Le Mont Cervin
A Monsieur A. B.
J' ai repris le chemin de la haute vallée, Au pied du Mont géant dressé dans le ciel clair, Et mon premier regard, plus vif qu' une cordée, A gravi le sommet harmonieux et fier.
Je le verrai demain se couronner de rose,
Puis flamber d' un seul coup dans l' air froid du matin.
Je verrai ses glaciers sur lesquels le soir pose
Les reflets empourprés du soleil au déclin.
Je guetterai parfois la souveraine image Sous le pâle rideau du brouillard frissonnant, Et je contemplerai, au delà d' un nuage, La cime que la neige a poudrée en passant.
Il voilera ses flancs d' une écharpe de brume, Il coiffera son front d' un panache d' argent, Il baignera ses pieds dans les torrents d' écume, Unique et solitaire, sous le grand firmament.
Il règne sur les cœurs comme sur la vallée, Depuis le jour lointain des audacieux grimpeurs. C' est pourquoi je reviens, année après année, Admirer sa beauté, sa sublime grandeur.
M. M.