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Snaefellsjokull, la montagne solitaire d'Islande

Remarque : Cet article est disponible dans une langue uniquement. Auparavant, les bulletins annuels n'étaient pas traduits.

PAR G. R. E. BR00KE

Avec 1 illustration ( 18 ) et un croquis topographique Bien que l' Islande soit montagneuse sur la plus grande partie de son territoire, cette grande île en bordure du Cercle arctique n' a toutefois que peu de sommets bien individualisés. Il en est cependant un qui, sous les lignes douces d' un cône volcanique, frappe les regards en raison de la situation qu' il occupe.

Si l'on se rend par un jour clair sur quelque point élevé de la capitale Reykjavik, on peut voir au nord-ouest, par delà 120 kilomètres d' océan, une cime neigeuse dressée dans un splendide isolement au-dessus des vagues ensoleillées. C' est le Snaefellsjokull, 1446 m, planté comme un phare à l' extrémité de la longue et étroite presqu'île de Snaefellness, une des pointes extrême ouest du pays. Dans un rayon de 150 km, il n' y a pas d' autre montagne de cette altitude. Son isolement, sa situation exposée dominant les vagues courroucées du Détroit de Danemark, lui confèrent un caractère unique parmi les montagnes islandaises.

I si 11, Snaefellsjokull ( 3,Ao^ .'S- e e 1 a n d A la fin d' un séjour de quatre semaines que je fis en Islande en juillet 1961, alors que je revenais à Reykjavik après une visite dans l' intérieur, j' admirai une fois de plus cette lointaine crête de neige flottant au-dessus de la mer comme un nuage d' argent. Je ne pus résister à l' appel de l' en et entrepris le long voyage qui devait trouver son but sur ce sommet solitaire.

Les routes de l' Islande sont rudes, et le voyage le long de la côte rocheuse ouest, fortement échancrée, fut long et fatigant. Au déclin d' une journée ensoleillée, j' arrivai au village de Budhir, où un petit hôtel couronne un mamelon gazonné, presque entièrement entouré par des criques de la mer furieuse.

La matinée suivante s' annonçait brillante. A 20 km, le Snaefellsjokull faisait une tache lumineuse dans le bleu du ciel, sur lequel son cône légèrement convexe se détachait nettement. Quelques légères écharpes de brumes se dissipèrent bientôt à la chaleur du soleil. Sa situation à proximité immédiate de la mer doit faire du Snaefellsjokull la cime la plus nuageuse de l' Islande, mais ce jour-là, le premier que je passais dans son voisinage, il faisait le plus beau temps du monde.

L' idée de gravir les montagnes ne semble pas être très familière à la majorité des Islandais; le jeune paysan qui voulut bien me faire franchir dans sa voiture les douze kilomètres de la route côtière très rocailleuse qui tourne la base de la montagne, paraissait fort intrigué. Après avoir pris congé avec reconnaissance de mon chauffeur, qui me regarda partir avec un air amusé et perplexe, je remontai la pente peu inclinée d' un ancien champ de lave pour atteindre, à l' altitude de 500 m, un vaste plateau large de 3 km, recouvert de débris volcaniques. Immédiatement au-delà se dressait la forme régulière du Snaefellsjokull. Le plateau traversé, je gravis une pente d' éboulis, puis suivis une petite arête rocheuse qui s' enfonçait dans le névé à 1100 m environ. Arrivé au bout, je m' engageai sur la neige, dont l' angle de pente ne dépasse pas 15 degrés. Ces petites calottes glaciaires des régions arctiques n' ont qu' un très faible mouvement; je ne rencontrai pas de crevasses durant mon ascension.

La montagne culmine en une arête assez bien caractérisée, orientée WSW—ENE, et couronnée par deux sommets séparés par une selle neigeuse. Le sommet inférieur, à l' ouest, est une gracieuse coupole de neige, tandis que le sommet principal, à l' est, est constitué par un bastion rocheux, un « nunatak » haut d' environ 25 m, appuyé sur son flanc oriental par une rampe de neige et de glace très redressée.

L' ascension du « nunatak » exigea quelques pas peu commodes sur la bosse de glace soutenant les derniers rochers. Jusque là, l' ascension est des plus faciles et ne dure que quatre heures. Après quoi vint l' agréable promenade le long de la selle neigeuse doucement incurvée qui mène au second sommet, inférieur d' une vingtaine de mètres, mais d' où la vue est encore plus remarquable. Au nord, à l' ouest et au sud, le regard plonge sur l' immensité de I' Océan dont les lames blanches d' écume viennent battre les récifs de lave noirâtre qui bordent la côte désolée.

Le Snaefellsjokull est un volcan éteint du type du Foudji; sa forme est celle d' un cône aplati aux flancs légèrement convexes. Sur les versants sud et ouest, la limite des neiges se trouve à quelque 900 m. Elle s' abaisse de 200 m au nord et à l' est. La calotte glaciaire sommitale recouvre une surface d' environ 25 km2. La montagne, particulièrement au sud et au nord-ouest, est entourée de vastes champs de lave, ceinturés par une côte basse et déchiquetée, digne cadre de ce promontoire exposé aux plus rudes tempêtes.

Au dire des gens du pays, le Snaefellsjokull est rarement visité. D' autres montagnes attirent depuis longtemps les foules, parce que d' un accès plus facile ou à cause de leur importance géographique. Le Snaefellsjokull reste fièrement à l' écart, sentinelle neigeuse gardant ce long bras de terre aventuré dans les brumeuses solitudes des mers nordiques.

( Traduit de Vanglais par L. S. )

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