L'aimant de pierre. 150 ans de fascination pour l'Eiger | Club Alpin Suisse CAS
Soutiens le CAS Faire un don

L'aimant de pierre. 150 ans de fascination pour l'Eiger

150 ans de fascination pour l' Eiger

L' aimant de pierre

L' impressionnante muraille de calcaire partiellement friable dominant le verdoyant vallon de Grindelwald, l' Eiger, n' est que le onzième par l' al et pourtant le plus célèbre des sommets des Alpes bernoises. Avant même la première ascension de sa face nord haute de 1800 mètres, sillonnée aujourd'hui de 33 itinéraires et endeuillée de 64 morts, cette montagne a posé des problèmes aux alpinistes. Histoire de l' Eiger en huit longueurs de corde

1. Le sommet comme but: 1858 à 1864

Il y aura 150 ans le 11 août que des alpinistes foulèrent pour la première fois le sommet de l' Eiger, mais cela fait 200 ans déjà que des hommes avaient essayé de gravir cette montagne. L' un rebroussa chemin à mi-parcours, un deuxième dévissa, un troisième atteignit presque le but mais ne retrouva pas son chemin au retour... Il n' est donc pas étonnant que la réputation de l' Eiger ait été celle d' un sommet « simplement invincible » comme le constatait Gottlieb Studer, cinquième vainqueur de la Jungfrau et membre fondateur du CAS, dans l' article « Topographische Mitteilungen aus dem Alpengebirge » en 1843: « Son sommet se dresse comme une lame si affûtée que, même de loin, l' observateur ne peut que confirmer cette affirmation. » Quinze ans plus tard, l' impossible se réalisa pourtant: le 11 août 1858 à midi, l' alpi occasionnel irlandais Charles Barrington atteint, avec ses guides Christian Almer et Peter Bohren, de Grindelwald, le point culminant de l' Eiger ( 3970 m ) par le flanc ouest. Ils y restent dix minutes et y plantent un drapeau, afin que l'on voie d' en bas le succès de leur entre- Connu sous le nom de « Glet scherwolf » ( loup des glaciers ), le guide de montagne Peter Bohren figure parmi les premiers conquérants de l' Eiger. Photo extraite du livre de Carl Egger, Pioniere der Alpen, Zurich, 1946 Le guide de montagne Christian Almer aurait déconseillé à son hôte anglais Charles Barrington de sauter sur le Champignon lors de la conquête de l' Eiger. Photo extraite du livre de Carl Egger, Pioniere der Alpen, Zurich, 1946 prise. La cinquième ascension, en 1864, voit la première femme vaincre l' Eiger avec son guide Melchior Anderegg: il s' agit de la pionnière de l' alpinisme féminin, Lucy Walker.

2. Nouvelles voies: 1871 à 1885

« Notre itinéraire passe par là, il n' y en a pas d' autre », déclarent trois guides de Grindelwald à leurs trois touristes au pied du flanc ouest de l' Eiger, au matin du 13 septembre 1870. L' un de ceux-ci est E. Ober, qui écrit le premier article sur l' Eiger dans l' annuaire du CAS ( 1871-1872 ). Il n' y a effectivement pas encore d' autre voie, mais on la cherche: après l' ascension réussie de la plupart des plus hautes montagnes des alpes oc- cidentales, ce n' est plus le sommet seul qui compte, mais aussi la voie qui y conduit. Le 14 juillet 1871, l' arête sud-ouest est gravie pour la première fois par l' Américain ( bientôt résidant de Grindelwald et historien alpin ) W. A. B. Coolidge, sa tante Meta Brevoort et trois guides indigènes. Ils suivent cette arête entre le petit et le grand Eiger, atteignent « finalement le point sommital par des rochers escarpés et difficiles » et redescendent par la voie normale du flanc ouest. Selon Coolidge, Christian Almer, en qui il voit « le meilleur guide de tous les temps », suit le même parcours en sens inverse. Il ne descend cependant pas sur la Petite Scheidegg par le glacier de l' Eiger, L' Eiger vu par un peintre du XIX e siècle. Maximilien de Meuron ( 1785-1886 ): Le Grand Eiger, 1825, huile sur bois. Photo extraite du livre de Daniel Anker, Eiger – die vertikale Arena, Zurich, 2008 mais se taille un passage dans la raide paroi de glace vers le col sud de l' Eiger et ramène ainsi ses deux clients anglais le même jour à Grindelwald. C' est la première traversée de l' Eiger. L' arête sud sera parcourue pour la première fois en 1876. Mais la voie la plus exigeante vers l' Eiger est à cette époque indubitablement l' arête nord-est, mieux connue sous le nom de Mittellegi. Deux Anglais et deux guides de Grindelwald font une première tentative en 1874. Alexander Burgener, l' un des plus remarquables guides suisses de l' époque, fait une nouvelle tentative sur cette arête en lame de couteau le 1 er juillet 1885 avec deux collègues valaisans et un client autrichien. Mais ils ne réussissent pas à vaincre la grande tour. Deux jours plus tard, ils y parviennent quand même mais en descente, abandonnant plus de 150 mètres de corde dans les rappels et le piolet de Burgener auquel la corde est fixée. Trente-six étés s' écouleront encore, avant que Yuko Maki vienne à bout de l' arête Mittellegi avec des guides indigènes le 10 septembre 1921: c' est alors et déjà une autre époque de l' alpinisme.

3. Nouvelles cordées, nouvelles saisons: 1878 à 1924

Retour à l' année 1878: tous les alpinistes ne veulent ou ne peuvent pas se payer un guide. La première ascension de l' Eiger sans guide est réussie en 1878 par quatre jeunes Bernois, partis à pied d' Interlaken avec un court bivouac à la Wengernalp. Paul Montandon rappelle ce souvenir dans Les Alpes de 1928: « Au milieu, une ravine verglacée nous rappela à la prudence... le pied ne trouvait pas toujours bonne assise sur des plaques de glace et des filets d' eau glissants. Mais qui, à l' époque, connaissait les crampons? » A la première escalade hivernale, le 7 janvier 1890, succéda la première ascension à skis le 18 mai 1924: l' Anglais Arnold Lunn, accompagné de trois Suisses, remonte à skis le glacier densément crevassé de l' Eiger jusqu' au col nord de l' Eiger ( 3614 m ) et de là poursuit à pied par l' arête sud jusqu' au sommet. Lunn écrit dans le journal British Ski Yearbook: « Nous chaussâmes nos skis au col de l' Eiger et descendîmes vers la cascade de glace, une descente parfaite sur une neige idéale. » On pouvait estimer alors que tout était fait à l' Eiger, si on le comparait simplement à d' autres sommets des Alpes. C' est alors que la paroi nord commence à capter tous les regards. Elle a été escaladée déjà, au moins dans son tiers inférieur. Le 20 septembre 1911, Christian Almer, de Grindelwald, et Joseph Schaler, de Zermatt, ont conduit un Mister P. H. Torp de Lancester par une voie, malheureusement inconnue, de névés raides et de ressauts verticaux, en deux heures et demie à peine, jusque sous la fenêtre de la Station Eigerwand où « les audacieux alpinistes ont été hissés au moyen d' une corde de glacier » comme le relate le journal Echo von Grindelwald.

4. La fascination de la paroi nord: 1932 à 1938

Hans Lauper écrit dans Les Alpes de 1933, au sujet de la première ascension par le nord le 20 août 1932: « Les guides allumèrent enfin leurs cigares, si longtemps désirés et toujours si puants... escaladèrent tranquillement la croupe de neige jusqu' à l' arête nord-est et suivirent celle-ci d' un pas assuré vers le sommet ( 16 h 45 ). Nous avions vaincu la dernière des trois parois nord du front alpin le plus célèbre au monde. » La vue sur la paroi nord proprement dite, depuis la paroi nord-est de l' Eiger, elle-même constituée d' aplombs rocheux et de vertigineux névés, semble avoir grandement impressionné ces premiers visiteurs: « Ce que nous avons vu de la paroi nord nous a semblé suffisamment décourageant et pour tout dire impossible. Impossible? » Impossible ou non: voilà bien la question qui tient en haleine les journalistes, chroniqueurs, touristes et juristes de 1932 à 1938. L' époque héroïque de l' Eiger avec neuf morts, interdiction d' escalade de la paroi nord, polémiques, trois premiers livres et un film, prend fin avec la victoire des Allemands Anderl Heckmair et Wiggerl Vörg ainsi que des Autrichiens Fritz Kasparek et Heinrich Harrer le 24 juillet 1938. « Plus dure est la lutte et plus grand le danger, plus la récompense est précieuse et belle »: c' est ainsi que Heckmair, chef de cordée, commente en 1949 cette victoire dans son classique de la littérature alpine Les Dans Les Alpes, la première ascension de la paroi nord de l' Eiger trouve un plus large écho dans la publicité – ici, une annonce de Tricouni – que dans la partie rédactionnelle. Il a fallu attendre 1921 pour voir le Japonais Yuko Maki vaincre l' arête Mittellegi avec l' aide de guides indigènes.

Photo extraite du livre Die Alpen · Les Alpes 1947 Photo: ar chiv es des Alpes Ueli Steck reçoit l'« Eiger Award » Le vainqueur est... Ueli Steck. C' est à cet alpiniste bernois chevronné qu' a été décerné l'« Eiger Award », lancé cette année et doté de 10 000 francs. Dans le cadre de la manifestation « Eiger live » qui s' est déroulée en mai à Grindel wald, Adolf Ogi a remis au lauréat ce trophée que les organisateurs appellent « Oscar de l' alpinisme ». Cette distinction a pour but de récompenser des personnes qui, par des performances de premier ordre, ont permis au grand public de découvrir la valeur et la magie des montagnes et des sports qui s' y pratiquent.

En 1957, les curieux se bousculent autour des télescopes de la Petite Scheidegg pour voir le drame de Corti. Photo: Ludwig Gramminger/archives de Hans Steinbichler, Bernau am Chiemsee C' est à grand renfort de matériel que l' équipe anglo-américaine emmenée par John Harlin se lance, en 1966, dans une véritable expédition pour trouver une voie directe dans la paroi de l' Eiger. Photo extraite du livre de Gillman/Haston, Eiger direct, Londres, 1966 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 14 13 15 16 17 18 19 20 21 22 24 23 25 26 27 28 29 30 31 32 33 Lauper-Route 2O.8.1932 Heckmair-Route 21./22.–24.7.1938 John-Harlin-Direttissima 23.2.–25.3.1966 Nordpfeiler ( Polen ) 28.–31.7.1968 Nordpfeiler ( Messner ) 3O.7.–1.8.1968 Japaner-Direttissima 15.7.–15.8.1969 Nordpfeiler ( direkt ) 28.–31.7.1970 Tschechenpfeiler 4.–29.8.1976 Tschechenroute 2 16.1.–26.1. und 7.2.–27.2.1978 Les Portes du Chaos 13.–16.8.1979 Westgrat direkt 3O.7.1980 Nordverschneidung 26.–27.8.1981 Knez-Route 15.7.1982 Ochsner-Brunner-Route 13.8.1982 Ideal-Direttissima 2O.3.–2.4.1983 Spit verdonesque édenté 3.6., 9.–12.7.1983 Piola-Ghilini-Direttissima 26.–3O.7.1983 Hiebeler-Gedächtnisweg 1O.–27.3.1985 Slowenenroute 27.–28.7.1985 Eigersanction 5.–7.8.1988 Gelber Engel 6.–11.8.1988 Löcherspiel 17.8.1988 Métanoïa 19.–22.2. und 23.2.–4.3.1991 Le Chant du Cygne 29./3O.7.1991, 17./18.7.1992 Yeti August 1997–98; 29.8.1998 Symphonie de liberté August 1999; 28./29.8.1999 La vida es silbar 1998 bis 2000; 25./26.8.2000 Deep Blue Sea 2000/01; 23.8.2001 The Young Spider Juni–Oktober 2001; 15.1O.2001 Griff ins Licht 12.–16.9.2002 Russen-Direttissima 4.–17.2.2006 Magic Mushroom 1.–3., 8.–1O.1O.2007 Projekt Siegrist/Steck 2003–?

33 32 31 30 29 28 27 26 25 24 23 11 22 21 20 19 18 17 16 15 14 13 12 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1

19

80

19

90

20

00

19

30

19

60

19

70

09_Rote Fluh_V4:Eiger 6.6.2008 16:37 Uhr Seite 92 Photo: Jost von Allmen, Gr aphique: A S Verlag Zurich 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 14 13 15 16 17 18 19 20 21 22 24 23 25 26 27 28 29 30 31 32 33 Lauper-Route 2O.8.1932 Heckmair-Route 21./22.–24.7.1938 John-Harlin-Direttissima 23.2.–25.3.1966 Nordpfeiler ( Polen ) 28.–31.7.1968 Nordpfeiler ( Messner ) 3O.7.–1.8.1968 Japaner-Direttissima 15.7.–15.8.1969 Nordpfeiler ( direkt ) 28.–31.7.1970 Tschechenpfeiler 4.–29.8.1976 Tschechenroute 2 16.1.–26.1. und 7.2.–27.2.1978 Les Portes du Chaos 13.–16.8.1979 Westgrat direkt 3O.7.1980 Nordverschneidung 26.–27.8.1981 Knez-Route 15.7.1982 Ochsner-Brunner-Route 13.8.1982 Ideal-Direttissima 2O.3.–2.4.1983 Spit verdonesque édenté 3.6., 9.–12.7.1983 Piola-Ghilini-Direttissima 26.–3O.7.1983 Hiebeler-Gedächtnisweg 1O.–27.3.1985 Slowenenroute 27.–28.7.1985 Eigersanction 5.–7.8.1988 Gelber Engel 6.–11.8.1988 Löcherspiel 17.8.1988 Métanoïa 19.–22.2. und 23.2.–4.3.1991 Le Chant du Cygne 29./3O.7.1991, 17./18.7.1992 Yeti August 1997–98; 29.8.1998 Symphonie de liberté August 1999; 28./29.8.1999 La vida es silbar 1998 bis 2000; 25./26.8.2000 Deep Blue Sea 2000/01; 23.8.2001 The Young Spider Juni–Oktober 2001; 15.1O.2001 Griff ins Licht 12.–16.9.2002 Russen-Direttissima 4.–17.2.2006 Magic Mushroom 1.–3., 8.–1O.1O.2007 Projekt Siegrist/Steck 2003–?

33 32 31 30 29 28 27 26 25 24 23 11 22 21 20 19 18 17 16 15 14 13 12 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1

19

80

19

90

20

00

19

30

19

60

19

70

09_Rote Fluh_V4:Eiger 6.6.2008 16:37 Uhr Seite 92 Voie Lauper 2O.8.1932 Voie Heckmair 21/22-24.7.1938 Direttissima John Harlin 23.2-25.3.1966 Pilier nord ( Polen ) 28-31.7.1968 Pilier nord ( Messner ) 3O.7-1.8.1968 Direttissima des Japonais 15.7-15.8.1969 Pilier nord ( direct ) 28-31.7.1970 Pilier des Tchèques 4-29.8.19769 Route des Tchèques 2 16-26.1 et 7-27.2.1978 Les Portes du Chaos 13-16.8.1979 Arête ouest directe 3O.7.1980 Dièdre nord 26-27.8.1981 Voie Knez 15.7.1982 Voie Ochsner-Brunner 13.8.1982 Direttissima idéale 2O.3-2.4.1983 Spit verdonesque édenté 3.6, 9-12.7.1983 Direttissima Piola-Ghilini 26-3O.7.1983 Voie commémorative Hiebeler 10-27.3.1985 Route des Slovènes 27-28.7.1985 Eigersanction 5-7.8.1988 Ange jaune 6-11.8.1988 Jeu de trous 17.8.1988 Métanoïa 19-22.2 et 23.2-4.3.1991 Le Chant du Cygne 29-3O.7.1991, 17-18.7.1992 Yeti Août 1997-1998; 29.8.1998 Symphonie de liberté Août 1999; 28-29.8.1999 La vida es silbar 1998 à 2000; 25-26.8.2000 Deep Blue Sea 2000/2001; 23.8.2001 The Young Spider Juin-octobre 2001; 15.1O.2001 Prise dans la lumière 12-16.9.2002 Direttissima des Russes 4-17.2.2006 Magic Mushroom 1-3, 8-1O.1O.2007 Projet Siegrist/Steck 2003-?

dès 1930 dès 1960 dès 1970 dès 1980 dès 2000 dès 1990 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 14 13 15 16 17 18 19 20 21 22 24 23 25 26 27 28 29 30 31 32 33 Lauper-Route 2O.8.1932 Heckmair-Route 21./22.–24.7.1938 John-Harlin-Direttissima 23.2.–25.3.1966 Nordpfeiler ( Polen ) 28.–31.7.1968 Nordpfeiler ( Messner ) 3O.7.–1.8.1968 Japaner-Direttissima 15.7.–15.8.1969 Nordpfeiler ( direkt ) 28.–31.7.1970 Tschechenpfeiler 4.–29.8.1976 Tschechenroute 2 16.1.–26.1. und 7.2.–27.2.1978 Les Portes du Chaos 13.–16.8.1979 Westgrat direkt 3O.7.1980 Nordverschneidung 26.–27.8.1981 Knez-Route 15.7.1982 Ochsner-Brunner-Route 13.8.1982 Ideal-Direttissima 2O.3.–2.4.1983 Spit verdonesque édenté 3.6., 9.–12.7.1983 Piola-Ghilini-Direttissima 26.–3O.7.1983 Hiebeler-Gedächtnisweg 1O.–27.3.1985 Slowenenroute 27.–28.7.1985 Eigersanction 5.–7.8.1988 Gelber Engel 6.–11.8.1988 Löcherspiel 17.8.1988 Métanoïa 19.–22.2. und 23.2.–4.3.1991 Le Chant du Cygne 29./3O.7.1991, 17./18.7.1992 Yeti August 1997–98; 29.8.1998 Symphonie de liberté August 1999; 28./29.8.1999 La vida es silbar 1998 bis 2000; 25./26.8.2000 Deep Blue Sea 2000/01; 23.8.2001 The Young Spider Juni–Oktober 2001; 15.1O.2001 Griff ins Licht 12.–16.9.2002 Russen-Direttissima 4.–17.2.2006 Magic Mushroom 1.–3., 8.–1O.1O.2007 Projekt Siegrist/Steck 2003–?

33 32 31 30 29 28 27 26 25 24 23 11 22 21 20 19 18 17 16 15 14 13 12 10 9 8 7 6 5 4 3 2 1

19

80

19

90

20

00

19

30

19

60

19

70

09_Rote Fluh_V4:Eiger 6.6.2008 16:37 Uhr Seite 92 trois derniers problèmes des Alpes: la face nord du Cervin, la face nord des Grandes Jorasses, la face nord de l' Eiger. Cette ascension historique de la plus célèbre paroi des Alpes trouve un écho contrasté dans Les Alpes de 1938: six lignes seulement dans la partie rédactionnelle, mais de grandes annonces en publicité: « Ovomaltine et les clous Tricouni ont procuré réconfort et assurance aux vainqueurs de la paroi nord de l' Eiger ». Par rapport au grand spectacle de la paroi nord, la première escalade de la paroi sud-est, haute de 800 m et purement rocheuse, par les Allemands Otto Eidenschink et Ernst Möller les 11 et 12 août 1937, est passée presque inaperçue. Personne non plus ne remarque qu' une semaine auparavant, l' Autrichien puis citoyen suisse vivant à Soleure Hans Haidegger a fait une tentative d' escalade en solo de la paroi nord. Selon des indications orales données à des camarades d' escalade, il aurait grimpé jusqu' au Bivouac de la mort puis serait redescendu. Dans son journal, il note simplement: « visite en solitaire de la paroi nord de l' Eiger ».

5. La fièvre de la paroi nord: 1946 à 1964

Dans son édition du soir du 25 juillet 1938, la NZZ désigne la première ascension de la paroi nord de l' Eiger comme « un défi au Ciel », et redoute une course aux records. Les premiers à vouloir répéter l' exploit sont les guides suisses Edwin Krähenbühl et Hans Schlunegger. Le 16 août 1946, ils progressent jusqu' au « glacier de la rampe ». A 300 mètres sous le sommet, l' habituel et catastrophique changement de temps les contraint à rebrousser chemin. Leurs collègues français Louis Lachenal et Lionel Terray auront plus de chance l' année suivante, suivis trois semaines plus tard par les guides Hans et Karl Schlunegger, de Wengen, accompagnant le varappeur du Le Champignon est un but non seulement pour les alpinistes, mais également pour les base jumpers.

L' alpiniste genevois Michel Piola a marqué de son empreinte la période moderne en ouvrant cinq nouvelles voies à l' Eiger entre 1979 et 1992.

Photo: Daniel H. Anker, Thoune Photo: Thomas Ulrich BibliographieDaniel Anker, Eiger, théâtre du vertige4 e édition, Editions AS, Zurich, 2008 Joe Simpson, Eiger, la dernière course, Editions Glenat, mars 2003 Toni Hiebeler, Combats pour l' Eiger, Editions Arthaud, 1966 Film La sanction. Réalisation: Clint Eastwood, USA, 1975. Un tueur à gages est chargé de tuer deux agents ennemis, dont le second est membre d' une cordée qui va gravir l' Eiger. Afin d' éliminer l' alpiniste, il s' intègre à son expédition... Thriller impressionnant qui se déroule dans la fameuse paroi nord de l' Oberland bernois. Disponible en DVD Die Nordwand ( La paroi nord ). Réalisation: Philipp Stözl, 2008. Lancement prévu le 23 octobre 2008. Ce film retrace la tentative d' ascension de l' Eiger en 1936 par Toni Kurz, Andreas Hinterstoisser, Willy Angerer et Edi Rainer, qui se ter- mina tragiquement. Le livre Nordwand. Das Drama des Toni Kurz am Eiger ( Paroi nord. Le drame de Toni Kurz à l' Eiger ) paraîtra à cette occasion aux Editions AS, avec notamment des textes d' Oswald Oelz.

Exposition Parois et audace – le risque en montagne depuis la première ascension de l' Eiger il y a 150 ans, Musée alpin suisse, Berne, jusqu' au 28 septembre 2008, www.alpinesmuseum.ch Emotions à l' Eiger Jura Gottfried Jermann. En 1950, les Autrichiens Leo Forstenlechner et Erik Waschak accomplissent la première ascension de la paroi en un seul jour. Les expéditions réussies se succèdent alors, de même que les échecs. Quatre morts en 1953, deux en 1956. Aucun accident cependant n' échauffera les esprits comme le drame de l' Eiger de 1957. Une cordée de quatre hommes progresse lentement dans cet immense décor de roche et de glace, jusqu' à ce que les deux Italiens Claudio Corti et Stefano Longhi doivent s' arrêter, épuisés et blessés. Peu après, les deux jeunes Allemands Günther Nothdurft et Franz Mayer disparaissent sans trace. Des alpinistes de six nations mènent une opération de sauvetage depuis le sommet de l' Eiger balayé par la tempête. Seul Claudio Corti y sera treuillé vivant au bout d' un filin d' acier ( Les Alpes, 10/2007 ).

Les tragédies, triomphes et scandales se succèdent. En 1964, c' est à la Muni-choise Daisy Voog que revient d' être la première femme à vaincre la paroi nord de l' Eiger, en quatre jours. C' est aussi la 51 e ascension de la voie Heckmair. Le journal suisse de boulevard Blick titre: « La blonde secrétaire munichoise Daisy a brisé un tabou dans la paroi meurtrière. »

6. Direttissima: 1964 à 1971

Le prochain grand jeu à l' Eiger va consister à ouvrir la voie la plus proche de la verticale, comme celles déjà tracées dans les autres célèbres parois nord des Alpes. Quatre alpinistes allemands font une première tentative au glacial mois de janvier 1964. Deux ans plus tard et dans un style « expé », une cordée anglo-amé-ricaine et une allemande s' attaquent à la paroi, aux caprices météo et à la concurrence. Les cordées ne s' unissent vraiment qu' après la chute de John Harlin sous l' Araignée, le 22 mars 1966, suite à une rupture de corde. Cinq alpinistes dessinent ainsi la première nouvelle voie dans la paroi: la Direttissima Harlin, dite aussi voie directe hivernale. Une cordée japonaise ( cinq hommes et Michiko Imai ) ouvre la variante d' été en 1969 avec des moyens impressionnants: une tonne de matériel dont 250 amarrages, 200 pitons normaux, 2400 mètres de corde. La paroi mythique perd peu à peu son aura meurtrière, comme l' illustre l' ouverture de trois nouvelles voies par le pilier nord entre la voie Lauper et la paroi nord elle-même. Le 9 mars 1970, le Valaisan Sylvain Saudan descend à skis le flanc ouest: l' Eiger, cet ogre au cœur de pierre, semble apprivoisé. Le 12 septembre 1971, des sauveteurs évacuent deux alpinistes par hélicoptère directement depuis le deuxième névé.

7. Les temps modernes: 1976 à 1992

Durant la seconde moitié des années 1970, des grimpeurs ont ouvert à l' Eiger des voies ne conduisant plus à un sommet. Quatre alpinistes tchèques ont d' abord inauguré à l' été 1976, à droite de la Direttissima des Japonais, une nouvelle voie qui pour la première fois ne finit pas au sommet. A leur suite, de jeunes grimpeurs suisses, et en premier le Genevois Michel Piola, commencent à s' intéresser à la muraille verticale de la moitié ouest de la paroi. Piola et Gérard Hopfgartner ouvrent en août 1979 la voie Les Portes du Chaos dans un pilier nommé depuis le Pilier des Genevois. « Deux Genevois ouvrent une nouvelle voie dans la face nord », claironnent Les Alpes peu après. Cette première voie d' escalade sportive dans la paroi nord restera un classique. De 1976 à 1992, les grimpeurs ouvrent un réseau de dix-sept nouvelles voies dans la face nord, surtout dans la partie droite. La voie Heckmair n' est pas oubliée pour autant: Catherine Destivelle la parcourt par exemple en 17 heures en 1992. C' est la vraie première féminine de cette voie.

8. L' Eiger devient une star: 1999 à 2008

La fièvre de l' Eiger reprend dans le monde alpiniste à la fin du XX e siècle. Avec Eiger-Nordwand live en 1999, la télévision suisse diffuse l' aventure d' une ascension de la voie Heckmair. Trois ans plus tard, Michal Pitelka et Stephan Siegrist refont le parcours avec l' équipement des premiers vainqueurs de 1938. A l' hiver 2008, Ueli Steck jette la stupéfaction en pulvérisant le record de rapidité, escaladant la muraille vertigineuse en 2 h 47 – la moitié du record précédent.

Les grimpeurs qui ont gravi la montagne de divers côtés par des itinéraires nouveaux, souvent très difficiles ( La vida es silbar et The Young Spider, par exemple ), ont suscité moins d' intérêt. De même pour les base jumpers. Ceux-ci se précipitent du Champignon, une tour de la paroi nord, à trois mètres à peine d' éloignement de l' arête ouest. C' est justement devant cette tour, selon le guide et historien Andreas Fischer, que s' est jouée la scène suivante entre les premiers vainqueurs de l' Eiger Charles Barrington et Christian Almer ( Les Alpes: chronique du CAS et petites communications, 1946 ) :Almer: « En l' an 58, notre Seigneur a voulu sauter sur cette tribune. » – Fischer: « Et pourquoi ne l' a pas fait? » – Almer: « Parce que nous lui avons dit qu' il n' en redescendrait plus. » a Daniel Anker, Berne ( trad. )

Alpinisme et autres sports de montagne

Alpinismo e altri sport di montagna

Alpinismus, Berg- u.a. Sportarten

Feedback