Le Snow Man Trekking du Bhoutan. L'Everest des randonneurs | Club Alpin Suisse CAS
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Le Snow Man Trekking du Bhoutan. L'Everest des randonneurs

LE SNOW MAN TREKKING DU BHOUTAN

préserver leurs traditions, leur religion et leur environnement.

Entre relief népalais et tradition tibétaine

Le Bhoutan se blottit tout à l' est de la chaîne himalay enne, juste avant que celle-ci ne s' évanouisse entre les moiteurs et les reliefs moins tourmentés de l' Arunachal Pradesh et de la Birmanie. Mais au Bhoutan, de fi ers sommets dépassant parfois les 7000 mètres rappellent au visiteur qu' il est bien au cœur de l' Himalaya. Des dimensions de la Suisse, le pays adopte le profi l et les reliefs du Népal: jungles exu-bérantes au sud, collines boisées ou cultivées de champs en terrasses au centre, pâturages, glaciers et pics élégants au nord. Les similitudes avec son voisin népalais s' arrêtent ici; les coutumes et les traditions du Bhoutan sont davantage marquées par les régions du nord et la civilisa -tion tibétaine. C' est d' ailleurs un grand lama venu du Pays des Neiges, Ngawang Namgyel, qui unifi a le pays au XVII e siècle.

Chözo dzong, joli village au pied du Norbukang ( 7050 m )

LE SNOW MAN TREKKING DU BHOUTAN

Changement de caravane!

Longeant la frontière avec ce Tibet tout proche, tant du point de vue culturel que géographique, le Snow Man Trekking traverse de nombreux cols pour atteindre, tout au nord, les régions de Lunana, les plus reculées et les plus sauvages du Bhoutan. Là, dans un univers démesuré de neige et de glace, de petits villages tentent de survivre depuis la nuit des temps. Au total, vingt-cinq jours de marche sont nécessaires pour accomplir cet itinéraire d' exception et relier Paro, à l' ouest, à la douce vallée de Bumthang, dans le centre du pays. Au pied de sommets enneigés, le chemin progresse entre forêts odorantes, pâturages verdoyants et moraines glaciaires. En dépit de leur isolement, ces régions ont toujours abrité de petits villages aux populations venues jadis du Tibet.

Comme au Népal, les groupes de marcheurs sont accompagnés par toute une équipe de guides, de cuisiniers et d' assistants locaux en charge des yaks ou des chevaux. Cependant, afin de respecter de vieilles lois coutumières, ces randonneurs doivent changer régulièrement de caravane, les habitants de tel ou tel village, comme leurs bêtes, n' étant pas autorisés à dépasser certaines limites régionales correspondant à d' anciennes juridictions administratives. Loin d' être une contrainte, cette coutume permet de nombreuses rencontres avec les éleveurs de yaks de Lingshi, de Laya ou de Thangza dont on utilise ainsi les services pour quelques jours.

Les éleveurs de yaks à Laya

Après avoir croisé le Jomolhari qui, à 7320 m, barre le fond de la vallée de Paro, le chemin longe plusieurs sommets frisant les 7000 m pour déboucher finalement, après six jours de marche, à Laya. Situé à 3800 m d' altitude, Laya est un des lieux les plus attachants qui soient. Non pas un gros village, mais un ensemble de cinq à six hameaux, d' une dizaine de maisons chacun, répartis sur le plateau. A la limite de la forêt et des pâturages, cette localité jouit d' un emplacement particulièrement favorable pour les éleveurs de yaks que sont les « Layaps ». Les troupeaux peuvent paître à satiété sur les pentes d' herbe rase alors que les habitants trouvent dans la forêt en contrebas le bois nécessaire à leurs constructions et à leurs besoins quotidiens de chauffage ou de cuisine. L' activité économique des « Layaps » est complétée par un peu d' agriculture en été, orge et pomme de terre, et par du troc en hiver dans les villages de plus basse altitude où ils vendent, avec quelques quartiers de viande de yak, leur production de beurre et de fromage.

Laya, un village chantant

En dépit d' une vie rude liée à l' altitude et au climat, Laya est un village particulièrement gai. Les habitants chantent

Tserim Kang ( 6800 m ) depuis le col du Jare La

en toute circonstance et ne perdent jamais une occasion de rire ou de plaisanter. Vêtues de noir, les femmes et les jeunes filles de Laya se distinguent encore par un petit chapeau conique en bambou qu' elles portent du matin au soir. Amusante tradition dont on ignore l' origine et la signification. A la différence du reste du Bhoutan, les populations rencontrées au cours de ce Snow Man Trekking vivent selon des coutumes et des traditions souvent originales.

Le Jomolhari ( 7320 m ), conquis en 1937, est situé à la frontière du Tibet. Montagne sacrée, plus personne n' a atteint son sommet depuis Jitchu Drake ( 6794 m ) depuis les lacs de Jangothang Photos: R ober t Dompnier

« Rencontre » avec le léopard des neiges

Au-delà de la beauté du paysage et de l' intérêt des populations, cet itinéraire permet de découvrir une faune exceptionnelle. Cette dernière est particulièrement bien préservée au Bhoutan. Comme dans tous les pays bouddhistes, la religion interdit ici la chasse. Aussi le marcheur croisera, à coup sûr, de larges troupeaux de

A Laya, les troupeaux de gates peuvent paître à satiété sur les pertes d' herbe Photos: R ober t Dompnier Vêtues de noir, les femmes et les jeunes filles de Laya se distinguent par un petit chapeau conique en bambou qu' elles portent du matin au soir. Amu-sante tradition dont on ignore l' origine et la signification Barattage de la crème à Laya, un des lieux les plus attachants qui soient. En dépit d' une vie rude liée à l' altitude et au climat, les habitants de Laya sont particulièrement gais Situé à 3800 mètres d' altitude, le village de Laya est un ensemble de cinq à six hameaux, d' une dizaine de maisons chacun, répartis sur le plateau Theri Kang ( 7100 m ) et vallée de Tarina Le col du Karakachu La ( 5100 m ) permet d' accéder à la vallée de Tarina par un sentier d' une beauté incomparable. A l' arrière, le Jejekangphu Kang ( 7200 m ) Vallée de Tarina Traversée du col du Rinchenzo Derniers hameaux de Thangza au pied des glaciers Photos: R ober t Dompnier

bharals, rencontrera des yaks à demi sauvages, apercevra des aigles ou des vautours, débusquera des perdrix s' envo de derrière un fourré. Les plus chanceux verront quelques takins ( burdorcas taxicolor ), cet animal étrange mi-ovin mi-caprin, dans les prairies de Jakepassa ou, peut-être même, un ours noir à collier dans les forêts proches de Laya. Quant au léopard des neiges... inutile de rêver! Seules ses empreintes indiqueront quelquefois sa présence. Il faudrait rester de longues heures, voire des journées entières pour espérer apercevoir ce fugace et mystérieux seigneur des glaciers.

Des cols à plus de 5000 mètres

De Laya, il faut encore une petite semaine pour rejoindre Thangza, au cœur de Lunana, la région la plus reculée du Bhoutan. Le chemin s' engage toujours plus loin vers le nord-est du pays. Des cols à plus de 5000 mètres barrent l' accès de ces régions perdues où subsistent quelques villages: Woche, Chözo dzong et finalement Thangza. Villages complètement isolés par la neige en hiver, parfois

pour de longs mois. En dépit de cet isolement, les randonneurs trouveront l' environnement d' une exceptionnelle beauté. Pics élégants, arêtes enneigées et lacs glaciaires oscillant du bleu turquoise au vert émeraude et où se reflète dans l' eau pure l' image des géants alentours. Personne ne peut oublier la descente du col du Karakachula ( 5100 m ) lorsqu' on découvre, tout à coup, la vallée de Tarina dominée par les glaciers qui tombent en cascades des Theri Kang et Tsenda Kang, deux sommets de plus de 7000 mètres. Face au gigantisme du panorama, les petites prairies, où dans quelques heures seront montés les camps, font figure de ridicules mouchoirs de poche. De Tarina, trois jours de marche et le franchissement de deux nou-

Dzong et la douce vallée de Bumthang, dans le centre du pays Traversée du Phodrang La ( 4600 m ) Photos: R ober t Dompnier

veaux cols sont nécessaires pour atteindre finalement Thangza. Une journée de repos dans cette bourgade du bout du monde permettra de découvrir, là encore, le formidable environnement de ces régions oubliées.

Mélèzes jaunes et sapins bleus

Cette journée de repos permet aussi de reprendre quelques forces, car le retour depuis Thangza ne se fait pas sans effort. Sept cols au total devront être franchis pour retrouver la civilisation. A elle seule, l' étape entre Geshe Woma et Warthang en réserve trois dans une même journée! La difficulté de ce Snow Man Trekking tient d' ailleurs principalement à sa longueur, vingt-cinq jours au total, à la durée de certaines étapes, de huit à dix heures parfois, et à l' engagement du circuit. Le chemin, quant à lui, n' offre pas de réelles difficultés à l' exception de quelques bonnes montées ou descentes un peu raides. Emprunté par les populations locales, souvent avec leurs animaux, celui-ci est relativement bien tracé. Au-delà de ces nombreux cols, le chemin traverse de très beaux pâturages et d' épaisses forêts qui deviennent, en automne, une symphonie de couleurs et de parfums: pins odorants au vert tendre qui se mélangent à d' élégants mélèzes virant au jaune ou à d' épais sapins bleus de l' Himalaya.

Repos, schnaps et fromage à la ferme suisse

Après avoir complété ce Snow Man Trekking, le retour à Bumthang est un véritable enchantement. Entourée par des reliefs d' une grande douceur, la vallée accueille de nombreux temples parmi les plus anciens du Bhoutan. Dès le matin, les bâtiments s' éveillent au son des trompes et des tambours. L' architecture est de toute beauté et la population semble jouir ici d' une certaine prospérité. Quelques journées de détente au cœur de cette vallée seront les bienvenues. Et, pour se refaire des forces, le schnaps et le fromage de la ferme suisse apporteront, à coup sûr, le plus agréable des réconforts. Une ferme suisse née d' une vieille histoire d' amitié entre un homme d' af zurichois et feu le roi du Bhoutan, S. M. Jigme Dorje Wangchuck. Il est vrai que les deux pays présentaient, au-delà de leur taille comparable, quelques similitudes: montagnes enneigées, lacs aux eaux pures, collines verdoyantes, chalets de pierre et de bois, montagnards au caractère bien trempé. Mais ça, c' est une autre histoirea

Forêt près de Dhur

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