L'Année Géophysique Internationale 1957-1958 | Club Alpin Suisse CAS
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L'Année Géophysique Internationale 1957-1958

Remarque : Cet article est disponible dans une langue uniquement. Auparavant, les bulletins annuels n'étaient pas traduits.

PAR ANDRÉ RENAUD, LAUSANNE

Avec 6 illustrations ( 95-100 ) L' OPÉRATION « GLOBE » Le 1er juillet 1957 a marqué le début d' une vaste entreprise de coopération scientifique internationale qui a pour but l' étude sans frontières politiques des nombreux problèmes relatifs à la physique du globe. 56 nations participent à la réalisation d' un programme élaboré depuis 1953 par le Comité spécial pour l' Année Géophysique Internationale ( AGI ), présidé par le professeur Sydney Chapman d' Oxford.

Cette immense entreprise durera en réalité 18 mois. Elle est en quelque sorte la suite de la Première Année Polaire Internationale 1882-1883 et de la Seconde Année Polaire Internationale 1932-1933 qui eurent toutes les deux pour but l' établissement de stations météorologiques temporaires dans l' Arctique où les observatoires permanents ont toujours été en nombre insuffisant. L' AGI est donc la troisième opération de cette espèce; mais elle prend cette fois-ci une envergure considérable en s' étendant à toute la terre et en embrassant tous les domaines de la physique du globe sans se limiter la seule météorologie.

Un grand espoir soutient tous ceux qui participent à cette entreprise. C' est celui d' apporter une contribution nouvelle à la climatologie et une aide peut-être décisive à la prévision du temps à longue échéance. Car malgré les progrès considérables enregistrés par la science météorologique depuis l' établissement des premières cartes du temps, voici un siècle, beaucoup de problèmes restent mal connus. Le temps qui règne en un lieu est en grande partie influence par les grands courants aériens qui participent à la circulation générale de l' atmosphère. Les marins et les montagnards, qui sont parmi les meilleurs observateurs du temps, ont toujours considéré le vent et ses variations de direction et d' intensité comme l' un des premiers et meilleurs « signes » du temps à venir. Or, la circulation générale de l' atmosphère est encore trop peu connue. En particulier, les perturbations qui prennent naissance dans les latitudes moyennes, et qui sont toujours accompagnées de mauvais temps, attestent l' influence considérable que jouent les masses d' air polaire dans la circulation générale. L' étude de ces phénomènes sera considérablement avancée au cours de VAGI grâce à l' effort fait dans cette période pour multiplier les observations météorologiques au sol et les sondages aérologiques dans les régions polaires et subpolaires.

Bien qu' elle ressortisse à l' astronomie, l' activité solaire intéresse aussi les géophysiciens, qu' ils soient climatologues, météorologues ou spécialistes des radiocommunications, par exemple. Les admirables études du soleil effectuées depuis un demi-siècle ont non seulement permis de découvrir le processus physique qui entretient cette source d' énergie, mais elles ont encore mis en évidence les manifestations singulières de son activité et notamment les éruptions de la chromosphère. Les conséquences de ces manifestations sur le magnétisme terrestre et sur les aurores polaires sont connues depuis longtemps. Leur action sur la propagation des ondes radio-électriques est une chose plus récente et d' une importance considérable. Les relations entre les phénomènes terrestres et solaires sont étudiées depuis de nombreuses années par une commission mixte internationale. L' AGI n' a pas créé de nouveaux organismes de recherche, mais s' efforce plus précisément de coordonner leurs travaux dans l' espace et dans le temps.

Le rayonnement solaire reçu par notre planète n' est pas seulement la principale et presque unique source d' énergie pour les phénomènes de la vie et les industries humaines, il est encore le moteur de la circulation générale de l' atmosphère. On évalue en effet à 2% de l' énergie solaire retenue par l' atmosphère la part qui engendre les vents et qui, par leur mécanisme, répartit les précipitations à la surface du globe. On voit donc quelle est l' importance que revêtent pour le climat le rayonnement solaire et ses variations.

Des déterminations déjà anciennes fixent à deux calories par centimètre carré et par minute la quantité d' énergie solaire qui parvient à la limite de notre atmosphère. Ce qui correspond à une puissance de 1,4 kilowatt par mètre carré ou à une quantité de chaleur susceptible de fondre chaque année une couche de glace de 36 mètres d' épaisseur uniformément répartie à la surface du globe.

Cette valeur que l'on nomme communément constante solaire mérite-t-elle réellement d' être considérée comme invariable? Cette question est très discutée, car la précision de cette détermination n' est que de 1 à 2% et les variations observées au cours de la période de onze ans de l' activité solaire sont du même ordre de grandeur. Dans ces conditions, il n' est pas encore possible de se prononcer sur cette question dont l' intérêt est très considérable. La détermination de cette « constante » a été faite jusqu' ici à partir d' observations terrestres faute de pouvoir s' élever assez haut 18 Die Alpen- 1957- Les Alpes265 dans l' atmosphère dont la limite est extraordinairement élevée. Les sondages aérologiques au moyen de ballons-sondes ne parviennent qu' à 30 kilomètres environ. Les fusées dérivées des trop fameuses V 2 apparues à la fin de la dernière guerre mondiale vont environ dix fois plus haut, mais leur temps de vol est très court. La solution a été trouvée dans l' utilisation du satellite art ciel, seul capable de s' élever très haut, jusqu' à la limite pratique de l' atmosphère, et de mesurer automatiquement et durant plusieurs semaines, voire des mois, toutes les grandeurs physiques susceptibles de nous renseigner sur la haute atmosphère et plus particulièrement l' intensité de la radiation solaire.

Le premier satellite artificiel construit et lancé avec succès par les savants russes a montré que le problème balistique était résolu. C' est là, incontestablement, un résultat magnifique. Au jour où j' écris ces lignes ( 15 octobre ), nous ne savons pas encore si cette expérience tient aussi ses promesses dans le cadre de VA GI. Cela, les géophysiciens l' attendent avec la curiosité la plus vive, celle qui s' attache au progrès des connaissances et aux réalisations pacifiques au service de l' homme.

Les études sur le rayonnement qui figurent au programme de Y ACI portent non seulement sur sa valeur globale, mais aussi sur les variations dans la proportion entre les diverses radiations. Il n' est par exemple pas certain que les éruptions solaires augmentent la quantité de chaleur reçue par la terre; mais il est probable qu' elles modifient la proportion des radiations au profit des rayons ultraviolets. Or, on sait que ces derniers sont absorbés en grande partie en haute altitude déjà par la couche d' ozone1. Il peut en résulter une élévation de température dans cette partie de la stratosphère seulement, suivie d' une action secondaire dans la troposphère. Celle-ci, qui est l' atmosphère météorologique proprement dite, est le siège des phénomènes qui nous touchent de près, mais qui ont sans doute leur origine dans les couches supérieures. Il convient enfin d' ajouter que la prévision du temps à longue échéance, actuellement à ses débuts expérimentaux2, bénéficiera sans doute des découvertes qui seront faites sur la haute atmosphère et le rayonnement solaire.

Notre génération se préoccupe non sans raison de trouver de nouvelles ressources en énergie. L' utilisation des réactions de physique atomique constitue une solution parmi d' autres; mais elle n' exclut pas, par exemple, une meilleure utilisation des possibilités classiques offertes par le vent et le soleil. L' UNESCO vient très précisément de leur conférer une nouvelle actualité en les inscrivant au programme du développement économique des zones arides de la terre.

Le fait que VAGI a débuté le jour même où une aurore boréale intense apparaissait sous nos latitudes, suivie récemment par d' autres - phénomènes rares dans nos contrées -, montre que l' époque choisie n' a pas été fixée au hasard. On l' a effectivement fait coïncider avec une période maximale d' activité solaire.

Une caractéristique particulièrement importante de VAGI est l' observation simultanée des phénomènes qui sont susceptibles - telles les aurores polaires, par exemple - de se produire en tous les points du réseau des observatoires. A cet effet, on a prévu, selon un calendrier fixé à l' avance, des Journées mondiales et des Alertes mondiales, celles-ci déclanchées quelques jours avant une perturbation solaire prévue. Ces dispositions doivent permettre aux 800 observatoires du soleil de prendre à temps toutes les mesures pour remplir leur programme.

En 1882-1883, douze pays installèrent 46 stations d' observation temporaires. En 1957-1958, plus de 2100 stations situées d' un pôle à l' autre sur 93 pays différents assumeront la réalisation d' un 1 L' ozone est une variété instable d' oxygène n' existant qu' en proportion très faible dans Pair, spécialement vers 20 à 25 km de hauteur. Une couche de 5 à 6 mm à la pression normale suffirait à intercepter totalement les rayons ultraviolets.

2 Notamment en France, où on les établit un mois à l' avance.

programme dont l' ampleur et la coordination justifient bien le surnom d' opération « globe » que l'on donne parfois à VAGI.

Quant aux dépenses engagées, couvertes par les crédits des gouvernements des pays participants et le concours financier de l' UNESCO, elles sont de l' ordre de 1,2 milliards de francs suisses, coût des satellites non compris.

L' ANTARCTIQUE, RENDEZ-VOUS DES CHERCHEURS Le théâtre le plus spectaculaire et le plus animé de VAGI est sans conteste le Continent antarctique, véritable glacière du monde, puisque sa masse de glace équivaut aux 87% de la quantité totale des glaces du globe '. On a dit récemment, et non sans raison, que l' Antarctique est aussi international que la Science elle-même. N' est pas présentement peuplé de 6000 chercheurs appartenant à 12 pays et occupant 60 bases installées sur le continent et les territoires sub-antarctiques? Ce sont les seuls humains de cette terre inhospitalière que peuplent encore les manchots et quelques rares espèces animales et végétales. La collaboration est parfaite entre les uns et les autres, tant il est vrai que la science est une et qu' elle ne connaît pas de frontières. Les rivalités n' ont pas de place dans cet immense désert où il n' y a rien d' autre à conquérir que les secrets d' une nature hostile et dure. Outre l' activité scientifique proprement dite, il y aura aussi quelques manifestations sportives. Je cite en particulier la traversée de l' Antarctique qu' effectueront prochainement, en partant de bases opposées, pour se rencontrer au pôle même, deux équipes d' alpinistes, l' une anglaise sous la conduite du Dr Fuchs, l' autre néo-zélandaise dirigée par Hillary, le vainqueur de l' Everest.

Le pôle sud géographique n' est pas le point le plus élevé de l' Antarctique. Il se situe à l' altitude de 9200 pieds et les Américains y ont installé une base pour 18 chercheurs dont le chef est le Dr Siple, le continuateur de l' œuvre de l' amiral Byrd. Au mois de mai 1957, on a noté à cette station nommée Amundson-Scott une température de 100 degrés centésimaux au-dessous de zéro. Le matériel nécessaire à la construction de la station a été transporté à partir de la base de la Petite Amérique sur la Grande Barrière de Ross ( 78 degrés de latitude sud ) par des tracteurs à neige sur une distance de plus de 1000 kilomètres jusqu' à la station Byrd ( latitude 80 degrés sud ), puis de là par des avions qui larguèrent ainsi plus de 700 tonnes au Pole Sud même.

Le point le plus élevé de la calotte de glace semble être situé à la latitude de 82 degrés environ et à l' altitude de 14000 pieds. C' est le pôle de V inaccessibilité que les Russes chercheront à atteindre à partir des bases qu' ils possèdent dans ce secteur. De hautes montagnes de 15000 pieds s' élèvent encore au-dessus de la calotte, tel le Mont Wade, de 15000 pieds, situé dans les Monts du Prince Olaf, entre les glaciers de Liv et de Shakleton, sous une latitude de 85 degrés sud, dans la région la plus méridionale de la Grande Barrière de Ross. Dans l' Ile de Ross, située sous 77,5 degrés de latitude sud, le volcan Erebus, le seul actif de l' Antarctique, s' élève de 13200 pieds au-dessus de la Mer de Ross, en bordure de la Grande Barrière.

Le pôle magnétique est situé très loin du pôle géographique, soit à la latitude de 68 degrés sud et à la longitude de 144 degrés à l' est de Greenwich, à proximité de la côte, dans la zone australienne. C' est non loin de là que la France possède un secteur s' étendant sur 6 degrés de longitude, de la côte de la Terre Adélie jusqu' au pôle géographique. Depuis le mois de février 1950, la France entretient diverses bases. Elle possède actuellement sur la côte la base Dumont d' Urville, et la 1 Albert Bauer: Über die in der heutigen Vergletscherung der Erde als Eis gebundene Wassermasse ( in « Eiszeitalter und Gegenwart », 1955 ).

En haut:

Coupe transversale de l' Inlandsis du Groenland de la Baie de Disko ( Côte occidentale ) à l' tle d' Ella ( Côte orientale ) en passant par la Station Centrale. ( Les altitudes sont amplifiées environ 80 fois. ) En bas:

Quatre coupes de l' Inlandsis du Grœnland.

Figures tirées de Jean-Jacques Holtzscherer et Albert Bauer: Contribution à la connaissance de l' Inlandsis du Grœnland ( Paris 1954 ). Les auteurs ont participé aux Expéditions polaires françaises, Missions Paul-Emile Victor, qui ont effectué au Grœnland de nombreuses campagnes entre 1948 et 1953, y compris deux hivernages consécutifs à la Station Centrale de 1949 à 1951. Au cours de ces expéditions, les chercheurs français ont parcouru 9606 kilomètres d' itinéraires inédits avec des véhicules chenilles. Leurs études ont permis de résoudre l' énigme de la calotte de glace du Grœnland nommée aussi Inlandsis. Ils en ont en effet déterminé l' épaisseur en plus de 400 points par diverses méthodes physiques, notamment les sondages sismiques et les mesures de pesanteur ( gravimétrie ).

Comme on le voit sur ces figures, l' épaisseur de la calotte est considérable. Le dôme central ne paraît pas conditionné par le relief sous-glaciaire. L' altitude moyenne du socle sous-glaciaire est de 620 mètres; celle de la calotte est de 2135 mètres, d' où il résulte une épaisseur moyenne de 1515 mètres et maximale de plus de 3000 mètres environ. Le volume de cette masse de glace est de 2,6 millions de kilomètres cubes. Sa fonte provoquerait une montée du niveau des mers de 7 mètres environ.

Le but scientifique de la nouvelle expédition en préparation ( EGIG ) est de déterminer le régime de la calotte en multipliant en particulier les mesures d' accumulation et d' ablation dans la zone principale.

station « Charcot » à l' intérieur, enfouie dans le névé de la calotte. Le secteur français est l' un des plus déshérités et connaît les vents les plus fréquents et les plus violents du continent qui écoulent l' air froid venant de la calotte et dont la vitesse peut atteindre 200 nœuds. C' est encore dans ce secteur que l'on a étudié les plus grandes colonies de manchots empereurs, ces seigneurs de l' Antarctique, dont toute l' existence est un défi aux conditions habituelles de la vie.

Il n' est pas possible de donner dans cet article un aperçu plus complet de l' activité de I dans l' Antarctique. Je me borne donc à ajouter que ce continent n' est plus tout à fait une énigme géographique, il occupe approximativement toute une calotte située à l' intérieur du cercle polaire boréal, d' une superficie égale à celles de l' Europe et de l' Australie réunies, et ses côtes s' étendent sur quelque 20000 kilomètres, dont certaines parties ne sont pas encore connues. De même, il reste encore bien des régions intérieures à explorer et des sommets à découvrir. Néanmoins, la véritable énigme de cette terre est sa nature physique. Quelle est, en particulier, l' épaisseur de la glace? De très récents sondages sismiques ont révélé une couche de glace de 10000 pieds dans les parages de la station Byrd déjà citée. L' altitude de cette station étant de 5000 pieds, cette découverte signifie que la glace descend également à 5000 pieds au-dessous du niveau de l' Océan. Comment une telle calotte a-t-elle pu se former, et quelle est son influence sur le temps dans l' hémisphère sud, voire même dans le nôtre? Cette calotte est-elle la cause ou la conséquence de la température de l' air relativement basse de l' hémisphère austral, dont la valeur annuelle moyenne n' est que de 13,4 degrés contre 15,2 degrés pour l' hémisphère nord? La réponse est impossible à donner, car il ne faut pas oublier l' existence de la dissymétrie des saisons entre les deux hémisphères: la durée de la saison froide ( automne plus hiver ) est actuellement de 186 jours 11 heures pour l' hémisphère sud contre 178 jours 19 heures pour l' hémisphère nord.

Enfin, la glace de l' Antarctique n' a pas partout la même nature physique. Elle est beaucoup plus complexe que celle de l' Inlandsis grœnlandais, entièrement formée sur terre. Sur le Continent antarctique, la glace masque presque partout les côtes rocheuses sous-jacentes et déborde par-dessus pour s' écouler, non par des fjords ( bien qu' il en existe aussi quelques-uns ), mais en nappes très larges s' étalant vers l' Océan. A cela s' ajoutent les glaces de bordure, glaces de mer surchargées de précipitations neigeuses, formations complexes connues sous le nom d' ice. Ces couches atteignent plusieurs centaines de mètres d' épaisseur et ne reposent pas toujours sur le fond marin. Beaucoup de bases côtières, faute de pouvoir trouver la roche en place, doivent s' installer sur l' ice, instable et mouvant, mais tout de même plus confortable que la banquise elle-même beaucoup plus mince et dont les brusques débâcles obéissent à des causes qui ne sont pas encore bien connues. La Petite Amérique V, celle de VAGI, est aménagée sur l' ice, tandis que la station Dumont d' Urville a l' avantage d' être située sur terre ferme.

Le matériel pour l' Antarctique a été amené par mer. Les liaisons aériennes avec le reste du monde sont rares et réservées au personnel. Mais sur le continent lui-même, l' avion de transport est utilisé systématiquement, ainsi que l' hélicoptère. Enfin, les tracteurs chenilles ont définitivement remplacé les traîneaux à chiens que l'on réserve pour des missions spéciales ou de secours.

LA PARTICIPATION DE LA SUISSE À L' AGI Le Comité National Suisse pour VAGI que préside le professeur Dr J. Lugeon ( Zurich ) dispose des fonds accordés par la Société Helvétique des Sciences Naturelles d' une part et le Fonds National Suisse pour la Recherche d' autre part. La participation scientifique de la Suisse comprend les travaux effectués en Suisse et deux expéditions dans l' Arctique.

Trois observatoires suisses procèdent à des mesures de rayonnement. Ce sont ceux de Bâle ( Dr M. Bider ), de Davos ( Dr W. Mörikofer ) et de Locarno-Monti ( C. Thams ). Une station secondaire de haute altitude ( 2670 mètres ) au Weissfluhjoch est en outre rattachée à l' Observatoire physico-météorologique de Davos.

A la Station de recherche scientifique du Jungfraujoch ( Observatoire du Sphynx, 3600 mètres d' altitude ), l' Institut de Physique de l' Université de Berne ( G. Houtermans ) mesure de façon continue la composante neutronique du rayonnement cosmique qui, à cette altitude, est 15 fois plus intense qu' au niveau de la mer. Certaines variations dans la réception de ce rayonnement d' origine encore inconnue pourraient un jour être utilisées pour la prévision du temps.

L' Observatoire astronomique et chronométrique de Neuchâtel ( Dr J. P. Blaser ) participera à I' Ooération Mondiale des Longitudes et des Latitudes. Il s' agit là de mesures exigeant un matériel extrêmement précis dont ne disposent qu' un petit nombre d' observatoires. Ces mesures sont notamment destinées à vérifier l' hypothèse de la dérive des continents.

L' Institut fédéral pour l' étude de la neige et des avalanches au Weissfluhjoch sur Davos ( Dr M. de Quervain ) s' est chargé d' établir des cartes d' enneigement dans lesquelles on distingue les zones d' en occasionnel ( au-dessous de 700 mètres d' altitude environ ), régulier ( entre 700 et 2900 mètres ) et persistant ( névés glaciaires ). Les limites entre ces zones ont des variations climatiques qu' il est intéressant de comparer avec celles d' autres régions du globe et de Suisse.

La Commission des glaciers de la Société helvétique des sciences naturelles fait un effort particulier pour contrôler la position des langues glaciaires les plus importantes en 1957 et en 1958. Les glaciers sont les meilleurs témoins du climat et les renseignements qu' ils nous donnent remontent plus loin dans le passé que les observations climatologiques des observatoires les plus anciens.

Le Grand Glacier d' Aletsch est l' objet d' une étude particulièrement complète. Avec l' aide du Service topographique fédéral, un levé photogrammétrique aérien vient d' être effectué avec la collaboration de la Section d' hydrologie du Laboratoire d' hydrologie et de mécanique des terres annexe à l' EPF ( Ing. P. Kasser ). Pour faciliter la restitution cartographique de la surface trop uniformément blanche des névés, on les a parsemés d' un très grand nombre de repères visibles constitués par de la sciure noircie de suie. Ce levé doit servir de base à la détermination ultérieure des variations de masse de cette grande réserve de glace, en relation avec les fluctuations du climat.

La première expédition arctique est déjà en voie de réalisation. C' est Y Expédition radiométéoro-logique polaire suisse ( J. Lugeon, Zurich ) à la Baie de Murchinson ( 80 degrés de latitude nord ) au Spitzberg, en collaboration avec la Suède et la Finlande. L' étude de la propagation des parasites atmosphériques qui y est faite doit mettre en évidence l' influence de l' éclairement de la haute atmosphère, ce qui est particulièrement facile à l' intérieur du cercle polaire.

Une deuxième expédition arctique est en préparation. C' est Y Expédition Glaciologique Internationale au Grœnland ( EGIG ) dont le Comité directeur est actuellement présidé par le professeur Dr R. Haefeli ( Zurich)1. La Suisse y participe aux côtés du Danemark, de la France ( Expéditions polaires françaises, Missions Paul-Emile Victor ) et de l' Allemagne. Cette entreprise, sur laquelle nous reviendrons dans Les Alpes, a pour but de compléter la connaissance glaciologique de l' In grœnlandais dans une zone comprise entre 68 et 73 degrés de latitude nord, s' étendant de la côte occidentale à la côte orientale en passant par la Station centrale située à 3000 mètres 1 Depuis la rédaction de cet article, la présidence alternante a passé à l' Allemagne ( Professeur Dr Richard Finsterwalder ).

d' altitude, où les chercheurs suisses concentreront leurs recherches. Des reconnaissances ont en lieu en 1957, d' autres suivront en 1958. Diverses études préparatoires ont été faites cet été au Jungfraujoch sur le choix des balises, le datage physique du névé, etc. L' expédition proprement dite aura lieu en 1959. Bien qu' elle ne coïncide pas entièrement avec VAGI, cette expédition lui est cependant complètement rattachée. La Suisse qui a déjà envoyé en 1912-1913 une expédition au Grœnland ( A. de Quervain et P.L. Mercanton ) dont les résultats furent très fructueux est bien placée pour apporter une nouvelle contribution à la connaissance du Grœnland, car depuis 40 ans l' étude de la neige et des glaciers a fait chez nous d' importants progrès.

EXPLICATION DES ILLUSTRATIONS Planche VI, photo 95: Les Expéditions polaires françaises entretiennent des bases sur la Terre Adélie depuis 1950. Le radar « Aurore » monté devant la base Dumont d' Urville en 1956 sert à l' observation des courants de l' ionosphère ( région de l' atmosphère située entre 40 et 800 kilomètres de hauteur ). Il permet en outre de détecter les aurores polaires durant le jour, alors qu' elles sont invisibles.

Planche VI, photo 96: Abri pour le gonflement et le lancement des ballons-sondes météorologiques. Les cylindres d' hydrogène sont déposés à l' avant.

Planche VII, photos 97 et 98: La station « Charcot » est située à l' intérieur de la Terre Adélie à 300 kilomètres de la côte et à l' altitude de 2400 mètres environ. Le matériel pour son installation et le personnel qui la dessert ont été transportés par les véhicules chenilles dits « weasels ». Lorsque le blizzard souffle, les véhicules doivent s' arrêter, souvent même plusieurs jours de suite. Les installations de la station « Charcot » sont enfouies dans le névé de la calotte glaciaire.

Planche VIII, photo 99: A la fin de l' été 1957, on a effectué un levé photogrammétrique du Glacier d' Aletsch en parsemant les névés de points visibles ( procédé Kasser ) pour faciliter la restitution cartographique.

PlancheVIII, photo 100: Balise métallique d' enneigement ( modèle Hjefeli ) installée à titre d' essai auJungfraujoch en vue de l' Expédition Glaciologique Internationale au Grœnland.

Deutsche Zusammenfassung Am l.Juli 1957 begann das Internationale Geophysikalische Jahr, das bis Ende 1958 dauert, also 18 Monate umschliesst. Wissenschafter aus 56 Nationen haben sich zusammengetan, um nach einem bestimmten Programm die physikalischen Erscheinungen der Erde zu studieren, wie dies 1828-1883 und 1932-1933 für das Gebiet der Arktis mit der Errichtung temporärer meteorologischer Stationen bereits der Fall war. Man hofft im besondern für die Klimatologie und für die Wettervorhersage auf lange Sicht Erkenntnisse zu gewinnen.

So sucht man die allgemeinen Luftströmungen der Atmosphäre, die das Wetter bestimmen und die noch zu wenig bekannt sind, zu erforschen, vor allem die polaren Luftmassen, welche die Störungen in den Gebieten der mittleren Breitegraden bewirken. Die Beobachtungen gelten weiter der Sonnentätigkeit; die Eruptionen der Chromosphäre und deren Einwirkungen auf den Erdmagnetismus und die Polarlichter sind bekannt, nicht aber deren Einfluss auf die radioelektrischen Wellen, die Auswirkung der Sonnenstrahlung in der Erdatmosphäre in bezug auf die Erzeugung der Luftströme und Niederschlagsverteilung, welche die Hauptfaktoren unseres Klimas darstellen. Wohl kennt man die Sonnenenergie, welche unsere Atmosphäre erreicht, weiss aber noch nicht, ob sie eine unveränderliche Grosse ist ( errechnet 2 Kalorien/cm2/min ). Mit Hilfe von künstlichen Satelliten, deren ballistisches Problem gelöst ist, wird man versuchen, auch die physikalisch-wissenschaftlichen Probleme der Stratosphäre zu erforschen. Wohl kennt man die verschiedenen Sonnenstrahlenarten, nicht aber deren Verhältnis zueinander und deren Einwirkung auf die Erde, da ein Teil derselben durch die Ozonschicht der grossen Höhen absorbiert wird. So ergibt sich die Frage: ob diese Strahlenabsorption einen Temperaturanstieg in der Stratosphäre zu erwirken vermag, der dann seinerseits die Troposphäre, unsere meteorologische Atmosphäre, beeinflusst? Dies durch Beobachtungen in den obersten Luftschichten zu erfahren, ist für die Wetterprognose auf lange Sicht von Bedeutung. Auch erwachsen die Probleme, welche auf eine Ausnützungs-möglichkeit der Sonnenenergie hinweisen.

In der Antarktis, die 87 % der Eisdecke der Erde erfasst, wurden 60 Basen errichtet, in denen rund 6000 Forscher und Hilfskräfte arbeiten. ( Als sportliche Nebenleistung werden eine englische und eine australische Equipe versuchen, den Südpol von zwei entgegengesetzten Seiten zu erreichen ). Der geographische Südpol liegt auf rund 2800 m/üM.; es wurden hier Temperaturen bis —100° C gemessen. Der höchste Punkt der Antarktis soll auf rund 4270 m/üM. liegen; die Russen werden versuchen, ihn zu erreichen. Der magnetische Pol liegt weit vom geographischen Südpol entfernt, in der australischen Forschungszone. Die Küste der Antarktis ist bekannt, im Land-innern liegen aber noch weite unerforschte Gebiete, wobei vor allem ihre physikalische, geologische Beschaffenheit unbekannt ist. Seismische Messungen ergaben eine Eisdicke bis zu 3000 Meter bei der « Station Byrd », die 1500 m/üM. liegt, was sagt, dass eine gewaltige Eismasse dieser Gletscherkalotte unter Meeresniveau liegt.

Der Beitrag der Schweiz im Geophysikalischen Jahr wird in unserm Land selbst und auf zwei Expeditionen in die Arktis geleistet. Die Arbeiten stehen unter der Leitung von Prof. Dr. Jean Lugeon ( Zürich ). In der Schweiz sind vor allem die drei meteorologischen Observatorien Basel, Davos und Locarno-Monti eingeschaltet ( Davos mit der Höhenstation Weissfluhjoch ) sowie die Forschungsstation Jungfraujoch, wo im besondern auch die kosmischen Strahlungen beobachtet werden. Das astronomisch-chronometrische Observatorium Neuenburg betreut die Messungen der Längen- und Breitengrade ( Abtreibung der Kontinente ), Arbeiten, die grösste Exaktheit erfordern und nur mit Spezialinstrumenten durchgeführt werden können. Auf Weissfluhjoch wird an Schnee-deckenkarten gearbeitet, auf dem Grossen Aletschgletscher werden besondere Studien durchgeführt ( photogrammetrische Vergleichsaufnahmen ), sind doch die Gletscher wertvolle Klima-Registrierer. Auf Spitzbergen führen Schweizer, zusammen mit Schweden und Finnen, radio-meteorologische Beobachtungen durch, welche vor allem zur Erforschung der Störungsherde in der Atmosphäre im Gebiet des Polarkreises und deren Einfluss auf den Wetterablauf dienen. Ebenso werden Schweizer an der Expedition nach Grönland mithalten, an der auch Dänen, Franzosen und Deutsche mitarbeiten; sie gilt der weitern Erforschung des Inlandeises, dieses gewaltigen Gletschergebietes der Arktis.M. Oe.

BILDLEGENDEN Tafel VI, Bild 95: Das Basislager der Französischen Polarexpedition auf Adélie-Land ( seit 1950 ). Die Radar-Ein-richtung erlaubt Strömungsbeobachtungen in der Ionosphäre ( 40-800 km Höhe ) und der Polarlichter bei Tag ( 1956 errichtet ).

Tafel VI, Bild 96: Unterstand für das Abfüllen der Registrierballone.

Tafel VII, Bilder 97 und 98: Lager Charcot, 300 km von der Küste entfernt im Innern von Adélie-Land, ca. 2400 m ü.M. Personal und Material werden mit Raupenautos zu- und abtransportiert; oft blockiert der « Blizzard-Sturm » jede Fahrmöglichkeit während Tagen. Alle Installationen der Station sind in Firneishöhlen untergebracht.

Tafel VIII, Bild 99: Gefärbte Flächen auf dem Gletscher und Firn des Aletschgebietes, um die im Sommer 1957 durchgeführte photogrammetrische Vermessung zu erleichtern ( Verfahren Ing. Kasser ).

Tafel VIII, Bild 100: Metallboje zur Messung des Einschneiens auf Jungfraujoch ( System Prof. Haefeli ).

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