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Des sommets et des lacs sous le soleil du sud Balade à travers le Val Poschiavo supérieur

Une randonnée entre le col de la -Ber-nina et Poschiavo, en osant un petit crochet par le Val da Camp, est la -promesse d' expériences intenses au beau milieu des sommets et des lacs de montagne, charme du sud et spécialités culinaires en sus.

« Mi dispiace, signore !» La patronne gesticule comme au théâtre. Au bord des larmes, elle semble déplorer le fait de ne pas encore être en mesure de nous servir de mets chauds. « Solo alle sei e mezza », pas avant 18 h 3O. Et c' est le même refrain dans chaque restaurant. Pour l' instant, il n' y a donc ni pizzoccheri, ces délicieuses pâtes au sarrasin, ni capunet ( spätzli aux épinards ), ni polenta au sarrasin. A Poschiavo, nous sommes définitivement arrivés dans le sud. L' endroit se distingue non seulement par ses horaires de repas plus tardifs, mais aussi et surtout par la langue italienne, ou plutôt le « Pus' ciavin », dialecte du Val Poschiavo dans lequel les aubergistes parviennent à formuler une réponse négative sans rien perdre de leur charme. Il y a aussi l' architecture de pierre des palaces somptueux, le centre sans voitures parcouru de ruelles étroites et la place ouverte avec ses nombreux « Ristoranti ». Et les randonneurs affamés en ont pour leur argent, même avant 18 h 30: fromage du Val Poschiavo, saucisse, viande séchée ou Brasciadela, un pain de seigle à l' anis en forme d' anneau, sont autant de délices à se mettre sous la dent. De plus, un verre de Veltliner vous sera de toute manière servi à toute heure de la journée.

Les intérêts culinaires sont un motif suffisant pour un week-end prolongé dans le Val Poschiavo. Mais c' est en premier lieu pour marcher que nous avons fait le voyage. Notre premier objectif est le Piz Campasc, une belle pyramide située sur les hauteurs du col de la Bernina, que l'on gagne par une randonnée courte et facile. Cette course convient très bien comme excursion après le long, mais jamais ennuyeux voyage menant dans la région. Sur la route de l' Albula, avec son célèbre viaduc, et sur la ligne de la Bernina, qui fête ses 100 ans d' existence cette année, on garde la plupart du temps le nez collé aux fenêtres. Toutefois, les jambes fourmillent d' impatience à l' idée d' aller enfin se dégourdir sur le col de la Bernina. Le chemin serpente sur un épaulement répondant au nom de Giuf, un paysage rappelant celui des régions arctiques fait de petites collines arrondies et de petits lacs. Le sentier de montagne emprunte ensuite les pentes raides du sommet. La vue sur les lacs du col de la Bernina, dont les noms correspondent à leurs couleurs respectives, est très intéressante. Le Lago Bianco, de couleur claire, est alimenté par l' eau des glaciers, mêlée d' une fine poussière de roche « moulue » sous l' effet de la glace. Le Lej Nair, quant à lui, est de couleur sombre, car l' eau qu' il contient a déjà été filtrée par le sol, ce qui la rend plus claire.

Le randonneur désireux de poursuivre sur un parcours plus exigeant continuera son chemin par le Fil da Prairol jusqu' au Corn da Prairol. Sur l' arête, l' ascension devient plus alpine. Il s' agit déjà de surmonter quelques passages de grimpe et il vaut mieux disposer d' un sens aiguisé du choix de l' itinéraire. La situation dégagée du Corn da Prairol en fait un excellent point de vue. De là, on a en point de mire l' imposant Sassalb, le « rocher blanc », un gigantesque tas de blocs de calcaire et de marbre, qui menace tel une épée de Damoclès la petite localité de Poschiavo. Après être redescendu en direction de Cavaglia, il vaut la peine de faire un petit crochet jusqu' au jardin glaciaire tout proche aux Motti di Cavagliola, où une boucle balisée permet d' admirer d' énormes marmites glaciaires. A Cavaglia, nous remontons dans le train des Chemins de fer rhétiques, qui nous déposera à Poschiavo après avoir effectué quelques courbes impressionnantes dans une pente abrupte.

Le matin suivant, nous faisons route vers le Val da Camp, une petite extension à l' est du Val Poschiavo supérieur. On y est attiré par des toponymes aux accents poétiques comme Saoseo, Val Viola ou Mürasciola, et le voyageur y est récompensé par la diversité des couleurs allant du pastel turquoise le plus doux des lacs éclatant au soleil à la couleur or des mélèzes vêtus de leur habit d' automne. On n' oubliera pas non plus les sommets escarpés, la roche anguleuse et les arêtes aériennes de ce petit vallon. Parmi les sommets qui le dominent, citons le Corn da Mürasciola, dont on atteint l' arête nord-ouest en empruntant le sentier de randonnée qui sillonne le Val Mera, puis en remontant des pentes raides hors de tout sentier. Cette arête d' herbe et de blocs mène à un plateau d' où l'on gagne le sommet exposé par l' arête ouest, raide et pimentée de quelques passages d' escalade. La descente se fait également par l' arête ouest, mais nous descendons ensuite jusqu' aux Lagh da Mürasciola et rejoignons le Rifugio Saoseo, où l'on peut calmer sa faim en se régalant de spécialités locales.

Le troisième jour, nous délaissons les sommets et nous nous tournons vers les deux perles que sont le Lagh da Saoseo et le Lagh da Val Viola. Cela ne fait aucun doute, ils font partie des plus beaux lacs de montagne de tout l' arc alpin, et notre recherche de hauteur et d' espace ne pouvait se terminer autrement.

 

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