Sur les traces des Walser (Binntal-Bosco/Gurin) | Club Alpin Suisse CAS
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Sur les traces des Walser (Binntal-Bosco/Gurin)

Excursion de trois jours du Binntal VS à Bosco/Gurin TI Cette randonnée au très riche contenu historique permet de prendre contact avec des civilisations jadis florissantes et suscitant actuellement un regain d' intérêt; en outre, au travers de paysages aménagés et parfois surexploités, elle fait revivre les anciennes migrations tribales et leur cortège de déracinements. Elle conduit également le randonneur à franchir des frontières politiques et à prendre conscience de l' aspect assez relatif de leur signification.

« On cherche une famille !», tel était le titre assez inhabituel d' un avis paru dans plusieurs journaux au cours de l' hiver 1995/96. Quelques mois plus tard, l' Agence télégraphique suisse annonçait le succès de cette annonce: à Binn, commune du Haut-Valais menacée d' abandon en raison de l' exode rural ( car, comme l' écrivait le secrétaire communal Karl Imhof: « Un village sans enfants est mort » ), on pouvait provisoirement conserver Le lac Vannino: un bleu d' une intensité unique Les maisons de Binn ( ou Schmidigehischere ), village principal du Binntal. Au premier plan, la Binna. La commune de Binn compte deux villages ( Binn et Fäld ) et quelques hameaux.

Alpes. Plusieurs caractéristiques de leur identité se sont maintenues jusqu' au XXe siècle, en particulier leur parler, très proche du dialecte allemand du Haut-Valais, ou leur profonde foi catholique, dans laquelle ils ont puisé la force de résister aux dures exigences de la vie en montagne. On reconnaît également les villages bâtis par les Walser à l' archi typique de leurs habitations, toutefois adaptée aux conditions locales.

La nature intacte du Binntal L' entrée dans la patrie des Walser s' effectue par le Binntal, dont les paysages ont gardé un caractère naturel intact. En effet, c' est pour leur respect de l' environnement que les habitants de cette contrée ont reçu le Prix de la protection du paysage en 1985 et celui de la Ligue suisse du patrimoine national en 1991. C' est un véritable joyau qui attend votre découverte: vallées latérales plus ou moins spacieuses; charme secret du Rappetal, parallèle à la vallée principale; cimes imposantes aux noms peu connus: Helsenhorn, Ofenhorn ou Hohsand- horn; gisements de minéraux de Lengenbach, de renommée mondiale, et d' autres perles encore.

Selon la devise « qualité plutôt que quantité », l' offre touristique est modeste mais présentée par un syndicat d' initiative très compétent, qui fournit de nombreuses suggestions utiles: promenades, découverte guidée des richesses minéralogiques, visite du musée folklorique régional, conférences du secrétaire communal sur l' histoire de la vallée et ses légendes, à n' omettre que si l'on sait déjà ce qu' est un « Bozu » ou un « Goggwärgji »!

Notre excursion nous conduit tout d' abord du village de Binn ( 1400 m ) à Fäld, hameau aux traditionnelles constructions de bois, bien entretenues. Puis, par une route d' alpage, on atteint Freichi et Steihitta, d' où le chemin, bifurquant vers la droite à travers le magnifique paysage de l' Oxefeld, permet d' atteindre la cabane du Binntal. Il faut environ quatre heures de marche de Binn jusqu' à cette cabane du CAS, ce qui nous donne suffisamment de temps pour apprécier la beauté de la région. Par temps humide ou par brouillard, la montée à travers cette zone de marécages est une expérience que l'on n' oublie pas de sitôt. En effet, lorsque j' ai parcouru pour la première fois cette merveilleuse nature, j' ai clairement compris l' enthousiasme de mon père, natif de Binn, à l' évocation des étés passés dans sa jeunesse sur ces alpages, et je sais depuis lors que ce genre de récits n' est jamais exagéré.

Il ne pourrait guère en être autrement, lorsque l'on sait que la cabane du Binntal se distingue elle aussi par une singularité. Son excellente exploitation n' est pas assurée par un gardien ou une gardienne attitrée, mais par des membres de la section CAS de Delémont qui tour à tour montent là-haut, pour une semaine en général, et pourvoient à une ambiance chaleureuse.

Comment le Pomatt est devenu le val Formazza Le lendemain, plusieurs variantes s' offrent à nous, empruntant toutes, de prime abord, PAIbrunpass ( 2409 m ), passage obligé de la migra- tion des Walser. Au-delà de celui-ci se dévoile peu à peu, puis dans toute sa grandeur et sa beauté, un paysage aux contrastes étonnants: l' alpe de Dèvero, devenue parc national italien en 1990. Elle jouxte celle de Veglia, plus au sud, une autre réserve naturelle, fondée en 1978. Cet ensemble forme le pendant italien du Binntal, placé sous une large protection dès 1964. On trouvera la description détaillée de ces deux alpages dans le guide CAS des Alpes valaisannes de Maurice Brandt ( vol. 6 ).

Les randonneurs désirant descendre vers l' alpe de Dèvero ( trois heures de marche au maximum à partir de la cabane du Binntal ) disposent à Crampiolo ( 1767 m ), au-dessus de Dèvero, d' une excellente possibilité d' héber.

Traversée par la Scatta Minoia Notre itinéraire, presque invisible par endroits et demandant par brouillard quelque sens de l' orientation, nous conduit, sans notable perte d' altitude et par une montée dans une raide combe, à la Scatta Minoia ( 2599 m ), un col offrant l' abri du modeste refuge Ettore Conti, propriété de la section Domodossola du CAI. Puis le chemin se met à descendre et l'on aperçoit bientôt le lac Vannino, aux teintes toujours étonnantes. Plus rapidement que prévu, nous nous installons sur son rivage, devant le Rifugio Margaroli ( 2194 m ) et, un verre à la main, nous levons les yeux en direction de la Scatta Minoia en plaignant les randonneurs qui, parcourant ce chemin des Walser en sens opposé, doivent affronter cette redoutable grimpée! Mais nous ne perdons rien pour attendre, car nous n' avons pas encore étudié dans le détail notre marche suivante, en direction de Bosco/Gurin! La cabane de Margaroli est un excellent gîte d' étape, mais il est possible de se rendre le même jour encore jusque dans la vallée principale.

Dans le Pomatt ( ou val Formazza ) Les pylônes d' une ligne à haute tension nous indiquent la direction à suivre pour atteindre Sagersboden ( 1772 m ). Lorsque l' écrivain valaisan Maurice Chappaz, en fustigeant les « maquereaux des cimes blanches », remarquait amèrement à propos du progrès: « On va vers une sorte de fin du monde industriellement utile », il pensait en premier lieu aux violences faites au paysage par les promoteurs de l' énergie hydroélectrique. Ici dans le Pomatt, ses idées acquièrent une 01 a Suggestions de courses Bien avant les Walser, les marmottes avaient déjà colonisé le Pomatt!

Riale/Kehrbäch, dans le haut val Formazza ( Pomatt ). La simplicité extérieure de la plupart des églises et chapelles des Walser contraste avec leur intérieur richement décoré, de style généralement baroque ( tardif ) et rococo signification nouvelle, car la production de courant électrique n' a pas seulement modifié l' environnement mais aussi nécessité la construction d' une route, introduisant une nouvelle mentalité et contribuant finalement à la destruction de la civilisation des Walser. Premier établissement de ce peuple hors des frontières suisses probablement, le Pomatt est ainsi devenu le val Formazza, vallée à vrai dire peu menacée de dépopulation, au contraire de celle de Binn, mais aux prises avec la perte de ses traditions et de son identité culturelle. Cette transformation ne constitue pas un cas particulier, mais se situe dans la ligne générale de l' évolution du domaine alpin; toutefois, le nivellement culturel est frappant dans cet exemple, car il s' associe à la rupture d' une barrière linguistique. Cependant, maintes personnes s' y opposent, dont Anna Maria Bacher, écrivain et institutrice, l' âme des Walser de cette vallée. Avec plusieurs de ses conci-toyennes et concitoyens, elle se bat pour que l' existence historique de son peuple ne soit pas définitivement oubliée.

A Sagersboden, nous atteignons la station supérieure de l' ancien télésiège, encore reporté sur la carte. Ses pylônes rouillent depuis un certain temps déjà, mais on projette sa remise en service et son exploitation toute l' année. Nous ne nous y arrêtons guère et nous entamons la descente à pied vers Ponte/Zumstäg, tombant parfois sur des restes de filets de sécurité qui nous rappellent qu' on skiait encore ici il y a quelques années.

Indépendantisme du val d' Ossola Depuis notre départ, il nous a fallu six heures de marche pour arriver à Ponte/Zumstäg ( 1286 m ). Quelques vieilles maisons de bois rappellent le temps des Walser; quant aux autres habitations, elles sont typiques d' une vallée italienne de montagne. En revanche, on n' y trouve plus guère de signes du courageux coup de force entrepris en 1944 par la population de ce triangle de terre italienne séparant le Valais du Tessin, que l'on nomme val d' Ossola. Cette année-là, durant l' occupation allemande consécutive à la désintégration du régime fasciste de Mussolini, les « Ossolans » tentèrent en effet de se séparer de l' Italie en proclamant la « République libre d' Ossola » et en essayant d' éta des relations diplomatiques avec la Suisse. Mais cet espoir d' indépen avorta au bout de quinze jours, les troupes allemandes reconquérant la région en rébellion, ce qui contraignit 35000 de ses habitants à fuir au Tessin et en Valais à travers la frontière enneigée, pour être internés en Suisse. Aujourd'hui encore, il semble que certains Ossolans ressentent quelque chose de plus que la simple distance géographique qui les sépare de Rome. En 1993, par exemple, un éboulement de rochers a obstrué la route du val Vigezzo, au-dessus de Domodossola, et interrompu les communications entre leur vallée et le Tessin. Rien ne fut entrepris pour les rétablir, le gouvernement se refusant à rouvrir la route. Cette attitude des autorités, catastrophique pour le tourisme local et pour les nombreux frontaliers venant gagner quotidiennement leur pain au Tessin, a fourni aux communes du val Vigezzo l' occasion d' une démonstration solennelle en faveur d' un rattachement à la Suisse.

Walser tessinois ou Tessinois walser?

Passant par la Guriner Furka et la Grossalp, notre dernière étape nous conduit à nouveau sur les traces des Walser qui ont fondé, il y a plus de 750 ans, le village de Bosco/Gurin, à une époque où la Suisse n' existait pas encore. De Ponte/Zumstäg, nous descendons la vallée jusqu' à Fondovalle/ Stafelwald et, après une brève visite du village, nous prenons notre cou- Sur un petit replat du versant sud de la Guriner Furka se dressent encore les murs de pierres sèches de Bodme, un alpage abandonné depuis longtemps rage à deux mains pour attaquer sans trop nous hâter la suite de l' étape. Il s' agit de vaincre une forte dénivellation de 1200 mètres, tout d' abord à travers une agréable forêt, puis par des pentes dénudées et des alpages, enfin ( en prenant à droite à l' endroit où le chemir principal se dirige vers Hendar Furggu ) par des traces de sente exigeant le sens de l' itinéraire jusqu' à la Guriner Furka ( 2323 m ). Brusquement, le panorama mouvementé des Alpes tessinoises se déroule devant nous, ce qui ne nous empêche pas de jeter un regard en arrière sur le petit lac de montagne où se reflète pour une dernière fois la splendeur des sommets qui nous ont dominés pendant ces trois jours de randonnée: le Helsenhorn, le Pizzo Cervandone et l' Ofenhorn, formant la limite entre le Binntal et le val Formazza.

La descente se déroule sans difficulté particulière. Après deux ou trois faux pas, nous arrivons à la Grossalp, qui dément l' assertion commune selon laquelle les Walser ont construit tous leurs bâtiments en bois. En effet, les granges et les étables de cet alpage sont constitués de gneiss et de granit extraits sur place, et la seule bâtisse de bois s' élevant devant nos yeux surpris est la Capanna Grossalp.

Après une halte nécessaire et bien méritée, nous descendons en une heure à peine jusqu' à Bosco/Gurin, la seule localité walser du Tessin, bien que des éléments architecturaux typiques des Walser se rencontrent ailleurs dans le canton, notamment dans le val Bedretto, aux Monti di Rima, près de Broglio, à Cimalmotto et dans le val Malvaglia. Notre promenade dans le village nous reporte dans le Binntal où nous étions trois jours plus tôt: mêmes maisons, même type de localité, et presque la même langue.

En automne, le paysage entre le lac Vannino et Sagersboden, parsemé de blocs de granit, se montre sous son plus beau visage. Au fond, le groupe du Basòdino Mais cette dernière similitude tend à s' estomper car, comme en d' autres endroits, ce dialecte alémanique est en voie de disparition depuis un certain temps déjà, cédant la place à un patois d' origine latine. Les frontières entre deux cultures montagnardes riches en traditions sont devenues perméables et Gurin se transforme peu à peu pour devenir Bosco.

Avant de nous embarquer dans le car postal qui nous conduira lentement, par une route tortueuse, à Suggestions de courses Cevio dans le val Maggia, nous prenons le temps de visiter le plus ancien S; des musées des Walser et écoutons c avec attention les commentaires cap-^ tivants de sa conservatrice, Erika J. Leoni. Conclusion toute trouvée ànotre séjour de trois jours dans ledomaine linguistique des Walser, ^m dont le savant zurichois J. Ziegler Informations pratiques Aller Prendre le train jusqu' à Fiesch, station du chemin de fer Furka-Oberalp ( horaire: p. 610 ), puis se rendre à Binn avec le car postal ( 61O.15 ). Sur ce tronçon se situe Ernen, joli village qui vaut le détour. Office du tourisme de Binn: 027/971 45 47. Hôte! Ofenhorn ( construit en 1883 et rénové avec goût ): 027/971 45 45; hôtel Albrun: 027/97145 82.

Première étape Binn ( 1400 mcabane du Binntal ( 2269 m ). Dénivellation de 900 m et 4 heures de marche par des chemins bien tracés. Cabane du Binntal ( gardiennée en été seulement ): 027/971 47 97.

Deuxième étape Cabane du Binntal ( 2269 m ) -Scatta Minoia ( 2599 mPonte/Zum-stäg ( 1286 m ). Montée de 500 m et descente de 1500 m en 6 à 7 heures de marche, par des sentiers parfois peu visibles, ce qui demande un certain sens de l' orientation, par brouillard surtout. Des taches de neige peuvent subsister à la Scatta Minoia jusque vers la fin de l' été. Possibilités d' hébergement: Rifugio Ettore Conti ( 2599 m, abri toujours ouvert à la Scatta Minoia ); Rifugio Eugenio Margaroli ( 2194 m, au bord du lac Vannino, gardienne en été, 0324/63 155 ou 63054 ); Locanda Punta Fizzi, à Crampiolo ( 1767 m, auberge de montagne le long de la variante passant par le lac de Dèvero, 0324/62 325 ). Office du tourisme de Ponte/Zumstäg ( val Formazza/Pomatt, indicatif depuis la Suisse 00 39 ): 0324/63 059. Plusieurs hôtels, dont Albergo Edelweiss ( 0324/63 033 ); Albergo Rothen-tal ( 0324/63 060 ); Albergo Brunni Montmartre ( 0324/63 114 ). Attention: en plein été, les hôtels sont souvent complets dans le val Formazza, surtout à la mi-août ( « Ferragosto » ). I! faut impérativement réserver à l' avance.

Troisième étape Ponte/Zumstäg ( 1286 mGuriner Furka ( 2323 mBosco/Gurin ( 1503 m ). Montée de 1200 m et descente de 1000 m en 4 à 5 heures de marche sur des chemins de montagne. Attention à ne pas manquer l' embranchement en direction de la Guriner Furka. Possibilités d' héberge: Capanna Grossalp ( 1901 m, ouverte et gardiennée en été, 091/ 754 16 80, év. 091/826 17 61 ).

Bosco/Gurin Office du tourisme ( Ente turistico ) Vallemaggia: 091/753 18 85. Musée waiser ( Walserhaus ): 091/754 18 19 ( év. 091/754 14 81 ). Hôtel Edelweiss ( 091/754 12 45 ); Albergo Basòdino, à Cevio ( 091/754 11 01 ).

Retour Un car postal circule entre Bosco/ Gurin et Cevio ( 63O.65 ). De là, un bus permet d' atteindre Locamo ( 63O.60 ).

Bibliographie Cartes et guides CN 1270 Binntal, 1271 Basòdino, 1291 Bosco/Gurin ( et 1290 Helsenhorn, pour le détour par Crampiolo ). M. Brandt, guide du CAS Alpes valaisannes 6; G. Brenna, guide du CAS Alpi Ticinesi 1; U. Bauer et J. Frischknecht, Grenzschlängeln, Zurich 1995; H. Schmid, Ossola Täler, Munich 1995.

Autres ouvrages II existe une vaste documentation sur les Walser, notamment: P. Zinsli, Walser Volkstum, Coire 1991; K. Wanner, Unterwegs auf Walserpfaden, Coire 1993; E. Rizzi, Geschichte der Walser, Coire 1993; G. Trego, Der grosse Walserweg, Oldenbourg 1993; P. Donatsch, Geschichte vom Leben zwischen den Bergen, Coire 1994.

On peut aussi recommander: J. Schwanz, Th. Schüpbach et A. Gorsatt, Das Binntal und seine Mineralien, Binn 1994.

Randonnées guidées - Per pedes Bergferien, case postale, 8037 Zurich ( 01/461 70 00 Wanderlust, case postale, 7122 Valendas ( 081/921 45 97 ).

Marco Volken, Zurich ( trad. ) M Maison Walser typique à Bosco/Gurin: bois de mélèze sombre, rez en dur, petites fenêtres et escalier sur le côté. N' est pas dans la tradition le toit, couvert ici de « piode » ( dalles de pierre ) au lieu des bardeaux habituels.

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