Le glacier de l'Unteraar d'après les source historiques | Club Alpino Svizzero CAS
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Le glacier de l'Unteraar d'après les source historiques

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Heinz J. Zumbühl, Berne

« Cet endroit est un des plus sauvages et des plus extraordinaires que l'on puisse imaginer... L' air y est extrêmement pur et le ciel très clair; la vue des grands pics rocheux qui m' entouraient de toutes parts, les énormes masses de neige et de glace qui en descendaient, les plaines de glace sans fin qui entre-choquaient pour ainsi dire sous mes pieds - tout cela faisait naître un état d' âme inhabituel qui m' était des plus agréables. » J. S. WYTTENBACH, sur la moraine médiane du glacier de l' Unter, près de l' Abschwung, le 5 août 1777:29/40.

AU 06.1 C. Wolf, 1774/1776: sur la moraine médiane du glacier de l' Unteraar, près de l' Abschwung ( détail ) ti 1. Introduction On peut sans doute parler du glacier de l' Unteraar comme du « berceau de la recherche historico-glaciologique ». Sa place dans la science est rappelée, aujourd'hui encore, par la dénomination des sommets qui l' environnent: Agassizhorn, Escherhorn, Grunerhorn, Scheuchzerhorn et Studerhorn, baptisés du nom de personnalités marquantes de la recherche alpine. Le glacier de l' Unter, le plus grand du bassin d' alimentation du Rhin et des Alpes bernoises ( le quatrième de toutes les Alpes ), est un glacier de vallée d' une longueur maximale de 13,5 km, d' une largeur de 2,4 km en son milieu, d' une surface de 28,41 km2, s' écoulant vers ll' est Il est alimenté principalement par trois régions glaciaires: au nord-ouest ( gauche orographique ), par le glacier de Lauteraar ( qui a son origine sur les versants nord-est du groupe Schreck-horn-Lauteraarhorn et dans l' auge neigeuse située entre le Nässihorn et le Bärglistock ); au sud-ouest ( droite orographique ), par le petit glacier de Strahlegg ( né de la dépression sud-sud-est des Lauteraarhörner ) et celui de Finsteraar, provenant de l' importante dépression dominée par les falaises abruptes de la paroi nord du Finsteraarhorn, haute de plus de 1000 mètres ( altitude du sommet 4273.9 m ) et flanquée de l' Agassizhorn et du Studerhorn. Tous, ils se réunissent près de l' Abschwung, un contrefort oriental des Lauteraarhörner, pour former le glacier de l' Unteraar, long d' hui de plus de 6 km et recouvert d' impo moraines.

Ses grandes dimensions, la faible déclivité de sa langue - sur 11 km, sa surface ne s' abaisse que de 750 mètres ( déclivité de la surface glaciaire env. 7%, déclivité du sol env. 3-4, ainsi que l' importance de sa couverture détritique, font qu' il ne réagit qu' avec un grand retard aux variations climatiques. Les essais de reconstituer son histoire à partir de la documentation figurée et des cartes sont rendus difficiles pour trois raisons:

- Il manque, au voisinage de l' extrémité du glacier, des barres rocheuses marquantes et clairement identifiables ( à l' opposé de ce qu' on trouve à Grindelwald et à Rosenlaui ).

- Ni la documentation, ni le terrain ne font apparaître de nombreux dépôts morainiques caractéristiques dans la marge proglaciaire ( contrairement au glacier du Rhône ).

- L' ancienne marge proglaciaire a été recouverte par le lac artificiel du Grimsel.

2. La première mention du glacier de l' Unteraar ( 1577 ) et sa crue au XVIIIe siècle2 La région du « verus Arolae fons », c'est-à-dire de la « véritable source de l Aar » et le glacier de l' Unteraar apparaissent pour la première fois dans la Chorographia Bernensis, rédigée vers 1577 par le médecin bernois Thomas Schoepf pour accompagner sa magnifique carte du canton de Berne, dessinée en perspective cavalière ( cf. glacier du Rhône, note 5 p. 302 ).

« Au pied oriental de cette montagne ( le « Schreckhornm(ons ) », comme l' indique la carte ) commence une vallée qui s' étend jusqu' au Grimsel, très rude et couverte de neiges éternelles, en sorte qu' elle ne se signale par aucune espèce d' utilité, sauf pour les chasseurs et ceux qui extraient les cristaux dont le lieu recèle une riche quantité. Et comme cette vallée a la forme d' une nacelle ou d' une arche, il lui est venu le nom d' ion arch, d' où cette célèbre rivière, l' Aar, a également tiré le sien » ( SCHOEPF, 1577, 1: 204)3. Ailleurs, il est encore précisé que la véritable source de l' Aar et le « lieu de son jaillissement » se trouvent au pied ouest du Mont Schreckhorn, au-dessous du lieu appelé « inn arch ».

Sur la carte de Schoepf, V«Arolae fons verus » est indiqué à l' est du Schreckhorn par trois torrents.

La première représentation cartographique du glacier de l' Unteraar ( comme de celui du Rhône ) figure dans la « Nova Helvetiae Tabula Geographica » ( AU 01.1 et 2 ) de J. Scheuchzer, parue en 1712/1713. Sur le dessin original que Scheuchzer réalise probablement lors de son quatrième voyage dans les Alpes, en août 1705, le « Fons Arolae verus » est indiqué - plutôt mal - par de l' aquarelle brune et quelques traits de plume, au pied gauche ( SW ) du Schreckhorn. Sur la carte imprimée ( AU 01.2 ), un motif globulaire signale le glacier. Mais assurément, sa situation topographique est considérablement faussée par un décalage vers l' ouest ( il se trouve maintenant entre le Bietschornet le Schreckhorn ).

Presque au même moment, S. Bödmer, dans son Marchbuch Nr.2, sur une perspective cavalière de la région du col de Grimsel ( cf. RO 03* p. 171 ), dessine, lui aussi, les environs de l' Oberaar et de l' Unteraar, avec leurs deux torrents. A propos de la vallée d' Unter aar, recouverte aujourd'hui par le lac d' accu, Bödmer note: « C' est ici que la wisse arr sort du glacier » ( BÖDMER 1706, 2: 247 ). Sur une illustration, on voit bien l' Unteraarbach, la « wisse arr », et sa confluence avec celui d' Oberaar, la « schwarze arr » ou « finster arr », puis leur écoulement commun en direction de l' est et de l' hospice du Grimsel, mais le glacier lui-même n' apparaît pas. Le confluent des deux torrents, que cinquante mètres seulement séparaient en 1871 de l' extrémité de la langue glaciaire ( cf.fig.6 du dépliant ), semble avoir été situé, au début du XVIIIe siècle, à une grande distance de celle-ci. Ainsi, le glacier d' Unteraar, dont le front devait avoir considérablement fondu et reculé vers l' ouest, ne pouvait pas figurer sur le dessin de Bödmer.

La première description qu' on puisse exploiter en partie, comprenant une esquisse de plan et un croquis des parties terminales du glacier, est publiée en 1751 par le naturaliste et médecin lucernois Moritz Anton Cappeler ( 1685-1769 ) sous le titre Von den Gletscheren auf dem Grimselberg, und deren alldorten sich befindenden Crystall-Gruben; elle est incluse sous la forme d' une lettre dans l' ouvrage de Johann Georg Altmann Versuch einer Historischen und Physischen Beschreibung der Helvetischen Eisbergen.

Cappeler visite la région du Grimsel probablement entre 1719 et 1729. C' est à l' occasion de ce voyage qu' il dessine le « Glacier du Mont Grimsel » ( CAPPELER in ALTMANN 1751: 130)4.

Sur la base de ses dessins et de son texte, on pourrait, pour les années 1719-1729, donner à l' extrémité du glacier trois localisations:

a ) le point de départ est l' esquisse de plan très approximative f. I de AU 02* p. 271. D' après elle, le glacier s' arrêtait à peu près à l' endroit où le torrent du versant sud ( rive droite ) sur le versant NE du Vorderer Zinggenstock atteignait le fond de la vallée. Cet endroit se trouve à 1200 mètres environ à l' ouest de la jonction des torrents d' Oberaar et d' Unteraar, ou à 1150 mètres environ en arrière du maximum glaciaire de 1871. Cette hypothèse nous semble décrire l' extension la plus probable du glacier de cette époque.

Carte 7 L' extension maximale du glacier de l' Unteraar et les positions successives de son front au cours des XVIIIe et XIXe siècles. Emplacements où l'on a trouvé des sols et des bois fossiles -2400Oberaarbach Extension maximale du glacier et positions successives du front ( le maximum a ete reconstitué par l' elude des valfums morainiques.est peu sûr dans les zones marginales ) maximum de 1871! vers 1890 voir la figure 6 vers 1900 1981 Carte nationale de la Suisse, feuille 1250, 1.25000 Sols et bois fossiles Excavations ayant permis de mettre à jour des sols fossiles et les morceaux de bois qui s' y trouvaient AU Al AU A3 Bois fossiles ( découvertes isolées ):

1-11 ( à l' exception de 4, il s' agit d' arbres qui ont pousse à l' endroit même ou on les a trouvés ) 269 Extension du glacier reconstituée au moyen de sources historiques ( choix ) 1719-1729 d' après Cappelervers 1758/60 d' après Grünerers 1842 d' après Wild et Agassiz, voir AU 38-p.282/283; correspond a peu prés à l' extension du glacier vers 1890 Crues du glacier reconstituées par la méthode du carbone 14 XW sièclesAU A3,6 Fin du XVIf /debut duAU Al, AU A2, 1-4,7,8 XVII1 siècle XIX " siècle5,9-11 Vallum morainique au 08.1 J.J. Le Barbier l' aîné, années 70 du XVIIIe siècle: la langue terminale du glacier de l' Unteraar, recouverte d' abondants éboulis b ) d' après la vue de AU 02* p. 271, le glacier se terminait ( la légende F indique qu' il était « exactement comme on l' a sous les yeux, et que, tout ensemble, il est appelé la Glace par les habitants de l' Alpe » CAPPELER in ALTMANN 1751: 167 ) au pied du Zinggenstock, bien reconnaissable sur la gravure, c'est-à-dire moins de 1000 mètres en arrière de l' embou de l' Oberaarbach.

c ) selon le texte de Cappeler, le glacier d' Unteraar, « en même temps l' un des plus grands,... avait son commencement à environ une heure et demie de chemin du célèbre hospice du Grimsel, en marchant à main droite en direction du midi,... » ( CAPPELER in ALTMANN 1751: 135 ). D' après ces indications ( 1,5 heure de marche correspondant à une distance d' environ 7,5 km de l' hospice ), le glacier s' ar à 3 km environ à l' ouest de l' Oberaar, ce qui représenterait un recul extrêmement important ( à env. 2950 m du maximum de 1871, ou 1300 m de son extrémité actuelle ), au pied nord du Vorderer Tierberg. Le plan comme la gravure ( AU 02* p. 271 ) contredisent ces indications5.

Lorsque Cappeler se renseigne auprès des habitants du lieu sur le comportement du glacier, on lui répond que « la glace grandit chaque année dans les vallées, sans qu' on ait observé jusqu' ici qu' elle rétrécisse à nouveau ». Pour preuve de cela, les Valaisans lui montrent « comment, en plusieurs lieux, il y a eu un grand nombre de ces arbres appelés mélèzes, mais qu' ils ont été renversés par la poussée de la glace et finalement recouverts ». ( CAPPELER in ALTMANN 1751: 141/142 ).

C' est environ 30 ans plus tard, probablement vers 1758, qu' est exécuté le dessin original de la gravure « le glacier de Zinke ou la paroi du glacier de Lauteraar » ( AU 04*, p. 271 ) qui accompagne le livre de Grüner Eisgebirge des Schweizerlandes ( GRÜNER 1760, 1: 48/49 ). Après avoir fait allusion à l' importante couverture détritique de l' extrémité orientale de la langue, Grüner critique la représentation de Cappeler: « Cette paroi n' est pas construite comme un mur régulier, comme la présente la AU 04 H. Grimm, autour de 1758: l' extrémité du glacier, au pied du Vorderer Zing-genstock'?H,t\,fDer Znikf {ilrt.trlirr ûi/rr t//r Eiiivimiitux Lmilei un Cant. Sem AU 02 M. A. Cappeler, probablement entre 1719 et 1729 ( pubi, en 1751 ): plan et vue de la langue terminale du glacier de l' Unteraar description de Monsieur Altmann; au contraire, elle est sensiblement plus haute en son milieu, et plus basse sur chacun de ses côtés. Elle n' est pas non plus découpée verticalement; mais, sur toute sa longueur, sa partie médiane forme un ventre ». ( GRÜNER 1760, 1:48 ).

Il note à propos de la position de l' extrémité de la langue du glacier de Lauteraar: « Cette paroi de glace relie en quelque sorte le Vor-derzinkestock et le Brüstberg ( Brünberg ?) dressé au nord-ouest » ( GRÜNER 1760,1: 49 ). Le fleuve glaciaire se terminait ainsi au pied du Vorderer Zinggenstock, à 1000 mètres environ en arrière de la moraine du maximum glaciaire de 1871. Si la gravure AU 04* p. 271, où nous avons une vue de la rive gauche du glacier vers le sud-sud-est, c'est-à-dire le « Vorderzin-ken », confirme ces indications, une évaluation plus précise de sa situation terminale est toutefois impossible. Sur la gravure « Vue de la Glacière où l' Aare prend sa source dans un lieu nommé Hospital », réalisée dans les années 1770 par Le Barbier ( AU 08.1, p. 270 ) et publiée dans les Tableaux de la Suisse de ZURLAUBEN, l' extrémité de la langue est représentée fidèlement, mieux sans doute que chez Grüner, mais une détermination topographique exacte de sa position n' est pas possible.

Le grand peintre alpin C. Wolf, à qui nous devons de magnifiques huiles des glaciers du Rhône et de Rosenlaui ( cf. pp. 183 et 238 ), séjourne également au glacier de l' Unteraar et y réalise des vues des environs de l' Abschwung, mais aucune de l' extrémité de la langue. Ainsi le comportement du glacier pendant les années 1770 ( une période bien documentée pour d' autres endroits ) ne peut être reconstituée d' une manière satisfaisante.

Les indications les plus sûres pour cette période sont apportées par le naturaliste bernois J. S. Wyttenbach qui visite le glacier de l' Unter le 5 août 1777, puis de nouveau onze ans plus tard, le 2 août 1788: « En 1788, l' écoule de l Aar se faisait sur la rive septentrionale du glacier et, parce que le phénomène était nouveau, il ne formait encore ni voûte, ni paroi de glace. (... ) Le glacier s' allongeait jusque sur des places de végétation et avait atteint la proximité d' une petite forêt d' aroles située sur son côté nord. La plus grande partie des dépôts de pierres se trouvait tout à fait contre les bords du glacier; au milieu seulement, j' en vis un autre, à une portée de fusil environ vers l' aval, que le glacier a dû jadis entraîner jusque-là. Que le glacier était en crue, et cela depuis quelques années, les habitants me le dirent aussi ». ( WYTTENBACH, 2.8.1788: 25 ).

L' époque à laquelle s' est formée la moraine que Wyttenbach place à 130-150 mètres ( une portée de fusil ) du glacier reste incertaine. L' inondation du terrain des avancées rend toute reconstitution impossible. Pour 1788, seule l' avance elle-même est établie.

Intéressante, mais imprécise du fait de son format réduit, est une gravure coloriée, en forme de médaillon, du « Glacier de Lauteraar » ( AU 09.2 ) par C. Wyss ( peut-être une copie de C. Wolf ); le glacier s' y termine au pied du Vorderer Zinggenstock ( à gauche sur l' image ), à faible distance du flanc nord-est du Zinggen- stock, à une altitude de 2260 mètres environ, là où fut ouvert, en 1719, le plus grand four à cristaux des Alpes Suisses recensé par la litté-rature6. Wyss a probablement représenté cette cavité sur la gauche du médaillon ( Wolf a également réalisé un tableau depuis l' entrée de la grotte, cf. Raeber 1979: 292, Cat. N°.364 ).

Le 19 août 1794, H. C. Escher de la Linth visite pour la première fois le glacier. L' image qu' en donnent ses Fragmente über die Naturgeschichte Helvetiens conviendrait encore à la situation actuelle: « Le glacier de Lauteraar (... ) s' étend tout à plat dans cette vallée horizontale (... ), sans crevasses, ni fentes d' aucune sorte. Simplement, on voit une pente tranchée presque verticalement qui est l' extrémité de l' énorme masse de glace. (... ) Le glacier lui-même est entièrement recouvert d' une épaisse couche de débris et d' éboulis (... ). Puisque, ici, il n' apparaît aucun remblai glaciaire remarquable », Escher croit que « ce glacier n' est soumis à aucune avance, mais demeure au lieu même où il né ». ( ESCHER 1791/1794, 1:89/90 125 ).

Ainsi, il n' observe pas le dépôt morainique, vu six ans plus tôt par Wyttenbach.

Il est difficile d' admettre que le glacier ait tellement avancé ( de 130-150 m en effet ) et qu' il l' ait recouvert dans l' intervalle. Leurs observations se contredisent donc. Lequel des deux avait la meilleure vue? De cela, nous ne déciderons pas!

Nous avons une belle illustration du texte dans le dessin à la plume, réalisé par Escher le 19 août 1794 ( Au 10*, p. 279 ) et représentant le front du « glacier de Lauteraar au Grimsel », mais elle est par trop imprécise pour faciliter la détermination de l' état de la langue. Cependant, la pente de glace, visiblement très impressionnante, confirme l' avance du glacier7.

3. La crue du glacier de l' Unteraar au XIXe siècle ( jusqu' en 1871 ) Le glacier de l' Unteraar figure également sur le grand relief des Alpes Suisses à l' échelle de 1:38000, exécuté par J. E. Müller ( au 16* ), probablement dans son état de 1810/1812 ( cf. pp. 196, 197 ). L' étonnante qualité de rendu des lieux qu' il présente pour le glacier du Rhône ne se retrouve pas dans celui de l' Unteraar. L' épaisse couche de débris dans la zone frontale est bien indiquée, mais des détails aussi précis qu' au glacier du Rhône font défaut. On a pu estimer que l' ex de la langue se trouvait 1150 à 1320 mètres à l' ouest du confluent de l' Oberaar et de l' Unteraar, ou à 1100-1270 mètres environ du maximum glaciaire de 1871. Néanmoins, une telle extension n' est en rien assurée. Le glacier apparaît encore sur trois esquisses de panoramas du Nägelisgrätli ( AU 12 et 14 ) et du Sidelhorn ( Au 13 ), malheureusement non datées et d' une facture peu soignée. L' extrémité de sa langue y est invisible ou partiellement masquée, mais, sur les trois dessins, son extension semble plus considérable que sur le relief, ce qui vient ajouter à la valeur du témoignage fourni par cette source.

J. R. Wyss, dans son Voyage dans l' Ober Bernois, décrit également le glacier d' Un qu' il visite en 1815 ( le 2 août ) et 1816: « Haut comme une tour, large d' une étendue d' un bon quart d' heure, et très raide, le glacier s' élève soudain par un mur de glace recouvert presque entièrement de sable et d' éboulis ». ( WYSS 1817, 2: 759 ). Qu' alors il se soit tenu encore très en-deçà de son maximum du XIXe siècle ( en 1871, près de Mederlouwenen, au-dessous du Bärenritz ), mais qu' il ait eu une extension bien supérieure à celle d' aujourd, cela ressort de la description suivante ( cf. carte, pp.268/269 ): « Par les pentes du Berrenlamm, nous atteignîmes le grand chaos de blocs qui recouvrent son écoulement. Le glacier s' élève un peu en son milieu et s' incline au sud vers le Zinkenberg, au nord vers le Brunberg par le pied duquel nous nous étions approchés de lui ». ( WYSS 1817, 2: 760 ). Un an plus tard, Wyss note une avancée: « En été 1816, son écoulement était notablement déplacé vers la vallée de l' Aar ». ( WYSS 1817,2:769 ).

Cinq ans après lui ( en 1821 ?), K. Kasthofer8 confirme la progression: « Le glacier de l' Aar antérieure, non loin de l' hospice du Grimsel, (... ) a avancé maintenant de plusieurs centaines de pieds au-delà de son ancienne moraine. Sur les parois rocheuses, dans l' ouver desquelles il se force un passage, les marques des sillons qu' il a creusés, jusqu' aux plus élevées, sont ensevelies sous la glace. Nombre des vieux aroles, qui ici encore, sur le versant ensoleillé, avaient poussé au cours des siècles sans le moindre dommage, se sont mis à dépérir, cela avant même les rigueurs des années 1816 et 1817 ». ( KASTHOFER 1822: 300, cf. aussi 210 ).

S. Birmann, sur son « Panorama du Sidelhorn », d' août 1824 ( AU 23* p. 280 ), a dessiné à la plume le glacier de l' Unteraar, avec l' exacti photographique dont il est coutumier. Cascadant par-dessus les ressauts de la double couronne des sommets du Lauteraarhorn et du Schreckhorn, le glacier avec toute la couverture de ses moraines médianes fait l' ef d' un fleuve aux puissants méandres.

Le glacier, dont le front est très clairement composé de deux parties ( le lobe de Lauteraar, à droite sur l' image, s' étend visiblement plus loin dans le fond de la vallée ) a fortement progressé; il dépasse la position attestée par les précédentes illustrations et se termine à 190-240 mètres environ à l' ouest du maximum de 1871. La structure des parois rocheuses, à l' ouest du Bärenritz et de Mederlouwenen, permet une estimation topographique de la position de l' extrémité de la langue. Birmann, observateur méticuleux, a naturellement différencié ( par un lavis gris ) l' importante couverture détritique de la zone frontale. Du côté du Zinggenstock ( à gauche sur l' image ), le front du lobe de Finsteraar porte deux portails. En avant du glacier, Birmann n' a pas dessiné de moraines, soit qu' elles aient fait défaut, soit que, de la distance où il se trouvait, il n' ait pu les apercevoir assez clairement.

De 1827 à 1831, le professeur et naturaliste soleurois Franz Joseph Hugi ( 1793-1855)9 fait chaque été un séjour au glacier de l' Unteraar. Pour l' occasion, il se fait installer sur la moraine médiane, à l' est de l' Abschwung, un abri entre deux blocs de granite. C' est probablement lors de son troisième voyage alpin, en 1829, que l' ingénieur Walker et P. Gschwind 10 doivent lever une carte, gravure coloriée de gris-bleu qui est annexée à son Naturhistorische Alpenreise paru en 1830, sous le titre « Le glacier d' Unteraar et ses embranchements » ( AU 25, échelle irrégulière, variant entre 1:45000 et 1:60000 ) n. Orientée au sud, elle comprend tout le bassin du glacier de l' Unteraar, du front jusqu' aux plus hauts sommets, ainsi que les moraines médianes et latérales. Hugi voit la principale utilité de la carte parce que, « au moyen de signaux, par exemple un bloc de granite blanc gravé d' une croix, le déplacement du glacier au front pourra être déterminé ». ( H U G 1830: 233 ).

Sur la carte, meilleure que celle de l' ATLAS SUISSE de Meyer-Weiss-Müller ( feuille 11 parue en 1800 ), mais que, à cause des disparités de son échelle, on peut difficilement considérer comme une base exacte, le fleuve glaciaire se termine ( en 1829 ), côté sud, à 265-285 mètres environ en arrière de l' embouchure de l' Oberaarbach ( échelle env. 1:53000-57000 ), et, côté nord, à 106-114 mètres environ en arrière de la ligne du torrent, au-dessous du Bärenlamm. Sur la base de ses voyages annuels, Hugi est le premier à pouvoir donner des renseignements plus précis sur les modifications du front glaciaire. « Le glacier a avancé depuis l' an passé de 40 à 50 pieds vers l' aval; et en 18 ans, de plus d' un quart d' heure. Dans le même temps, il s' est aussi étendu sur ses côtés ...Un petit arole qui se tenait l' an passé sur un granite couvert de végétation est maintenant atteint par le glacier et détruit ». ( HUGI 1830: 229 ). La valeur annuelle de 11,7 à 14,6 AU 06.1 C. Wolf, 1774/1776: le glacier de Lauteraar, vu de l' Ab ( esquisse utilisée pour la réalisation du tableau au 06.2* ) mètres pour 1828/1829 ( 1 pied bernois = 0,293 m ) est parfaitement réaliste. En revanche, l' indication d' une distance « d' un quart d' heure » ne se laisse pas traduire exactement. Si nous partons de l' extension du glacier, telle que la donne ( avec la même imprécision ) le relief de Müller vers 1810/1812 ( AU 16 ), nous obtenons en 18 ans ( jusqu' en 1829 ) une progression de 860 à 1050 mètres ( ce qui pourrait tout à fait correspondre à un quart d' heure de marche ). Compte tenu du dessin de Birmann de 1824 ( AU 23* p. 280 ), cette valeur aurait dû être atteinte en 12 ou 14 ans déjà, ce que la grande inertie du glacier rend, semble-t-il, peu acceptable. Comme il recule de nos jours sans interruption depuis plus de cent ans, nous n' avons pas de chiffres actuels à ce sujet.

De 1840 à 1845, après une première visite en 1839, Louis Agassiz ( 1807-1873)12, jeune professeur de zoologie et de paléontologie à Neuchâtel, y conduit, avec une équipe de collaborateurs, un programme d' expérimentations tout à fait dans la ligne de la science moderne, et qui marque le début de la recherche glaciologique expérimentale ( cf. pp. 281-284 ). A cette occasion, Johannes Wild, ingénieur géomètre et plus tard professeur de géodésie à l' Ecole polytechnique de Zurich, dessine ( en été 1842 ) d' après les indications d' Agassiz ( 1847: IV ), la « Carte du glacier inférieur de l' Aar l' échelle de 1:10000 ( AU 38* pp. 282/283 ). Agassiz publiera en 1847 cet ouvrage unique en son temps et aujourd'hui encore digne d' admiration, « la première carte scientifique d' un glacier » ( KLEBELSBERG 1948, 1: 3 ), dans l' Atlas de ses Nouvelles études et expériences sur les glaciers actuels. Sur la lithographie en deux couleurs ( un d' œuvre également du point de vue esthétique ), la langue du glacier, longue alors de plus de 8 km au-dessous ou à l' est de l' Abschwung et semblable à une double vague élégamment déroulée, est rendue par un système raffiné d' om de pente. Wild, à la demande d' Agassiz, y a retenu toute la variété des phénomènes de surface du glacier, tels que moraines, entonnoirs, cônes ( par exemple le « grand cône » sur la moraine médiane, dans l' alignement des repères VIII et IX ), blocs rocheux de diverses tailles et bien entendu, près de l' Abschwung, V«Hôtel des Neuchâtelois », marqués en noir.

au 07.1 C. Wolf, 1774/1776(7 ): une table glaciaire sur le glacier de l' Unteraar Les systèmes de crevasses, les torrents glaciaires superficiels et les lacs, les cascades in-traglaciaires sont introduits en bleu dans les structures de base noires. En 1842, le glacier se termine par un front imposant et abrupt, à 130 mètres environ ( sur son côté sud ) du confluent de l' Oberaarbach et de l' Unteraar. Depuis l' époque de la carte de Hugi ( Au 25 ), c'est-à-dire pendant la période comprise entre 1829 et 1842, il a progressé, sur son flanc sud de 135 à 155 mètres ( d' env. 10, 4 à 11,9 m par année ); sur son flanc nord, un peu moins, de 84,4 à 94,4 mètres environ ( 6,5 à 7,3 m par année ).

Sur la « Carte Orographique du Glacier de l' Aar montrant les détails de la Stratification et l' origine des glaciers de second ordre » ( Au 43 ), levée quatre ans plus tard ( en 1846 ) par l' ingénieur J. R. Stengel, c' est son extension de 1842 qui semble être reprise, bien que les mouvements de son extrémité aient été régulièrement mesurés au cours des années de la campagne' 3.

Le 22 août 1847, cinq ans donc après la carte d' Agassiz, Henri Hogard fixe sur une lithographie en couleur et de grand format, publiée en 1854 dans les Principaux Glaciers de la Suisse ( Au 54* p. 291 ), l' extrémité de la langue du glacier, couverte de débris morainiques. L' extension de celui-ci est alors beaucoup plus considérable qu' aujourd, et sa surface fortement bombée ( convexe ) indique une progression. De nos jours au contraire, sa surface est affaissée ( concave ): il est en recul. Du fait qu' elle a son origine dans plusieurs régions de névés dont les conditions lithologiques sont différentes, la langue est de deux couleurs nettement tranchées: le glacier de Finsteraar ( à gauche ), avec son portail, est brun-rouge ( forte proportion de schistes micacés de la couverture schisteuse méridionale ), et celui de Lauteraar ( à droite ), avec deux grandes ruptures de front, de clair à brun-gris sombre. Dans le commentaire de l' illustration, Hogard confirme l' avance, plus notable en 1852 dans le lobe du glacier de Finsteraar: « Le glacier s' avance sensiblement vers les chalets que l'on voit sur sa droite, près des rochers de Baerenritz, et il touchait en 1852 ( au mois de juillet ) le bloc que l'on voit sur la rive droite près de la voûte sous laquelle sort la branche principale de l' Aar. De ce côté, son avance a constamment été plus sensible que sur la rive gauche, la branche du Finster-Aar étant plus forte et recevant des affluents plus nombreux que celle du Lauter-Aar ». ( HOGARD 1854: 10 ). Sur la lithographie ( AU 54* p. 291 ) manquent, sur le terrain des avancées ( et abstraction faite d' une petite moraine latérale figurée sur la gauche de l' image ), des accumulations morainiques importantes de stades antérieurs. Nous avons remarqué, en examinant sa vue du glacier du Rhône ( cf. pp. 211/212 ), que Hogard était particulièrement attentif aux phénomènes géomorphologiques. Aussi aurait-il à coup sûr représenté, le cas échéant, de telles accumulations. Voilà qui confirme une fois encore, de manière indirecte, la progression continue du glacier pendant une assez longue période14.

Au même moment ( en 1851 ), J. Anselmier, en liaison avec le service géodésique suisse, cartographie pour l' Atlas Dufour la région du glacier de l' Unteraar qui figure sur sa feuille XVIII, levée à la planchette ( échelle 1:50000, AU 70 ). Une comparaison des états de l' extré du glacier en 1842 ( Au 38* pp. 282/283, carte Agassiz-Wild ) et en 1851 ( AU 70, Anselmier ) fait apparaître, selon le lieu de la mesure, un écart de 44 à 62,5 mètres 75. Vouloir donner les valeurs exactes de la progression du glacier pour cette époque n' a de toute façon pas de sens, l' échelle de la carte étant trop petite et Anselmier trop peu précis ( cf. glacier du Rhône p. 213 ).

La poursuite de l' avancée est documentée par le plan de Daniel Dollfus-Ausset ( 1797-1870)16, « Glacier de l' Unteraar, Situation des blocs numérotés de 1842 à 1854 » ( en fait 1861 ) à l' échelle de 1:10000 ( AU 53 ), qui reproduit l' état de la langue terminale pour les années 1842/1852/1854/1861. Au cours de ces 19 ans, le front du glacier a avancé en son milieu de 120 mètres environ ( sur les deux côtés sud et nord, les valeurs sont moindres ).

En 1861, avant donc le maximum de 1871, A. Braun ( 1812-1877 ), ou plutôt son collabora- 5. Grands moments de la recherche glaciologique au glacier de l' Unteraar C' est le peintre Caspar Wolf ( 1735-1783 ) qui donne les premières représentations exactes des glaciers de l' Unteraar et du Lauteraar.

teur Jean-Claude Marmand, photographie du Sidelhorn et du Pavillon Dollfus le glacier d' aspect très impressionnant ( AU 72/AU 73)17.

Cette poussée se prolonge jusqu' en 1871 18, année où le glacier « atteint sa plus grande extension de l' âge postglaciaire ». ( KlNZL 1932: 330 ).

Dans l' intervalle de 1842 à 1870, mieux étudié ici qu' en d' autres régions, le glacier a progressé de 150 mètres environ en son milieu ( 5,2 m par an ), de 117,2 m sur son côté nord ( 4,05 m par an ), et de 80 mètres sur son côté sud ( 2,7 m par an ).

4. Le retrait continuel de 1872 à 1986 En 1872, une année après le maximum glaciaire, L' Hardy effectue un relevé très schématique du glacier et de ses environs pour la carte Siegfried à l' échelle de 1:50000 ( AU 78 ). Le glacier est beaucoup mieux différencié sur la carte originale XVIII, levée à la planchette par J. Becker et figurant dans l' Atlas Siegfried de 1879/1880 ( AU 80* p. 290 ). Le front a reculé de 60-80 mètres environ ( FOREL 1884, 5: 296 ) en arrière des moraines ( bien visibles ) de sa position la plus avancée.

A peu près contemporaine semble la photographie « Vue depuis le Mont Sidelhorn » ( AU 79* p. 290 ) montrant le glacier et la moraine du maximum glaciaire de 1871, disloquée en quatre parties. L' écoulement principal, avec son portail, se fait sur le côté sud ( à gauche sur l' image ) dont le recul est déjà plus accentué. Neuf ans plus tard ( à la fin d' août 1889 ), Jules Beck ( 1825-1904 ) photographie la « Moraine frontale du glacier de l' Unteraar et Lauteraarhörner, vus de Ghälteralp 1862 mètres » ( AU 86 ). L' extrémité de la langue glaciaire présente les symptômes indubitables du retrait: sa surface se déprime et se creuse d' enton, la glace disparaît peu à peu sous l' épaisse couche d' éboulis. Cette apparence n' a plus beaucoup varié jusqu' à aujourd'hui.

De 1871 à 1986, le glacier a reculé presque sans interruption, en tout et pour tout de 1790 mètres ( de 133 m pour la seule période de 1979/1980 à 1986 ).

AU 10 H. C. Escher de la Linth, août 1794: le front du glacier de l' Unteraar Deux des visites qu' il y fait ont lieu en compagnie de J. S. Wyttenbach ( 1748-1830 ), pasteur à l' église du Saint-Esprit et, après A. de Haller, le plus grand naturaliste bernois de la seconde moitié du XVIIIe siècle. Cette circonstance influence immédiatement le contenu de ses tableaux. C' est ainsi que, de 1774 à 1777, il réalise dans la région de l' Abschwung, au confluent des glaciers du Finsteraar et du Lauteraar, trois esquisses à l' huile et trois tableaux ( AU 05.1 *, AU 06.1 * p. 274, AU 07.1 * p. 276 ), deux de ces derniers devenant plus tard la base de gravures des VUES REMARQUABLES de 1780/1782, 1785 et 1789 ( AU 06.4, 06.5, 06.6 et AU 07.1* p. 276, AU 07.2* p. 277 ). Le glacier, épanché en arc puissant de la fière pyramide du Finsteraarhorn et s' écoulant largement jusque sur le devant de l' image, forme le centre des vues AU 05.1* p. 274, AU 05.2 ( esquisse à l' huile et tableau ) datant probablement de 1774. Les représentations AU 06.1* et AU 06.2* p. 274, AU 06.3 ( AU 06.1* de ton spontané et très frais, le tableau AU 06.3 plus sombre ) sont dominées à l' arrière par la couronne 279 dentelée des groupes Lauteraarhorn-Schreck-horn, à l' avant et à gauche par la haute pyramide détritique s' élevant sur la moraine médiane, à droite par les névés du Lauteraar. Les personnages figurés ( différemment sur AU 06.2* p. 274 et AU 06.3 ) sont tous occupés du glacier, qu' ils soient peintres, contemplateurs de monts ou naturalistes observant la pyramide glaciaire apparaissant au premier-plan à droite' 9.

Mais que signifie la recherche glaciologique en cette deuxième moitié du XVIIIe siècle, en ce crépuscule de la philosophie des lumières? J. S. Wyttenbach, une fois encore, nous en donne l' idée. Le 5 août 1777, il choisit pour ses observations ce lieu, au pied du Finsteraarhorn et des Lauteraarhörner, « où le glacier se partage en plusieurs bras et où, au point de leur réunion, il a charrié de grandes masses de débris et d' énormes éboulis. Wolf a peint cette place que nous occupâmes pour nous reposer et séjourner c' est là que je préparais mes baromètres et mes thermomètres ». ( WYTTENBACH 1777/1788: 28 ). En dehors de la récolte d' échantillons rocheux et des mesures topographiques, il s' intéresse particulièrement aux phénomènes morphologiques de la surface du glacier dans le secteur de la mo- raine médiane. Il est tout spécialement fasciné par les pyramides de glace ( cf. AU 06.1* et 06.2* p. 274, AU 06.3 à droite ) et par les tables glaciaires ( AU 07.1* p. 276 ). « Un peu plus loin, je fus frappé par un phénomène que je n' avais encore observé sur aucun glacier, à savoir un bloc de rocher d' une longueur de 18 à 20 pieds, large et épais en proportion, lequel se trouvait au milieu d' un bassin de glace, reposant en parfait équilibre, environ à hauteur d' homme, sur un beau et épais pilier de glace, et offrant le plus curieux spectacle... Ce grand rocher se trouvait, de même que mille autres, sur le plat du glacier ». ( WYTTENBACH 1777/1788:38 ).

Wolf, sur son étude à l' huile AU 07.1* p. 276, en reproduit les proportions avec exactitude. Sur les aquatintes en couleur ( AU 07.2* p. 277, AU 07.3 ) en revanche, la taille des personnages est diminuée, sans doute dans l' idée d' accroî encore l' effet du phénomène étonnant pour l' époque.

Après les observations du pionnier F.J. Hugi de 1827 à 1831 ( cf. p.273 ), ce sont les campagnes estivales de Louis Agassiz ( 1807-1873)12 et de ses compagnons, longues de plusieurs semaines, pendant les années 1840 à 1845, qui constituent au XIXe siècle le grand moment des recherches glaciologiques au glacier de l' Unteraar. Agassiz, dans son discours d' ouverture du 24 juillet 1837 devant l' assemblée annuelle de la Société suisse d' histoire naturelle à Neuchâtel, avait défendu avec véhémence la théorie glaciaire, c'est-à-dire l' existence, encore très contestée à l' épo, d' une glaciation quaternaire en Suisse et en Europe. Après deux longs voyages réalisés en 1838 et 1839 à divers glaciers des Alpes centrales et occidentales, il publie ses résultats dans les Etudes sur les glaciers ( AGASSIZ, 1840 ), sa première œuvre maîtresse, au succès de laquelle un imposant volume de 32 planches gravées n' est pas le dernier à contribuer. Il reconnaît cependant la nécessité, pour les chercheurs de l' avenir, de séjourner sur place et d' étudier les glaciers sur de plus longues périodes, cela en accord avec sa devise: « La nature doit être notre seul manuel ».

Son intérêt particulier pour le glacier de l' Unteraar a plusieurs raisons:

Lors de sa première visite au glacier, en 1839, il constate avec surprise que, depuis 1827, la cabane de Hugi s' est éloignée de l' Abschwung de plus de 4400 pieds vers l' aval ( soit environ 1289,2 m en 12 ans, ou 107,4 m par an ), ce qui est pour lui un indice essentiel du mouvement glaciaire ( AGASSIZ E. 1887: 226, PORTMANN 1975: 121-124)20. Outre cela, l' im extension du glacier, son accès facile, ainsi que la proximité de l' Hospice du Grimsel ont dû le déterminer à en faire l' objet de son étude.

Chaque été, de 1840 à 1845 ( sauf en 1844 ), Agassiz et ses compagnons séjournent plus ou moins longtemps sur le glacier; la plus longue et la plus importante campagne dure du 4 juillet au 5 septembre 1842. A cela s' ajoute, en 1841, la visite faite par Agassiz au mois de mars, à l' occasion donc d' un « voyage d' hiver » ( PORTMANN 1975: 134 note 49 ). Pendant les campagnes ( toutes avec des objectifs très précis ), chacun de ses collaborateurs a la mission d' obtenir certains résultats.

L. Agassiz est l' initiateur, le principal organisateur, responsable des mesures thermométriques, hygrométriques et barométriques ( DESOR 1847: 189; PORTMANN 1975: 125 ); son fidèle secrétaire Jean-Edouard Desor ( 1811-1882)21, en tant que naturaliste, est chargé des questions glaciologiques ( p. ex. l' examen de la structure de la glace ) et géomorphologiques {«Nature et origine des moraines », DESOR 1847: 187 ). Carl Vogt ( 1817-1895)22, médecin à l' origine et devenu après son expulsion d' Allemagne ( en 1848 ) professeur de géologie, de paléontologie et de zoologie à Genève, s' intéresse à la formation des neiges rouges. Célestin Nicolet examine la flore du glacier et de ses environs. Enfin, aux ingénieurs J. Wild, puis Stengel, venus s' ajouter à l' équipe, revient la charge de mesurer avec le plus de précision possible la topographie et la géomorphologie du glacier, et d' en lever deux cartes au 1:10000 ( AU 38* pp. 282/283, AU 43 ) qui permettront de noter ses mouvements. C' est dans ce domaine, en effet, que la contribution du travail d' Agassiz est la plus importante.

Joseph Bettannier exécute les planches des Etudes sur les glaciers ( AGASSIZ 1840en-suite, de 1840 à 1845, c' est le vieil ami d' Agas, Jacques Bourckhardt ( 1811-1867)23 - accompagné en 1843 du jeune peintre Gustave Castan ( 1823-1892)24 - qui participe aux campagnes en qualité de dessinateur.

CARTE OU GIACIER IN'.'f .... tu I.V. ' ,\ „ 1.1.. ',. Jue au 38 J. Wild, été 1842: la première carte scientifique du glacier à l' échelle 1:10000. Elle est due à l' initiative de L. Agassiz et fut publiée en 1847 Les résultats de leurs innombrables observations, Agassiz les publie à Paris en 1847 sous le titre Système glaciaire ou recherches sur les glaciers... première partie: Nouvelles études et expériences sur les Glaciers Actuels, leur Structure, leur progression et leur influence sur le sol. Cette monographie du glacier de l' Unteraar, comportant un texte étendu et un volume de planches ( avec 3 cartes et 9 planches cf. AU 37, AU 38* pp. 282/283, AU 39*p.283, AU 40-49 ), sa deuxième œuvre décisive, marque le début de la recherche glaciologique expérimentale moderne.

comme lithographie dans son volume de planches illustrant ses « Nouvelles études et expériences sur les glaciers actuels ».

Mentionnons quelques résultats essentiels: Agassiz et ses compagnons complètent par des observations détaillées et des mesures les premières constatations de B. F. Kuhn au sujet de l' écoulement des glaciers, publiées en 1787 dans son Versuch über den Mechanismus der Gletscher ( KUHN 1787: 1-26 et RÖTHLISBERGER 1987: 147-152 ) devenu célèbre pour sa qualité scientifique. Ainsi, durant l' été 1842, ils repèrent le déplacement journalier de la surface du glacier au moyen de blocs ( p. ex. du 3 au 26 août 1842, +0,1 m/jour ). Les années suivantes, Agassiz introduit des méthodes encore en usage de nos jours: mesure au théodolite de jalons enfoncés dans la glace, et mesure mécanique directe du déplacement d' un jalon planté sur le bord du glacier, en face d' un repère établi sur un rocher de la rive. Ces opérations font apparaître de larges variations saisonnières de la composante horizontale du déplacement, avec un premier maximum de vitesse durant la fonte des neiges et un deuxième, moins important, en février. La mesure du mouvement vertical de la glace, réalisée à une moindre échelle, indique une élévation saisonnière du niveau du glacier, qu' Agassiz n' est toutefois pas encore en mesure d' interpréter. Lui-même et ses compagnons ne cernent pas encore la cause effective du mouvement des glaciers, ce qui ne diminue en rien l' importance de leurs travaux. Agassiz estime à 380 mètres l' épaisseur du glacier de l' Unteraar, chiffre dont les mesures récentes ont révélé l' étonnante exactitude. A l' occasion, dans sa quête de résultats, il fait preuve d' une extraordinaire audace: ainsi, un jour de 1841 par exemple, emmitouflé dans des peaux de marmottes, il se laisse descendre par l' orifice d' un torrent de fonte, suspendu à une corde, jusqu' à 120 pieds ( 35-36 m ) dans les profondeurs du glacier. Lors des campagnes longues de plusieurs semaines, Agassiz et ses collaborateurs font leur gîte d' un énorme bloc de schiste micacé, situé sur la moraine médiane et baptisé en 1840 « Hôtel des Neuchâtelois ». Ce rocher se trouve alors à 797 mètres à l' est de l' Abschwung 25 probablement tout près de l' endroit d' où C. Wolf et S. Wyttenbach, 75 ans plus tôt, puis F.J. Hugi, vers 1830, ont procédé à leurs observations. J. Bourckhardt dessine ( AU 33.1 * p. 287/34.1* p. 286/36.1* p. 286 ) ou peint ( AU 35 et 36.2* p. 287 ) Y « Hôtel des Neuchâtelois » à plusieurs reprises pendant ces années; Nico-let26, dans l' atelier d' Agassiz, en tire des lithographies pour les touristes et les personnes intéressées ( AU 33.2 et 34.2 ).

Sur le dessin à la plume aquarelle ( Au 33.1* p. 284 ), on voit le côté sud de Y « Hôtel » de 1840, avec l' arrière du glacier du Lauteraar. Le dessin Au 34.1* p. 286 montre la face nord du bloc et les masses glaciaires du Finsteraarhorn. Le refuge a été aménagé au cours des années. La peinture AU 35* p. 287 de 1842 en représente le vestibule où L. Agassiz est ins- tallé avec ses instruments, scène que le texte de Desor ( 1847: 389 ) semble commenter: « La cuisine était la pièce la plus confortable; on pouvait s' y tenir debout, et son foyer de glace faisait à chaque fois l' admiration des étrangers; et, de fait, il était étonnant de voir la marmite bouillir sur une saillie de glace recouverte de pierres ». De Y « Hôtel », muni des fenêtres ajoutées probablement par les transformations de 1841, J. Bourckhardt tire le sujet d' une aquarelle, une vue vers l' est et l' aval ( AU 36.1 * p. 286 ), et d' un tableau rehaussé par le décor montagneux du Finsteraarhorn ( AU 36.2* p.287 ).

Tous ces scientifiques et chercheurs n' oubliaient pas les plaisirs de l' existence. Ainsi, un beau dimanche de l' été 1842 voit des musiciens du Haut-Valais, avec bon nombre de jeunes garçons et filles du village de Guttannen, se rassembler sous une tente installée sur le glacier de l' Unteraar pour y célébrer une fête du glacier. Un des compagnons d' Agassiz note à cette occasion: « Le bal dura jusque très avant dans la nuit, et bien que le sol ne fût pas très lisse et la musique encore bien plus raboteuse, on dansa avec une belle persévérance. Et de tout le temps que les Alpes sont debout, ce fut sans doute le premier bal sur un glacier ». ( DESOR 1847:496 ).

Après le départ d' Agassiz pour les USA en 1846 ( où il est nommé professeur d' histoire naturelle à l' Université de Harvard à Cam-bridge/Mass. ), Daniel Dollfus-Ausset ( 1797-1870 ), industriel alsacien passionné de glaciers, poursuit jusqu' en 1863 les observations et les mesures au glacier de l' Unteraar. Il en publie le résultat dans la riche documentation des Matériaux pour l' étude des glaciers ( DOLLFUS-AUSSET 1863-1872 ).

Des années 1847-1849 datent plusieurs belles et grandes lithographies en couleur de Hogard ( 1854: 6-15 ). L' artiste a représenté l' extrémité de la langue ( AU 54* p. 291 ), le glacier près du pavillon Dolfuss ( Au 55, un panorama de format oblong, avec à gauche la langue, et à droite la zone du confluent des glaciers du Lauteraar et du Finsteraar ), de même que les puissantes moraines de l' Abschwung AU ( 56* p. 289 ). Mais la plus belle œuvre de la série est sans doute AU 57* p. 289, avec le « Cirque de la Strahleck » et la paroi nord-est du Finsteraarhorn baignée de soleil, les pointes de son sommet effilées encore par une stylisation. Comme nous l' avons vu, il existe de semblables images du Finsteraarhorn et du névé. Elles sont de C. Wolf ( Au 05.1 * p. 274, AU 05.2 ). G. Lory fils ( Au 22 ) et S. Birmann ( AU 24 ).

Au XXe siècle, le glacier de l' Unteraar continue à être le laboratoire de recherches décisives. Dans les années 1936-1950, plusieurs campagnes sismologiques y sont organisées ( KASSER 1986: 206/207 ).

Depuis 1969, des mesures systématiques de son déplacement sont réalisées au moyen d' une caméra automatique ( FLOTRON 1973: 15-17 ). A cette occasion, on a observé pendant la fonte des neiges, à côté de son maximum typique de vitesse, un mouvement vertical atteignant jusqu' à 0,6 m ( IKEN, RÖTHLISBERGER H., FLOTRON, HAEBERLI 1983: 28-47 ). Le phénomène serait dû à des accumulations d' eau sur le lit du glacier, dont le glissement serait ainsi influencé par la pression des eaux subglaciaires et l' état correspondant des cavités développées sur sa semelle.

6. Le glacier de l' Unteraar menacé La langue du glacier de l' Unteraar est aujourd'hui gravement menacée par le projet « Grimsel West » des usines de l' Oberhasli, qui prévoit une élévation du niveau du lac du Grimsel jusqu' à la cote 2020 m. Si les conditions climatiques actuelles se maintiennent, on peut craindre que, à la suite de la fonte et du vêlage du glacier, la langue elle-même ne rétrécisse, en 50 ou 100 ans, de 3,3 km environ. AELLEN 1987: 216, RÖTHLISBERGER H, FUNK 1987 a/b/c, UVP KWO 1988:75 ). La moitié de la langue actuelle du glacier de l' Unteraar risque d' être détruite à l' est de l' Abschwung.

De la cabane du Lauteraar en direction du sud et du sud-est, on aurait vue sur le lac artificiel. Vers le sud-ouest seulement, on apercevrait un moignon de langue glaciaire, long d' un peu plus de 3 km, avec, au moment de la retenue d' eau maximale, un front de rupture du glacier de quelque 30 mètres de hauteur. Il s' agit donc d' empêcher par tous les moyens la destruction d' un glacier unique par son histoire et ses paysages!

7. Bois et sols fossiles de la marge proglaciaire Hanspeter Holzhauser, Zurich Lors d' une visite à L. Agassiz au glacier de l' Unteraar, COLLOMB ( 1849a: 39, 1849b: 12 ) fait une intéressante observation sur le chemin de son retour à l' Hospice du Grimsel:

« Sur la rive gauche, dans une localité indiquée sur la carte de L. Agassiz, sous le nom de Brandlamm, il existe sur le flanc de la montagne encaissante quelques pieds rabougris de pinus cembra. Un de ces pins a été atteint l' été dernier21 par le glacier; nous en avons scié le tronc et reconnu l' âge: il avait 220 ans; à côté de ce tronc, on remarquait d' anciennes souches de la même essence, passées à l' état de bois pourri, qui devaient remonter à une époque plus reculée, mais dont il était impossible de déterminer l' âge précis ».

La remarque de Collomb est intéressante à deux égards: d' une part, elle prouve que, vers 1848, des aroles plusieurs fois centenaires étaient implantés à proximité immédiate du glacier ( dans la région du Vordri Brandlamm, cf. AU 38* pp. 282/283 ), et que, à cette époque, ces arbres ont été renversés par sa progression ( son extension correspondait alors environ à celle de 1890, cf. fig.6 du dépliant ).

D' autre part, l' âge des arbres ( 220 ans ) donne une valeur minimale du temps pendant lequel le site est resté libre de glace: au moins depuis 1628. On peut en déduire que le glacier n' a pas atteint de maximum durant la fin du XVIe/début du XVIIe siècle. En effet, le glacier aurait dû, à la fin du XVIe siècle déjà, découvrir la place où Collomb rencontre les aroles, car l' expérience montre qu' un certain temps s' écoule après le recul du glacier jusqu' à ce que les arbres puissent prendre pied sur le terrain des avancées ( dans le cas des aroles, il peut être de plusieurs décennies ). Si l'on considère la lenteur avec laquelle ce glacier réagit aux variations climatiques - comparé à d' autres, il n' a connu sa plus grande extension que tardivement ( en 1871, il est très peu vraisemblable qu' un maximum se soit produit déjà à la fin du XVIe siècle, une époque où la plupart des glaciers commençaient seulement à avancer.

Même si certains éléments font penser à une progression du glacier de l' Unteraar aux XVIe et XVIIe siècles, l' existence d' un maxi- mum ne peut pas être démontrée. Les souches pourries dont parle Collomb sont probablement des indices de cette ancienne progression ( cf. carte 7, p. 269 ).

Au mois d' août de trois années consécutives ( 1848-1850 ), Hogard s' arrête dans la région du front ( au-dessous du Bärenritz ) et fixe par le dessin la manière dont un grand bloc de rocher transporté par le glacier fait plier, puis casser un arole ( HOGARD 1858-1862: pi. 19; AU 58 ). Au milieu du siècle passé, la partie extrême des avancées était, elle aussi, plantée d' arbres visiblement âgés, que le glacier a peu à peu écrasés dans sa progression.

Au-dessous du Bärenritz, près de Mederlouwenen, on peut encore trouver aujourd'hui quelques souches fermement enracinées; un gros bloc également, qui pourrait correspondre à celui figurant sur l' esquisse de Hogard, est accroché à la pente raide. Nous nous trouvons dans la région de l' extension maximale du glacier au cours du XIVe siècle. Un remblai morainique, peu caractéristique, forme ici la limite du terrain des avancées. Sur l' autre versant de la vallée, on reconnaît un petit remblai bien visible, déposé pareillement par la dernière extension maximale ( 1871 ) du glacier. La disparition du glacier après 1871 a mis à jour des fragments d' arbres, preuves indubitables que le terrain des avancées était autrefois couvert de végétation.

A l' occasion d' une excursion dans le cadre de l' inauguration de la réserve naturelle de l' Unteraar ( en 1935 ), MARIÉTAN ( 1936: 45-50 ) avait découvert des racines ancrées dans des crevasses du rocher, au-dessous du Bärenlamm, à des endroits que la fonte du glacier libérait alors. Encouragée par ce résultat, la recherche d' autres restes fut entreprise avec succès en 1985 sur le côté gauche du terrain des avancées, entre Vordri Brandlamm et Mederlouwenen: en tout, vingt échantillons de bois fossiles et cinq de sols fossiles purent être collectés à la surface ou dans des ouvertures naturelles ( cf. carte 7 p. 269 ). Quinze des échantillons de bois - à une exception près, ils ont été exclusivement trouvés in situ- et 4 des sols fossiles ont été datés par le 14C. Le gisement le plus proche du glacier était encore, il y a peu, recouvert par la glace28. Un torrent y a mis à nu un sol fossile fortement comprimé et tissé d' un dense réseau de racines. A faible distance de là est implantée la souche assez fortement dégradée d' un arole ( cf. carte 7 p. 269 ). La datation du bois et du sol par le 14C reporte la première avancée moderne du glacier de l' Unteraar au tournant des XVIe et XVIIe siècles. Il faut admettre, sur la base des données fournies par le sol fossile, que le front glaciaire est resté plusieurs siècles durant en retrait du gisement AU Al, et qu' ainsi le glacier était plus petit qu' aujourd D' autres données du 14C tirées des bois et des sols fossiles ( 2, 3, 4, 7, 8 et AU A 2, carte 7, p. 269 ) parlent aussi en faveur d' un accroissement du glacier aux XVIe et XVIIe siècles, ou d' un intervalle antérieur, long de plusieurs siècles, pendant lequel le terrain des avancées a développé un sol où des conifères et des arbustes ont pu prospérer ( cf. note 29 ).

Lors de cette première avancée, la crue du glacier atteignit un niveau équivalent à celui de 189030 ( situation de l' échantillon 3, carte 7 p. 269 ); pour les raisons citées au début ( l' arole de Collomb, vieux de 220 ans ), il n' a pas dû s' étendre beaucoup au-delà, si bien que les portions latérales du terrain des avancées sont demeurées vertes.

La date à laquelle cette progression a commencé, ainsi que sa durée, ne peuvent être établies exactement par les données du 14C. Quoi qu' il en soit, le glacier, après avoir atteint son maximum ( extension comme vers 1890 ), se retira au cours du XVIIe siècle et fit de nouveau place à la végétation.

Selon les carnets de Cappeler, le glacier de l' Unteraar se mit une fois de plus à avancer dans les années 1719-1729 ( voir pp. 268, 270 ). Le front se trouvait alors à 1150 mètres environ en arrière de son maximum de 1871, ce qui correspond à sa situation vers 1945. Le fait que des mélèzes isolés ( comme l' écrit Cappeler ) furent ensevelis par la glace indique que, auparavant, le glacier était plus petit et qu' il devait se tenir en-deçà de sa position de 1945.

A la fin du XVIIIe siècle, la frange antérieure du terrain des avancées était encore couverte de végétation. Wyttenbach écrit que le glacier s' étendait en 1788 « jusque sur des places de végétation », à proximité d' une petite forêt d' aroles située sur le versant nord de la vallée ( voir p. 272 ).

Les résultats de l' examen des bois fossiles ne contredisent pas les témoignages de ces sources historiques; des souches fossiles qui furent trouvées en place dans la partie latérale du terrain des avancées et auxquelles furent attribués des âges par le UC ( compris entre 170 yBP et moderne ) confirment la faible extension du glacier au XVIIIe siècle. Il s' agit de restes d' arbres qui poussaient autrefois sur le terrain des avancées ( on le voit sur AU 08.1 ) et qui, au cours de la crue ( qui d' après les sources historiques commence au XVIIIe siècle déjà et se termine en 1871 par une extension maximale ), ont abouti sous la glace. La poussée du glacier peut être bien restituée au moyen des données du 14C ( voir carte 7 p. 269 ).

L' échantillon 9 ( vieux de 17090 yBP, UZ-1039 ) indique une progression jusqu' au niveau de 1900, l' échantillon 5 ( moderne, UZ-955 ) une progression jusqu' à celui de 1890 ( correspondant environ à celui de 1848, cf. Collomb ). Avec les échantillons 10 ( 15575, UZ-962 ) et 11 ( moderne, UZ-975 ), l' extension maximale suivante, au XIXe siècle, est, elle aussi, établie.

au 80 F. Becker, 1879/1880: feuille topographique à l' échelle 1:50000 pour la Carte Siegfried. Les moraines frontales de l' ex maximale de 1871 sont clairement signalées devant la langue terminale du glacier de l' Unteraar.

L' arole dont parle Hugi, et qui fut renversé par le glacier en 1829 ( voir p. 275 ), pourrait s' être trouvé dans la zone de rochers située au-dessous du Bärenlamm d' où provient aussi l' échantillon 9. L' échantillon 5 a été prélevé sur une racine du gisement décrit par Collomb ( au sud-est du Vordri Brandlamm ).

Les indications des sources historiques et les résultats des analyses glacio-morphologi-ques se complètent et se confirment ici d' une manière exceptionnelle.

Une avancée ancienne du glacier de l' Unter peut être établie vers les années 950/1050 ( cf. carte 7 p. 269 AU A3 et 6 ). Le fleuve de glace a atteint alors des dimensions équivalentes pour le moins à celles de 1890.

Pendant un temps assez long avant cette poussée, le glacier a été beaucoup plus petit: les données du UC évoquent une période extrêmement longue de constitution du sol, qui a duré au moins de 193575 yBP jusqu' à 94580yBP(UZ-1043bzw. uz-1042)31. Pendant cet intervalle, le glacier n' a jamais atteint son extension de 1900 ( situation du gisement AU A3 cf. carte 7 p. 269 ). Comparée aux fluctuations d' autres glaciers alpins, une phase de faible amplitude aussi démesurément longue est très inhabituelle.32 Ce comportement du glacier de l' Unteraar, s' écartant de celui d' autres glaciers alpins, se reflète aussi dans sa longue période de faible extension avant le début de sa première avancée moderne aux XVIe et XVIIe siècles: après son avancée médiévale des années 950/1050, AU 79 A. Braun ( éventuellement J. C. Marmand ), peu après 1871: le glacier de l' Unteraar avec la couronne de moraines frontales qui se sont formées peu auparavant il a reculé dans une mesure telle qu' il a finalement présenté une extension moindre qu' aujourd.

Au cours des quatre siècles suivants, un sol se forma peu à peu sur le terrain d' extension du glacier, ce qui favorisa de nouveau un développement de la végétation.

Sur la base des données à disposition, le glacier de l' Unteraar n' aurait donc connu, pendant les deux derniers millénaires, que trois progressions importantes: au Moyen Age, vers 950/1050 ( 1000/900 yBP ), dans les Temps modernes aux XVIe/XVIIe, puis aux XVIIIe/XIXe siècles.

Le glacier de l' Unteraar est visiblement un mauvais indicateur des conditions climatiques. Une raison de son comportement anor- U I, 11; i, AU 54 H.Hogard,22août1847: le glacier de l' Unteraar en lente progression mal doit sans doute être recherchée dans le fait que sa langue est longue, extrêmement plate et couverte de débris. Mais cette circonstance ne suffit pas à expliquer l' absence ( apparente ?) d' autres puissantes avancées, telles qu' elles sont apparues, par exemple, au grand glacier d' Aletsch et au glacier du Rhône ( vers 750/850 et vers 1350 ).

Traduction de Denis Stulz J.'l'.XT K lì .I

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