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Tirich Mir 1982

Remarque : Cet article est disponible dans une langue uniquement. Auparavant, les bulletins annuels n'étaient pas traduits.

Or, soudain, au début de février, une autorisation en bonne et due forme leur parvient pour la période de juin-juillet. Il restait donc à peine quatre mois pour réunir une équipe et tout préparer... Le pari est tenu, et huit alpinistes ( dont trois Romands ) s' envolent pour Rawalpindi dans les premiers jours de juin. Nous voyageons en deux groupes, à trois jours d' intervalle. Je fais partie de la deuxième équipe qui quitte la Suisse le 6 juin. Dans l' avion les souvenirs défilent: il y a deux ans, c' était le Népal; l' an passé, le Haut-Atlas; et cette fois, le Pakistan. Je regarde mes compagnons de voyage que je ne connais que depuis quelques semaines. Pour nous tous, c' est l' in, car il est difficile de trouver en Europe des renseignements sur le Pakistan, pays neuf et nettement moins touristique que ses proches voisins. Aussi évitons-nous d' aborder ce pays avec trop d' idées préconçues.

Islamabad, Rawalpindi: deux villes distantes de quelques kilomètres seulement, avec l' aéroport entre deux. Il y a peu à dire d' Isla, la toute moderne capitale du pays, faite d' immeubles en béton assez dispersés et sans âme. Nous ne nous y rendons que pour les indispensables formalités, d' ailleurs relativement vite expédiées. En revanche, Rawalpindi ( ou « Pindi » ) est une ville asiatique typique, grouillante, bruyante et pleine de vie.

Pakistan, situation géographique URSS Chine C' est là que nous logeons, dans un hôtel au charme vieillot datant de la colonisation anglaise et servant de point de ralliement pour les expéditions. C' est là également que nous complétons nos provisions et notre stock de combustible et de matériel divers. Mais nous voulons surtout nous imprégner de la vie pakistanaise en parcourant à pied les ruelles des bazars où l'on vend de tout, où croisent-péni-blement les carrioles tirées par les chevaux, les minibus aux décorations artistiques et les taxis ( des antiques Morris jaunes et noires ). Contrairement à l' Inde et au Népal, il y a peu de couleurs ici: tout est dans les tons gris-brun, et les rares femmes rencontrées sont complètement voilées et souvent vêtues de noir. Les hommes portent d' amples tenues de toile légère aux tons fades, bien adaptées à la température qui dépasse 40 ° durant la journée.

Moins d' une semaine après le départ de Suisse, nous sommes prêts à partir. Nous avons avec nous un officier de liaison, le major Javed, qui nous fait d' emblée une excellente impression. Nous n' aurons d' ailleurs qu' à nous féliciter d' avoir pour compagnon cet homme charmant et énergique qui connaît bien son pays et qui nous rendra de grands services. Nous partons vers le nord, vers les montagnes, loin des villes et des plaines surchauffées.

Deux minibus nous conduisent par de bonnes routes en une journée à Dir, au pied des premières montagnes importantes. La route nous offre le spectacle constamment renouvelé de véhicules de toute nature, toujours artistiquement coloriés, de scènes de la vie campagnarde et de villages aux petites maisons typiques. De brèves haltes au hasard des circonstances nous permettent d' apprécier le charme des échoppes à thé, communes à toutes les routes de cette partie du monde, où l' eau bout en permanence tandis que mijote le ragoût et que rôtissent les chappatis.

L' étape de Dir marque le terminus de la route goudronnée et impose un changement de véhicules. Le moyen de transport universel est ici la jeep, qu' on peut vraiment qualifier de transport en commun: un véhicule ne circule jamais avec moins d' une douzaine de personnes à bord! Nous chargeons notre matériel ( une tonne ), puis grimpons nous-mêmes ( 15 personnes avec les chauffeurs et leurs aides ) sur trois jeeps! Inutile de préciser que nous voyageons juchés sur une pile de cartons, ce qui nous assure une vue panoramique imprenable. Avec l' altitude, la chaleur est nettement moins forte, et les pentes sont très verdoyantes. Les montagnes font obstacles aux nuages qui assurent des précipitations assez importantes pour permettre de belles cultures et la présence de forêts de cèdres jusqu' à plus de 3000 mètres.

Chitral et le sommet du Tirich Mir La route fait de nombreux lacets, traverse plusieurs rivières dont l' une est encore recouverte par la neige descendue durant l' hiver. Les véhicules passent sur le pont de neige et évitent acrobatiquement un camion dont une roue a crevé le névé! Nous faisons un arrêt pour arroser à grande eau les radiateurs surchauffés et permettre aux chauffeurs d' effec de menues réparations. Les habitants de Dir sont en train de découper de gros blocs de neige sale qu' ils chargent sur des camionnettes et vont vendre en ville. Devant nous passent à pied des groupes de réfugiés, emportant leurs maigres biens. C' est l' occasion de faire un brin ce causette avec des Afghans bardés de cartouchières, de grenades et de fusils qui se préparent à retourner combattre dans leur pays. A environ 3000 mètres, nous atteignons le col qui donne accès à la vallée de la Kunar. La crête où nous nous trouvons est un barrage pour les nuages de la mousson, et le paysage que nous découvrons est un univers de vallées arides, un paysage minéral où les pentes de couleur gris-brun contrastent avec les fonds de vallées cultivés et aux tons verts et or. De nombreux lacets nous conduisent au bord de la rivière qui, dans un grondement impressionnant, roule ses eaux boueuses vers l' Afghanistan dont la frontière n' est qu' à quelques kilomètres. Et les jeeps repartent le long de la rivière vers Drosh et Chitral, sous un soleil implacable et en soulevant des nuages de poussière.

Muzhgol, le terminus de la route Vue du camp de base Un élargissement de la vallée a permis l' éta de Chitral, petite ville qui constitue une oasis de verdure dans ces paysages monotones. Piste d' aviation, centrale électrique et pont en béton contrastent fortement avec le bazar moyenâgeux et le palais en ruine, protégé par une boucle de la rivière, qui ont de tout temps fait de cette bourgade un centre administratif. De notre hôtel nous découvrons, très loin encore et enveloppées de nuées, les cimes neigeuses vers lesquelles nous sommes pressés d' aller. Aussi nous hâ-tons-nous de liquider les problèmes administratifs et de faire les inévitables visites aux autorités.

Nous reprenons place sur les jeeps le surlendemain de notre arrivée pour une étape de 70 km, toujours le long de la rivière, sur une route en assez bon état qui traverse alternativement des gorges sauvages, désertiques et brûlées par le soleil, et des zones de cultures ombragées par les arbres fruitiers et les peupliers là où l' irrigation est possible. Nous quittons nos véhicules à Muzhgol ( au pied du col de Zani ) et commençons les traditionnelles discussions avec les chefs des porteurs. Que dire de ces négociations, sinon que l' opiniâ treté des porteurs pour les questions d' argent n' a d' égale que leur endurance et leur énergie pour accomplir leur tâche, une fois le contrat conclu. Jugez plutôt: la première étape nous conduit de Muzhgol ( à environ 2000 m ), jusqu' à Shagrom ( 2800 m ) en passant le col de Zani à plus de 3800 mètres. Il faut ajouter que certains porteurs, ne faisant que la première étape, s' en retournent par le même chemin le soir même! Pour nous, la montée au col est un enchantement: la pente qui paraissait dénudée, vue du bas, est en fait constituée de plusieurs vallons et étages, invisibles de loin. Les cultures ont pu s' établir là où coulent des ruisseaux. Nous traversons encore plusieurs villages jusqu' à plus de 2500 mètres d' altitude. Au-dessus des dernières habitations le sentier serpente dans les pierriers parmi les Eremurus jaunes en pleine floraison et quelques autres belles espèces dont nous ignorons le nom. La vallée de Shagrom, de l' autre côté du col, est arrosée par une rivière issue directement des glaciers du Tirich Mir. Elle est en- core plus encaissée que les précédentes, mais la proximité des très hautes montagnes permet un bon approvisionnement en eau et la culture de champs au-delà de 3000 mètres. Après un jour d' arrêt ( vivent les négociations !) nous pouvons repartir. Nous remontons trois jours durant la vallée, trois étapes dont nous nous souviendrons longtemps. Souvenirs de l' étape de Sherniak, où pousse au-dessus de 3500 mètres la seule forêt de toute la région. Le soir, autour d' un grand feu, les porteurs chantent, dansent, frappent dans leurs mains et nous invitent à nous joindre à leur groupe pour ce moment privilégié. Demain nous quitterons la verdure pour un monde fait de pierres et de glace.

Les deux dernières étapes de la marche d' approche se font sur le glacier même. La longue colonne des porteurs serpente entre de gigantesques blocs de rocher pris dans la glace, monte et descend en suivant une vague piste tracée par les expéditions précédentes. La dernière nuit se passe à plus de 4000 mètres, sur la moraine latérale, au milieu de gros blocs ronds charriés par le glacier. Le soir les porteurs musulmans s' inclinent pour leur prière, face aux sept mille illuminés par les derniers rayons du soleil couchant, spectacle grandiose et émouvant pour nous autres Occidentaux.

Le lendemain, alors que le soleil effleure à peine les plus hautes cimes, nous repartons pour la dernière étape parmi les montagnes de glace aux formes étranges. L' altitude se fait sentir également chez les porteurs qui montrent au médecin leur tête d' un geste évident avec l' espoir de recevoir des médicaments. Nous n' en menons pas très large non plus, car la montée a été très rapide et nous sommes maintenant au-dessus de 4500 mètres. C' est avec un soupir de soulagement que nous découvrons une série de terrasses aménagées par de précédentes expéditions parmi les blocs morainiques et près d' un coude du glacier. Les porteurs sont pressés de retourner vers des climats plus hospitaliers: le temps de boire une tasse de thé et de recevoir leur salaire, et nous les voyons repartir vers la vallée en une longue colonne joyeuse. Nous voilà donc seuls avec un cuisinier et son aide, plus trois porteurs pour nous seconder lors des portages vers les premiers camps. Nous organisons la cuisine, protégée par des murets de pierre et un grand plastique, dressons les tentes et déballons tout notre matériel; les gestes sont lents, toute activité demande de En direction du camp II, situé au pied de I' Irg Zom fréquents arrêts durant lesquels nous profitons de lorgner vers les sommets qui nous entourent. Nous sommes déjà pressés de monter, de voir ce qui se cache derrière les cailloux qui nous dominent, de nous mesurer avec la montagne que nous avons choisie; mais pour plusieurs la montée a été dure, et un repos est indispensable avant de monter plus haut.

Dès le lendemain cependant, une équipe dresse le camp I à environ 5000 mètres. Les journées suivantes sont consacrées à faire la trace et à porter les charges vers le haut, à pousser toujours un peu plus loin sur un glacier à la pente modérée, mais d' une longueur désespérante et où le vent et la neige ( qui tombe chaque après-midi ) effacent les traces et compliquent singulièrement notre tâche. Il nous faut plus de deux semaines d' efforts pour établir un camp situé à près de 6600 mètres, face aux véritables difficultés, c'est-à-dire au pied d' un couloir de 600 mètres donnant accès à l' arête sommitale. Deux se- Le couloir, vu du camp III. Le camp IV est situé sur l' arête, au haut du triangle neigeux Entre les camps II et III. Au fond: le sommet du Tirich Mir avec le couloir ( à gauche ) maines pénibles pour le moral, car, au lieu des deux camps prévus jusque-là, nous avons dû en établir quatre, tant les conditions étaient mauvaises. Brasser la neige jusqu' aux genoux à plus de 6000 mètres, avec une charge sur le dos, quoi de plus déprimant? Les étapes, trop courtes à notre gré, sont ponctuées de halètements et de « Ah! ce sac, ce qu' il est lourd! » ou d' expressions d' Outre que nous autres « Welsches » n' avons aucune peine à interpréter.

C' est finalement avec soulagement que nous abordons les pentes raides et difficiles du couloir où la neige fraîche ne peut s' amon et où la progression est, paradoxalement, plus facile. Une première reconnaissance montre que l' ascension reste possible et qu' il y a encore une réelle chance d' attein le sommet.

Le 10 juillet toute l' équipe est réunie au camp IM en bonnes conditions et avec un excellent moral pour aborder la phase finale. 300 mètres de cordes fixes sont déjà en place, la base du verrou rocheux qui ferme le couloir à 7000 mètres est atteint. Il reste 50 mètres de rochers difficiles, puis une pente raide de neige ou de glace de 150 mètres pour atteindre le col, emplacement du dernier camp.

Dimanche 11 juillet Hier, Toni et moi avons travaillé tard à poser les cordes; et nous voulons prendre un peu de repos. Eric et Yèti partent au début de la matinée avec la mission de franchir et d' équiper le passage-clé, les 50 mètres de rochers délicats. Nous suivons leur progression et partons à notre tour, Heinz, Ernst et moi, au commencement de l' après. Nous allons installer le camp IV, et faire une tentative vers le sommet, si les conditions le permettent. Nous sommes bien chargés avec notre matériel personnel, la tente et la nourriture pour trois jours. Nous savons aussi que nous devrions prendre du repos, mais les jours sont comptés, et nous ne pouvons prendre le risque de perdre une journée.

La remontée des cordes fixes dans la pente de neige est lente mais régulière. La pente se creuse rapidement, tandis qu' au de nos têtes nos deux camarades s' engagent dans les passages délicats. C' est le troisième jour que je suis dans ce couloir; je ferme la marche et j' en profite pour photographier la montée. Les deux autres, pour qui le parcours est nouveau, sont pressés de monter. Nous arrivons au début des rochers, alors qu' Eric vient d' arriver au haut du passage et finit de poser la corde. Yèti le rejoint et nous pouvons à notre tour nous engager dans cette section verticale et en entonnoir qui canalise toute la neige poudreuse venue du haut! Nous rejoignons nos camarades qui doivent redescendre sans tarder, car le soir approche; ils sont très fatigués et se laissent rapidement glisser le long des cordes.

Pour nous le plus dur reste à faire: équiper les 150 derniers mètres dans le vent qui se lève, la neige qui commence à tomber et le soir qui approche. Quelques pas prudents, et je peux rassurer mes camarades: la pente est en bonnes conditions, même s' il faut donner de grands coups de pied pour faire mordre les crampons dans la couche dure sous-jacente. Nous démarrons, encordés à trois, mais progressant ensemble pour aller plus vite. Heinz déroule derrière lui les 150 mètres de cordes fixes qui nous assureront une retraite, quelles que soient les conditions. Au fur et à mesure que nous montons, le vent augmente, tandis que la lumière commence à baisser et seul, chacun pour soi, nous ne pensons qu' à faire un pas, puis encore un pas, pour atteindre le haut de ce maudit couloir qui semble s' éloi toujours plus. Mais tout a une fin, et nous débouchons enfin sur le col en pleine tempête, le cœur battant à tout rompre. Il faut hurler pour se faire comprendre et s' organiser en vue de fixer le bout de la corde, de tailler une vague plate-forme et de monter la tente. Nous nous y engouffrons bientôt et pouvons enfin souffler. Tandis que le réchaud ronronne, nous nous enfilons dans les sacs de couchage et pouvons rassurer par radio nos camarades qui d' en bas ont suivi notre progression.

Lundi 12 juillet Après une nuit plus ou moins confortable, à trois dans une Dunlop montée à la hâte, nous avons récupéré un peu mais hélas! un simple coup d' oeil dehors nous ôte tout espoir: neige et brouillard rivalisent avec un vent d' une rare violence. Il faut attendre le retour du beau temps. Nous apprenons par radio que Toni monte vers nous, avec une seconde tente. Notre seule sortie sera destinée à déplacer la tente, trop exposée au vent, et à préparer une seconde plate-forme, ce qui exige plus d' une heure d' effort à cette altitude. Toni arrive dans l' après, et nous avons bon espoir de tenter le lendemain le sommet à quatre, car une belle éclaircie à la tombée de la nuit nous permet de contempler la mer de nuages au-des-sous de nous.

Mardi 13 juillet Hélas! il faut déchanter! Le temps est encore plus mauvais que la veille, et nos visages trahissent la fatigue engendrée par deux nuits passées à 7200 mètres. A huit heures, la radio nous apprend qu' Eric a eu un malaise le soir précédent, ce qui l' a obligé à recourir à une bouteille d' oxygène. Heinz, notre médecin, es- Le Tirich Mir vu du glacier entre les camps II et III. Grossièrement tracé, l' itinéraire conduisant au sommet par le couloir et l' arête faîtière.

time qu' il doit redescendre. Comme son expérience alpine se limite... à cette seule expédition ( ou presque ), il n' est pas question de le laisser descendre seul. Ernst est très fatigué également, et pour ma part je ne suis pas fâché de regagner une altitude inférieure. Toni reste seul. Il est nettement en meilleure forme que nous, et Yèti doit monter le rejoindre. Nous savons que notre dernière chance d' at le sommet s' envole, mais que faire contre le mauvais temps?

La descente de 500 mètres de cordes fixes dans la tempête, et dans l' état de fatigue où nous nous trouvons, n' est pas une partie de plaisir. Nous équiper et démonter une tente demande près d' une heure, et après avoir souhaité bonne chance à Toni, nous plongeons dans le couloir, en plein brouillard. Le descendeur nous permet une retraite rapide et sûre, et finalement nous sortons du brouillard au-dessus du camp Ill. Yèti monte à notre rencontre, mais il s' est rapidement rendu compte qu' il n' a plus les ressources suffisantes pour rejoindre Toni. Celui-ci reste donc seul là-haut, tandis que nous nous retrouvons à 7 au camp III, tous très fatigués.

Mercredi 14 juillet Nous n' y croyions plus, mais le temps s' est remis au beau! A huit heures la radio nous apprend que Toni est parti, qu' il tente sa chance tout seul, portant tous les espoirs de l' expédi. Nous ne pouvons que l' encourager par la voix et suivre sa progression. Au fil des heures, notre ami se rapproche des 7707 mètres du sommet, lentement mais sûrement. Au camp III, quatre d' entre nous entreprennent de descendre avec une partie du matériel vers les camps inférieurs; seuls Heinz et moi res- tons pour attendre Toni, mais nous ne nous faisons aucune illusion: nous serions probablement incapables de remonter pour soutenir notre camarade s' il était en difficulté.

Toni est donc livré à lui-même, et c' est un magnifique exploit qu' il accomplit, aussi bien du point de vue physique que moral. Parti à 7 heures du matin, il escalade 8 heures durant des pentes raides de rochers ou de neige fraîche, profonde, pour fouler, vers 15 h 30, le plus haut sommet de l' Hindou Kouch. Par l' in de la radio, nous suivons sa progression et partageons ses doutes lorsqu' il doit chercher un itinéraire peu évident, et surtout sa joie lorsqu' il peut fouler la cime du Tirich Mir. Le temps de prendre quelques photos, de déployer le drapeau pakistanais, et notre ami entreprend la descente des 500 mètres qui le ramèneront au camp IV avant la nuit et en bonne forme, malgré la fatigue et quelques légères gelures aux pieds.

Deux jours plus tard toute l' équipe est réunie au camp de base et peut fêter dignement le succès acquis par un important travail d' équipe et couronné par l' exploit individuel de Toni.

Il est certain que de meilleures conditions météorologiques auraient permis à d' autres alpinistes de parvenir au sommet. Etions-nous trop tôt dans la saison ou avons-nous eu une année extrêmement défavorableSans doute l' un et l' autre, mais il semble bien que 1982 restera une année marquée par un grand nombre d' accidents et par des conditions très peu favorables en Hindou Kouch et dans le Karakorum voisin.

De toute façon nous avons atteint l' objectif principal de l' expédition et vécu un extraordinaire voyage. L' expédition était entièrement privée et financée exclusivement par les membres eux-mêmes. A titre indicatif, les dépenses se sont élevées approximativement à 6500 fr par personne, pertes de salaire non comprises. Tout le travail de préparation a été fait par les membres qui souvent ne se connaissaient pas, quatre mois auparavant. Malgré les différences de langue, de conception de l' expédition et de caractère, l' entente est restée bonne et a favorisé un travail d' équipe, conditions nécessaires pour assurer le succès d' une telle entreprise.

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