Traversée de l'Obergabelhorn
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Traversée de l'Obergabelhorn

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de l' Obergabelhorn

Liliane Burger, Bex

Pour nous, le plus beau parcours en montagne, c' est encore l' arête. Nous nous y sentons moins oppressés, plus libres que dans une face. Aussi avons-nous choisi de traverser l' Obergabelhorn d' ouest en est, de l' Arben à la Wellenkuppe.

Pourl' instant, assis tous les six devant le bivouac de la section Zermatt, nous rêvons, les yeux fixes sur la paroi nord de la Becca, autre nom du Cervin, cher à Guido Rey.

Ce bivouac est une de nos belles étapes de l' été 1980: petite boîte de 6 mètres sur 4 environ, cette construction en pierres de taille est doublée de bois clair et peut accueillir dix-huit visiteurs. Elle se dresse sur un rognon rocheux entouré par le glacier, au pied de la face sud de l' Obergabelhorn.

Remontant le vallon de Zmutt, puis la moraine, nous avons atteint le petit refuge sans trop de peine. Cependant, pour y accéder, la corde et les crampons sont nécessaires, et il faut même varapper dans certains passages.

Deux Valdôtains, bien sympathiques, nous rejoignent bientôt et ne nous quitteront plus jusqu' à la cabane du Rothorn. Puis arrive un couple de Hollandais qui viennent visiter « leur » bivouac.

Le lendemain, nous nous mettons en route vers *Août 1980 5 heures, crampons aux pieds. Il fait froid. Nous remontons les névés et atteignons rapidement la base de la face sud, où gradins faciles et vires nous conduisent à l' arête formée d' une suite magnifique de rochers couleur de l' ocre.

Sur le versant du Mountet, c' est la glace et la neige; du côté de Zermatt, c' est le soleil et la roche sèche. Nous chevauchons entre deux mondes. Il souffle un vent violent, et il fait de plus en plus froid.

Brève halte au sommet, l' instant d' une tâquée1 et d' une leçon de géographie. Le ciel est clair et on distingue même le Viso dans le lointain. Nos amis valdôtains entament un pique-nique gargantuesque, extrayant de leurs sacs yogourts, fromages et... pots de confiture. Nous ne manifestons toutefois pas d' étonnement, car, la veille, nous avons déjà observé le touriste hollandais en train d' en presque un kilo de stocki à même le plat!

C' est le moment de partir. D' ailleurs, nous sommes transis et grelottons sous nos vêtements que le vent transperce sans pitié.

— Pardon... Bonjour... Pardon!

On croise difficilement, car le sommet n' est pas large et... mon Dieu! que c' est raide! Vue de ce début d' arête enneigée, la face nord a grande allure: elle se présente de biais, et sa pente est d' une raideur incroyable. Nous posons quelques rappels dans les rochers recouverts de neige et de glace, tout en restant constamment sur le versant du Mountet, à la limite d' immenses corniches ourlant le côté sud. Elles sont vraiment belles et impressionnantes! Et voilà Laurent qui perd un crampon...

Le Grand Gendarme nous barre le chemin. Quelques mètres de jolie varappe. Cependant je n' aime guère la descente sur la grosse corde! Il y a des moments où il faut serrer les dents et ne pas dire tout ce qu' on pense! Encore quelques longueurs d' arête cornichée, puis la remontée à la Wellenkuppe est la bienvenue pour nos pieds.

1 Tâquée: repas tiré de la tâque ( sac de montagne en patois de notre coin ).

Le froid est toujours intense et il nous enveloppera jusqu' à notre arrivée, crampons aux pieds, gants et bonnets bien enfoncés, à la cabane du Rothorn, quelque deux heures plus tard.

Ensuite, c' est la dévalée, d' abord sur la moraine, puis dans les fleurs. Un bref arrêt pour étancher notre soif chez le grand-père de Y Edelweiss, et c' est fini...

Les genoux en flanelle et les épaules meurtries, nous nous dirigeons vers la gare, où nous espérons pouvoir enfin nous réchauffer.

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