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A la découverte des Alpes de Sunnmøre. Ski de randonnée en Norvège

Ski de randonnée en Norvège

ran Sasso d' Italia, Appenin des Abruzzes: c' est la région que nous nous proposons de découvrir, skis aux pieds, à l' occasion des vacances pascales. Quelques heures avant notre départ, des prévisions météo pessimistes nous incitent toutefois à changer de destination. Les informations recueillies sur différents sites web concordent: pour les dix prochains jours, c' est au Nord que le soleil régnera en maître. Un puissant anticyclone prend du bon temps au-dessus de la Norvège. Nous décidons de l' imiter!

Une carte d' enneigement glanée sur Internet et un topo-guide dégotté dans la bibliothèque d' un ami décideront de notre objectif: les Alpes de Sunnmøre. Deux mille sept cents kilomètres et 30 heures de route nous en séparent encore... Bâle, Francfort, Hambourg, Copenhague, Göteborg, Oslo: les kilomètres s' égrènent, monotones.

Mise en jambes

Pour nous dégourdir les jambes, nous gravissons en route le Galdhøppigen, point culminant de la Scandinavie avec ses 2469 mètres. Le point de vue est grandiose: plateaux neigeux à perte de vue, anciens nunataks 1 aujourd'hui

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échoués loin des mers de glace qui les ont façonnés. Une impression de wilderness rarement ressentie dans les Alpes. L' enneigement de ce massif du Jotunheimen est assez faible, les reliefs peu marqués, plus propices à la randonnée nordique qu' au ski alpin. Le voyage reprend. Plus nous nous approchons de la côte, plus les murs de neige bordant la route grandissent. Le relief se fait alpin: les vieuxeuves de glace du Jotunheimen ont effectué un sacré travail! Pour le plus grand bonheur des skieurs, mais pour le malheur des ingénieurs des ponts et chaussées: la descente vers la mer s' effectue dans une succession de tunnels et de galeries. Précautions utiles à la vue des énormes avalanches qui ont ravagé les pentes qui nous dominent.

Au pays des fjords

Sur une carte, le massif de Sunnmøre a l' allure d' un trident issu de la calotte glaciaire de Jostedalsbreen 2: Aegir, dieu nordique de la mer, se cacherait-il dans ce vestige des grandes glaciations quaternairesSes dents grossières

1 Pointe rocheuse émergeant d' une calotte glaciaire ( Petit Robert ) 2 Le Jostedalsbreen est le plus grand glacier d' Europe continentale: 1000 km 2, dont 500 d' un seul tenant.

Le Voldsfjorden et le Vartdals-fjorden, du sommet du Liahornet. Les seuls nuages, ou presque, de notre séjour T E X T E Philippe Morel, Fribourg P H O T O S J. Vallet, Ph. Morel, M. Morel, V. Morel

A LA DÉCOUVERTE DES ALPES DE SUNNMØRE

s' enfoncent dans les flots de la mer de Norvège, protégée par un chapelet d' îles. Pour des raisons de logement et de facilité d' accès aux montagnes, nous décidons de consacrer notre séjour à la découverte de la pointe centrale de ce trident. A proximité de la ville d' Ørsta, un petit chalet ( hytter ) loué à un couple d' agriculteurs sera notre camp de base. Cette zone est délimitée à l' ouest par le Voldsfjor-den, au nord par le Vartdalsfjorden et à l' est par le Hjørundfjorden. Ce dernier est le plus sauvage. Ses flancs culminent à près de 1600 mètres. Comme les avalanches, les sommets qui en sont issus tombent droit dans la mer. Contraste saisissant d' un élevage de saumons aux côtés du chaos d' un cône de neige sale. La gigantesque étrave du Jakta sépare le fond du fjord en deux branches, encore partiellement prises par les glaces. Sur la rive occidentale, le Slogen tient le rôle de Cervin local. Malgré sa faible altitude, il n' a pas à rougir de la comparaison avec son grand frère alpin. A son pied, le village d' Øye ( L' Ile ). Bien que situé sur le continent, seule la mer permet d' y accéder durant les mois d' hiver.

Cueillette de sommets

Si les photos du topo-guide nous donnent quelques idées de courses, les commentaires, en norvégien, ne nous sont pas d' une grande utilité. Nous décidons alors de cueillir les sommets comme ils se présenteront, au gré des belles pentes qu' ils offriront à nos yeux d' abord, à nos spatules ensuite. Le plus évident est le Saudehornet, dont le raide versant sud-ouest tombe droit sur la ville d' Ørsta. Hélas, ici comme ailleurs, le massif a ses classiques et les télémar-kers locaux ont profité des excellentes conditions de ce week-end de Pâques pour tracer cette belle pente de long en large. Nous ne sommes pas venus ici pour skier sur de vieilles traces gelées!

Premières impressions

Un épais brouillard côtier, se déchirant en fin de matinée, décide de notre premier objectif, le Festøykollen, à l' ex nord de la péninsule. Le mauvais regel nocturne et l' heure tardive nous incitent à la modestie de ses 911 mètres d' altitude. C' est skis sur le sac que nous entamons l' ascension. Elle commence par une dense forêt de petits bouleaux, parcourue par un bon sentier. Après une dizaine de minutes, le sentier fait place à une succession de

Ambiance alpine à deux pas de la mer Le Hjørundfjorden et le Sylvkallen Photos: Julien Vallet

bouts de tissus rouges attachés aux branches. Faisant confiance à notre sixième sens d' hommes des bois, nous les suivons... jusqu' à leur disparition. Qui correspond également à notre arrivée dans la neige pourrie... Pas d' autre choix que de mettre les skis aux pieds et de forcer l' obsta: ah! les joies de la découverte! Sortis de la forêt, nous débouchons sur un vaste plateau. La vue de la belle face ouest du Rametinden nous détourne rapidement du Fes-tøykollen. Avec la mer si proche, la montée est un véritable enchantement. Le sommet offre à nos regards les ascensions à venir: Middagshornet, Svinetinden, Liahornet... Les belles pentes ne manquent pas! A 15 heures, face à un

Fin mars, la débâcle a déjà libéré les eaux de la rivière Otta Photo: Philippe Morel Le haut du Barstaddalen avec le Svinetinden et le Middagshornet. Deux superbes descentes vierges de toute trace!

Les trolls ne nous ont pas empêchés de traverser la forêt située au pied du Rametinden Les pentes sommitales du Skårasalen Le brouillard côtier se déchire sur la brèche entre le Masdal-skloven et le Storhylla. Le chevalier Roland et son épée Durandal ne sont pas passés par là. Thor et Mjøllnir peut-être?

Photo: Philippe Mor el Photo: Philippe Mor el Photo: Maude Morel Photo: Philippe Morel Les pentes dominant le Kvistaddalen Le Skårasalen se donne un petit air de Patagonie Hytter dans le Kvistaddalen Photo: Julien Vallet Photo: Julien Vallet Photo: Philippe Mor el

soleil resplendissant, la descente s' effectue sur une neige juste revenue. Bonne nouvelle, il n' y aura pas besoin de se lever trop tôt ces prochains jours!

Grand ski au Skårasalen

C' est du Sylvkallen que nous avons observé le Skårasalen et sa belle pointe émergeant du plateau sommital. Si sa face est plonge dans le Hjørundfjorden, sa pente ouest est une invitation au ski. L' ascension débute par un rituel bien rôdé. A la sortie du village de Kvistad, à une centaine de mètres d' altitude, la route est bloquée par la neige. Cette route nous permet de franchir aisément la forêt peu dense qui encombre les versants jusqu' à une altitude de 300 à 400 mètres. L' itinéraire est aujourd'hui évident: il n' y a qu' à suivre les traces. Pourtant nous ne croisons jamais personne! Ces vieilles traces gelées sont pénibles à parcourir. Nous trouverons bien une variante pour la descente.

Des corniches meringuées ourlent le sommet, un cairn croule sous une épaisse couche de givre. Il semble que les conditions clémentes dont nous bénéficions ne soient pas la norme en ces parages... Ce que ne manquera pas de nous confirmer le seul Norvégien que nous croiserons sur ces montagnes: la conjonction d' une longue période de beau temps, d' un enneigement exceptionnel et d' un manteau neigeux stable est plutôt rare sous ces latitudes. Notre coup de poker a réussi! La descente des pentes sommitales suspendues au-dessus du fjord est un pur bonheur. Le raide versant ouest nous permet d' éviter les traces du matin. Bien que l' équipement moderne de télémark soit parfaitement adapté à leur parcours, les Norvégiens semblent délaisser ces belles pentes soutenues. Nous n' allons pas nous en plaindre! Parvenus au bas de la face, nous remettons les peaux de phoque et nous dirigeons vers le Storhornet voisin. La crainte des corniches nous tient à

Arrivée au lever du soleil sur le plateau entre le Svinetinden et le Middagshornet. Tempête de ciel bleu, neige dure et couteaux sont notre menu quotidien Le Ramoen, le Jønshornet et les Molladalstinden vus du pied du Middagshornet Hytter devant le Svinetinden Photo: Philippe Morel Photo: Maude Mor el

distance respectable du point culminant. Le début de la descente s' effectue en taillant de grandes courbes sur une neige encore dure. La pente se fait de plus en plus forte. D' un coup, elle plonge sur la route, 700 mètres plus bas. Lisse et régulière, elle offre la perspective étrange d' une descente qui semble infinie. Les petits virages s' enchaî sur une neige de printemps parfaite, le fond de la vallée est toujours aussi lointain. Mais tout a une fin et c' est par un joli slalom que nous atteignons la route. Il n' y a pas de doute: cette descente sera le point d' orgue de notre trop court séjour dans les Alpes de Sunnmøre. a

Ici, on troque les skis contre les crampons et les piolets Corniche sur l' arête ouest du Sylvkallen Photo: Vér onique Mor el Photo: Julien Vallet Photo: Maude Mor el Informations pratiques La ville d' Ørsta ( 6500 habitants ) est idéalement située pour découvrir les Alpes de Sunnmøre. Elle dispose d' un supermarché, de magasins de sport, d' une librairie ( cartes et guides ). Elle se situe à 60 km d' Ålesund ( aéroport ). Une voiture est indispensable pour rejoindre le départ des randonnées. Logement: il y a un hôtel ( Viking Fjord Hotel ) à Ørsta, mais la solution la plus avantageuse consiste à louer un hytter, petit chalet en bois équipé pour la cuisine que l'on trouve dans la plupart des campings de Norvège. Nous recommandons Brudevoll Gard, à 5 km d' Ørsta sur la route 655 ( http:// www.brudevoll-gard.no/ ) pour son excellent accueil. Le ski-club d' Ålesund ( http://www.aask.no/ ) gère la cabane de Stan-dalhytta, au pied du Kolåstinden, la grande classique de la région. D' autres courses sont possibles au départ de cette cabane ( Kopphornet, Sylvkallen, Sætretindane ).

Cartes/Guides: une dizaine d' itinéraires sont décrits sur le site http://www.skirando.ch.

Un guide de randonnée à ski est également disponible: Skiturar i Sunnmørsalpane, Fjella vest for Hjørundfjorden ( 1996 ) de Jon Hagen et Helge J. Standal ( http://www.iriss.no/ skiturar ). La carte au 1: 50 000 Sunnmørsalpane ( 2501 ) est indispensable. Les zones de crevasses et les falaises n' y sont pas indiquées. En cas de brouillard, faire attention aux énormes corniches! Pour les informations nivo-météorologiques: http://www.met.no.

Matériel: en plus du matériel de sécurité habituel ( DVA, pelle et sonde ), crampons, piolet et matériel de glacier sont utiles sur certains itinéraires.

Histoire, culture et littérature alpines

Storia, cultura, letteratura alpina

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