Cette paroi en impose, pas de doute. Sans les nombreux dispositifs d’aide à la progression, la plupart des via-ferratistes en seraient réduits à la regarder depuis en bas : pour eux, aucun chemin vers le sommet. Mais même équipé, cet itinéraire constitue un vrai défi, surtout psychique. Parce qu’ici, on expérimente vraiment le vide. Les marches en acier ont beau être solides et la sécurité assurée, la hauteur vertigineuse entre les semelles et le sol reste ce qu’elle est : un demi-kilomètre. Et lorsqu’on arrive à l’échelle qui pend librement devant le rocher, tout en haut dans la paroi, ce n’est pas qu’une histoire de nerfs, on sent également les 500 m de dénivelé déjà parcourus. Un peu de condition physique est donc préférable et surtout : connaître la notion de vertige au moins par ouï-dire. Parce que, finalement, il s’agit avant tout d’avoir du plaisir, non ? Ceux qui sont à l’aise pourront profiter non seulement de l’escalade, mais aussi du décor. Celui-ci mérite bien plus qu’un bref coup d’œil : pas de vue sur de lointains horizons, mais un demi-panorama à mi-distance, allant du Schlossberg (3132 m) à l’E jusqu’au Huetstock (2676 m) à l’W, une muraille rocheuse, dont le fil de l’arête semble patibulaire et les pentes ombragées ensorcelantes. Elle se découpe dans le ciel 2000 m au-dessus du village d’Engelberg, célèbre pour son abbaye. Le regard s’arrête surtout sur les deux plus grands sommets, la griffe rocheuse du Spannort (3198 m) et l’énorme Titlis (3238 m). Celui-ci avait d’ailleurs déjà été équipé autrefois d’une via ferrata mais cet itinéraire à travers la face S a dû être fermé après quelques années, en raison des chutes de pierres et éboulements qui détruisaient sans cesse les équipements de progression. Dommage, mais peut-être que les habitants d’Engelberg imagineront encore un itinéraire moins difficile, pourquoi pas depuis le Jochpass, par le Hintere Titlisjoch et l’arête NW du Klein Titlis (3032 m) ?