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Téléphotographie

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Par Stefane Jasienski.

Sous le titre: « Téléphotographie et hyperstéréoscopie » M. Henri Huguenin a fait paraître dans cette revue en 1936 ( pages 147-151 ) un article fort intéressant, mais qui me paraît préconiser des méthodes dépassées par la technique moderne de la prise de vues en photographie à grandes distances. Je me permets donc d' apporter quelques remarques sur les progrès les plus récents de cette technique un peu spéciale, car les périodiques spécifiquement photographiques ne s' adressant qu' au grand public ne consacrent pas volontiers des pages aux descriptions techniques qui n' intéressent qu' un nombre très restreint de leurs lecteurs. Pour nous alpinistes la prise de vues alpestres à grande distance est cependant si intéressante et nous touche de si près que les remarques techniques seront certainement bien venues aussi dans notre revue.

L' auteur cité préconise l' emploi d' émulsions orthochromatiques et d' un écran jaune pour obtenir le rendement aussi distinct que possible des Alpes vues depuis les crêtes du Jura.

Cette technique était en effet usuelle avant l' introduction sur le marché photographique des emulsions panchromatiques modernes dont le rendement des couleurs en leurs tonalités grises en lumière diurne est presque correct sans aucun écran. Toutefois mettons-nous d' accord sur les facteurs qui influencent le rendement photographique des grands lointains.

1° Echelle: Comme l' image projetée par un objectif photographique est directement proportionnelle à sa focale, il est évident que, plus la focale est longue, mieux on pourra rendre les détails des montagnes lointaines. Toutefois il existe deux limites à l' emploi de focales très longues. Une limite pratique et relative et une limite absolue. La limite pratique est vite atteinte, si l'on prend en considération le poids et le volume de gros objectifs à longue focale. La limite relative prend en considération le format de la prise de vues et la netteté de l' image obtenue. Il est évident qu' il vaut mieux se servir d' une focale plus courte donnant une image absolument nette, susceptible de supporter un agrandissement ultérieur, que d' employer une focale très longue, mais donnant une netteté insuffisante. Enfin la limite absolue est donnée par les moyens dont dispose l' optique pour la fabrication de gros objectifs et la nécessité de monter de pareils objectifs sur des socles en béton comme des lunettes astronomiques.

2° Constraste: Le sujet alpestre présente des contrastes entre le roc et les plans de neige et de glace et le ciel. Ce contraste, très grand pour les prises de vues en haute montagne lors d' excursions, va en diminuant avec la distance et l' épaisseur de la couche atmosphérique qui nous sépare des montagnes à photographier. Pour augmenter ce contraste du sujet, il faut se servir d' émulsions dures et augmenter par l' emploi de filtres colorés le contraste de couleurs en rendant le ciel bleu aussi sombre que possible pour faire se détacher les plans de neige et glace blancs.

3° Atmosphère: Le volume d' air qui se trouve logé entre les montagnes et notre point de prise de vues est très important pour la bonne réussite. Plus l' air est pur, mieux le contraste du sujet est visible. Toutefois un grand mouvement dans l' air devient d' autant plus gênant que la focale de l' objectif de prise de vues est longue et le temps de pose à donner est long. Un avant-plan ensoleillé, des toits ou des rochers chauffés par le soleil et voici des colonnes d' air chaud se levant et montant en tourbillons qui occasionnent un flou certain, même avec des temps de pose très courts.

Pour vaincre ces trois principales sources d' obstacles il faut se servir de tous les moyens disponibles et escompter seulement alors le meilleur résultat pratique. Passons rapidement en revue ces moyens.

Optique: Tous les efforts des fabricants d' optique de longue focale tendaient toujours à fournir des objectifs d' un volume et d' un poids restreints, mais de bonne netteté. Je me permets de rappeler ici le téléphot Vautier, qui divisait le long tirage d' un objectif à longue focale en trois sections superposées par deux miroirs inclinés, les différents téléobjectifs dont le principe est toujours de grossir optiquement l' image primaire d' un objectif à focale courte, etc. Tous ces moyens sont bons, mais le meilleur résultat possible peut être obtenu en se servant d' un objectif composé de peu de lentilles, accusant si possible seulement deux faces verre/air et dont la correction est faite seulement pour le format vraiment utilisé. Tout aussi important est un appareil de construction robuste et accusant une rigidité parfaite ainsi qu' une haute précision dans l' identité de position du verre dépoli et de la surface sensible pour la prise de vues.

Chimie: La chimie des emulsions sensibles nous a gratifiés de deux importantes réalisations: emulsions panchromatiques et sensibles à l' infra.

Le panchromatisme de pair avec une gradation contrastée peut donner tout ce qui est visible à l' œil et même davantage, tandis que l' infra nous donne toujours un rendement de tonalités autre que de visu, mais peut nous donner des détails invisibles à l' œil selon l' état de l' atmosphère.

Savoir utiliser judicieusement ces moyens, c' est s' assurer le meilleur rendement en photographie des grands lointains. Le facteur le plus important selon mes expériences est le contraste. Une emulsion à grands contrastes est toujours une aide importante lorsque l'on a affaire seulement à des arrière-plans, mais elle devient inutilisable, s' il s' agit de rendre en même temps un avant-plan. D' autre part, plus le contraste de l' émulsion est grand, moins l' écart de pose est admissible. Effectivement avec une plaque panchromatique type aviation à grands contrastes il n' y a pas d' écart de pose pratique! Deux poses dont l' une était d' un quart de seconde, l' autre d' un huitième étaient à peine utilisables, car une était trop longue, l' autre trop courte!

La sensibilisation panchromatique, surtout pour le rouge, nous permet de nous servir d' un écran rouge au lieu d' un jaune, ce qui coupe non seulement le violet, mais le bleu et malgré cela permet des temps de pose plus courts qu' avec les anciennes emulsions orthochromatiques et des écrans jaunes.

N' oublions pas qu' en photographie en couleurs ( par sélection trichrome ) la prise de vue derrière l' écran rouge donne l' extrait qui s' imprime en bleu, c'est-à-dire que si nous employons un écran rouge nous obtenons en noir sur le positif tout ce qui est en réalité bleu ou mélangé de bleu. L' augmen des contrastes est donc seulement une exagération dans le rendement des valeurs bleues en noir.

La situation se présente par contre d' une façon différente pour les emulsions infrarouges. Ici les radiations du rouge extrême et des rayons invisibles à l' œil contribuent ou, selon la densité de l' écran choisi, composent seuls l' image dont les tonalités n' ont plus rien de commun avec l' aspect normal du paysage. Surtout toute verdure est rendue absolument blanche ( sauf les sapins ), ce qui fait l' effet d' un paysage enneigé. Mais la valeur de l' infra est très grande pour les prises de vues extrêmement lointaines et par temps brumeux. Il existe deux sortes de plaques infrarouges: à gradation normale et des emulsions à contrastes. Pour les prises de vues alpestres les gradations normales sont amplement suffisantes par beau temps. Seulement quand il s' agit d' opérer par temps brumeux où l'on espère obtenir des détails invisibles non seulement à l' œil nu, mais aussi avec une jumelle, l' émulsion à contrastes devient utile. Il faut aussi dire que ces dernières accusent un grain plus fin et se prêtent mieux à un fort agrandissement du négatif, mais sont d' une sensibilité moindre.

Exemple pratique: Pour faire voir la différence du résultat obtenable, je présente deux photographies du massif de la Jungfrau prises de Bienne. L' une sur plaque panchromatique grain fin et assez contrastée, l' autre sur plaque infrarouge rapide à gradation normale.Voici les données:

N° 1. Photographie exécutée sur plaque panchromatique. Objectif: Télé-objectif de 180 cm. de focale équivalant c F/50 environ. Ecran rouge Lifa 200 c. ( sélection trichrome ). Prise de Bienne le soir vers 18 h. quand toute la ville était à l' ombre. Temps de pose 3 minutes.

N° 2. Photographie infrarouge. Objectif: Lentille simple anastigmatique focale 90 cm. à F/50. Ecran rouge Lifa R 909 ( très foncé ). Prise à 18 h. 30 en juin. Temps de pose 12 secondes.

La comparaison de ces deux prises ( qui d' ailleurs pourraient servir aussi d' exemple pour la stereoscopie à grande base, car elles ont été prises à environ 300 m. de base ) permet d' une façon bien distincte de juger du progrès. Malgré le rendement tout à fait faux de la verdure faisant effet de neige où il y avait de beaux prés et des champs verts, quel rendement du premier plan! Tandis que la photo exécutée sur plaque panchromatique nous a bien rendu, vu son grand contraste et l' écran rouge, les cimes neigeuses, mais nous a fait sacrifier tout l' avant, l' épreuve d' après le négatif infrarouge ( agrandi deux fois pour compenser la relation des deux focales 180 à 90 cm .), tout en nous donnant le même rendement des cimes, nous vaut tous les plans bien fouillés. L' agran a été exécuté sur papier de gradation douce, tant le cliché est parfait. Je ne puis finir mon compte rendu sans donner en quelques mots mon appréciation des progrès réalisés par la photographie de petit format. Qui dit petit format, pense en premier lieu au Leica, l' appareil pionnier du petit format.

Malheureusement il n' existe pas d' émulsions sensibilisées aux radiations infrarouges à grain vraiment fin. Les films infrarouges, que l'on peut obtenir en largeur 35 mm. perforés pour cinéma professionnel et Leica, accusent un grain plus gros que certains des films des plus sensibles pour le même appareil. Il existe en plaques des emulsions infrarouges à grain plus fin, mais ce sont des emulsions lentes à forts contrastes, inutilisables pour des instantanés. Ce handicap est très sérieux car, toute proportion gardée, on pourrait obtenir des résultats surprenants au moyen du Leica et des objectifs spéciaux à longue focale. J' avais bien marqué dans la discussion sur l' optique que la netteté est des plus importantes pour la photographie à grandes distances. Or, un objectif normal de longue focale adapté sur un petit appareil ne donnera jamais le résultat maximal, car, étant calculé pour couvrir un grand format, sa correction répartit les restes de défauts sur son angle de champ entier.

Pour un petit appareil ou mieux un appareil de petit format, ce qui n' est pas la même chose, il nous faut un objectif qui malgré sa longue focale ne couvre qu' un très petit angle, mais alors avec une netteté inconnue à l' optique pour grands formats. La maison Astro de Berlin, spécialisée dans l' optique pour cinéma professionnel, fournit sous la dénomination « Fernbildlinse » de pareils objectifs pour le cinéma et le Leica. Une « Fernbildlinse » de 40 cm. de focale ne couvre pas le format Leica! Un champ de 24 x 24 mm. est d' une netteté parfaite. Ces objectifs ouverts à F/5 sont livrés dans des focales jusqu' à 1000 mm. ( toujours pour le format Leica au maximum !) et n' accusent que deux faces verre/air, ce qui leur donne outre la netteté parfaite un grand brillant de dessin.

L' épreuve n° 3 nous donne une vue sur les Alpes Bernoises prises du sommet du Pilate avec le Leica et un objectif Summar Leitz de 5 cm. de focale sur film panchromatique à grain fin.

L' épreuve n° 4 nous donne du même point de vue et sous les mêmes conditions une vue comparative prise avec le même Leica et une lentille Astro « Fernbildlinse » de 400 mm. de focale.

Voilà ce qui peut être fait avec un appareil de petit format, mais non « petit » comme tel surtout avec la lentille Astro.

Le photographe avisé se servira donc aujourd'hui pour ses prises d' émul panchromatiques dont il choisira le degré de contraste selon les exigences de son sujet, et le cas échéant recourra aux emulsions infrarouges pour obtenir le maximum de ce que peut donner la photographie à grande distance.

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