Les échelles célestes des Ecrins | Club Alpin Suisse CAS
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Les échelles célestes des Ecrins Via ferrata dans les Hautes Alpes

La première via ferrata de France, qui vit le jour en 1988 à la périphérie du Parc national des Ecrins, rencontra un écho considérable. De plus en plus de montagnes furent équipées ensuite, et les environs de Briançon devinrent la destination la plus populaire chez les amateurs de via ferrata. Cependant, un accès à la portée de tous et la tendance à mettre du métal partout n' est pas du goût de tout le monde. Passage en revue de quelques délices plus alpins.

Il existe tout de même encore au milieu de ce méli-mélo de fils de fer des via ferrata qui peuvent se passer de chichis, à l' instar de la via ferrata alpine de l' Aiguillette du Lauzet, recommandée par Lionel Condemine. Un régal, nous pouvons le confirmer! Le chemin menant à l' Alpe du Lauzet longe des eaux tumultueuses jusqu' aux pâturages, où nous sommes accueillis par le bêlement des troupeaux de moutons. Après une heure de marche, nous arrivons aux premiers câbles. Le long accès s' avère sélectif et assure une faible fréquentation. Mais les animaux sauvages sont nombreux dans les environs, ce que vient très vite nous rappeler les chutes de pierres engendrées par le passage de bouquetins un peu plus haut. Ces acrobates des rochers empruntent sans crainte les vires de la via ferrata. Nous nous accoutumons volontiers de ces charmants « ouvreurs de voie », même si la situation nous oblige à rester en permanence sur nos gardes. Trois cabris apprécient notre compagnie. Ils sautent en bêlant, faisant des allers-retours jusqu' à ce que leur mère perde patience et pousse un bêlement afin de rassembler ses troupes. Du point de vue de la technique d' escalade, cette via ferrata « historique » – elle est la deuxième plus ancienne de France après celle de Freissinières – offre des passages variés. Nous traversons sous des parois rocheuses érodées, nous faufilons dans un tunnel naturel et venons à bout de ressauts exposés, en posant la plupart du temps les pieds et les mains à même le rocher. L' itinéraire et le paysage apportent à eux seuls suffisamment de sensations. A mi-chemin déjà, la Barre des Ecrins, le 4000 m le plus méridional, exhibe déjà ses flancs glacés devant nos yeux. Une fois au sommet, le regard vagabonde au-delà de la vallée de la Guisane jusqu' au Queyras et au Monviso.

Poursuivant notre quête de via ferrata « alpines », nous en dénichons une de l' autre côté du col du Lautaret, près de La Grave, l' une des rares « métropoles » de sports d' hiver françaises à avoir conservé son charme d' antan. La Meije se dresse presque verticalement au-dessus du village. Quelques kilomètres plus loin en aval, la vallée de la Romanche se rétrécit en une gorge impressionnante. Seul l' œil attentif distinguera les entrées des galeries creusées dans les rochers du flanc sud, témoins de l' exploitation de l' argent qui fut une importante manne financière pour la région entre 1807 et 1925. La via ferrata des mines du Grand Clot en suit les traces. L' attaque elle-même mène à travers l' un des anciens tunnels miniers. Tout au long du cheminement, des panneaux didactiques -informent sur l' histoire des lieux. Le premier acte consiste en un passage abrupt menant d' une entrée de galerie à l' autre. L' ascension d' une cheminée surplombante dans sa partie supérieure fait affluer l' adrénaline dans le sang. Le reste s' avère être plus digeste. En empruntant des vires et des marches, nous gagnons le plateau d' Emparis, l' un des hauts -plateaux les plus attrayants de toute la France qu' un tapis de fleurs multicolores vient égailler chaque printemps. Au sud, sur l' horizon, on aperçoit le glacier de la Girose et les sommets englacés du Râteau et de la Meije, qui se distinguent du plateau.

Une fois arrivés sur le plateau, le lac Lérié, « miroir des montagnes », vaut bien un détour. Et peut-être verrons-nous un vautour fauve fendre les airs? Après sa disparition il y a plus d' un siècle, ce rapace a bénéficié d' un programme de réintroduction dans la -région des Ecrins, où l'on compte aujourd'hui 150 individus. C' est sur le plateau d' Emparis qu' on en observe le plus. L' aigle royal semble également s' y plaire, puisqu' une campagne de comptage de grande envergure menée en mars a permis d' en dénombrer 148 spécimens.

Le cœur du Parc national des Ecrins bat dans la vallée du Vénéon, qui court depuis le nord jusqu' au pied de la Barre des Ecrins en formant de profondes gorges. Il s' agit là d' un relief à couper le souffle, qui compte également deux via ferrata peu courues. Nous les mettons au programme des prochains jours. D' abord, nos pérégrinations nous conduisent dans le village d' alpinistes chargé d' histoire de Saint-Christophe-en-Oisans. Dans le cimetière figurent les noms de pionniers de l' alpinisme comme Emil Zsigmondy, qui trouva la mort en 1885 dans la face sud de la Meije, ou le guide Pierre Gaspard, qui signa en 1877 la première ascension de la Meije. Un petit musée alpin aide à combler les lacunes. On notera aussi l' Hôtel La Cordée, un lieu de rencontre très charmant depuis 1907. Le hall d' entrée à lui seul donne déjà l' impression d' une épicerie des temps passés, où livres traitant d' alpinisme et de via ferrata côtoient cartes postales et spécialités locales. Dans l' arrière se trouve un restaurant à l' atmosphère de salon, où Marie-Claude, l' arrière de Pierre Gaspard, sert les hôtes en personne. 

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