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Courses à skis faciles au pays des collines L'Emmental, c'est bien plus que du fromage et du «Guetzli»

Les sommets n' y sont pas trop élevés et la difficulté des descentes facilement appréciable. Le danger d' avalanche y est moindre, le fond y est herbeux et on y est heureux lorsqu' il a neigé jusqu' à l' Emme, l' Ilfis et l' Aar. Il n' est dès lors plus permis d' hésiter plus longuement avant de partir faire la trace dans la neige emmentaloise.

Tandis qu' il séjournait à l' Auberge Hirschen, à Trubschachen, pour le Nouvel An 1969/70, l' écrivain bernois E.Y. Meyer ne se serait certainement pas retrouvé dans cette situation scabreuse lors de ses promenades digestives dans les alentours s' il avait été en possession de skis et de peaux de phoque: « on recommence à ramper tant bien que mal le long de la pente, à quatre pattes dans la neige, mais on glisse sur la couche de fond, qui n' offre aucun soutien et on reste couché maintes fois dans la neige, qui est parvenue entre temps à pénétrer sous les habits. A chaque fois, on est tenté de rester allongé dans cette masse moelleuse qui fait corps avec vous et semble conserver la chaleur durement acquise plutôt que la reprendre. »

C' est à skis que nous quittons, début mars, le magasin de la fabrique Kambly, dans la partie orientale du village de Trubschachen. La fabrique de biscuits fête en effet cette année son centième anniversaire. Après nous être régalés de Bretzeli, de Matterhorn-Guetzli, de Butterfly et de bien d' autres sortes de biscuits, le Rämisgummehoger s' impose comme promenade digestive idéale. Par son nom, ce sommet incarne en quelque sorte l' Emmental: le mot « Rämisgumme » est teinté d' atmosphère bernoise et le paysage emmentalois est constitué de collines massives, les « Höger », et de vallées perdues, les « Chrachen ». On trouve aussi sur le Rämisgummehoger de vastes pentes qui n' ont pas laissé nos prédécesseurs skieurs de marbre: le guide Wanderungen und Ferien im Oberemmenthal de 1926 parlait d' une « superbe descente en hiver ». Hans Kempf énumérait, cinq ans plus tard, les possibilités d' hébergement dans son Berner Skiführer: « Cabane du Ski-Club de Langnau à Vorder Rämisgummen, à deux heures de la gare de Trubschachen, à trois heures de la gare de Langnau en passant par Hohwacht-Blapbach, dix places dans la paille; la Chrümpelhüslihütte de la Société sportive de la ville de Berne, réservée aux membres et aux personnes invitées, vingt-cinq places dans le foin, douze lits, à deux heures de la gare de Trubschachen ». Dans l' Allgemeiner Ski-Tourenführer der Schweiz de 1932, on trouve la réclame suivante: « Les bons biscuits Kambly pour un pique-nique bienvenu. »

En parlant de l' Emmental, ce guide de randonnées à skis écrit ceci: « Le ski n' est plus depuis longtemps réservé aux seuls jeunes gens intrépides. Les hommes mûrs, quelquefois même aux cheveux blancs, aiment aussi se laisser aller sur la neige et prennent du plaisir à une descente à vitesse raisonnable. » N' en est-il pas de même pour les courses à skis dans l' Emmental? Pratiquement aucune pente à couper le souffle, aucune descente sans fin, mais pas non plus de ces longs faux plats ennuyeux comme on en trouve quelquefois dans les Alpes. Il faut reconnaître que le départ de la descente du Chapf, un sommet panoramique à l' ouest d' Eggiwil, est passablement délicat. Cependant, une fois la pente menant à l' Emme atteinte, il ne reste plus qu' à se faire plaisir en godillant, en empruntant même à l' occasion la piste lorsque le remonte-pente fonctionne. Comme nous aimons les beaux virages, nous montons encore sur la prochaine colline. De là, nous nous laissons glisser depuis Hurnusser sur la route recouverte de neige jusqu' au centre de cure de Hohwacht et nous redescendons juste après du sommet du même nom jusqu' à Langnau dans la neige fraîche, traçant nos dernières courbes entre les arbres fruitiers et les premières maisons. Arrivés au bord de l' Ilfis, un homme qui nous a observés lance: « Je m' en souviens, c' est là aussi que nous faisions du ski autrefois, qu' il y avait encore de la neige chaque hiver! »

L' hiver 2008/09 fut un de ces hivers neigeux et suffisamment longs pour que l'on puisse en profiter. On ne peut oublier la course à skis reliant Heimenschwand, au-dessus de Thoune – où l'on trouve encore au Restaurant Bären un portrait du général Guisan trônant dans la salle à manger – à Konolfingen, en passant par l' Äschlenalp et le Chnubel, avec ses montées sous le soleil et ses descentes ombragées dans la meilleure des poudreuses. C' est à l' Äschlenalp que l'on obtient les courbes les plus racées, mais on laissera également de belles traces dans la courte pente raide au-dessus du château avant de gagner Oberdiessbach. C' est exactement ce que je comptais faire le 7 mars de l' année dernière en bordure du village de Trubscharen. Cependant, il y avait tant de neige fraîche sur la pente escarpée que j' ai provoqué une petite avalanche. C' eût été la poisse de terminer enseveli par la neige justement à cet endroit. 

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