Arêtes grisonnes
Avec 4 illustrations.Par René Dittert.
L' idée d' aller passer quelques jours au cœur des Alpes Rhétiques ne nous est certes pas venue d' un moment à l' autre; depuis fort longtemps déjà, nous avions esquissé un projet d' ascensions et de traversées d' arêtes qui devaient nous fournir un aperçu de ce massif, contrée bien différente de celle que, nous autres, habitants d' extrême Romandie, avions coutume de visiter: Mont Blanc, Valais, Oberland bernois. Outre l' intérêt évident que fournit toujours à l' alpiniste une région qui lui est inconnue, cela lui permet de se tremper un peu dans cette atmosphère de découvertes, celle des ascensions du siècle dernier; nul doute aussi que les auspices peu favorables sous lesquels s' annonçait l' été de 1939 aient milité en faveur de ce court séjour au pays des « Piz » où l' Inn prend sa source. L' Engadine, en effet, semble être sous l' influence de conditions atmosphériques plus favorables que celles des Alpes Grées ou Pennines.
Le 28 juillet, par la route, nous quittons Genève; un beau voyage au travers des sites si divers de notre pays, et le lendemain déjà, vers midi, nous atteignions Pontresina qui sera notre point de départ. Pontresina, charmant village; la grande route s' y fraie un passage et permet d' admirer les demeures indigènes si cossues aux façades blanchies à la chaux, aux fenêtres ornées de ferrures artistiques d' où jaillissent des bouquets de fleurs multicolores; constructions pittoresques de style italien qui voisinent avec les nombreux hôtels modernes, richesse de cette vallée. A la petite pinte où nous nous arrêtons, tout nous rappelle aussi que la frontière n' est guère éloignée; servante accorte au teint foncé, rires sonores, conversations bruyantes; toute la vie trépidante de nos fougueux voisins du sud.
Au début de l' après nous gagnons Berninahäuser, sur la route du col du Bernina, qui relie Pontresina à Poschiavo. Tout à coup, entre deux monts pelés, d' une blancheur irréelle, surgit le Piz Palü. De Berninahäuser un sentier cahoteux conduit à la cabane Diavolezza. Lorsque nous l' atteignons, toutes les cimes que nous admirons pour la première fois se parent de leurs plus belles teintes; le vent s' amuse avec des panaches de neige qu' il arrache des crêtes les plus élevées: celle du Bernina et du Piz Palü qui étale devant nous sa puissante paroi aux caractéristiques piliers; paroi qui semble avoir été créée par quelque génie en mal de symétrie, tant est régulière sa configuration. Notre regard se porte sur la longue crête qui, en méandres paisibles, ondule sur le ciel et va, de son sommet, par la Bellavista, le Piz Zupo, le Piz Argient jusqu' à la Fuorcla Crast' Aguzza où se trouve à 3600 mètres environ le refuge Marco-e-Rosa. Plus loin, c' est le Bernina, 1e Biancograt et enfin le Piz Morteratsch, arête déchiquetée qui nous sépare du bassin de Tschierva. Noms sonores de montagnes neigeuses qui couronnent cet immense amphithéâtre où depuis toujours s' étalent les masses éblouissantes des glaciers de Morteratsch et de Pers qui s' inclinent vers la vallée, tantôt paisibles, tantôt Die Alpen — 1942 — Les Alpes,10 bouleversés, tantôt offrant les gemmes aux mille reflets des séracs impressionnants.
Ce tableau à jamais gravé dans notre mémoire, nous allons nous étendre sur les paillasses, en attendant l' heure qui nous libérera de cette incertitude implacable qui s' empare de l' alpiniste et qui ne le quitte qu' au moment de l' action. Devant nos yeux défilent la crête nord du Palü, l' arête, chemin aérien qui nous conduira demain, après de longues heures de marche, au refuge Marco-e-Rosa. Avant que le sommeil ne s' empare enfin de nous, nous les parcourons de nombreuses fois, en pensée.
A 2 heures nous descendons au réfectoire pour le déjeûner et pour payer une facture... salée; aussi, est-ce sans regret qu' une heure après nous quittons ces lieux qui ne sont pas à la mesure de nos bourses. Le ciel est clair, le Palü étend son ombre blafarde sur le glacier que nous dominons. Nous errons dans les éboulis, la lanterne n' éclaire qu' un espace restreint, mais en dépit du peu de visibilité nous trouvons un chemin, une sente plutôt, qui nous amène sur le glacier. La corde est déroulée, il fait froid, nous continuons tranquillement en direction de l' arête; elle s' avance au loin dans le glacier, tel un môle, et semble rompre l' impétuosité de la mer, houleuse, pétrifiée, qui bat ses flancs. Plusieurs lanternes scintillent à notre gauche: d' autres caravanes cherchent aussi leur chemin dans la nuit; tout en marchant, nous nous plaisons à les découvrir, à mesurer leur avance. Une barre de séracs et la vue de la paroi sombre qui nous domine, secouent notre torpeur et réclament plus de vigilance de notre part. Nous sommes à 2970 mètres d' altitude, à la base extrême du pilier est, qui interpose les 900 mètres de son arête effilée et aérienne entre nous et le Palü oriental. Nous chaussons les crampons et, travail moins monotone que la marche fastidieuse sur le glacier, nous franchissons la rimaye. La neige est en assez bonnes conditions quoique récente, la pente raide oblige le piolet à décrire quelques orbes; des éclats jaillissent et vont disparaître dans la gueule béante et sombre qui s' ouvre, affamée, à nos pieds. La course est commencée, nous allons vivre de longues heures mêlées d' inquiétudes, de joies, de déceptions peut-être aussi. Une traversée ascendante donne accès à un couloir peu profond bordé de rochers. Les premières défenses que nous oppose la montagne sont surmontées sans grandes difficultés; nous parvenons à un vaste plateau, puis c' est l' attaque de l' éperon est.
Avec le jour qui pointe nous découvrons la face nord du Piz Palü; elle apparaît en enfilade, avec au premier plan le glacier, glacier ravagé, bouleversé, qui nous sépare du pilier central: « le Bumillergrat » ainsi appelé du nom de Hans Bumiller, qui le gravit le 1er septembre 1887. Le pilier est, conquête de la célèbre équipe von Küffner et Alex. Burgener, le 22 août 1899, s' élève au-dessus de nous et va se perdre dans le bleu intense du ciel où se traînent quelques brumes glacées. Il est curieux de constater que des trois piliers qui constituent cette paroi, le plus difficile, le central, a été gravi le premier; celui de l' ouest d' ailleurs a été aussi conquis en 1899.
De la brèche que nous venons d' atteindre, nous jetons un coup d' œil à la crête de neige qui nous attend: des gendarmes de granit, masses de rouille sur un voile d' argent, penchent leurs têtes ici à gauche, là à droite; plus loin, beaucoup plus haut, la crête de neige réapparaît, immaculée; des ombres seules jettent, par-ci, par-là, leurs demi-teintes et lui donnent un relief plus vivant.
« Beaucoup de neige » pense Marullaz qui est encordé avec Aubert, alors que Guelpa et moi nous nous mettons en route. Sur le versant ouest, la neige est farineuse, sans consistance, tandis qu' à l' est, travaillée par le soleil de deux belles journées, elle permet une progression plus aisée quoique pas aussi rapide que nous l' eussions désiré. Après quelques longueurs de corde nous heurtons des rochers, agréable diversion aux aériennes crêtes de neige que nous venons de suivre. C' est cette variété, ce changement, ainsi que le spectacle continuellement renouvelé des glaciers suspendus qui nous côtoient, qui rendent l' ascension intéressante. Quoique moins longue et moins difficile que d' autres, elle peut soutenir la comparaison avec les plus belles arêtes.
Les rochers sont crépis de neige et de verglas; ce n' est que très prudemment que nous progressons en dégageant consciencieusement la prise qui devra recevoir, soit une main, glacée au contact de la neige, soit le pied qu' elle fait trembler par son exiguïté. La crête neigeuse qui suit permet de reprendre haleine, de se préparer à surmonter l' obstacle qui se dresse rébarbatif à quelques longueurs de corde. Il ne semble pas que nous puissions le forcer directement; aussi est-ce à droite, par une pente inclinée qui fuit sous nos pieds vers le glacier, en taillant des degrés, que nous gagnons une encoignure de roche; une vire s' en échappe, nous nous y engageons. Le verglas, ennemi avec lequel l' alpiniste doit toujours compter dans les grandes ascensions, rend difficile le rétablissement qui nous dépose de nouveau sur l' arête. Les montagnes avoisinantes brillent de mille reflets allumés à leurs flancs sauvages par le soleil qui, en montant lentement dans le ciel pur, les anime et leur donne la vie. La progression n' est guère rapide; elle ne le sera certainement pas davantage dans le bastion hardi qui suit et qui défend l' accès aux dernières arêtes menant au Palü oriental, lequel eut longtemps le privilège du nom, car seul il est visible de l' alpe Palü. Muot dal Palü et Piz Spinaz étaient alors les noms respectifs de ses voisins. Une dalle inclinée oppose une vive résistance à notre progression; elle est protégée par plusieurs centimètres de neige fragile qui dissimule sa vulnérabilité et, en glissant sur la roche, laisse une tramée luisante de verglas. Avance délicate; le leader confectionne un minuscule point d' appui pour les pieds; aidé du piolet dont la pique acérée blesse la protection glacée et grince sur le granit, il s' élève lentement; un mouvement précipité et l' équilibre serait rompu, le travail à recommencer. Ce passage franchi, l' arête continue, elle n' est plus guère défendue et nous sentons que nous approchons du but. L' inclinaison plus grande nous invite à chausser nos crampons.
Un vent aigre et glacé nous accueille lorsque nous débouchons sur le vaste sommet. Avant d' aller plus bas nous réfugier à l' abri de quelques rochers, nous jetons un regard circulaire à ces cimes aux noms étranges, à ces glaciers qui très haut montent vers les crêtes et nous forcent à les mettre en parallèle avec d' autres montagnes qui nous sont chères. En effet, alors qu' ici l' ensemble est harmonieux et peu bouleversé, nous pensons à quelque sauvage cirque du massif du Mont Blanc, où tout est à une échelle plus considérable, où les glaciers se heurtent à des parois vertigineuses sans cesse balayées par des pierres. Mais le charme de ce massif, c' est précisément cette harmonie et ces crêtes qui s' allongent et ondulent indéfiniment.
Il y a neuf heures que nous avons quitté la cabane, aussi est-il urgent de prendre quelques aliments. Nous sommes accolés à des rochers; petit à petit le froid nous gagne, alors que notre corps fatigué doit récupérer les forces dépensées, ces forces qui, des heures durant, nous permettront de poursuivre notre course aérienne vers le refuge Marco-e-Rosa. Longue et sinueuse, l' arête qui nous y mène culmine au Piz Zupo à 4002 mètres, et sa plus basse dépression se trouve être la Fuorcla Bellavista à 3684 mètres.
Une arête de neige nous conduit au sommet principal où nous ne nous arrêtons guère; sur toute sa longueur, cette arête est ourlée de corniches qui projettent leurs ombres déchiquetées sur les séracs de la face nord. Nous poursuivons notre marche vers le dernier des sommets qui constitue le Piz Palli. A gauche, dans un lointain qui paraît très éloigné, le Piz Zupo offre le spectacle de sa face est, de ses couloirs où s' écoule de temps à autre la neige accumulée ces jours derniers. Lorsque, de son air malicieux, Marullaz annonce à Guelpa que nous devons aller jusque là-bas et plus loin encore, Guelpa, persuadé qu' il y a erreur, crie que jamais nous n' arriverons et que si tel est le cas, « ça sent le bivouac ». C' est bien cette éventualité que j' envisage car les rochers pourris et instables que nous devons gravir pour atteindre la crête de la Bellavista sont monotones et interminables. Peu attrayante la montée qui suit, aussi la fatigue a beau jeu; c' est alors que les attraits du farniente s' incrustent dans la pensée; le doux farniente au bord d' un petit lac, dans la verdure fraîche des mélèzes qui profilent leur ombre diffuse sur l' eau agitée par la brise; heures que l'on croit les plus belles mais qui ne le seraient certes pas sans le souvenir et la comparaison de celles plus pénibles passées dans la lutte. Car, outre le spectable qu' elle offre, la montagne exige d' incessants efforts d' ordre physique et spirituel. Pour vaincre l' obstacle, la force musculaire seule est insuffisante, il lui faut surtout les ressources d' une âme bien trempée; l' harmonieux équilibre entre ces deux forces donne à l' alpinisme sa beauté et sa raison d' être.
Bienvenu l' arrêt au sommet de la Bellavista, après l' interminable parcours de la longue arête semée de fastidieuses « bosses » qui rendent le but entrevu insaisissable. Nous avons une soif ardente. Hélas! Depuis longtemps le contenu de la gourde est absorbé, aucun liquide ne vient humecter nos lèvres gercées. En rangs serrés contre le Piz Argient se pressent des nuages; bientôt leurs troupes floconneuses envahiront combes et monts; aussi, sans plus tarder, nous filons. Précédée d' une descente dans des rochers faciles, la montée qui suit est agréable, la fraîcheur du soir y est pour quelque chose; et c' est avec un plaisir réel, momentanément exempt de fatigue, que nous gravissons le Piz Zupo, sommet élégant, à l' arête fine et aérienne. Second des Grisons, s' il n' a pas l' allure et la fierté de ses voisins, Bernina, Scerscen et Roseg; il n' en reste pas moins une belle cime; il se cache derrière de puissants contreforts, seul son sommet est visible, mais, des belvédères environnants, il est méconnaissable, ce qui lui a valu son nom. Des brumes ambrées, trop longtemps contenues dans la bassine du glacier de Scerscen, lentement débordent par les dépressions les plus basses et se répandent partout autour de nous. Elles nous laissent de temps à autre entrevoir des parois et des glaciers qui semblent appartenir à un monde lointain et irréel, au milieu duquel, comme une déesse puissante, apparaît la Crast' Aguzza. Soulevés par le vent, agités par son souffle, les nuages s' effilochent et jettent plus haut leurs oriflammes dorées qui, de leurs délicates et fragiles dentelles, vont orner le Piz Argient, dernier sommet de l' arête; nous nous arrachons à ce spectacle pour aller le gravir. Puis c' est la descente exténuante dans la neige profonde qui cède et la remontée au petit refuge. Nous poussons la porte, laissons nos sacs glisser des épaules et à notre tour nous nous laissons choir sur le banc de bois; il y a 17 heures que nous cheminons.
L' arrivée à la cabane reste toujours dans la vie rude de ceux qui courent les cimes un doux instant; souvent, il précède une journée riche de souvenirs, ou, comme aujourd'hui, en marque la fin. Que de belles heures passées assis autour d' une rustique table de bois, sur de grossiers tabourets, rêvant ou discutant ardemment! mais surtout nous revenons toujours à d' innombrables souvenirs alpins. Ce soir, de nouveau, nous sommes réunis autour d' une de ces tables de cabane toujours encombrées; le gardien nous a servi une bonne bouteille de « blanc » qui flatte les narines et dessèche agréablement le gosier. Tous les moments pénibles de la journée se sont déjà évanouis, seule une image glorieuse en reflète les différentes péripéties.
Le soir est descendu, dehors il fait froid, le brouillard qui enveloppe le refuge sème sa crudité à l' entour. Plus rien ne nous retient; aussi, rompus de saine fatigue, nous gagnons nos paillasses.
31 juillet. A 9 heures, nous quittons le refuge, qui vient d' être envahi par une foule bruyante et exotique. Le temps n' est pas très beau et nous oblige à modifier nos projets; nous désirions en effet monter au Bernina, traverser le Scerscen et le Piz Roseg; trop longue course par temps douteux, aussi nous continuerons par le célèbre Biancograt.
Du refuge, une longue pente nous conduit à une arête; de bonnes traces en facilitent le parcours vers la Spalla. La promenade aurait été agréable sans ce vent violent qui cherche continuellement à nous soulever. Il s' empare brutalement de la corde qui nous relie, la lance dans l' espace, s' amuse, tire violemment dessus, la secoue, la relâche, puis la reprend de plus belle. Prudemment, avec beaucoup de patience, nous avançons le long de cette gracieuse arête frangée de corniches, mouchetées de légers flocons blancs qui naissent et meurent selon les caprices du vent. Quand nous parvenons au sommet du Bernina, 1e brouillard qui, depuis longtemps, croupissait dans le bassin de Tschierva, comme une houle à l' assaut de falaises impuissantes à le contenir, monte et nous enveloppe. Il est 10 h. 30, le froid est piquant et ne permet guère un arrêt prolongé. Elle est pourtant impressionnante, l' apparition fugitive qui laisse quelques instants nos yeux se promener sur la fine arête du Scerscen au Roseg, dominant le gouffre de leurs versants nord où s' accrochent hardiment de sinistres glaciers suspendus. Un remords nous prend, nous aurions tant aimé visiter ces fiers sommets. Tant pis, disent les uns, tant mieux pouvons-nous répondre, car ainsi un motif impérieux nous rappellera vers les belles cimes de l' Engadine et, en quittant leur point culminant, c' est un « au revoir » que nous leur adressons.
Du Piz Bernina au Piz Bianco, l' arête est de rocher; agréable et variée, elle n' offre pas de difficultés spéciales: la progression est rapide. L' escalade de plusieurs petits ressauts vertigineux, sans nous arrêter, ralentit néanmoins notre marche. Au Piz Bianco l' arête s' incline vers le bas, la neige n' est plus très bonne. Nous chaussons nos crampons. Aubert et Marullaz, qui nous précèdent, prennent quelques photos et nous invitent à jeter un dernier regard vers le signal de bois qui marque le point culminant, là-bas où le vent s' achar chasse le brouillard qui désespérément s' accroche sur le versant est. La descente se poursuit variée quoique la neige assez profonde forme de désagréables sabots sous les crampons: inconvénients de peu d' importance devant le spectacle farouche que nous fournit l' arête sur laquelle nous inscrivons notre trace; elle s' allonge derrière nous, glisse entre ombre et lumière jusqu' au Piz Bianco qui, insensiblement s' éloigne.
Une courte halte nous permet de contempler un immense cirque: les glaciers de Morteratsch et de Pers telles les marches d' une cathédrale, montent vers la longue arête parcourue hier, arête indécise qui semble se fondre sur le ciel taché de brumes vaporeuses. Ces brumes, avant-garde de nuages insidieux, crèveront dans quelques heures en rafraîchissant l' atmosphère lourde de cette journée. Une dernière montée, puis, par des rochers en gradins, des dalles, nous descendons vers un petit col, fine ligne de neige précédant les sombres parois du Piz Morteratsch; traversée interrompue quelques instants par des pierres qui viennent ainsi nous rappeler que la montagne a aussi ses défenses et qu' elle peut frapper où et quand elle veut.
Au col se termine l' histoire de ces deux glorieuses journées passées sur les plus hautes crêtes de l' Engadine. Mais, si le parcours d' arête brusquement s' interrompt, un long trajet nous sépare encore de la vallée. La neige est pourrie, le glacier interminable. A la cabane Tschierva nous prenons quelques rafraîchissements, puis c' est la descente agréable le long d' un sentier capricieux. Nous admirons les immenses étendues blanches qui de toutes parts nous environnent. Plus bas, venant à notre rencontre en rangs serrés, les aroles, les mélèzes permettent à nos yeux, fatigués par tant de lumière éclatante, de se reposer sur le vert profond de leurs frondaisons.
Lorsque nous parvenons à Pontresina, l' ombre du soir descend lentement sur la vallée. Le village est pavoisé, nous croisons d' élégantes jeunes filles vêtues du seyant costume de l' endroit: robe rouge, éclatante, protégée par un tablier aux mille fleurs des Alpes. Elles sourient, elles sont joyeuses; demain, c' est la fête nationale... Pèlerins incorrigibles, demain, nous quittons ce merveilleux pays, nous irons dans une autre vallée chercher d' autres aventures, connaître un nouveau coin de notre paradis alpestre.
Horaire: Cabane Diavolezza. .2 h. 50Refuge Marco-e-Rosa .9 h.
Piz Palü 12 h. 50 Bernina 10 h. 30 Bellavista 15 h. 15 Piz Bianco 11 h. 25 Piz Zupo 16 h. 55Fuorcla Prievlusa... 13 h. 05 Piz Argient 17 h. 50Cabane Tschierva... 14 h. 10 Refuge Marco-e-Rosa. 19 h.