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Comment on se perd en montagne

Remarque : Cet article est disponible dans une langue uniquement. Auparavant, les bulletins annuels n'étaient pas traduits.

Par E. Brodbeck

Avec 3 croquis Le sens de l' orientation est inexistant chez l' homme; privés de points de repère ou de moyens d' observation, le sauvage aussi bien que le civilisé sont incapables de s' orienter et de marcher ensuite dans une direction rectiligne; de nombreuses expériences l' ont prouvé.

Les principales causes de désorientation par le brouillard ou la tempête sont les suivantes.

L' inattention Combien de fumeurs, au cours d' une randonnée, ne se sont-ils pas arrêtés pour allumer une pipe, ont fait un quart de tour pour s' abriter du vent; puis ils ont continué sans autre leur chemin, et tout à coup se sont aperçus qu' ils revenaient sur leurs pas ou prenaient une mauvaise direction.

COMMENT ON SE PERD EN MONTAGNE 11 arrive aussi qu' au cours d' une excursion on s' arrête pour examiner une plante, un animal, ou tout simplement pour discuter. Quand on se remet en marche, on change de direction sans s' en rendre compte, pour peu que le brouillard nous prive de points de repère.

En hiver, et tout particulièrement à ski, l'on suit volontiers une piste qui va dans la bonne direction de départ; on s' y fie sans prendre garde qu' elle ne conduit pas nécessairement au bon endroit; j' en ai fait l' expérience un jour à mes dépens, en suivant la piste d' un facteur postal.

L' assymétrie du corps humain et les inégalités physiologiques Une jambe légèrement plus longue ou plus vigoureuse que l' autre provoque à chaque foulée une déviation imperceptible; ces écarts s' additionnent à l' insu du touriste, en sorte qu' après un temps relativement court, il se trouve avoir fait un demi-tour et revenir sur ses pas.

Par exemple si l'on dévie d' un centième de la longueur d' un pas de 70 centimètres, soit de 7 millimètres tous les deux pas, on accomplira sans s' en douter un demi-tour en une demi-heure de marche, après avoir fait 2800 pas, ce qui représente un trajet de 1960 mètres.

Les formes du terrain A pied, figure 1.

Nous devions nous rendre du point A au point B par un fort brouillard; il s' agissait de monter au sommet d' une colline dans la direction du nord, de descendre dans une combe, toujours dans la même direction, puis franchir un col.

L' inclinaison de la pente en C augmentant, nous sommes montés légèrement de biais sans nous en rendre compte, puis arrivés en D, l' inclinaison diminuant, nous Fig. l avons à nouveau pris la plus grande pente, de sorte que notre direction se trouva modifiée d' un quart de tour. Arrivés au sommet, nous sommes redescendus tout naturellement en conservant la même direction nord-ouest, puis montés en E, direction ouest, croyant nous élever au col du côté de B au nord.

A ski, figure 2.

En traversant une colline. Par un brouillard intense, nous avons été priés de reconduire des skieurs à leur chalet, soit du point A au point B, distants de moins d' un km. Pour atteindre le chalet par le plus court chemin, il suffisait de marcher constamment dans la direction nord-est en traversant une colline de biais. Dès le point C la descente se fit à ski, et ceux-ci nous entraînèrent insensiblement dans la direction de la plus grande pente, de COMMENT ON SE PERD EN MONTAGNE

sorte que finalement nous allions à l' op du but. Nous étant aperçus du changement de direction, il nous a suffi de faire une visée à la boussole pour reprendre immédiatement la bonne direction.

Sur les pentes. Que ce soit à la montée ou à la descente, il y a lieu de contrôler son cheminement à la boussole, après avoir fait un certain nombre de lacets.

Fig. 2 Dans une neige profonde, figure 3. Par une tempête nous devions nous rendre du point A au point B en contournant un sommet A partir de C le trajet est presque plat, puis monte légèrement. Au lieu de prendre la bonne direction, nous sommes allés en E, en voici la cause: de C à D nous avions l' impression d' aller à plat parce que la couche de neige fraîche nous obligeait à pousser nos skis, alors qu' en réalité nous descendions; de même de D à E nous croyions monter, alors qu' en réalité nous allions à plat.

Les facteurs psychologieues La peur. Parfois la peur paralyse le raisonnement, et par là même la possibilité de s' orienter; par exemple quand on est pris par la nuit, ou subitement entouré de brouillard.

Fig. 3 Un accident. Ce même phénomène peut aussi se produire à la suite d' un accident de montagne. Les rescapés sont plongés aussitôt après dans une complète inconscience; non seulement ils ne portent aucun secours à la victime, mais eux-mêmes, complètement désemparés, ne cherchent qu' à fuir n' importe où.

La carte topographique en main. Certaines personnes s' orientent bien sur la carte ou sur les plans de ville, mais sont incapables de passer de la théorie à la pratique; au lieu de se diriger en laissant la carte correctement orientée, ils se tournent, tenant la carte à la main, et se trompent fatalement de direction puisque la carte n' est plus orientée.

Ces exemples dont nous fûmes les victimes ou les témoins sont loin d' épuiser le sujet, aussi serions-nous reconnaissants aux clubistes de bien vouloir nous communiquer les expériences qu' ils auront eu l' occasion de faire dans ce domaine.

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