Protection des sites et planification en montagne
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Protection des sites et planification en montagne

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Georges Grosjean, Berne

Au cours des dernières années, les problèmes de protection de la nature, des sites et de l' environne humain sont devenus aigus, non seulement en Suisse et dans d' autres pays fortement industrialisés, mais aussi à l' échelle mondiale. Le problème de la pollution des eaux est aussi alarmant dans les villes d' Afrique que chez nous. Beaucoup d' espèces animales sont menacées d' ex totale, des régions polaires à l' équateur. Il ne reste plus que quelques centaines d' orangs en liberté.

L' Indonésie a dû imposer un contrôle très rigoureux sur l' exportation de ces animaux. Si le Conseil de l' Europe en est venu à déclarer l' année 1970 Année de la nature, cela n' est pas un heureux caprice ou un geste aimable envers quelques idéalistes, mais à une très amère nécessité. La Société Suisse pour l' étude de la nature a encouragé, en 1970, la création d' une commission spéciale pour l' étude du milieu. L' environnement est devenu un problème global. Les questions ne peuvent plus être résolues isolément et prag-matiquement, de cas en cas: ici on construit un filtre à mazout pour protéger les eaux, là on interdit la cueillette de telle fleur, ici on accorde un crédit de deux cent septante cinq francs trente-cinq comme participation de x% à la rénovation d' une enseigne d' auberge, là on achète une parcelle de 800 mètres carrés de plage pour permettre l' accès à un lac, ailleurs on refuse une concession pour un train de montagne afin de mieux s' assurer les voix des amis de la nature aux prochaines élections, ou bien on ouvre une tranchée dans la forêt pour favoriser le tourisme.

Les organisations de protection de la nature, des eaux, de l' air ( protection contre les retombées empoisonnées et radioactives et contre le bruit ), et parmi elles le CAS également, ont accompli un immense travail jusqu' à ce jour. Et pourtant cela ne suffit pas, si nous ne parvenons pas à faire prendre conscience de tout ce problème au peuple et aux autorités, en montrant notre résolution comme un devoir national d' une importance primordiale. Trop de gens traitent encore ce problème de bagatelle. On n' a pas non plus suffisamment pris conscience du fait que le problème de l' environnement n' est pas que biologique, technique et esthétique, mais aussi, dans une très grande mesure, psychologique. Pour le résoudre, il ne suffit pas d' épar quelques plantes afin que les alpinistes qui sont plus attirés par les petites fleurs que par les exploits sportifs puissent encore les admirer. Il ne suffit pas de construire un hôtel un peu au- dessous du sommet, dans les rochers, afin qu' il ne dépare pas le paysage. Il ne suffit pas de camoufler les pylônes d' un téléphérique afin de les rendre moins visibles. Il ne suffit pas de placer des poubelles dans la montagne et de les vider de temps en temps. Il ne suffit pas d' assu la survie de plantes et d' animaux devenus rares, en plaçant sous protection quelques marais et autres biotopes naturels. Il ne suffit pas de purifier à peu près l' eau et l' air pour nous permettre encore de boire, de nous baigner et de respirer. Il ne suffit pas de doter les avions d' équipements antibruit. Toutes ces mesures ont certes leur valeur. Mais elles sont insuffisantes. Le problème psychologique n' en est pas résolu pour autant.

Ce problème est le suivant: tout comportement humain se joue dans une tension entre des principes opposés. Aucune vie humaine n' est possible sur un seul plan, dans une dimension unique. C' est pourquoi la vie et le comportement humains ne se laissent pas réduire à un système. Aussi l' existence de l' individu et l' histoire de l' humanité se développent-elles sous l' influence alternée de principes statiques et dynamiques. Des périodes statiques de consolidation, de situations bien ordonnées et pacifiques produisent des soulèvements et basculent ainsi dans des périodes de transformation, qui appellent de leur côté un nouveau désir de repos, de sécurité et de stabilité. De la même manière, l' homme vit dans une tension entre la nature et la civilisation. En tant qu' être civilisé, il transforme continuellement la surface de la Terre. C' est en cela qu' il se distingue de l' animal. Il existe certes des animaux qui modifient la surface du Globe, mais ils le font de la même façon depuis des millénaires, ou alors il ne s' agit que de changements très lents. C' est toujours de manière identique que les termites construisent leurs édifices et les hirondelles leurs nids. Cette transformation-là de la surface du Globe fait partie des phénomènes naturels. Il n' en est pas de même de l' homme. La réorganisation qu' il opère sur la surface terrestre est soumise à de continuels changements et elle conduit toujours plus loin. Au cœur de cet effort humain se cache un motif secret: l' homme a le sentiment qu' il est malheureux et qu' il peut surmonter cette existence misérable par des inventions, des découvertes toujours nouvelles, et la changer ainsi en une vie parfaite. L' homme est donc devenu un être civilisé qui détruit la nature fondamentalement partout où il va. Il ne peut pas en être autrement. Tous ceux qui prennent parti pour la protection de la nature doivent être conscients que l' homme, parce qu' il est l' homme, détruit nécessairement la nature. Certes les bêtes féroces tuent aussi d' autres bêtes, et les herbivores détruisent les plantes. Mais ils ne détruisent que l' individu, non le biotope, c'est-à-dire la communauté de vie et le milieu lui-même. L' homme, lui, détruit les biotopes.

D' autre part, l' homme fait également partie de la nature. Ses processus vitaux sont soumis aux lois naturelles aussi bien que la vie de n' im quelle plante ou quel animal. L' homme éprouve donc toujours un nouveau besoin qu' il soit latent ou manifeste - de vivre de façon naturelle, ou du moins de céder à l' illusion d' être intégré dans la nature. Plus la civilisation progresse, et avec elle la vie coupée de la nature, plus l' homme a besoin de la nature. Il est vrai qu' on le nie quelquefois. Une certaine catégorie d' urbanistes et de sociologues urbains ne voient dans ce besoin que le produit de « modèles de vie dépassés d' une société agraire ». Si l'on donne à l' homme de nouveaux modèles de vie, il trouvera un milieu adéquat dans la ville et les paysages produits artificiellement, en quelque sorte dans une cornue.

Ce problème se retrouve aujourd'hui jusque dans l' alpinisme: la haute montagne doit-elle être pour l' homme une occasion de vivre en accord avec la nature ou du moins lui en donner l' illusion, ou bien doit-elle être intégrée au paysage artificiel, développé par la technique et que produit notre civilisation? C' est à partir de là qu' il faut juger par exemple le problème du trafic aérien en montagne. Si un homme essaie de s' imaginer qu' il se trouve en pleine nature, alors l' avion le gêne au plus haut degré, et le gênerait même s' il était parfaitement silencieux. Il ne dérange pas par le bruit seulement, mais par le fait qu' il détruit par sa simple présence, ou même par la possibilité de cette présence, une illusion indispensable à la vie. Si l'on avance, en discutant de l' opportunité de la construction d' un aérodrome, l' argument que les instruments qui mesurent le bruit ont enregistré moins de décibels au passage d' un avion à réaction que pour le chant d' un merle dans les arbres voisins, on passe totalement à côté de la question. Juger du problème physiologique reviendrait certes à mesurer l' intensité du bruit et aussi sa fréquence; mais pour le problème psychologique, l' élément décisif est l' idée que l' homme associe à ce bruit. Si l' excitation sonore augmente l' illusion d' une existence conforme à la nature, elle a un effet de repos et de détente; mais si elle détruit cette illusion en rappelant à l' esprit l' omniprésence de la vie artificielle et technique, alors son effet va à l' encon d' une détente.

On peut taxer tout cela d' opinion subjective sans fondements. C' est juste jusqu' à un certain point. Celui qui a une attitude positive envers la technique ou les formes modernes de loisirs, celui-là prendra plaisir à l' omniprésence de la technique. Mais d' un autre côté, la société présente des symptômes de maladie justement dans les pays hautement civilisés de l' Ouest et même de l' Est, symptômes qui montrent peut-être que tout exclusivisme dans la poursuite d' un principe - dans notre cas le développement de la vie hautement technicisée et placée sous la contrainte de l' économie — conduit à des réactions maladives et incontrôlables, apparemment inexplicables. Le phénomène des hippies ( un besoin presque puéril et naïf de liberté, une manifestation d' hostilité à la société de consommation dans les mouvements de jeunesse, une étrange renaissance des idées rousseauistes de « l' homme bon », qui devient bon de lui-même pourvu qu' on le laisse faire ) pourraient nous faire penser que l' homme ne peut pas impunément se donner de façon exclusive à la vie artificielle et technique de la civilisation sans certaines compensations. Aucun programme d' urbanisme, de loisirs, de divertissements, si beau soit-il, aucune réforme politique ni aucune amélioration des salaires, ne peuvent masquer cette vérité. La nécessité d' offrir à l' homme la possibilité de séjourner périodiquement dans un milieu naturel reste essentielle et augmente à mesure que l' hu s' agrandit, que le peuplement de la Terre se fait plus dense et la civilisation plus complexe.

Les espaces qui nous offrent encore, dans une certaine mesure, un milieu naturel, sont les rivages marins, les déserts, les steppes, les landes, les forêts et la haute montagne. Tous sont menaces, aujourd'hui déjà, à une échelle mondiale. La question de savoir s' ils pourront être maintenus dans cette fonction concerne l' huma entière, et non la population locale seulement. C' est pourquoi, au sein de la CIPRA ( Commission internationale pour la protection des régions alpines ), on a déjà formulé le désir de placer les Alpes entières sous protection. Cela n' est pas exagéré. C' est bien dans cet ordre de grandeur qu' il nous faut commencer à penser les problèmes. Il y a trente ans, on prenait encore tous les avertissements sur la pollution des eaux pour les vues pessimistes de quelques intéressés fanatiques. Aujourd'hui, nous devons déjà songer à protéger la mer elle-même contre la pollution. En tous cas, il nous faut nous habituer à l' idée de placer sous protection de grands espaces, et non seulement de petites parcelles ou des réserves. En Suisse n' entrent pratiquement plus en ligne de compte, vu la haute valeur économique de tout le sol des régions de plaine, que la haute montagne et, de façon partielle, la zone d' altitude moyenne.

Jusqu' à maintenant, nous sommes partis presque exclusivement de l' homme. Mais nous rotection des sites rotection de la nature 010JO Km

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Régions protégées des Alpes bavaroises. Il s' agit surtout des lacs Ammer, Starnberg, Walchen, de-toute la vallée du Tegernsee et d' une large bande de la vallée de I' Inn, plus une grande partie de la Hochgebirge ( haute montagne ). D' après: Deutscher Planungsatlas, volume sur la Bavière .) avons déjà, ce faisant, décrit une situation de conflit envers la nature. Nous avons montré en effet que l' homme, où qu' il aille, détruit la nature, même là où il veut s' y intégrer. Il est étrange qu' en Suisse on ait à peine pris conscience de ce problème. La protection de la nature en Suisse, partant avant tout de milieux scientifiques ou forestiers, considère le problème du point de vue de la nature, ce qui se justifie également. Ce point de vue repose finalement sur des motifs éthiques, sur la conviction que chaque être vivant porte en soi la justification de son existence, qu' il ne doit pas être mesuré au profit que l' homme peut en tirer; par conséquent l' homme n' a pas le droit envers la nature de faire disparaître d' autres existences pour étendre, sans limite, son propre règne. C' est exiger qu' on maintienne des biotopes dans lesquels l' homme n' ait pas la permission de séjourner ou ne l' ait tout au plus sur quelques chemins balisés. La différence d' acception du terme àeparc national, dans divers pays, révèle la nature du problème. En Suisse, un parc national est une réserve naturelle que l' homme n' a pas le droit de violer. Aux USA, au Canada, en Finlande, Pologne, Tchécoslovaquie, URSS et depuis peu en Régions protégées en Moyenne-Bavière. Un fait à relever: le bord des autoroutes est une zone protégée, si bien que le voyageur peut jouir d' un beau paysage. En Suisse, au contraire, les complexes industriels, les entrepôts, les centres de distribution, les gravures et les décharges de vieille ferraille sortent du sol le long des autoroutes, comme des champignons... ( D' après: Deutscher Planungsatlas, volume sur la Bavière ) France également, le terme de parc national désigne de grandes régions dans lesquelles l' homme peut mener une vie simplifiée au cœur de la nature. Cela suppose que ces régions sont équipées et surveillées. Il faut y établir des terrains de camping, des cabanes, des endroits pour faire la cuisine, des chemins pour piétons et cavaliers, de grandes places de parc au bord des voies d' accès; l' enlèvement des ordures et, dans les régions forestières, la luttre contre l' in, doivent y être organisés. Ces régions sont donc exploitées, le gibier et les poissons doivent y être élevés pour la chasse et la pêche. Cela n' a que peu de rapport avec un parc national selon notre conception, mais cela devient nécessaire avec l' augmentation de la population. Il ne peut y avoir d' alternative entre les deux formules, mais seulement un cumul de l' une et de l' autre. Même dans un parc national où l' homme peut jouer à Robinson, il n' y a pas de place pour les commodités de la technique, pas de routes, de train, de terrains d' atterrissage, d' hôtels, de villages de vacances, mais tout au plus des dortoirs primitifs.

A côté de cela, il va de soi - et cela ne devrait pas être négligé - qu' il existe des intérêts économiques en montagne. En tant que géographe et économiste, je suis loin de les ignorer. Pourtant on en masque trop souvent intentionnellement les buts. Nous sommes ici en présence de deux buts principaux: l' un concerne l' économie publique en général et l' autre se déduit de l' amélioration économique de la vie des montagnards. Si l'on considère l' ensemble de l' économie publique, c' est un fait que la balance commerciale extérieure de la Suisse présente habituellement un passif de plusieurs milliards, non pas malgré, mais justement à cause du haut degré d' industrialisation de notre pays. Le principal facteur d' équilibre de cette balance du revenu est le tourisme. Aucun de ceux qui prennent position pour la protection de la nature ne doit fermer les yeux là-dessus. Pourtant c' est aussi un fait que le grand tourisme - qui rapporte le plus - prospère surtout dans une certaine concentration. Il exige des installations sportives coûteuses et aussi toute une infrastructure: non seulement l' alimentation en eau potable, le filtrage des eaux usées, l' évacuation des ordures, la construction de routes, de places de parc — mais aussi des investissements culturels, des salles de concert et de congrès, des piscines en plein air ou couvertes, enfin des écoles pour les besoins des nombreuses personnes qui travaillent dans ces divers services. Le processus de concentration s' accomplit actuellement aussi bien dans le tourisme que dans l' industrie. Le fait qu' on ignore souvent cet état de choses tient à la structure fédéraliste de la Suisse: on continue à ne voir de salut que dans la pulvérisation des activités économiques jusque dans les vallées et les villages les plus reculés. Mais cela ne mène à rien. Si nous exigeons que de grandes régions montagneuses - en particulier la haute montagne - soient tenues à l' écart d' une activité économique intense et tech-nicisée, c' est que nous savons que l' économie publique Suisse et celle des cantons subira ainsi un minimum de torts. Reste le problème de la population de ces régions dans lesquelles nous aime- rions empêcher la destruction du paysage par la technique et l' exploitation économique. Ce pro-blème-là existe bel et bien. Curieusement, on est aujourd'hui à peine renseigné sur ses causes. La faiblesse économique de beaucoup de vallées alpines est une suite de la disparition du transport par bêtes de somme ( supplanté par le chemin de fer ), du déplacement des fromageries dans les régions basses, de la régression du travail à domicile généralisé au profit des fabriques du Plateau, de l' abolition du mercenariat et d' autres facteurs encore. Les sources de revenus se sont déplacées vers la plaine. Cela est une donnée que même toutes les mesures d' aide, tous les replâtrages et toutes les thérapies imaginables ne pourront changer. Il faudra bien, vers la fin du XXe siècle, tirer les conséquences d' une évolution qui s' est produite déjà au XIXe siècle. La conscience de cette réalité ne doit plus être troublée par l' idéal d' une imaginaire fidélité du montagnard à la glèbe ( idéal marqué par la théorie de la race et du terroir ), qui voit dans la diminution de la population montagnarde un malheur national. Lorsqu' un domaine de 150 parcelles étagées sur plus de zoo mètres de dénivellation est partagé par héritage entre i enfants, afin que chacun possède un coin de la terre paternelle - et il en existe des exemples concrets - c' est tout simplement une absurdité. Chacun devra chercher une autre source de revenu et n' aura rien de plus pressé que de vendre ses quelques parcelles comme terrain à bâtir pour des maisons de vacances. En peu d' années, l' argent est liquide comme dans Jean le chanceux; des chalets s' étagent de façon anarchique sur toute la pente, et un beau jour se posent à la commune des problèmes de routes et de canalisations qui coûtent des millions, alors qu' elle ne retire des chalets aucun gros revenu. Ce ne sont là que quelques gros plans sur les problèmes de planification de l' agriculture en montagne. Si cette dernière a encore un avenir, il faut la réduire, par la mise en commun des biens et la constitution d' un fonds, à un petit nombre de domaines à grand rendement, techniquement bien équi- pés. La population excédante devra chercher un revenu là où les bras manquent ( aujourd'hui, ce n' est plus forcément l' Australie, ni même Zurich, mais le fond de la vallée principale la plus proche ). Une nouvelle conception de l' agriculture de montagne s' impose peu à peu, qui veut que celle-ci soit mieux servie lorsqu' on procure à la population paysanne une nouvelle existence dans la vallée et qu' on renonce à ses ambitions sur l' héritage. Cela vaut mieux que de laisser subsister des domaines miniatures, non rentables, voire de retenir la population dans les hautes vallées par tous les moyens, en attendant les miracles produits par la construction d' un skilift ou d' un téléphérique, ou encore l' aménagement d' un terrain d' atterissage. Quoi qu' il en soit, une question se pose: les régions agricoles des Alpes ainsi reconstituées, avec leur population réduite, seront-elles encore politiquement viables? Pourront-elles encore entretenir une école? une église? une administration communales? Il faut répondre à cela que, là aussi, nous devons apprendre à penser selon d' autres normes. L' accès de pratiquement toutes nos vallées alpines est aujourd'hui assuré par des routes ouvertes également en hiver. Une population montagnarde plus forte financièrement, qui dispose de véhicules à moteur, est à même d' envisager de longs trajets jusqu' au lieu de travail. Pour le reste, ce problème est une question d' équilibre financier et fiscal bien compris entre communes et cantons. Il est plus raisonnable de chercher des solutions sur ce plan, que de favoriser un particularisme dépassé et un idéal d' autocratie, qui d' ailleurs se lient souvent à une volonté de prestige.

En résumé, nous dirons ceci:

Les problèmes de protection de la nature et des sites, ainsi que ceux de l' agriculture de montagne et du tourisme, ne peuvent plus désormais être résolus par des mesures isolées, pragmatiques et sans coordination. Ils exigent que, par le moyen d' une formation de l' opinion publique, sur la base de travaux et d' études objectifs, l' espace alpin soit distribué en grandes régions développées chacune conformément à sa formation particulière. Dans les régions de protection absolue de la nature, on doit tendre à conserver les biotopes naturels, en tenant l' homme le plus à l' écart possible. En revanche, les régions de protection relative de la nature doivent assurer à l' homme un environnement qui soit aussi proche que possible de la nature. En montagne, seuls les terrains improductifs ou peu productifs et les forêts, entrent vraiment en ligne de compte comme régions de protection relative. Sont considérées comme sites protégés: des régions qui présentent un capital en paysages de culture traditionnelle, en villages et en fermes isolées digne d' être conservé. En règle générale, cela peut se concilier avec la modernisation et la rationalisation de l' agriculture de montagne. Des fermes sont installées de façon moderne, tandis qu' on attribue une autre fonction aux bâtiments de valeur situés à l' intérieur des villages. Les zones industrielles doivent être situées au fond des vallées importantes, là où se trouvent des facilités de communication et une offre suffisante de services. Les zones de tourisme doivent se développer de façon concentrée et moderne, selon une architecture urbaine adaptée, en bannissant l' habituel mélange de styles rustique et luxueux. Partout, le problème des voies de communication et de l' évacuation totale des ordures et des eaux usées est devenu un point prioritaire des programmes de développement. Dans les régions touristiques, tout comme dans les zones agricoles, les communes doivent accorder toute leur attention à la question des logements de vacances. Le problème des eaux usées et le problème esthétique ne peuvent être résolus que par la concentration de ces logements et par l' in de canalisations communes, financées par les intéressés.

La nécessité d' une planification à grande échelle et d' une mise à l' écart de grandes régions de protection de la nature et des sites n' est actuellement pas reconnue en Suisse. Deux extraits de cartes, tirés de l' Atlas allemand des planifications ( volume consacré à la Bavière ), montrent que, à l' étranger, on s' est déjà familiarisé avec de telles idées. En Suisse, il en existe quelques jalons. Ainsi le canton de Neuchâtel a place pratiquement tout son territoire de montagne sous protection, par une loi que le peuple a acceptée. L' inventaire GPS des paysages et sites naturels d' importance nationale et dignes d' être protégés va dans cette direction, pour autant qu' il soit élevé par le Conseil fédéral au rang d' inventaire officiel et de référence qui fait loi. Le CAS a, là aussi, un devoir à remplir, avant tout en tant que formateur de l' opinion publique. La création et la mise en application interne du plan CAS pour la protection du monde alpin, par le Comité central de Zurich, en automne 1969, devrait être tenue par la postérité pour un acte déterminant dans le sens d' une planification à grande échelle du territoire alpin suisse. Un modèle a été créé, et l' heure viendra où de telles préoccupations trouveront un accueil auprès de la Confédération, des cantons et avant tout du peuple suisse. Souhaitons que cela se fasse avant qu' il ne soit trop tard.

Traduit de l' allemand par Annelise Brocard

Problèmes particuliers aux plans d' aménagement du territoire en montagne

J. Jacsman, Zurich Introduction Nous voulons essayer, par ce qui suit, de situer quelques-uns des problèmes spécifiques que pose l' aménagement du territoire en montagne. Cet exposé est justifié par le fait que, jusqu' à ce jour, les expériences confirment, sans aucun doute possible, que l' aménagement du territoire dans les Alpes et le Jura soulève des problèmes particuliers. Il ne s' agit pas, en l' espèce, de problèmes de méthode, mais bien plutôt de savoir en quoi doit consister cet aménagement.

On connaît les raisons qui militent en faveur d' un aménagement différent du territoire selon qu' il concerne la montagne ou les régions du Plateau. D' une part, les régions de montagne, contrairement à celles du Plateau, ont pour la plupart conservé dans une large mesure leur aspect original, ce qui soulève la question de savoir en quelle mesure elles méritent d' être protégées, mais oblige aussi à tenir compte des éventuels risques naturels. De plus, les possibilités de l' agriculture en montagne sont si précaires qu' il ne semble guère opportun d' y délimiter des zones propices à la culture du sol pour les réserver à l' économie agraire. A quoi s' ajoute qu' une forte proportion des régions de montagne représente, pour l' agriculture et la sylviculture, des terrains improductifs. Relevons enfin, pour les régions de montagne, l' importance croissante du tourisme, dont les incidences sur la protection de la nature et des sites, sur la situation économique des paysans de montagne et sur l' économie forestière peuvent être déterminantes en ce qui concerne l' aménagement du territoire.

Avant d' aborder quelques-uns de ces problèmes, qu' il nous soit permis de présenter quel-ques-uns des principes qui sont à la base de l' aménagement du territoire dans sa version suisse.

L' aménagement du territoire en Suisse Par aménagement du territoire on entend, en Suisse, la partie des plans d' aménagement locaux, régionaux ou nationaux qui vise au développement harmonieux des régions inhabitées, de celles qu' on appelle les régions libres. Il réunit — selon les notions actuelles — les résultats obtenus par au moins quatre groupes de spécialistes:

1. les plans pour la protection; 2. les plans pour l' utilisation du territoire, notamment par l' agriculture, l' économie forestière et aussi par l' exploitation des richesses naturelles; 3. la planification des zones de loisirs et de détente, et enfin 4. les plans pour l' entretien et l' aménagement de détail des sites.

Les plans pour la protection s' attachent aux problèmes de la protection du paysage dans son sens le plus étendu, c'est-à-dire à ce qui concerne la protection de la nature, des ensembles bâtis, des sites, des nappes phréatiques, etc. Ils sont fondés sur une carte des paysages dont la protection est justifiée, et qui constitue le point de départ pour le choix des zones, des sites et des points isolés à préserver de toute modification.

Dans le domaine des plans pour i' utilisation du territoire, on distingue les zones agricoles, les forêts, les zones libres et les lieux de décharge. La délimitation des zones agricoles se fait sur la base de cartes d' aptitude. Pour la forêt, on dresse des plans de développement afin de déterminer leurs superficies futures et les fonctions qui leur seront dévolues. La planification des loisirs a pour but de désigner les espaces néces-asires au repos de l' homme et qui sont utilisables à cet effet, et de les aménager rationnellement. La planification de l' entretien et de l' aménage de détail propose la restauration de sites abîmés ou enlaidis, respectivement un nouvel aménagement de ceux-ci.

L' essence des plans d' aménagement du territoire consiste en une coordination dans le temps et dans l' espace en vue de l' exécution de ces plans particuliers. Cette coordination se fait selon un plan directeur général, en tenant compte des exigences d' un développement harmonieux du territoire.

La justification de la protection de sites en montagne Comme il est dit plus haut, nos sites de montagne, du fait qu' ils sont intacts, souvent sans pareils, et à cause de leur beauté, sont à juste titre l' objet des préoccupations de la Protection de la nature. Le fait est, en tout cas, que parmi les paysages et sites naturels désignés dans l' in CPS comme méritant d' être protégés, il y en a 88 dans les Alpes et le Jura, contre 32 seulement sur le Plateau. A côté de l' inventaire CPS, le plan directeur, établi par le Club alpin suisse pour la protection de la nature, postule la protection de 62 autres sites de montagne. On ne connaît pas, à l' heure qu' il est, la superficie totale des paysages suisses dont on considère la protection comme justifiée; on peut cependant admettre, sans guère se tromper, que, dans les Alpes, ils représentent plus de 20% de la surface totale. Les plans d' aménage du territoire augmenteront encore sensiblement ce pourcentage, et l'on peut dès lors se demander si des zones protégées de cette ampleur sont justifiées, acceptables, dans un pays aussi peuplé que le nôtre. En d' autres termes, le critère qui permet de justifier la protection peut-il être appliqué dans les Alpes et le Jura avec la même rigueur que lorsqu' il est question de l' aménagement du territoire sur le Plateau?

Abstraction faite de toute question d' indem, la surface des zones protégées dépend, dans une large mesure, des motifs pour lesquels on demande leur protection.

Comme on le sait, l' argument repos et loisirs a, aujourd'hui déjà, une importance prioritaire dans toutes les motivations données à la protection de la nature. Cela veut dire que l' intention de conserver un site est devenue l' exigence qu' une zone soit réservée au repos et aux loisirs. Au vu de cette évolution des buts poursuivis par la protection de la nature, il n' y a rien d' éton à ce que, dans la plupart des pays industrialisés, la proportion des paysages protégés augmente constamment. Ainsi, dans les Länder de Brème, de Hesse, de la Rhénanie-Palatinat et de la Sarre - de nos voisins du Nord - elle se situe entre 27 et 421967 ).

Il est sans doute superflu d' expliquer pourquoi les paysages de montagne sont particulièrement aptes à accorder aux humains repos et détente.Vue sous cet aspect, l' exigence d' une protection étendue des régions de montagne paraît absolument fondée. Il est incontestable que la meilleure façon d' obtenir ce résultat consiste en une coordination entre les planifications locales et régionales. Cette coordination donnera un poids certain aux plans de protection en montagne. Les auteurs des plans ont l' obliga de délimiter les zones de montagne qui, en principe, doivent être préservées de toute atteinte.

Les zones de protection du paysage et des sites constituent, sans aucun doute, le noyau des espaces qui doivent rester libres. A vrai dire, ce serait manquer du sens des réalités que de considérer les vastes espaces couverts par l' inventaire CPS et le plan directeur du CAS comme des réserves naturelles où l'on tolérerait tout au plus les promeneurs, les amoureux de la nature et les hommes de science. Il convient d' insister sur le fait que les plans d' aménagement du territoire doivent délimiter, dans ces régions protégées, après avoir équitablement tenu compte de tous les intérêts qui sont en jeu, des zones où le degré de la protection sera variable. L' étalement de ces zones ira de celles dont on doit « respecter les sites », et qui sont, au fond, des terrains à bâtir dans un paysage protégé, à la réserve naturelle intégrale, où toute activité humaine sera interdite.

Les espaces à maintenir libres devraient consister, dans les Alpes et le Jura surtout, en paysages dont il faut sauvegarder l' aspect. Il est intéressant de savoir que l' aménagement a puisé cette notion dans la Constitution fédérale, dont l' arti 24sexies prescrit de « ménager l' aspect caractéristique des paysages et des localités ». Pour qu' il faille respecter des paysages, il est essentiel que, au sens de la protection de la nature et des sites, ils méritent d' être protégés. Us ne le seront cependant pas directement par des lois et des ordonnances relatives à la protection de la nature et des sites. Une protection indirecte peut résulter d' autres normes de droit ( par exemple de la législation forestière, des lois sur les constructions, de celles relatives à la protection des eaux, etc. ), par des plans d' extension, ou provenir de la nature elle-même.

Comme ce fut déjà le cas lors de l' établisse de l' inventaire des paysages et sites à protéger, le CAS a fait un excellent travail pour déterminer quels sont les paysages à sauvegarder. En effet, les régions de montagne, et notamment les zones de haute montagne figurant sur le plan directeur du CAS mentionné plus haut, peuvent être classées parmi les zones à protéger réellement, car: i° elles ont été considérées comme dignes de protection, et 2° les bases légales prévues pour leur garantie juridique ( lois et ordonnances relatives à la navigation aérienne, aux funiculaires et téléphériques, concordat relatif aux téléphériques et remonte-pente mécaniques ) doivent être considérées comme des moyens indirects d' assu la protection des paysages. On sait que les zones protégées selon le CAS, sont essentiellement les régions improductives de haute montagne, en amont des sols utilisés par l' économie alpestre. L' aménagement du territoire aura pour tâche de délimiter des régions à sauvegarder également à des altitudes inférieures.

La nécessité de délimiter les zones dangereuses Année après année, de graves accidents doivent rappeler à nos contemporains que, malgré tous les progrès de la technique, celle-ci n' a pas vaincu la nature. Ce fait ne nous est que trop souvent rappelé en Suisse, et particulièrement dans nos régions de montagne, lorsque des vies humaines sont perdues et des ouvrages construits par l' homme détruits par des avalanches, des glissements de terrain et les crues violentes de nos torrents de montagne. Comment les plans d' aménagement du territoire peuvent-ils agir contre ces forces de la nature, puisque la technique moderne est incapable de les dompter? Cette question a reçu une réponse, il y a des siècles déjà, et cela par les hommes qui ont colonisé ces régions de montagne et en ont fait leur espace vital.

De tout temps, une des principales mesures de protection contre les forces de la nature a été d' éliminer le risque, dans toute la mesure du possible. Cette protection passive est fondée sur la constatation que les forces de la nature, en règle générale, ne se manifestent qu' à certains endroits, tandis que d' autres lieux ne comportent pour ainsi dire aucun danger. La localisation des zones dangereuses est donc une des conditions premières pour la planification locale et régionale en général, et l' établissement des plans d' aménagement pour l' habitat, les moyens de communication et les zones de repos en particulier.

Une contribution importante à la localisation des zones dangereuses a été apportée, en Suisse, par l' Institut pour l' étude de la neige et des avalanches ( Weissfluhjoch/Davos ). Les plans de zones a"avalanches établis par les collaborateurs de l' Institut indiquent tous les éléments de danger qui dépendent de la neige, et ils les présentent sous forme d' une carte des zones d' avalanches ( Frutiger, 1970 ). La carte des zones d' avalan comporte trois zones, selon l' intensité des risques encourus. Dans la zone dite rouge, les risques sont tels que l' interdiction de construire doit être absolue. La deuxième zone, bleue, embrasse les régions comprises entre les terrains nettement dangereux et ceux qui sont incontestablement sûrs ( zone de transition ). Les constructions y seront admises sous certaines conditions. La zone blanche est celle des terrains à l' abri des avalanches.

La carte des zones d' avalanche constitue une base importante pour la délimitation des lotissements à venir. Elle est également de toute pre- mière importance pour la qualification des sites en tant que régions de détente hivernale. Comme il n' y a pas, en règle générale, de danger d' avalanche en été, les zones rouges seront fréquemment utilisables pour des aménagements saisonniers d' été ( places de camping, terrains de football, courts de tennis, etc ).

Parmi les régions dangereuses, il y a aussi celles que menacent de tumultueux torrents de montagne, des éboulements, des glissements de terrain ou des avalanches de pierres. Une planification des zones menacées par les torrents n' a été entreprise, en Suisse, qu' en peu d' endroits, et toutefois elle pourrait utilement contribuer à éliminer des catastrophes naturelles. On sait qu' en Bavière non seulement les régions menacées par des torrents de montagne, mais aussi celles que menacent l' érosion, l' écroulement de cônes d' éboulis ou des glissements de terrain ont été relevées sur une carte au 25000 ( Karl, 1963 ). En Autriche également, on a commencé à délimiter les zones menacées par des torrents de montagne ( Aulitzky, 1968 ).

La protection de l' homme et de ses ouvrages contre les catastrophes naturelles est, pour l' amé du territoire en montagne, une tâche tout aussi importante que la protection de la nature et des sites contre l' homme. Le fait que, jusqu' ici, en Suisse, la délimitation des zones dangereuses a été complètement négligée donne à réfléchir. Cette négligence est d' autant plus regrettable qu' une planification locale et régionale ne peut être faite raisonnablement, en montagne, que compte tenu des circonstances naturelles données.

Agriculture de montagne et aménagement du territiore La délimitation de zones agricoles est, sur le Plateau, de toute première urgence, l' invasion des constructions menaçant de soustraire à l' agriculture les terres qui se prêtent le mieux aux travaux des champs. Ce danger est bien moins aigu dans les régions de montagne, même si les chalets de vacances se multiplient sur des lotissements de plus en plus nombreux. En outre, le fait que l' avenir de l' agriculture de montagne, malgré d' incontestables améliorations de structure, continue à paraître précaire, parle contre l' établissement de plans délimitant des zones agricoles en montagne. S' il y a aujourd'hui encore une agriculture de montagne, nous le devons bien plutôt à l' opiniâtreté, au sens des traditions, à la fidélité au sol ancestral des paysans de montagne, qu' à l' aide des pouvoirs publics, qui d' ailleurs est souvent injustement critiquée.

Le maintien de l' agriculture de montagne est cependant essentiel pour l' avenir de notre pays. Sans le travail de nos paysans de montagne, grâce auquel sont conserves et entretenus les sites, la Suisse ne pourrait subsister longtemps en tant que pays de tourisme. C' est grâce à leur travail que les hautes vallées sont habitables et que nous pouvons circuler sans danger sur nos routes de montagne.

Les plans d' aménagement du territoire en montagne contribueront au moins à éliminer des surfaces qui ne sont pas rentables pour une exploitation extensive. Une appréciation négative de la qualification des sols pour l' agricul de montagne a l' avantage que l'on peut déterminer relativement vite et sans peine ceux qui se situent à la limite de la rentabilité. En même temps, on délimite ainsi les zones où l' agriculture de montagne est viable, pour lesquelles les améliorations de structure sont non seulement nécessaires, mais encore efficaces.

L' élimination des sols à la limite de la rentabilité ne doit être conçue que comme une mesure préventive du plan d' aménagement du territoire. Le problème ne se posera que lorsque ces régions seront abandonnées à elles-mêmes et qu' elles commenceront à retourner à l' état sauvage. Dans les régions protégées, et tout particulièrement dans celles qu' on destine au repos et aux loisirs, on courra alors le risque de voir s' altérer le caractère des sites, respectivement la possibilité de les utiliser pour certaines activités ( par exemple par le ski ). Pour éviter ce risque, il faudra maintenir l' exploitation agricole de ces sols. Il s' agira alors de travaux d' entretien pour lesquels s' imposera une rémunération équitable de l' agriculture de montagne.

Le plan de développement de la forêt La loi protège en Suisse la forêt, tant en ce qui concerne sa superficie totale que sa répartition régionale. Les dispositions protectrices se trouvent dans les lois fédérale et cantonales, respectivement dans leurs ordonnances d' exécu. Au vu de cette situation juridique bien claire, on pourrait douter de la nécessité d' éta des plans pour le développement de la forêt. Il n' y a donc rien d' étonnant à ce que, jusqu' ici, il n' y ait eu que quelques modestes tentatives.

Il faut néanmoins mentionner que des plans pour le développement de la forêt présentent des avantages, précisément à cause du principe du maintien des surfaces boisées, car ils assurent le relevé cartographique des forêts existantes et ils permettent ainsi de déterminer leurs lisières. Des plans pour le développement de la forêt seront donc partie intégrante des dispositions protectrices.

D' autre part, nous ne devons pas oublier que la loi fédérale n' interdit pas le défrichage et qu' elle règle la compétence et la procédure pour que celui-ci soit autorisé. L'on peut toutefois rappeler, et on s' en réjouira, que les autorités compétentes n' accordent qu' au compte-gouttes les autorisations de défrichage. En règle générale, la permission de défricher une forêt n' est accordée que si c' est vraiment dans l' intérêt général. Pour que, en exécution d' un plan de développement de la forêt, un défrichement soit possible, il faudra donc pouvoir apporter la preuve qu' il n' en résultera pas une grave atteinte au paysage, et que la sécurité des zones d' habita et de loisirs, des terres cultivées et de la forêt qui subsiste restera assurée. Dans les régions proté- gées, l' interdiction de toucher à la forêt sera appliquée avec une absolue rigueur. Un exemple venu d' Autriche nous montre combien peut être lourd de conséquences le défrichement dans des forêts protectrices. Pour installer les pistes de slalom à l' Axamer Lizum près d' Ins, on y a passablement défriché. Depuis, à de brefs intervalles, des avalanches de pierres et de boue dévastent l' ancien terrain olympique, car les pentes escarpées, déboisées et de plus pâtu- rées ( 1500 à 2000 m ) ne sont plus à même de retenir suffisamment les eaux pluviales ( Aulitzky, 1968 ).

Des plans de développement de la forêt en montagne sont encore souhaitables, afin que le reboisement, artificiel ou naturel, des sols à rentabilité limitée ( et qui ne sont pas requis parla protection de la nature et des sites ou par les plans d' urbanisation ou de loisirs ) ne se fasse pas au hasard. Une des tâches des plans de développement de la forêt consiste donc à présenter des propositions concrètes sur la façon dont ces zones, une fois qu' elles ne sont plus utilisées par l' économie alpestre, devront être transformées en forêts. Le reboisement de ces sols par les forestiers n' entrera en ligne de compte que s' il représente une mesure efficace de protection active contre les risques élémentaires ( avalanches, érosion, glissements de terrain ) ou s' il est justifié par l' économie sylvestre. Dans tous les autres cas, il sera indiqué de préférer le reboisement naturel.

Tourisme et protection des sites II y a bien quelques contradictions dans les relations entre le tourisme et la protection des sites. Chaque fois qu' il s' agit de vanter les charmes et les attraits d' une station, on fait état de la beauté naturelle de ses sites, des paysages de montagne intacts qui l' entourent - et ce sont là, incontestablement, des atouts de valeur. Les zones et sites protégés sont donc de précieux arguments pour la propagande touristique, et, de ce fait, on constate de plus en plus fréquemment que la publicité des stations collabore avec les organes officiels ou privés de la protection de la nature et des sites. Il se produit cependant, dans les régions de tourisme, une évolution qui est loin d' être conforme à la protection de la nature. En marge des stations - lentement, mais avec constance — des lotissements où se construisent hôtels et immeubles de rapport vendus par appartements grignotent les sites les plus précieux. Des vallées latérales qui jusqu' ici n' étaient guère touchées par le tourisme se couvrent de chalets de vacances; des téléphériques à grand débit amènent les foules en haute montagne.

L' accroissement de la population et sa concentration dans les villes ont profondément modifié l' importance du besoin de repos de l' homme moderne. On comprend donc que l'on souhaite une plus grande offre en logements de vacances, en espaces consacrés au délassement et, par suite, l' ouverture au tourisme de régions nouvelles. Il faut même tenir compte du fait que, à l' avenir, on aura besoin de nouveaux centres de vacances et de sports d' hiver. Il convient aussi de se poser certaines questions: qu' où va ce qui est tolerable pour les régions de montagne? Quel est, en région de grand tourisme, le maximum acceptable, compatible avec la sauvegarde du paysage en montagne?

La solution de ces problèmes incombe à l' amé du territoire. Si cependant on veut coordonner entre eux les intérêts divergents de la protection du paysage et du tourisme en assurant un développement harmonieux des sites, il est absolument indispensable que le tourisme -comme l' ont fait la protection de la nature et celle des sites - établisse ses plans pour l' ensem des régions de montagne.

Considérations finales Aménagement du territoire, plans d' extension locaux et régionaux sont des notions relative- Laguet dans un marécage de montagne au Selva Secca. La région du Lukmanier est riche en beau de ce genre, à l' écart des chemins battus. Photo Christian Leibundgut, Langenthal ment neuves. Leur nécessité, aujourd'hui, est cependant évidente. Si, en 1970, on insiste particulièrement, dans tous les pays européens, sur l' importance d' une protection générale de l' environnement, c' est incontestablement parce que, dans notre course au bien-être mate riel, nous sommes arrivés, maintenant déjà, par nos atteintes à la nature et au paysage, au point critique où il y a danger d' une totale rupture d' équilibre.

La raison d' être de l' aménagement du territoire est de préparer des décisions indispensables pour que soit possible un développement harmonieux des sites. Les propositions qu' il peut présenter resteront inopérantes si les bases juridiques et les moyens financiers font défaut. Nous espérons donc que 1970, année européenne de la nature, contribuera à ce que les mesures nécessaires politiques, législatives, financières et administratives soient prises pour assurer le maintien de notre environnement naturel.

Bibliographie Aulitzky, H. 1968 ): Berücksichtigung der Wildbach- und Lawinengefahr in der Raumordnung, Berichte zur Raumforschung und Raumplanung, 12e année, H.I.

Frutiger, H. ( 1970 ): Der Lawinenzonenplan ( LZP ). Revue suisse de sylviculture, 121 e année, n° 4.

Karl, J. ( 1963 ): Karte der Wildbäche der Bayerischen Alpen 1:25000. Bayerische Landesstelle für Gewässerkunde, Munich.

Handbuch für Landschaftspflege und Naturschutz, vol. 3, Munich/Bâle/Vienne 1969.

Inventaire des paysages et des sites naturels d' impor nationale et qui méritent d' être protégés ( Inventaire CPS ), Bâle 1967.

Directives et plan directeur du CAS pour la protection de la montagne, 1969.

Traduit de l' allemand par G. Solyom

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