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Travailler dans les montagnes. Une vie mouvementée

Travailler dans les montagnes

Originaire de Bergün, Arnold Caviezel-Felix – « Nöldi » de son surnom – est un de ces esprits bienfaisants qui veillent sur les axes de transit des Alpes. Chef des services ferroviaires auprès des Chemins de fer rhétiques, il est responsable, avec son équipe, de la ligne de l' Albula – entre Filisur et Preda.

Nöldi, qui réside à Bergün avec sa femme Annetta et leurs enfants Michaela et Adriano, a un lieu de travail pour le moins imposant: la ligne de chemin de fer de l' Albula, entre Filisur et Preda. Sans être un fanatique des sommets, il est un homme des montagnes. La chasse et la pêche font partie de ses passions. Qui s' étonne encore que Nöldi aime son village et les alentours? Il joue du cor baryton dans l' ensemble du village et prend part à de multiples activités dans Bergün.

Entre et à côté des voies Pendant ses heures de travail, Nöldi est silencieux et posé, conscient d' effectuer une tâche exigeante: c' est sur et à proximité de cette ligne de chemin de fer très fréquentée que se trouve son lieu de travail. Ses interventions, de même que les nombreuses interruptions qui se produisent, sont dictées par l' horaire. L' équipe chargée du service ferroviaire est un élément important de tout un système organisationnel perfectionné et elle ressent les changements et les retards éventuels plus fortement encore que les passagers. Ces derniers ont souvent l' oc d' observer ces hommes aux vêtements orange qui se tiennent au bord du remblai avec leur lanterne, leur piolet, leur pelle et leur râteau – un groupe qui semble inactif mais qui, à peine le train est-il parti, se met en mouvement. Le programme du jour, communiqué par Nöldi tôt chaque matin, doit être suivi impérativement afin que les trains puissent circuler selon l' horaire. Mais la ligne la plus intéressante des Chemins de fer rhétiques ne doit ses cent ans d' exis sur le tracé originel qu' au soin attentif et à la maintenance continuelle dont elle fait l' objet.

Le paysage de la vallée d' Albula est sauvage et souvent sombre. Comparable à un labyrinthe surdimensionné, la ligne de chemins de fer serpente entre Bergün et Preda sur 416 mètres. Quatre des neufs viaducs servent à la traversée de l' Albula. C' est pourquoi le petit train passe d' innombrables fois à droite et à gauche de cette rivière de montagne.

Un matin d' hiver à Preda En accompagnant l' équipe de service, on peut se faire une petite idée de ce travail si particulier qui exige de garder à l' œil et, si nécessaire, de dompter les forces de la nature. C' est ainsi que, seul passager à bord, je suis descendu à Preda un matin de décembre. A cette époque de l' année, on ne trouve guère âme qui vive dans les hameaux de Naz et de Preda. En décembre, le soleil se borne en effet surtout à illuminer les sommets montagneux, délaissant quelque peu la vallée.

Nöldi me mène au locotracteur, cette locomotive spéciale servant à la construction et à la maintenance des voies ferrées. Quelques hommes pellettent infatigablement la neige dans les wagons à mar-

Arnold Caviezel est l' un des hommes qui contribuent à la maintenance des Chemins de fer rhétiques Ambiance matinale à Preda avec vue sur la région du Piz Ela Pho to s:

Eli sab et h Ba rd ill LES ALPES 10/2003

chandises, pressés par le temps car, dans quarante minutes, la neige doit être descendue au tunnel de Toua. Après que les fraiseuses à neige ont été chargées, tous grimpent dans la cabine de la machine et c' est parti pour la descente! Il faut encore recouvrir de neige quelques passages délicats afin qu' aucune couche de glace ne puisse se former et que l' eau qui suinte de la roche et des murs, à l' intérieur du tunnel, parvienne à s' écouler dans le sol. Lorsqu' il fait très froid et que la neige est peu abondante, il arrive que des stalagmites et des stalactites de glace se forment en très peu de temps dans les tunnels. Celles-ci sont alors détruites à l' aide de longues lattes de glace. Les wagons sont vidés habilement avec pelles et fraiseuses tandis que l' homme qui conduit ce lourd engin fait preuve d' une grande prudence.

Il importe que chacun sache ce qu' il a à faire, où il est censé se trouver, quand il doit descendre ou remonter dans la machine. Les brefs appels de Nöldi et ses indications signalent les changements de position. Une fois le travail accompli, tous remontent dans le spacieux locotracteur et rentrent à Preda. Pour le prochain express qui prend le départ à Bergün – à raison d' un train par heure – la voie est libre. Quant aux hommes de l' équipe, c' est pour eux l' heure d' une collation bien méritée dans la petite salle d' attente chauffée au four à bois de la gare. Les boîtes de conserve ouvertes contiennent plein de bonnes choses à manger tandis que se répandent des odeurs de pain frais, de thé et de café.

Combat contre les éléments Pendant les tempêtes de neige, le travail est parfois difficile et dangereux. Nöldi trouve ce combat contre les éléments intéressant, bien que les horaires de travail soient tout sauf réguliers. Si les voyageurs peuvent si facilement faire la navette entre l' Engadine et le vaste monde, c' est uniquement grâce au travail extrême que fournissent Nöldi et ses hommes. C' est pour cela que la satisfaction envahit ces derniers lorsque leur regard saisit au passage quelques scènes touchantes à travers les fenêtres illuminées des wagons qui défilent. Une fois que les bruits se sont éteints, le silence règne à nouveau en maître. Et déjà un mouvement se fait sentir au sein du groupe afin que le prochain train puisse, lui aussi, circuler en toute sécurité.

Entretien aux multiples facettes La construction et la maintenance de voies ferrées ainsi que l' entretien du ballast, dont l' élasticité détermine le confort de la traversée, sont sous la responsabilité de Nöldi. Lors de l' exécution de nombreux travaux, il est important de ne pas oublier les câbles électriques. Nöldi et son équipe sont mis rudement à contribution non seulement au cours de l' hiver, mais aussi pendant les autres mois, lorsque se produisent des averses ou des orages. Entre-temps, les arbres doivent aussi être abattus pour que la ligne soit la plus libre possible et ne puisse être interrompue ni par des troncs d' arbre ni par des éboulis. « Je ne connais pas de métier qui me plaise davantage. Je me sens comme un homme des montagnes. Je vis le monde de la montagne chaque jour à fleur de peau, dans toute sa dureté et sa suavité, sans pratiquer d' alpinisme. La flore et la faune sont uniques sur ce parcours. Tout comme j' attends l' hiver avec impatience, je me réjouis de l' arrivée du printemps. Ce qui me lie à cet endroit, ce n' est pas le sport de montagne, mais plutôt tout ce qui a trait à la vie et aux travaux dans les montagnes .» a

Elisabeth Bardill, Schiers ( trad. ) Toujours fidèle à l' horaire. L' équipe se rend à son poste de travail en locotracteur Repas dans la petite salle d' attente chauffée au feu de bois dans le bâtiment de la gare Dépôt de neige à l' entrée du tunnel Toua

Nöldi, le fonctionnaire volontaire

Le « Swiss Alpine Marathon Davos » est impensable sans l' aide de bénévoles tels que Nöldi et ses semblables. Homme des premières heures, Nöldi organise et est actif dans le domaine du transport des marchandises, il met en place des barrages, contrôle le parcours, assure le terrain, indique aux coureurs le couloir à emprunter, doit éliminer les retardataires, ce qui attriste naturellement beaucoup ces derniers. Une bonne camaraderie caractérise le déroulement de la manifestation qui se fait sans ani-croche et dans la bonne ambiance. Nöldi est bien conscient que les aspirants au titre et les coureurs sont aussi les hôtes de la région d' aujourd et de demain.

LES ALPES 10/2003

Montagnes et environnement

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