L'exploration du Karakoram | Club Alpino Svizzero CAS
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L'exploration du Karakoram

Hinweis: Questo articolo è disponibile in un'unica lingua. In passato, gli annuari non venivano tradotti.

Essai de synthèse el de bibliographie raisonnée.

Avec 1 illustration.Par Robert Fazy.

4° Le Baltoro et ses tributaires.

Depuis Younghusband, Conway et Eckenstein-Jacot=Guillarmod, 1e Baltoro a fait l' objet d' une série d' expéditions, dont deux au moins sont célèbres. Il suffit d' indiquer sommairement leurs dates et leurs résultats essentiels.

Conway, après avoir escaladé sur la rive nord du glacier, à l' est du glacier Younghusband 2 ), un pic très escarpé, haut de 5913 m ., qu' il baptisa Crystal Peak 3 ), paraît s' être surtout intéressé à la puissante barrière qui, du Broad Peak au Golden Throne ou Baltoro Kangri ( 7312 m. ) 4 ), ferme l' accès au Siachen. Après de nombreuses reconnaissances, en particulier dans les parages du « Hidden Peak»5 ), il finit par gravir le « Pioneer Peak » ( 6888 m.)6 ), à l' ouest du Golden Throne. En 1902, Eckenstein et les alpinistes éprouvés qui l' accompagnaient virent leurs projets constamment contrariés par le temps. Seuls deux des participants, Victor Wessely et le Dr Jacot-Guillarmod, réussirent à atteindre l' altitude de 6700 m. sur l' arête nord-est du K2. En 1909, eut lieu l' expédition italienne commandée par le Duc des Abruzzes avec Filippo de Filippi, Vittorio Sella et six guides ou porteurs de Courmayeur. Reconnaissant le K2, les alpinistes italiens gravirent successivement, à l' ouest, le glacier baptisé par eux glacier de Savoie, puis, à l' est, le glacier Godwin Austen, jusqu' à la Sella dei Venti ( 6238 m .) au pied du Staircase ou Skyang Kangri ( 7339 m.)7 ). Des tentatives d' approche du K2 lui-même ne réussirent pas. Avant de quitter le Baltoro, l' expédition s' attaqua au Bride Peak 8 ) ou Chogolisa I. L' attaque parvint à la hauteur de 7493 m. le record d' altitude de l' époque.

La relation 1 ), confiée à Filippo de Filippi et à Vittorio Sella, mérite une mention toute spéciale. Le texte est un modèle de clarté et d' érudition sans pédanterie. L' illustration est hors pair. Cent pages de notes scientifiques, d' excellentes cartes et 17 panoramas complètent l' ouvrage très soigneusement édité, le plus beau peut-être des livres modernes sur l' Himalaya 2 ).

Interrompue par la guerre, l' exploration reprit en 1929. Le duc de Spoleto, accompagné entre autres de l' alpiniste connu Umberto Balestreri, du Dr A. Desio et de guides de Courmayeur, reconnut le glacier de Punmah3 ), puis, par le glacier de Sarpo Laggo, trois de ses compagnons s' efforcèrent de raccorder les parcours de Younghusband et de K. Mason dans la vallée du Shaksgam4 ). Sur le Baltoro, les explorateurs poussèrent jusqu' à la Concordia5 ). Leur but, cette fois, n' était pas le K2, mais la recherche d' un col praticable entre le Baltoro et le Siachen. Conway supposait un passage possible entre le Hidden Peak 6 ) et le Golden Throne 7 ). Le duc parvint à une altitude de 6700 m. environ dans la région envisagée par son devancier8 ). L' hypothèse de Conway, sans être définitivement réfutée, n' a pas été jusqu' ici confirmée 9 ).

En 1934, le professeur Dyhrenfurth, accompagné de sa femme, conduisit une expédition internationale au Baltoro supérieur. La Suisse y était représentée par le chef de l' expédition et Mme Dyhrenfurth, Marcel Kurz 10 ), André Roch, 1e Dr Winzeler de Schaffhouse et l' opérateur Richard Angst. Renonçant au K2, les explorateurs s' attachèrent à la conquête du Gasherbrum I, 8068 m ., le Hidden Peak de Conway. Ils l' attaquèrent sur le front sud-ouest, où Roch et Erti parvinrent à 6300 m. Une reconnaissance du front ouest demeura sans résultat. Restait l' attaque par le sud à travers le groupe du Queen Mary. M. et Mme Dyhrenfurth, Erti et Höchst atteignirent un premier sommet, Mme Dyhrenfurth établissant le record féminin d' altitude à 23,000 p. environ.

Quelques j ours après, Hoc hst et Erti conquirent les autres pointes du Queen Mary. L' ascension du sommet inférieur oriental du Baltoro Kangri-Golden Throne et la reconnaissance du glacier de Vignecomplétèrent les résultats sportifs.

Le professeur Dyhrenfurth a publié la relation de l' expédition, d' abord sous le titre « Dämon Himalaya»2 ). Ce titre bizarre est emprunté à un film qui devait défrayer l' expédition, mais qui en fut la croix et aurait coûté cher à son chef. Le texte, sacrifié pour des raisons pécuniaires, est un peu décevant. Il se réduit à des extraits des carnets de route, non sans valeur du point de vue sportif, mais dans lesquels il faut chercher le passage d' intérêt général. Il manque un chapitre résumant l' état des problèmes géographiques avant et après l' expédition et, sauf de rares indications, le travail de mise au point est laissé au lecteur. L' illustration apporte quelques aspects nouveaux: la vue la plus originale est sans doute la planche 39, qui donne un profil inédit de la Tour du Muztagh. Une seconde édition revue et augmentée a paru, en 1940, sous le titre de Baltoro 3 ). Elle ne comble qu' en partie les lacunes de la première. De nouveau, il manque une liste des illustrations et un index. Le classement du texte ne supplée pas à ces défauts. Un exemple suffira: L' une des principales tâches de l' expédition était de vérifier l' existence discutée, d' un passage, praticable aux porteurs, du Baltoro au Siachen par le Conway Saddle. La question est posée à la page 144, la solution se trouve à la page 77 4 ) et la gravure, qui l' explique plus ou moins, doit être cherchée dans Dämon Himalaya, vignette 86! Ces réserves faites, Baltoro mérite d' être recommandé pour sa partie scientifique, dans laquelle le professeur Dyhrenfurth suit de près les suggestions de Kenneth Mason, pour ses récits d' ascension vivants et précis et — last but not least -t-pour son croquis à grande échelle, très lisible et donnant les hauteurs en mètres. L' illustration est copieuse et en bonne partie nouvelle5 ).

En 1936, M. de Ségogne et six alpinistes français s' attaquèrent eux aussi au Gasherbrum I. L' expédition lutta courageusement contre le mauvais temps persistant qui l' obligea à battre en retraite à une altitude de 6700 m. environ6 ).

1938 vit une brillante reconnaissance du K2 par Charles Houston et d' autres alpinistes américains. Comme jadis au Nanga Parbat, cette tentative de débutants du Karakoram faillit réussir. Deux des grimpeurs parvinrent à 26,000 pieds sur le front sud-est de la pyramide 1 ).

La même année, J. O. M. Roberts avec James Waller et d' autres s' atta au Masherbrum 2 ), 7821 m ., dont le souvenir hantait Waller depuis une tentative infructueuse au Saltoro Kangri, Peak 363 ). De Khapalu, l' expédition arriva à pied d' œuvre par la vallée du Hushi. L' attaque, commencée le 30 mai, était parvenue le 17 juin à 7200 m. environ. Le mauvais temps et le froid excessif imposèrent la retraite 4 ).

En 1939 enfin, une expédition américaine qui, chose curieuse, ne s' était assuré le concours d' aucun des participants à la tentative de 1938, s' attaqua à nouveau au K2, sous la direction de Wiessner. L' expédition fut conduite avec une regrettable imprudence, qui devait conduire au désastre. Il est possible, non certain, que l' altitude de 8360 m. ait été atteinte. A ce moment, le temps se gâta; les alpinistes étaient épuisés, les communications inexistantes. Un des Américains, Dudley Wolfe, ne put redescendre du camp 7 5 ). Le 31 juillet, trois des meilleurs sherpas, Pasang Kikuli, l' un des rares survivants du camp 8 au Nanga Parbat en 1934 6 ), Phinsoo Sherpa et Pasang Kotar s' efforcèrent héroïquement de l' aller secourir. On ne devait plus les revoir7 ). K. Mason a sévèrement jugé les fautes commises. Sa conclusion est « Eigerwand-tadics are criminal in the high Himalaya and Karakoram » 8 ).

5° Siachen et Rimo. a ) Siachen.

Découvert par H. Strachey en 1847 9 ), le Siachen a fait l' objet des trois expéditions suivantes:

En 1909, Longstaf f y pénétra par la vallée du Saltoro et le glacier de Bilafond, retrouvant le col de Saltoro 10 ). Faute de moyens suffisants, il ne put reconnaître qu' une partie du glacier n ).

De 1911 à 1912, les Workman, après avoir reconnu les vallées du Hushi et du Kondus et leurs glaciers, s' engagèrent à leur tour dans la vallée du Saltoro et atteignirent le Siachen par le col de Saltoro et le glacier qu' ils ont baptisé Lolofond 1 ). Disposant de moyens exceptionnels, ils explorèrent le glacier en tous sens, poussant dans le Teram Sher jusqu' à proximité du col2 ) qui le relie au Rimo, identifiant à l' extrême nord, au Turkestan-La3 ), ce qu' ils croient avoir été la selle de Younghusband 4 ) et poussant, à l' ouest, jusqu' au pied du Baltoro Kangri-Golden Throne. La relation de ce très intéressant voyage, malheureusement gâtée par trop de polémiques personnelles 5 ), vaut particulièrement par les cartes qui l' accompagnent.

En 1932 enfin, le professeur Giotto Dainelli battit tous les records, parvenant au Siachen, par Leh, le Diggher-La et la vallée de la Nubra, moins de deux mois après son départ de Florence 6 ). Il passa huit semaines sur le glacier, le remontant jusqu' à la chaîne du Roi George, gagna ensuite le Rimo par le Teram Sher et le col d' Italie, et rentra par le plateau du Depsang et le Kardong La. La relation, écrite pour le grand public, est pleine de charme et contient, à côté du récit de l' exploration du Siachen, quantité de détails sur le Ladakh que l' auteur connaît et a compris comme peu d' autres 7 ).

b ) Rimo.

Le Rimo, particulièrement intéressant parce qu' il donne naissance au Shyok8 ) et à la rivière de Yarkand, a été l' un des principaux objets d' étude de l' expédition italienne de 1913/14 9 ). Dirigée par Filippo de Filippi, elle comptait onze participants, parmi lesquels Giotto Dainelli, les topographes H. Wood et J. A. Spranger, 1e guide Giuseppe Petitgax. En 1913, elle prit ses quartiers d' hiver à Skardu, d' où Dainelli entreprit une série de reconnaissances dans les vallées du Shigar, de la Basha, du Kondus et du Saltoro, visitées pour la première fois en hiver 10 ). Au printemps 1914, les explorateurs gagnèrent par le Chang-La le plateau de Depsang. De là, Filippo de Filippi dirigea l' exploration des trois branches du Rimo 11 ), pendant que Wood et Spranger reconnaissaient la source de la rivière de Yarkand 12 ). Le 16 août, la nouvelle des déclarations de guerre de l' Autriche et de l' Alle magne parvint au camp du Depsang 1 ). Les explorateurs rentrèrent en hâte par le col du Karakoram et Kashgar, abandonnant leur projet d' exploration de la vallée du Shaksgam. La relation, faite par Filippo de Filippi en collaboration avec Dainelli et J. A. Spranger, est digne de celle de la première expédition italienne au Baltoro. L' illustration est splendide et 1a carte du Rimo unique. La nomenclature de K. Mason n' indique pas moins de douze pics de 21,840 à 24,230 pieds 2 ), formant le groupe Rimo 3 ). Les résultats scientifiques font l' objet d' une vaste publication qui comprendra douze volumes in-quarto. Le premier, intitulé La Esplorazione della regione fra l' Himalaya occidentale ed il Caracorum ( sic ), rédigé par Dainelli, a paru à Bologne, chez Nicola Zanichelli, en 1934. Ce travail d' homme d' action doublé de bénédictin présente, dans tous ses détails, l' histoire de l' exploration qu' en 1929. L' auteur pousse la conscience jusqu' à donner une carte d' iti pour chaque voyage. A la fin du volume se trouve la première bibliographie complète du sujet, particulièrement précieuse, parce qu' elle rassemble, en les groupant logiquement, les articles dispersés dans les diverses revues scientifiques ou sportives.

6° Cartes.

La plupart des ouvrages analysés dans le texte sont accompagnés de cartes. Dans la règle, toutefois, elles ne concernent que des régions restreintes et la carte générale annexée est le plus souvent médiocre. L' Hima Journal contient, lui aussi, des cartes de détail et des croquis fort utiles, mais il se réfère en général à la grande carte du Survey of India. Ceux qui ne la possèdent pas, pourront y suppléer avec la carte au 1: 500,000 de feu Cesare Calciati « II Karacorum secondo le ultime esplorazioni con speciale riguardo al contribuo degli Italiani, 1928, et surtout avec celle au 1: 750,000 en quatre feuilles, de Giotto Dainelli, « Cashmir e regione limitrofe ». Cette carte, très lisible et suffisamment détaillée, est annexée à La Esplorazione della regione fra l' Himalaja occidentale ed il Caracorum. Il y a des réserves à faire sur la nomenclature. Les auteurs italiens paraissent ne pas vouloir s' incliner devant celle du Survey of India et l' emploi récent de l' orthographe Caracorum par Dainelli laisse supposer que l' entente n' est pas près de se faire. L' article déjà plusieurs fois cité de Kenneth Mason, Karakoram nomenclature * ), permet les mises au point nécessaires.

Pour l' étude théorique préalable de la chaîne dans son ensemble et des principales vallées, l' ouvrage classique de S. G. Burrard et H. H. Hayden, A Sketch of the Geography and Geology of the Himalaya Mountains and Tibet, publié à Calcutta en 1907, reste fort utile. Il a été récemment réédité 5 ). De dimensions plus modestes, mais moderne ( 1934 ) et d' une clarté remar- quable, est Le Problème Himalayen de Marcel Kurz. Le seul défaut de cette étude de premier ordre est que, tirée à 100 exemplaires numérotés, elle n' est pas dans le commerce 1 ). Il faut espérer que l' auteur, qui travaille incessamment à la bibliographie de l' Himalaya, fera paraître bientôt une seconde édition revue et complétée, accessible à tous.

7° Conclusion.

Ce travail est forcément incomplet. Il laisse de côté toute une pléiade de voyageurs, missionnaires, savants et sportsmen 2 ) qui ont parcouru les vallées du Karakoram et pénétré plus ou moins profondément sur ses pentes et ses glaciers. Ceux qui seraient curieux de les mieux connaître, trouveront leurs excursions analysées con amore dans l' ouvrage de Giotto Dainelli sur l' exploration. Ces notes ne pouvaient entrer dans ces détails. Elles se bornent à résumer et classer l' essentiel. Leur principal but est d' éviter aux amis du Karakoram l' exaspérante recherche du fait cité quelque part, du passage lu mais non noté, ou du livre dont le titre exact a été oublié et qu' il faut retrouver dans une vingtaine de volumes ou dans des périodiques, dont les tables générales ne sont pas encore publiées.

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