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Le Mont Kenya : neige et glace à l'équateur

Hinweis: Questo articolo è disponibile in un'unica lingua. In passato, gli annuari non venivano tradotti.

Peter Hartmann, Trimmis

Que l'on puisse trouver de la neige à l' équateur, c' était au siècle passé une idée impensable. Quand le Dr Krapf, missionnaire, rapporta en Europe qu' il existait des glaciers au Mont Kenya, il reçut le même accueil que son collègue Rebmann un an plus tôt, qui osa parler du cône de glace du Kilimandjaro. On leur rit au nez à tous les deux, en expliquant les blanches protubérances par la teinte d' un calcaire de couleur claire.

Quarante ans plus tard seulement, l'«honneur » de Krapf fut rétabli, et confirmé un événement vieux de plus de trois millions d' années. A cette époque, l' Afrique orientale fut le théâtre de profonds bouleversements tectoniques, origine de la fameuse vallée du Rift, et accompagnés d' une intense activité volcanique. Outre un grand nombre de petits volcans dans la vallée même du Rift, des géants prirent naissance: le Kilimandjaro, le Mont Elgon et le Mont Kenya. L' altitude primitive de ce dernier doit avoir été de 7000 mètres, et sa forme semblable à celle du Kilimandjaro. Une érosion glaciaire intense vint ensuite réduire sa taille d' au moins 1800 mètres, jusqu' à sa stature actuelle. Mais 5200 mètres, c' est déjà une fière altitude, et l' ascension des sommets jumeaux Batian ( 5199 m ) et Nelion ( 5188 m ) est une entreprise alpine d' envergure.

Le premier Européen à se risquer sur cette montagne fut le comte austro-hongrois Teleki, en 1887. Son expédition atteignit l' altitude de 4200 mètres. La grandiose vallée de Teleki, à l' ouest du Mont Kenya, avec ses superbes forêts de séneçons, rappelle aujourd'hui encore l' événement. Mais il a fallu attendre l' expédition de Mackinder, en 1899, pour saluer la réussite de l' ascension. Avec deux guides du Mont Blanc, il fit la « première » du Batian, un exploit fantastique pour l' époque.

FLORE ET FAUNE DU MONT KENYA Le Mont Kenya prend pied dans une chaude région de savane pour s' élever jusqu' aux neiges et glaces sommitales. De ce fait, il s' entoure de ceintures végétales nombreuses et variées, séjour d' une grande quantité de bêtes sauvages. Plus haut que la savane s' étend d' abord une bande de terres cultivées que l'on a peu à peu gagnées sur la forêt primitive. Les tribus ici établies, les Kikuyus, les Merus et les Embus ( tous Bantous ), vivent de l' agriculture et de l' élevage. Leurs plantations sont souvent visitées par les éléphants et les buffles, et leur bétail emporté par les léopards. Au-dessus de ces terres cultivées règne la forêt tropicale et pluvieuse, qui monte jusqu' à près de 3000 mètres. Sa partie inférieure, plus sèche, produit surtout des bois de construction; dans sa partie moyenne dominent les arbres géants de la forêt primaire; puis vient une ceinture de bambous impénétrables. Enfin, dans la partie supérieure, le revêtement forestier s' éclaircit et prend un aspect de parc. La forêt tout entière abonde en bêtes sauvages, mais qui se tiennent cachées durant la plus grande partie du jour, ne se montrant guère que tôt le matin et tard le soir. Les plus connues sont l' éléphant, le buffle d' Afrique, le rhinocéros noir, le léopard, outre d' énormes sangliers, des singes et toute une variété d' oiseaux.

Au-dessus de la « forêt pluvieuse » s' étend la zone des bruyères géantes, avec de superbes exemplaires isolés atteignant g mètres de hauteur. L' as du Mont Kenya n' est possible qu' à la saison sèche, à cause des marais prédominant dans la région, car on ne peut en venir à bout sans trop de problèmes qu' à la saison sèche. Plus haut on parvient enfin dans la zone alpine, un monde végétal exotique, où deux plantes surtout exercent leur charme sur nous: les séneçons géants qui bordent notre chemin comme d' immenses candélabres, et la lobelia telikii qui, à la floraison, s' enveloppe en-zetièrement d' une chevelure de fils d' argent laissant une impression féerique, surtout à contre-jour. A côté de ces deux plantes, la lobelia keniensis est particulièrement appréciée, car ses feuilles, même en pleine saison sèche, retiennent de l' eau provenant du givre.

Parmi les espèces animales alpines, le sujet le plus familier pour nous est le Rock Hyrax du Mont Kenya, car il ressemble à bien des égards à nos marmottes. Mais les animaux de la « forêt pluvieuse » atteignent occasionnellement ces altitudes, en particulier quand ils passent d' un versant à l' autre de la montagne. Ainsi a-t-on trouvé qu' à 4900 mètres des squelettes d' éléphants et de buffles.

La limite de la zone alpine se confond avec les divers glaciers de la région supérieure et avec l' édifice sommital lui-même, haut de 400 mètres et constitué minéralogiquement de néphélsyénite avec intrusion de phonolite.

ASCENSION DU MONT KENYA Le plus souvent on entend par « ascension du Mont Kenya » celle du troisième sommet par ordre décroissant d' altitude, la Pointe Lenana ( 4895 m ), que l'on peut atteindre sans équipement d' escalade. Le point de départ est toujours la Naro Maru Riverlodge, située à près de 2000 mètres sur le flanc ouest de la montagne et sur la grand-route de Nairobi à Nanyuki. De là, on s' élève encore en Landrover de I o000 mètres à travers la « forêt pluvieuse ». Là seulement commence la pénible approche, en montée à travers la région marécageuse des bruyères géantes, jusque dans la Teleki Valley. On a avantage à passer la nuit ici dans le Mackinders Camp ( 4150 m ). Le deuxième jour on doit surmonter pentes d' éboulis et côtes rocheuses toujours plus raides jusqu' à la Top Hut ( 4800 m ), la plus haute cabane de l' Afri. Il ne reste plus, de là, qu' à faire un « saut de puce » jusqu' à la Pointe Lenana. Celui qui dispose encore d' une « réserve d' air » suffisante peut le jour même l' atteindre en une heure tout juste. Autrement, on attend le jour suivant, puis on achève la course en regagnant la limite de la forêt.

L' ascension des deux points culminants, le Batian et le Nelion, ne peut être recommandée, en revanche, qu' aux alpinistes expérimentés. La voie normale emprunte la paroi sud, haute de 400 mètres. Elle est estimée du degré IV de difficulté. De la Top Hut au Batian et retour à la cabane, on compte environ 7 heures, ce qui représente à cette altitude une rude journée d' efforts. De plus, de là-haut, la vue que l'on découvre est tout simplement accablante. Au nord et à l' est, façonné par la sécheresse du climat, le pays kenyan s' étend, aride et poussiéreux, jusqu' aux abords de la Somalie et de l' Ethiopie. A l' ouest, les Monts Aberdare avec leurs forêts enveloppées de vapeur. Au sud, le pays des Kikuyus, Nairobi et les steppes des Massais. Si l' air est transparent comme du verre, on peut reconnaître à 300 kilomètres ou plus la coupole neigeuse du Kilimandjaro. Il ne reste qu' à noter dans l' agenda que l'on s' est dressé sur le point le plus élevé de la terre situé à l' équateur...

Trad. Ed. Pidoux Publications sur le Mont Kenya:

— Guide Book to Mount Kenya and Kilimanjaro, third edition 1971; The Mountain Club of Kenya, P.O. Box 45741, Nairobi.

Bergsajan am Kilimandscharo — Mount Kenya - Ruwenzori, de Katschner/Senft, 1974; Leopold Stocker Verlag.

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