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Traversée des Aiguilles du Vélan

Remarque : Cet article est disponible dans une langue uniquement. Auparavant, les bulletins annuels n'étaient pas traduits.

Avec 1 illustration ( 112Par G. Caillât

Depuis l' inauguration de la cabane de la section Genevoise, le Mont Vélan, belvédère isolé, face au Mont Blanc, est devenu à la mode au printemps. La longue et magnifique descente, des glaciers de Valsorey et de Tseudet, sur des pentes propices au ski actuel, attire de plus en plus le skieur alpin épris de virages savants. Et que dire de la fameuse descente de la cabane aux chalets d' Amont? Et de celle de la Croix de Tsousse à Bourg-St-Pierre, à laquelle une gentille remontée de trois demi-heures permet d' accéder? Mais sitôt la neige disparue, la Luis des Bourres, sur laquelle la cabane est construite, retrouve son calme d' antan. De temps à autre une caravane apparaît, pour faire la facile ascension du Vélan par l' itinéraire des skieurs ou par l' arête du Col de la Gouille au Dôme. Ou encore pour gravir le Petit Vélan. Mais d' alpinistes de classe, point, ou presque. Et pourtant, il y a là une fameuse arête, traversée pour la première fois par des Anglais en 1897, sous la conduite de Joseph George d' Evolène, qui vaut largement n' importe quelle ascension de la région. Nous allons essayer de vous la décrire.

Si, partant de la cabane au tout petit matin, muni de votre piolet et de vos crampons, vous suivez le bisse que l' infortuné Basile Bournissen, constructeur de cette magnifique maison, a établi pour amener sur place l' eau qui lui était nécessaire, vous arrivez à point voulu pour aborder le Glacier de Tseudet, que vous n' avez qu' à remonter jusque sous le col du même nom. Plusieurs côtes, dont vous suivrez le fil, vous permettront d' échapper aux chutes de pierres, fréquentes dans ces parages. En deux heures, vous arrivez au Col de Tseudet, 3185 m ., sur l' arête NNW, où une vue superbe sur la chaîne du Mont Blanc vous attend. Contrairement au guide-itinéraire, qui vous incite à contourner les Dents de Proz par le versant de Tseudet, sur des vires actuellement écroulées en partie, vous passerez sur le versant W, au-dessus du petit Glacier de Pettemont, jusque sous les parois sommitales des Dents. Et vous arriverez ainsi, en une petite heure, à la base de la première Aiguille ( 3288 m. ). L' arête que vous avez devant vous est large et pas très inclinée. La roche est schisteuse et offre de nombreuses prises. Souvent, vous quitterez le fil de l' arête, pour éviter des gendarmes. C' est ainsi qu' en une heure et demie environ, vous arriverez au sommet ( 3488 m. ). Une descente à peine marquée, conduit à la brèche qui sépare du sommet suivant. Mais avant d' y arriver, le rocher change brusquement de couleur et passe au beau noir. L' arête s' effile et devient très raide, beaucoup plus solide. Les prises y sont bien plus rares aussi. En 45 minutes environ, vous parviendrez au sommet de la deuxième Aiguille ( 3561 m. ). De nouveau, la roche change de couleur, revient au gris; encore une brèche et vous voilà parti pour le troisième sommet ( 3635 m. ). En une demi-heure, vous y serez. Il s' agit maintenant de quitter les Aiguilles et d' attaquer le Vélan proprement dit. Une varappée horizontale vous conduira au point 3670 m .; puis une nouvelle brèche, bien marquée, va s' opposer à votre passage. C' est la clé du Vélan. On s' en sort en escaladant par la gauche le gendarme qui fait face. Il y a un joli rétablissement à faire. C' est le passage le plus délicat de toute l' ascension. De là, vous descendez gentiment l' arête, jusqu' au point où elle s' enfonce sous les glaces du sommet principal. En un quart d' heure, vous êtes au Dôme du Vélan, large calotte glaciaire, qui s' affaisse brusquement sur le versant nord. De la cabane au sommet, nous n' avons jamais employé moins de huit heures pour faire l' ascension. Arrêts compris bien entendu. La descente, c' est une agréable promenade, surtout si vous passez par l' arête frontière. Quittant le Dôme de glace, vous suivez quelques rochers faciles conduisant au sommet italien, qui vous permettront d' éviter une large rimaye, dont les skieurs ne se doutent guère. Et vous continuez le circuit par le Mont Cordine, balcon penché sur le Val d' Ollomont, dont les pâturages verdoient au soleil. Tout au loin, c' est Valpelline. L' arête frontière vous permet d' éviter la chute de séracs du Glacier de Valsorey et vous amène en face du Col de la Gouille, dont vous atteindrez bientôt la base après une légère descente. Les cordes fixes sont toujours là. Celle du versant Tseudet gagnerait à être plus épaisse. Une chaîne galvanisée serait, en tout cas, mieux indiquée en ces lieux, à cause des fréquentes chutes de pierres. Du Col de la Gouille, suivant la gauche du glacier et revenant au bisse Bournissen, vous atteignez la cabane en une heure.

Depuis la première traversée de 1897, cette ascension n' a guère été effectuée qu' une demi-douzaine de fois. Et cependant, elle en vaut largement la peine et devrait tenter les amateurs, épris de nouveauté. C' est une course complète, pour bons varappeurs. Un conseil: partez au moins à 3 heures du matin.

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