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Air de secours en cas d’avalanche La veste « AvaLung » fournit de nouvelles connaissances

C' est d' asphyxie que meurent le plus souvent les personnes prises sous une avalanche. Pourquoi, dès lors, ne pas se munir d' un appareil respiratoire afin d' éviter cette asphyxie? La « veste respiratoire » « AvaLung » est le dernier en date des dispositifs d' aide en cas d' avalanche. Il pourrait effectivement élargir les probabilités de survie des personnes ensevelies sous la neige.

« Ueli, comment ça va ?» demande Thomas Schnider par le biais d' un in-terphone dont les fils partent sous la neige. « Ok - quel est mon pouls ?» répond le petit haut-parleur d' une voix nasillarde. « Il est descendu à 8O. La température corporelle et l' oxy sont stables », répond Thomas Schnider à Ueli. Thomas Schnider est médecin spécialisé dans les urgences et guide de montagne. Expert indépendant, il observe et surveille, avec trois collègues, un « essai d' ensevelis sous la neige » sur le domaine skiable de Laax ( GR ), démonstration menée par le fabricant américain de matériel de montagne Black Diamond. Ce dernier entend montrer qu' une personne ensevelie profondément sous la neige peut éviter l' as pendant au moins une heure si elle utilise « AvaLung », « veste respiratoire » récemment développée.

Des essais d' une durée supérieure n' ont pas été autorisés.

Le guide Ueli Bühler, importateur pour la Suisse des vestes « AvaLung », s' est mis à disposition comme cobaye. Avant d' être placé dans un trou de 1,5 m de profondeur creusé dans la neige, il est emballé dans des vêtements en duvet et connecté à une multitude de câbles et tuyaux divers. Avant l' opération, les représentants de l' entreprise ont expliqué le fonctionnement du dispositif. C' est par dessus ses vêtements, comme couche la plus extérieure, que Bühler porte la veste en matériau cellulaire dont le poids est de 700 g. Un embout respiratoire semblable à celui d' un tuba de plongeur sort du col devant son visage. En cas de nécessité, c'est-à-dire en cas d' avalanche, il suffit de le saisir et de le tenir entre les dents.

Cet embout conduit vers un tube placé sur la face avant de la veste et perforé de petits trous. Au moment de l' inspiration, l' air contenu dans la neige est aspiré. Même la neige compacte et humide est encore composée d' air pour la moitié de son volume. Au moment de l' expiration, une valve séparatrice dévie l' air utilisé vers un second tube qui aboutit, lui, dans la partie arrière de la veste, donc dans le dos du porteur.

L' appareil vise essentiellement à la survie sous la neige. Il ne protège évidemment pas contre l' ensevelisse, comme le sac gonflable est censé le faire, et il ne remplace pas le détecteur de victime d' avalanche ( DVA ). Son but est de faire gagner du temps jusqu' à l' arrivée des secours. Selon les statistiques, il faut en moyenne quelque 35 minutes pour qu' une victime munie d' un DVA soit localisée et dégagée. Pendant ce laps de temps, la probabilité de survie diminue à environ 0,3. La « mort par asphyxie » est la plus fréquente. Il est de toute manière recommandé, si l'on est pris dans une avalanche, de mettre tant que possible les mains devant le visage et d' empêcher la neige d' entrer dans les voies respiratoires. Lorsque l' avalanche s' est arrêtée, cette position des mains peut aussi permettre de dégager une cavité devant son visage. Or, bien qu' elles aient réussi à former une cavité, de nombreuses victimes ont été retrouvées mortes sans que les médecins puissent expliquer pourquoi.

« Les résultats obtenus lors de plus de trente essais d' ensevelissement nous ont obligés à revoir nos idées sur la mort dans une avalanche », déclare le Dr Schnider, qui suit depuis un certain temps les expériences des Américains. Ce n' est que depuis ces tests que l'on sait que la perméabilité à l' air de la neige est souvent insuffisante, même si une cavité a été dégagée. En effet, la surface de la cavité s' englace rapidement en raison de la chaleur et de l' humidité de l' air expiré. La victime se retrouve alors dans une sorte de sac de plastique et meurt d' une intoxication par gaz carbonique.

Grâce au système de la veste qui sépare l' air inspiré de l' air expiré, Ueli Bühler résiste sans problème à une heure d' enfouissement sous l' ava simulée.

Pour bien montrer ce qui se passe avec le gaz carbonique, il se fait recouvrir de neige une nouvelle fois sans veste « AvaLung » mais avec une cavité pour respirer.

Après quelques minutes, l' oxy indique un taux si bas d' oxy dans son sang que les médecins doivent interrompre la démonstration et le sortir de la neige. Une fois la démonstration terminée et l' équi revenue au restaurant d' altitude, le guide nous racontera d' ailleurs comment il a été rapidement pris de vertiges, de détresse respiratoire et de maux de tête pendant l' essai sans veste.

« Je suis impressionné par la démonstration de Laax », admet Frank Tschirky, de l' Institut pour l' étude de la neige et des avalanches ( ENA ), à Davos. Expert en avalanches et guide, il est convaincu que la veste « AvaLung » est un atout en cas d' accident. Une question au moins reste posée. Est-il possible, lorsqu' on est emporté par une avalanche, de ne pas lâcher l' embout que l'on tient entre les dents? Le fabricant, lui aussi, souligne que jusqu' ici aucune expérience n' a été faite en situation réelle. Toutefois, lors d' essais avec chute dans une pente, les « testeurs » n' ont pas lâché l' embout. Des mannequins lancés dans une avalanche déclenchée artificiellement n' ont par ailleurs pas perdu leur veste. On ne saura en fait si elle est utile que lorsqu' elle aura servi dans une véritable avalanche.

Il serait en tout cas faux de mettre en concurrence les divers appareils disponibles, DVA, sacs gonflables ballons et « AvaLung ». Selon Frank Tschirky, c'est à chacun de décider de sa sécurité et des moyens qu' il entend employer. Pour sa part, il recommande le nouvel appareil en premier lieu aux professionnels, patrouilleurs de piste et guides qui doivent souvent se rendre à des endroits où la sécurité est douteuse.

Eviter avant tout de se faire ensevelir

Un risque résiduel important demeure lors de chaque ensevelissement sous une avalanche et malgré toute l' aide procurée par la technique. Une grande majorité des personnes dégagées qui sont encore en vie ont subi des blessures importantes dues à la pression et/ou sont tombées très vite en état d' hypothermie. La meilleure façon de se protéger de tels risques reste donc d' éviter soigneusement toute avalanche en choisissant des itinéraires de randonnée ou de hors piste sûrs. On peut acquérir des bases solides, notamment en suivant les cours sur les avalanches proposés par le CAS et en faisant régulièrement des exercices sous la conduite d' experts. Dans une situation critique, après une avalanche, une personne peut dégager ses camarades dans un laps de temps réduit seulement si elle est équipée convenablement, si elle évalue correctement la situation et si elle garde la tête froide.

Hans Jaggi, administrateur du secours en montagne au CAS

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