Le tourisme de haute montagne dans les massifs de la Jungfrau, du Wetterhorn et du Gauli | Club Alpino Svizzero CAS
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Le tourisme de haute montagne dans les massifs de la Jungfrau, du Wetterhorn et du Gauli

Hinweis: Questo articolo è disponibile in un'unica lingua. In passato, gli annuari non venivano tradotti.

Hansruedi Mösching, Gwatt ( BE )

2. Touristes alpins, ascensionnistes estivaux, ascensionnistes « toutes saisons »

En 1981 on a enregistré en Suisse 78 millions de nuitées, dont approximativement 300000 dans les cabanes de haute montagne. Cette proportion modeste de 0,36% n' est cependant pas le fait d' une population unique qui serait constituée par quelques milliers d' ascensionnistes. Les hôtes des cabanes qui ont répondu à notre enquête peuvent être classés en trois catégories, selon le type de sport alpin qu' ils pratiquent au cours de l' an:

1. Introduction Dans le cadre du programme de recherche MAB ( Man and Biosphere - l' homme et la biosphère ) patronné à l' échelle mondiale par l' Unesco, on étudie depuis le printemps 1979 à Grindelwald les relations entre la nature, l' économie alpestre et le tourisme. Dans quelle mesure les êtres humains exercent-ils une pression sur la nature, et jusqu' à quel point cette pression est-elle tolerable? Telles sont, entre autres, les questions centrales qui ont servi de point de départ à notre travail. Son sujet proprement dit, le tourisme de haute montagne, sera traité selon les aspects suivants:

- analyse des populations de touristes de haute montagnefréquentation des cabanes et des itiné-rairesimpact sur la région.

Notre analyse se fonde sur une enquête, organisée durant l' été 1979 dans neuf cabanes des Alpes bernoises orientales, au moyen d' un questionnaire qui fut rempli par 1200 excursionnistes, soit le 26% de la population accueillie par les cabanes.

Notre choix s' est porté sur les cabanes du CAS suivantes: Rottal, Silberhorn, Guggi, Concordia, Gleckstein, Dossen et Gauli, auxquelles venaient s' ajouter les cabanes Mönchsjoch et Mittellegi, de VAssociation des Guides de Grindelwald. Leur répartition géographique est illustrée par la carte d' activités du chapitre 9.

D' autres sources d' information étaient constituées par les livres des cabanes et par les statistiques annuelles des nuitées dans les cabanes du CAS.

- le touriste alpin ( activité du type 1 ) n' entre ni courses de haute montagne, ni courses à ski ou de rocher; il se borne à monter jusqu' à une cabane. Il représente le 8% de l' ensemblel estival ( activité du type 2 ) ne se rencontre sur les sommets qu' en été; proportion: 451' ascensionniste toutes saisons ( activité du type 3 ) utilise également la saison d' hiver pour ses excursions; on le rencontre à ski aussi bien dans les Préalpes que les Hautes Alpes. Proportion: 47% de l' ensemble.

3. La varappe. Terrains d' élection de l' ascensionniste « toutes saisons » Des courses de pur rocher sont accomplies par le 43% des ascensionnistes. Plus des deux tiers de ces varappeurs sont du type 3, et trois sur quatre d' entre eux évoluent dans des terrains offrant les degrés de difficulté 4 ou 5. Ces données de base ont une influence décisive sur le choix des excursions ( cf. chap. 8 ). Où ont disparu les degrés de difficulté 1 et 2? Dans la rubrique A quel degré estimez-vous vos capacités de varappeur?ils ne figurent même pas. En effet, de l' avis général des ascensionnistes, la varappe proprement dite ne commence qu' au degré 3. L' échelle UIAA s' est appauvrie de deux degrés.

13 32 14 3 JO 17 Typ 2 Typ 3 Varappeurs Non-varappeurs Fig. 1: Répartition des ascensionnistes en varappeurs et non varappeurs; répartition globale en %. Le type 1 ( 8% ) n' est pas pris en compte.

Source: enquête 1979.

4. La dynamique de l' âge et de la profession Prépondérance des aînés!Tel était le bilan, peu encourageant, du sondage d' opinion effectué en 1982 à l' occasion du remaniement de la revue LES ALPES ( BM. sept. 1982, pp. 197-200 ). Notre enquête de 1979, ayant pour terrain les cabanes de haute montagne, donne une image bien différente. 60% des personnes touchées appartiennent aux classes d' âge inférieures à 35 ans ( figure 2 ); cette même population était trois fois moins nombreuse dans le sondage d' opinion du CAS.

Les rangs des actifs se font plus clairsemés au fur et à mesure que l' âge avance: le fait n' a rien d' étonnant. Qui n' a pas, à vingt ans déjà, vu des camarades du même âge dire adieu à la montagne? Les motifs de ces abandons peuvent être fort divers: la famille, la profession, plus tard des contraintes sociales ou des raisons de santé. N' oublions pas non plus que de nos jours les ascensionnistes sont plus nombreux qu' il y a dix ans, époque où ils étaient également plus nombreux que dix ans auparavant ( chap. 6 ). Il en résulte logiquement un amincissement des tranches d' âge élevé. Nous avons renoncé à représenter ici la répartition, en fonction de l' âge, pour les différents types d' activités, cela en raison de l' extrême variété des données. Mais nous tirerons tout de même quelques conclusions qui se dégagent de la comparaison des graphiques de structures.

31 28 23 11 -14 15-24 25-34 35^14 45-54 55 + Fig. 2: Répartition, en fonction de l' âge, des ascensionnistes dans les Alpes bernoises orientales, en %.

Base: enquête 1979.

Au Rottal. L' ombre étroite du Breithorn de Lauterbrunnen s' étend au pied du Tschingelhorn Comment devient-on alpiniste? Jusqu' à l' âge de quinze ans, ce sont mes parents ou des connaissances qui m' entraînent jusqu' à une cabane ( type 1 ). L' école terminée, je m' inscrirai a l' OJ du CAS, à un groupe de jeunes ou à l' Association des Amis de la Nature ( type 3 ). Si mon intérêt pour l' Alpe s' éveille plus tard, c' est d' une randonnée dans le cadre d' une école de varappe que viendra le déclic ( type 2 ), ou alors je me serai confié à la tutelle d' un camarade expérimenté. Je m' ins ensuite à une section de Club alpin qui m' initiera aux joies des ascensions hivernales ( type 3 ). Ce glissement d' un type à l' autre se produit dans les trois premières classes d' âge. Mais les activités du type 3 ne sont pas pour autant, dans chaque cas, l' aboutissement obligé: les ascensionnistes estivaux représentent en effet la moitié de l' ensemble des touristes de la haute montagne.

Dans la classe d' âge la plus peuplée, le gros du contingent est fourni par les écoliers, les apprentis et les étudiants ( 27% ). Viennent ensuite les employés du secteur public et du commerce ( 19% ), les maîtres d' école ( 8% ), les ingénieurs ( 8% ), les artisans ( 7% ), les mécaniciens ( 5% ), les ménagères ( 4% ) et les infirmières ( 2% ). Une pléiade de métiers divers fournit le 20% restant.

5. Proximité ou éloignement de la montagne L' alpiniste qui habite près des montagnes est mieux à même de prévoir le temps qu' il va faire, ainsi que la manière dont il évoluera par la suite; il peut ainsi projeter et exécuter ses randonnées à court terme. D' autre part, le' Juillet' Août Septembre 200 2.'3 .U.

I5 Iß 1 7 \q Ig ho.

Semaine Jours de pluie Lu- Jeu- Mar- Ven Mer Jeu Jeu Lu Lu Lu Mer Ven Sa Sa Ven Ven Di Di. Total de la semaine. Suisses Etrangers Fig. 3: Fréquence des nuitées en fonction de l' origine, du 1er juillet au 15 septembre 1979. Cette statistique concerne sept cabanes, hormis le Mönchsjoch et la cabane Concordia.

Source: livres des cabanes.

gain de temps que lui vaut une brève marche d' approche l' amène à partir plus souvent, il ne tarde ainsi guère à avoir épuisé la liste des « grandes classiques » et ne dédaigne de ce fait pas les buts moins prestigieux. Ceux-ci constituent le menu ordinaire des expéditions d' une semaine; leurs visiteurs les plus fréquents restent les Helvètes, et ils ont une influence décisive sur la courbe des variations saisonnières.

L' alpiniste qui vit loin des montagnes n' a que la ressource d' utiliser au mieux ses vacances pour ses excursions. Il est de ce fait plus aisé de prévoir le nombre d' ascensions possibles en un été, et cela explique l' allure moins accidentée de la courbe des étrangers. Un nombre d' ascensions plus aisé à prévoir, cela veut dire au premier chef un moins grand nombre; ainsi s' explique la préférence qu' a ce type d' alpinistes pour les quatre mille du front Nord des Alpes bernoises, dont on fait volontiers un tableau de chasse groupé: montée en train au Jungfraujoch ( 3454 mascension du Mönch ( 4099 mbivouac à la cabane du Mönchsjoch ( 3630 m ) ( cf. tableau 1sommet de la Jungfrau ( 4158 m ). Un autre exemple ( dûment constaté par l' auteur ): trajet Bonn-Stechelberg par l' autoroute: 2 h 00-11 h 00. Dîner au restaurant, puis six heures de montée jusqu' à la cabane Rottal. Le lendemain, la Jungfrau par l' arête du Rottal, aller et retour. Enfin, l' autoroute en sens inverse. Pour ces deux musiciens professionnels et leur camarade, montagne veut dire performance, aussi bien psychique que physique. C' est ce qui ressort de leurs propos: « Nous faisons une fois chaque année une grande course; l' été dernier, c' était le Weisshorn. » Tableau 1:

Choix des cabanes en fonction de l' origine pendant la 5 e semaine ( du dimanche 29 juillet au samedi 4 août 1979 ) Source: livres des cabanes.

co S

La répartition des provenances par cantons et par Lander de la RFA permet de définir les Alpes bernoises orientales comme le domaine d' élection de la Suisse alémanique attenante, ainsi que du Sud de l' Allemagne limitrophe.

Tableau 2:

Provenance par canton et par Land ( RFA ). 5e semaine ( du dimanche 29 juillet au samedi 4 août 1979 ) Source: livres des cabanes.

isses 1 rangers OT UJ Berne 33% Zurich 15% SO, AG, BS, BL 9% Autres cantons 8% RFA, Baden-Württemberg 16% RFA, autres Länder 6% Pays-Bas, France, GB 6% USA, Japon 4% Belgique, Autriche, Espagne 3% Total % 65% 35% Détail significatif: c' est à un prince japonais, accompagné par trois guides de Grindelwald, que l'on doit la première ascension, en 1921, de l' arête de la Mittellegi. Au cours de la même expédition il fonda la cabane du même nom, et instaura ainsi la tradition ininterrompue d' un pèlerinage des alpinistes d' Extrême au cœur de nos Alpes.

Au contraire des Suisses, les étrangers se classent en grande partie dans les activités des types 1 et 2. Ainsi s' explique le pourcentage élevé d' alpinistes estivaux. Cela dit, on peut se demander pourquoi les ressortissants des régions éloignées sont si peu nombreux à pratiquer le ski de randonnée. L' explication n' est pas simple. Rappelons tout d' abord que, dans les Préalpes, le cas n' a pas de cabanes avec libre accès, comme dans les Hautes Alpes. Raison pour laquelle les randonnées à ski dans les Préalpes se limitent à une journée, ce qui exclut un long voyage d' approche. Or, il faut précisément avoir pratiqué ce sport au cœur de l' hiver comme entraînement préalable à une longue randonnée de ski de printemps. La forme s' entretient en tout temps et en tous lieux, mais il n' en va pas de même pour l' aptitude à skier dans la haute neige.

Conséquence: la majorité fait coïncider, par la force des choses, les vacances en montagne avec celles d' été.

Quels sont les hôtes intéressants pour la région? Ceux qui utilisent l' infrastructure touristique, et leur apport se chiffre en nuitées ( hôtels, logements de vacances, campings ). Cette catégorie: vacances dans la région = prétexte à excursions alpines ne regroupe pas moins d' un tiers des visiteurs touchés par notre enquête. Ceux-ci séjournent de préférence dans les vallées des Lütschinen, et ce fait a une incidence directe sur l' occupation des cabanes en fonction de l' origine des visiteurs ( tableau 1 ).

6. Le développement du tourisme de haute montagne dans les massifs de la Jungfrau, du Wetterhorn et du Gauli Durant les deux dernières décennies, le développement de l' alpinisme pourrait se résumer comme il suit: plus de temps libre, davan- Concordia 5000 Nuitées 4000 3000 2000. Gleckstein Gauli .Dossen 1000 500 Rottal Guggi -Silberhorn Fig.4: Evolution, en chiffres absolus, du nombre de nuitées.

Moyennes quinquennales 1965-69/1970-74/1975-79.

Source, statistique des nuitées ( LES ALPES ).

tage d' excursions, une expérience accrue, des itinéraires plus difficiles, un équipement en constante amélioration. Cela étant, les trois graphiques illustrant ce chapitre montrent qu' un véritable essor ne s' est produit que dans certaines régions touristiques à l' exclu d' autres.

Une évolution à grande échelle s' est opérée au profit des cabanes Concordia et Gauli. Les excursions organisées sur les glaciers ou à ski ont fait monter les courbes en flèche, et cela continue!

La cabane Gleckstein, la plus importante dans le massif du Wetterhorn jusqu' en 1979 ( année de l' agrandissement de la cabane Gauli ), offre un exemple de croissance équilibrée d' une cabane d' été. Aujourd'hui encore, elle partage avec celle de l' éperon du Faulberg {Concordia ) l' héritage de célébrité que lui ont valu les temps héroïques de l' alpinisme dans ce massif aux sommets aussi attrayants qu' élevés. Pour la cabane Dossen, on constate 500% -Concordia .Gauli 400% Moyenne suisse 300% 200%. Rottal 100%. Gleckstein. Dossen Guggi 50% Silberhorn Fig. 5: Evolution relative du nombre de nuitées.

Variation en % des moyennes quinquennales 1965-69/1970-74/ 1975-79, comparées aux moyennes des années 1935-39100% ).

Source: statistique des nuitées ( LES ALPES ).

Cabane Gleckstein - Wetterhorn Vue sur le versant nord du Schreckhorn une régression accrue du nombre des visiteurs depuis 1976, année où fut installé le bivouac du Rosenlaui.

La mode s' est installée non seulement des ascensions mixtes, type Rottalgrat, mais encore - avec quelques années de retard - des courses de glace: traversée de la paroi nord de l' Ebnefluh ou du Mönchsnollen. Cela n' em pas un certain fléchissement de la courbe des cabanes Rottal et Silberhorn; sans doute faut-il y voir une conséquence des mises en garde publiées dans la revue LES ALPES à la suite des avalanches meurtrières du val Silberlaui. Pur hasard: cette baisse se manifeste juste après l' agrandissement de la cabane Rottal, motivé par l' essor enregistré durant la période 1965-74. Il s' agit de variations à Photo: Hansruedi Mösching petite échelle, attribuables à de multiples causes dont les ramifications sont malaisées à débrouiller.

Les variations annuelles de la figure 6 s' ex avant tout par l' influence du temps. C' est pourquoi, au cours d' une même année, elles oscillent dans la même direction pour la plupart des cabanes. Si l'on fait la synthèse des valeurs estivales et hivernales, cela donne une courbe très accentuée. Un brusque changement du nombre de places disponibles peut également jouer un rôle, qu' il s' agisse d' une réduction imposée par des transformations ( Concordia, 1976 ) ou d' un agrandissement du bâtiment [Gauli, 1979 ). Les années du milieu de la dernière guerre constituent un cas parti- 7000 6000 5000 4000 3000 20001000 1925 30 35 40 Cabane Concordia Cabane Gleckstein Cabane Gauli Fig. 6: Nombre de nuitées des périodes 1924-45 et 1964-81 pour les trois cabanes CAS les plus fréquentées du secteur.

Juillet Août Septembre Juillet Août Septembre 1 Nuitées 800

A

80% 600

60% 400 \

/

40. 200 :^ L- 20% 1. Jours Lu-Mer Di 2. I3. U. de pluie Jeu-Mar Ven'5.'6.

Ven Mer Sa' 7.

Jeu Sa'8.'99.'1O.

Jeu Lu Lu Ven Di' 11 Semaine Lu Ven 1. 2. !3. .'4 .Jours de pluie Lu- Jeu-Mar-Mer Ven Di' 5 6.

Ven Mer Sa I7.

Jeu Sa 8.'99.'10.

Jeu Lu Lu Ven Di 11 Semaine Lu Ven Total de la semaine Du dimanche au vendredi SamediSamedi Du dimanche au vendrediFig 7: total des nuitées pour 7 cabanes ( non compris Concordia et Mönchsjoch ); du 1er juillet au 15 septembre 1979 Source: livres des cabanes.

culier; en effet, les cabanes faisaient partie du dispositif de défense de l' armée suisse.

Les statistiques des années 1946-63 n' ont jamais été publiées. Or c' est précisément dans ce laps de temps qu' a eu lieu le démarrage général, dont on peut tout de même se faire une idée approximative grâce aux courbes des âges. On peut le situer au début des années 50, moment de la montée la plus rapide de la courbe. C' est aussi l' année où fut atteint le sommet de l' Annapurna, le premier 8000.

45 1965 70 75 80 7 cabanes ( non compris Concordia et Mönchsjoch ) du 1er juillet au 15 septembre 1979 Source: livres des cabanes.

7. Répartition des nuitées durant l' été 1979 Le nombre quotidien de nuitées entre le dimanche et le vendredi montre que l'on a affaire à un tourisme typiquement vacancier: poussée maximum de la mi-juillet au début du mois d' août, suivie d' un pic secondaire en septembre. En revanche, le trafic du week-end est étroitement tributaire de la météo. Cela explique que la dépression des 6e, 7e, 8e samedis ( mois d' août ) présente toutes les apparences d' une variation saisonnière.

Un samedi pluvieux a une influence catastrophique sur le nombre de nuitées ( 6e et 7e semaines ). Si les prévisions sont défavorables pour le dimanche uniquement, on montera tout de même à la cabane le samedi, car le dimanche matin autorisera avec un peu de chance une modeste excursion ( 1. ). Mais lorsque le samedi tombe au milieu d' une période de mauvais temps, on renonce, surtout si la neige fraîche est descendue jusqu' à 2000 mètres ( 8. ).

Durant la 2e semaine, de toute évidence, beaucoup de vacanciers ont boudé la montagne. L' assaut en règle ne débute qu' au moment où la neige d' altitude a suffisamment fondu.

Rapportons le nombre de nuitées d' une cabane au nombre de places disponibles, nous obtenons alors le taux quotidien d' occupation ( fig. 8 ). Il se peut que la « bourrée » du samedi vienne à crever le plafond des 100%; c' est l' occasion de parler d' une suroccupation. Il faut avoir vécu la chose pour savoir ce que cela signifie concrètement. L' opinion couramment répandue que l' alpinisme est, lui aussi, devenu un sport de masse n' est donc nullement dénuée de fondement, surtout si l'on pense que la presse du samedi soir à la cabane se retrouve logiquement le dimanche sur l' itinéraire conduisant au sommet; nous en reparlerons au chapitre 9.

Août' Juillet Cabane Mittellegi' Août

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Cabane Gleckstein - pi i—i—i 1 1 ru

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11. Semaine CH Jusqu' au vendredi H Samedi Fig. 8a: nuitées du Ie' juillet au 15 septembre 1979 Quel est le taux limite d' occupation d' une cabane? Pour illustrer ce problème très actuel, nous prendrons l' exemple des cabanes Gleckstein et Mittellegi ex\ ne considérant dans un premier temps que le nombre de places couchées.

Pour calculer le taux d' occupation, on peut utiliser en première approximation le nombre officiel des couchettes, tel qu' il figure dans le guide des cabanes du CAS. Des valeurs limites plus précises pourraient être obtenues par le métrage des surfaces, dans la mesure où l'on a les données suivantes présentes à l' esprit:

- la norme pour la largeur d' une couchette est de 90 cm ( mais en réalité le chiffre varie beaucoup d' une cabane à l' autreen cas de suroccupation, cette valeur peut s' abaisser à 60 cm; ce qui donne une flexibilité de 50%. Le nombre de couchettes « place réduite » serait de 150 pour la cabane Gleckstein et de 21 pour la cabane Mittel-legion peut aménager des places de secours sur le sol des dortoirs, dans les corridors et dans les salles de séjour.

C' est précisément de l' étendue de ces dernières surfaces que dépendra la possibilité d' une cabane de supporter jusqu' au double ou Septembre Nombre de couchettes 14 n 100 50 au triple de son taux normal d' occupation maximale. De telles pointes sont de nos jours une réalité. C' est régulièrement le cas dans les logements bisaisonniers à Pâques et à Pentecôte ( fin et moment culminant de la saison de ski de randonnée ); mais cela peut arriver aussi occasionnellement dans toutes les cabanes, parce que l'on ne s' est jusqu' ici pas suffisamment appliqué à contrôler et à canaliser l' af des touristes ( par exemple, il est simplement recommandé de s' annoncer à l' avance par téléphone ou par lettre, sans que ce soit une règle imperative comme dans les refuges français ).

En regardant la figure 8a, on comprend pourquoi, lors de rénovations ou de nouvelles constructions de cabanes, on est plus attentif qu' autrefois au nombre de places disponibles dans les salles de séjour. Prenons le cas de la cabane Gleckstein ( environ 50 places assises ): il est beaucoup plus important que, pendant 70 jours sur 77, chaque visiteur puisse s' y asseoir, que de savoir qu' on y a déterminé le nombre de couchettes normalement disponibles en fonction d' une affluence extrême lors de quelques week-ends. Tout compte fait, on ne dort pas plus mal à la dure que dans un dortoir bondé; en revanche on n' achètera une bouteille au gardien que si on peut faire cercle autour d' elle à table.

Dans les gîtes où la salle de séjour est trop exiguë, rien ne s' oppose à ce que l'on réduise le nombre des couchettes au profit des places assises. Grâce à un réaménagement bien conçu, il est parfois possible de faire l' écono d' une nouvelle construction: la solution mérite examen par les temps qui courent.

8. Type d' activité et choix des cabanes Tableau 3:

Pourcentage des différents types d' activités, par cabane Source/enquête 1979.

nés CN m .Q a û ) Q.

03 a ( J i— I— Guggi 1 21 78 Mitellegi 0 31 69 Concordia 14 57 29 Gleckstein 16 38 46 Autres, respectivement:

4-6 44-56 39-46 Les différences considérables enregistrées dans ce tableau montrent clairement que la situation d' une cabane et son domaine d' excur influencent le choix des touristes en fonction de leur type d' activité.

Les guides et itinéraires ne recommandent les cabanes Guggiet Mittellegi qu' à des habitués de la montagne; elles sont donc hors du champ d' action du simple touriste alpin.

Les ascensions du Mönch et de la Jungfrau, à partir de la cabane Guggi, toutes deux longues et difficiles, sont en général réservées aux grimpeurs « toutes saisons ». La majorité des grimpeurs estivaux préfèrent les voies plus faciles du versant sud.

L' arête de la Mittellegi est une classique des Alpes occidentales; elle attire des alpinistes du type 2 en nombre croissant.

Les parcours glaciaires convergeant vers la cabane Concordia nous font rencontrer un nombre inattendu de touristes alpins ( type 1 ). Notre portrait du chapitre 2 doit donc être nuancé: pour ceux-ci, il faut que ce soit aussi « de l' alpinisme ». Quant à ceux du type 3, ils préfèrent parcourir ces longues étendues glaciaires à ski, au printemps.

Un chemin bien balisé, un paysage impressionnant, la relative proximité de Grindelwald et l' accueil d' un gardien: tout cela vaut à la cabane Gleckstein la réputation d' un but de première classe. On y monte donc souvent en course d' un jour.

9. Fréquentation des itinéraires Le nombre des nuitées ne permet pas, à lui seul, de se faire une vue d' ensemble du tourisme de haute montagne avec ses flux et reflux plus ou moins importants. C' est pourquoi il nous faut prendre en considération le nombre des ascensions prévues ( qui équivalent, la plupart du temps, à des ascensions exécutées ). La figure 9 est la transcription graphique du tableau 3, enrichi d' un critère supplémentaire: ascension prévue - pas d' ascension prévue. On constate avec quelque surprise qu' il y a aussi des alpinistes qui n' envisagent pas d' ascension; cette variété est plus fréquente chez le type 2 que chez le type 3. Cela dit, on voit immédiatement que, dans l' ensem, le côté droit du graphique est prédominant. En moyenne, ce n' est pas moins de 70% des visiteurs de la cabane qui y sont montés avec l' idée de faire une ascension.

Quant aux itinéraires, c' est en repérant leurs passages obligés qu' on peut les étudier valablement. En effet, un terrain largement ouvert offre en général passablement de variantes, et les plus fortes affluences s' y diluent comme par enchantement. Ce sont avant tout les voies d' ascension et de descente qui multiplient sur une longue distance les goulets d' étranglement. Deux cordées s' y trouvent-elles en même temps: c' en est déjà une de trop, et les choses se gâtent si la seconde est plus rapide ou si la première fait tomber des pierres. Sur nos cartes d' activités, les endroits particulièrement dangereux sont signalés: la selle et l' arête du Rottal, à la Jungfrau; le Mönch, qu' on l' attaque par le sud ou par le nord; l' arête de la Mittellegi, le Willsgrätli au Wetterhorn. En de tels endroits l' impatience accumulée à faire la queue éclate parfois; il n' est pas rare qu' elle pousse une cordée à entreprendre une dangereuse manœuvre de dépassement ou d' évitement. Exemple: entre 1966 et 1981, la tentation du raccourci pour la descente de la selle du Rottal a entraîné 26 morts. En méconnaissance de la discipline de marche, chaque année au Wetterhorn des alpinistes se laissent repousser vers les couloirs glacés de la face dominant la cabane Gleckstein. Tandis que l' arête rocheuse du Willsgrätli offre un nombre suffisant de points d' assurage, les couloirs glacés sont infiniment plus délicats à franchir, et il n' est pas rare que l' entreprise se solde par un accident grave ( renseignement fourni par Joh. Kaufmann, gardien de la cabane Gleckstein ).

15 alpinistes au Mönchsnollen - cela veut dire, pour la dernière cordée, trois heures Pas d' ascension de sommet Ascension d' un sommet 4Ò T2Ö 2Ö1 4Ö1 6Ö1 801 1001 D E3 Typ 1 2 3 Fig.9: activité prévue. Cabanes: Mittellegi/ Guggi/Mönchsjoch/Dossen/Gauli/Rottal/ Gleckstein/Concordia/Silberhorn.

Source: enquête 1979.

1 Hochgebirgsführer Berner Alpen, Bergverlag Rudolf Rothen, München 1976 ( p. 175 ) d' attente au pied du bourrelet de glace ( selon la propre expérience de l' auteur !). De tels délais d' attente peuvent faire tourner court l' ex; en raison de l' heure avancée, d' un orage ou du brouillard, il faut renoncer à gravir le sommet. L' arête du Rotbrett et la paroi nord du Silberhorn sont très peu fréquentées. Pour la plupart des visiteurs, la cabane Silberhorn constitue le véritable but de la course, et tient lieu de sommet. De fait, la longue ascension au cœur de cette région sauvage se suffit amplement à elle-même.

Limites de capacité des itinéraires Le 30 juillet 1981, par un dimanche immaculé, le soleil levant nous accueille au Col sud de l' Eiger, d' où l'on embrasse du regard toute la ligne de crête ouest-est de cette maîtresse montagne. Deux cordées sont déjà engagées sur l' arête ouest. Durant les quatre heures à venir, je compterai entre la cabane Mittellegi et le point culminant de l' Eiger de 100 à 150 personnes. Au sujet de cette observation, que je puis taxer de heureux hasard, il convient de donner tout d' abord les explications suivantes:

- il s' agit d' une excursion réservée à des alpinistes chevronnés: le 80% sont des peursl' ouvrage de Königer-Munter1 s' exprime comme suit au sujet de la cabane Mittellegi: « En juillet et août, durant les week-ends, désespérément bondée! » Conséquence: on admet d' entrée de jeu que bivouac il y aura, quelque part sur l' arête ou même au sommetil existe une autre possibilité: passer la nuit à la Petite Scheidegg et monter par le premier train jusqu' à la station Eismeerles passages difficiles sont munis de cordes fixes; dans la descente, on trouve même des fiches de fer fixées au rocher ( les ALPES, BM 1/80 ).

Conclusion: Pour toutes ces raisons le trafic, malgré sa densité, s' écoule de manière fluide et régulière, sans sérieux temps morts. Donc la limite de tolérance de cet itinéraire se situe bien au-delà de la capacité de la cabane. C' est un cas absolument unique, compte tenu des difficultés qu' offre cette voie.

Le but avoué de la majorité des alpinistes qu' héberge la cabane Gleckstein est le Wetterhorn, et on en compte entre 50 et 80 aux jours de pointe. Cette cabane spacieuse offrant à chacun sa couchette, les départs ne s' échelonnent pas de manière aussi naturelle qu' à l' Eiger. C' est même le contraire qui est de règle: chacun veut être le premier à s' enga sur le Willsgrätli, et infailliblement, en un temps record on s' y retrouve tous ensemble.

Plutôt que de calculer des valeurs limites de praticabilité pour de tels itinéraires ( limites théoriques qu' on ne se gênera pas de dépasser, et dont l' application reste ainsi sujette à caution ), il me paraît plus judicieux de rechercher les mesures qui pourraient aboutir à une décompression effective:

/. Installation de fiches permettant de s' as rapidement et constituant aussi de bons jalons sur tous les itinéraires de difficulté moyenne, lorsque ceux-ci sont trop fréquentés.

Des efforts dans ce sens ont été faits au début des années septante, mais ils n' ont pas été poursuivis avec persévérance. Emplacements classiques: à la Jungfrau, les rochers dominant la selle du Rottal et plus récemment la traversée du névé; le Blümlisalphorn, la Weisse Frau. Si on équipait de la même manière le Willsgrätli, on n' enregistrerait plus d' épisodes aussi regrettable que celui-ci: une des dernières cordées perd le contact avec la colonne descendante, s' égare dans le brouillard, n' arrive à la cabane que sur le coup de 20 heures, d' où elle doit repartir pour Grindelwald une heure plus tard, avec une de ses participantes à peine revenue de la peur et de l' émotion.

2. Création de variantes en parallèle à la voie normale. Il en existe en maints endroits de fort anciennes, qui furent même les premiers itinéraires des temps héroïques, mais qui sont depuis lors tombées dans l' oubli. Exemple: au Wetterhorn, la voie passant par le Hick.

3. Installation de fiches et de cordes fixes à l' usage des alpinistes expérimentés, dans les passages difficiles qui n' en sont plus ou pas encore équipés.

Emplacements classiques: l' arête de la Mittellegi, l' arête du Rottal, l' arête du Rotbrett, l' arête Gallet au Doldenhorn, le Bös Tritt au Gspaltenhorn.

Possibilités au Wetterhorn: arête ouest - il s' agirait d' y remettre des cordes; aménagement des passages rocheux sur l' arête nord.

4. Comblement d' une sérieuse lacune au niveau de la documentation, en publiant un recueil des itinéraires, restés jusqu' ici totalement ignorés, de difficulté minime à moyenne; il devrait comprendre les grandes traversées de cols, telles qu' on les faisait autrefois, sans gravir de sommets.

Il y aurait tout avantage à oublier quelque peu le classique Les cent plus belles courses; nul doute qu' il a puissamment contribué à canaliser le flot des touristes.

Exemples de possibilités:

Cabane Gleckstein—Gwächtenhorn, descente sur Bäregg, Cabane G/ec^ste/VT-Lauteraarsattel-Grim-sel, Auberge du Sfv' eregrgF.

5. Utilisation de cabanes ou de bivouacs situés dans des endroits peu explorés.

Exemples: Almagelleralp ( 1982 ), Rosenlaui, Lauteraar, Mittelaletsch, Stockhorn, Arben, Col de la Dent Blanche, Bouquetins, bivouac du Dolent ( toutes réalisations des années septante ).

Autres possibilités: cabanes Mettenberg et Zäsenberg.

La grande inconnue ( aussi grande que celle qui subsiste en matière de circulation routière ): combien de touristes supplémentaires aura-t-on attirés en prenant de telles mesures? Ne retrouvera-t-on pas, en fin de compte, les mêmes bouchons? En dernière analyse, peut-on imaginer de résoudre ces questions autrement qu' en repensant le problème du temps libre à l' échelle de la société entière?

10. Motivations et opinions Le contact avec la nature, la camaraderie et le besoin d' échapper à la grisaille quotidienne, telles sont les principales motivations qui animent les touristes d' altitude ( fig. 10 ).

Dans la pratique de leur sport favori, ils recherchent une expérience à la fois individuelle et sociale. La griserie des cimes, la vie de cabane et la performance sportive n' ont pour beaucoup qu' une importance secondaire. En revanche, l' ambition et le besoin de contact prennent une importance sans cesse croissante.

Les alpinistes ( types 2 et 3 ) ont d' une manière générale la même échelle de valeurs, avec un' e pondération sensiblement égale à celle de la figure 10. Le simple promeneur al- Nat Ca Ech So Cab Spo' 40' 20' 0 0' 201 40 60' 80' 100 □ pas important [3 important | très important Motivations:

Fig. 10: contact avec la nature ( IMat)/camarade- rie ( Ca)/échapper à la grisaille quotidienne ( Ech)/griserie des cimes ( So)/vie de cabane ( Cabj/performance sportive ( Spo ).

Source: enquête 1979 pestre a, en revanche, un profil de motivations un peu différent, sauf en ce qui concerne le contact avec la nature. Pour ce type de touriste venant pendant les vacances accompagné de sa famille, la rupture avec le train-train quotidien et l' expérience de la camaraderie jouent un moins grand rôle, comme par ailleurs la griserie des cimes et la performance sportive. En revanche, il est plus sensible à l' attrait de la vie de cabane, dont il jouit plus longuement que le conquérant des cimes.

Les avis concernant trois maux bien connus et souvent déplorés ne laissent guère planer de doute quant à leur quasi-unanimité ( fig. 11 ). Le calme et la solitude ne sont plus l' apanage de la haute montagne, et nombreux sont ceux qui s' en plaignent. On veut bien prendre son parti, à la rigueur, de l' encombrement des cabanes, mais on accepte plus difficilement de faire la queue sur un itinéraire. L' objet de la réprobation la plus unanime est l' aviation de tourisme alpin, mais il est intéressant de noter que sur ce dernier point les avis sont assez nettement tranchés: cette forme de tourisme est tolérée par une minorité assez compacte.

Les réactions les plus franchement négatives se rencontrent chez l' alpiniste « toutes saisons », car c' est celui qui pâtit le plus fréquemment de ce genre de mal. L' alpiniste estival réagit de manière moins heurtée, son profil d' opinion se recoupe assez bien avec celui de la figure 11. Du côté des accommo-dants, on trouve davantage de promeneurs d' altitude que d' alpinistes, et c' est compré- Qu Enc Av 20 40' 60' 80' 100' ne dérange pas dérange dérange beaucoup Avis:

Fig. 11: queues sur l' itinéraire ( Qu ) encombrement des cabanes ( Enc ) aviation touristique alpine ( Av ) Source: enquête 1979 hensible, car les touristes de type 1 ne se trouvent pratiquement jamais dans la situation de devoir faire la queue sur les itinéraires: ils fréquentent de préférence les grandes cabanes et ne connaissent l' héliski que par ouï-dire.

Les phénomènes de masse qui sont ressentis comme des nuisances sont connus de chacun. Pourtant, le besoin de vivre quelque chose est si intense que l'on ferme les yeux même sur des désagréments de gros calibre. Concrètement, voici ce que cela donne: « A la cabane nous avons dû dormir sur le flanc, comme des sardines dans leur boîte. Le lendemain il y a eu une épouvantable salade de cordées. J' ai été atteint à la tête par un caillou, heureusement que je portais le casque. Mais c' a été une course fantastique. » L' alpi est aussi un enfant de notre époque, au même titre que les interminables files d' autos. Finalement seules les valeurs positives demeurent, et ce sont celles que filtre la mémoire pour les conserver.

11. Les guides Au cours de l' année 1897, 64 touristes et 74 guides ont trouvé accueil à la cabane Dossen ( Samuel Brawand: Grindelwalder Bergführer, p. 86 ). Durant les onze semaines de la saison d' été 1979 qui ont fait l' objet de notre analyse, on y dénombre 522 touristes et 22 guides. Les principales raisons pour lesquelles l' alpinisme s' est développé dans un sens aussi défavorable aux guides sont, selon Brawand, au nombre de deux: les multiples possibilités de participer à des courses alpines ( armée, CAS, Amis de la nature, écoles de varappe ), d' autre part la disparition d' une clientèle riche.

Place Concordia-Lötschenlücke: à l' aube, seul en chemin. Vers midi, cet itinéraire est parcouru par des centaines, voire des milliers de skieurs » On se presse au Rottalsattel ( Jungfrau )!

Tableau 4: Guides et touristes durant la 5e semaine ( 29 juillet au 4 août 1979 ).

Source:^ livres des cabanes .2 E io w 3 U 0 ) O O C tta u> Nombre Pourcentage 56 5% 345 29% 776 66% Avant la Première Guerre mondiale, il n' était nullement exceptionnel de voir un touriste engager deux guides pour une course ( Brawand ). De nos jours, même pour des courses difficiles, un guide prend en charge une cor- dée de deux ou trois clients; et pour cette cinquième semaine, ils ont été en moyenne six à se répartir les honoraires ainsi que les frais de bouche, d' hébergement et de voyage de leur guide. Quelques exemples de tarifs ( 1982 ): Jungfrau depuis la cabane Silberhorn 460 fr., Mönch par le Nollen 410 fr. Arête de la Mittellegi 400 fr., Wetterhorn 360 fr., Jungfrau 260 fr., Mönch 21 Ofr.

12. Les gardiens de cabanes Des formules lapidaires du style « les alpinistes non clients du gardien sont des visiteurs de seconde classe, les cabanes sont devenues des entreprises d' hôtellerie, les cabanes aux alpinistes indépendants! » avaient donné le branle à un échange de lettres ouvertes dans la revue LES ALPES en juin 1981. Cette polémique eut au moins l' heureux effet Atmosphère d' une fin d' après sur le chemin de la cabane Silberhorn. Coup d' oeil vers l' ouest de mettre en lumière les problèmes importants auxquels sont confrontés de nos jours les gardiens de cabanes. Fritz Lorétan, gardien de la cabane Fründen, écrivait dans le bulletin mensuel de septembre 1981: « Le gardien de cabane ne reçoit généralement de la section qu' un petit salaire qui ne lui garantit souvent même pas le minimum vital. » De même: « S' il n' avait pas la possibilité de vendre des vivres et des boissons, il ne pourrait pas se permettre d' assurer un service de gardiennage. » Rien d' étonnant à ce que les lecteurs reprennent régulièrement la plume à ce sujet, lorsqu' on voit que les avis divergent à qui mieux mieux, quel que soit le type d' activité pratiquée. La bonne moitié des alpinistes d' été apprécient le genre de service à la clientèle pratiqué dans les cabanes; les « toutes saisons » qui partagent cet avis ne sont nullement l' exception. On peut en revanche s' étonner du fait que la majorité des alpinistes des trois types préfèrent une petite cabane où l'on fricote soi-même à une grande où ce soin est dévolu au gardien, tout en étant beaucoup moins nombreux à vouloir apporter eux-mêmes les denrées nécessaires... On peut en tirer la conclusion que la tradition et la nostalgie jouent un rôle important, ce qui n' empêche personne de donner, une fois n' est pas coutume, la préférence à la solution de facilité.

Tableau 5:

Nuitées en 1979. Moyennes hebdomadaires pour 11 semaines ( du 1 juillet au 15 septembre5e semaine ) Source: livres des cabanes .e e 0} rd osse auli eck onco one Q a a 2 Gardien 71 81 132 248 328 permanent non non OUI OUI OUI Le nombre de nuitées à partir duquel il est rentable d' engager un gardien à temps complet pour la saison est difficile à dégager du tableau ci-dessus. Les chiffres concernant les cabanes à gardien permanent recouvrent aussi des cas particuliers. A Gleckstein, Concordia et Mönchsjoch, les écoles de varappe constituent une clientèle régulière qui s' approvisionne auprès du gardien. A la cabane Gleckstein se rencontrent beaucoup d' excursionnistes à la journée qui, outre la cave, apprécient aussi la cuisine du gardien ( et tout spécialement celle de sa femme ). Jusqu' à trois fois par semaine, la compagnie ferroviaire de l' Oberland bernois organise une soirée fondue à la cabane Concordia, à l' inten des participants aux excursions de glacier. Les hôtes étrangers ont pris dans leurs propres résidences alpestres l' habitude du grand confort. Pour eux, un service de restauration va de soi, et il arrive même qu' ils demandent une chambre à deux lits avec douche! Les chiffres d' une cabane telle que celle du Mönchsjoch reflètent le pourcentage élevé de la clientèle étrangère.

13. Conclusion Les Alpes bernoises orientales offrent un vaste champ d' activité pour le sport alpin. L' analyse des populations de touristes de haute montagne montre qu' un massif d' une telle variété attire et rassemble des gens dont les attentes, les intentions et les comportements diffèrent dans une très large mesure, lorsqu' ils ne sont pas franchement contradictoires.

Si l'on se souvient que le tourisme d' altitude se pratique dans un cadre spatio-temporel très restreint ( les conséquences tangibles en étant l' encombrement des cabanes et des itinéraires ), on voit aisément que le système ne peut fonctionner sans grippage qu' à l' intérieur de limites assez strictes. Il est dans la nature des limites d' être transgressées; cela étant, le point au-delà duquel le système entier risque de s' effondrer ne peut pas être défini aussi longtemps que chacun restera libre de le fixer là où il lui plaît.

Traduction: René et Nicolas Durussel

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