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Sous le charme des 4000 Course de haute montagne au Balfrin

Au Balfrin, on est tout proche des célèbres sommets du massif des Mischabels, mais loin des foules.

Il y aurait certes des sommets plus connus en Valais, notamment de nombreux 4000 aux noms attrayants. Cependant, le Balfrin et ses 3796 mètres en valent le détour, ne serait-ce que pour la magnifique montée à la Bordierhütte. Elle commence à Gasenried, un joli hameau au-dessus de St. Niklaus, dans le Mattertal. Le chemin s’élève dans une forêt de mélèzes dégageant des senteurs d’épices, avant de traverser le Riedbach au P. 2030, où se dévoile pour la première fois la vue sur le Riedgletscher. La jolie vallée, avec ses rhododendrons en fleurs, son torrent qui gronde et son charmant petit lac, appelle à s’y attarder. Cependant, notre but se trouve 850 mètres plus haut.

Des noms exotiques

Le chemin continue derrière l’imposante moraine latérale, témoin du maximum glaciaire des années 1850, et passe à l’Alpja. Je me pose toujours des questions sur le nom «Balfrin». A priori, je placerais ce sommet plutôt dans les Grisons qu’en Valais. Que nous apprend l’étymologie à cet égard? Selon le linguiste Iwar Werlen, la signification exacte ne peut pas être établie avec certitude. Les différentes interprétations selon lesquelles, par exemple, ce nom provient du mot «Balenfirn» (Balen faisant référence à Saas-Balen) ou même des racines arabes «bal» (grand) et «aïn» (source) ne sont pas convaincantes pour des raisons morphologiques et phonétiques. Dans la traversée du Riedgletscher, dégarni de neige, j’ai soudain d’autres choses en tête: il faut se concentrer pour poser ses pieds sur ce terrain glissant.

Après quatre heures de montée, on arrive à la Bordierhütte. Voilà de nouveau un nom à la consonance bien exotique, pas très haut-valaisan. Cependant, l’explication est simple cette fois: la cabane a été construite en 1927 par la section genevoise du CAS grâce à un généreux don de Pierre Bordier, un banquier genevois passionné de montagne. C’est ainsi l’une des rares cabanes du CAS nommée d’après un nom de famille.

Agitation matinale

Au milieu de la nuit, la petite cabane s’anime et la plupart des hôtes tout ensommeillés fouillent dans leur sac, pendant des heures, dirait-on. Leur objectif est plus élevé que le nôtre: au programme pour eux, le Nadelhorn par la Selle, le Dirruhorn et l’Hobärghorn. Ils pourront ainsi empocher trois 4000 d’un coup. Pour notre part, nous nous retournons encore une fois sur notre matelas, et ce n’est que quelques heures plus tard que nous nous retrouvons sur le Riedgletscher. A 3300 mètres, nous cheminons en zigzag à travers les séracs et gagnons promptement le Riedpass, où commence l’escalade facile du Balfrin.

La vue depuis le sommet est grandiose. Des milliers de nouveaux buts nous font signe. Tout ce décor est cependant dominé par le Nadelhorn et ses voisins, et nous comprenons pourquoi cette montagne attire tant de monde. Nous aussi pouvons empocher un sommet supplémentaire en descendant l’arête nord-ouest et (attention, l’orientation change) en remontant au Gross Bigerhorn par l’arête sud. Avec ses 3626 mètres, il est encore un peu plus éloigné de la barre des 4000…

De retour sur la terrasse de la cabane, nous prenons un peu de temps pour rester plongés dans nos pensées: nous pensons à la course simple et magnifique que nous avons faite, peut-être aussi au 4000 que nous avons manqué. D’ailleurs, mon compagnon de cordée gravira le Nadelhorn quelques jours plus tard.

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