Les variations périodiques des glaciers des Alpes. Huitième rapport | Club Alpin Suisse CAS
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Les variations périodiques des glaciers des Alpes. Huitième rapport

Remarque : Cet article est disponible dans une langue uniquement. Auparavant, les bulletins annuels n'étaient pas traduits.

Par le Prof. Dr. F.A. Forel à Morges ( Section des Diablerets ).

Huitième rapport. 1887 ' ).

XXX. froidement du glacier.

Dans l' avant de mon rapport de l' année dernière ( XXVII ) j' ai montré que les variations de grandeur des glaciers sont liées à des faits de variation dans le débit du courant de glace. Quand le débit est considérable, il y a crue du glacier, qui s' épaissit, s' élargit, s' allonge; quand le débit est faible, il est insuffisant pour compenser, par apport de nouvelles masses de glace, la quantité qui se détruit pendant l' été; le glacier ralentit son écoulement, il fond sur place.

* ) Voir Vu " rapport, 1886, Jahrbuch des S.A.C. XXII, 219. Bern 1887.

17 Ces variations dans le débit sont causées par de » variations dans les chutes de neige sur les névés. Pour qu' un fleuve débite plus d' eau, il faut qu' il en reçoive plus de ses sources; pour qu' un courant glaciaire débite plus de glace, il faut que les névés, qui sont ses sources, lui en fournissent davantage. Il est donc clair que toute crue du glacier doit être précédée d' une crue du névé. Pendant quelques années la hauteur moyenne des chutes de neige a dépassé la normale; le névé s' est épaissi; il y a eu crue du névé. Ces relations entre les variations de taille des glaciers et les périodes de fortes chutes de neige sur les hautes montagnes ont été prouvées par l' étude que j' avais faite en 1881, ) constatant les variations périodiques de l' humidité et de la chaleur à Genève de 1826 à 1880, par celle du Professeur Ed. Richter 2 ) de Salzbourg sur les faits météorologiques à Klagenfurt de 1813 à 1878 et par celle du Dr. C. Lang, de Munich,3 ) sur les observations météorologiques de huit stations voisines des Alpes, dès la fin du siècle dernier jusqu' à nos jours. Si l'on se réfère à mon XXIII ( VIe rapport ), on y verra que le nombre des périodes glaciaires a été dans ce siècle le même que celui des périodes de l' humidité et aussi des périodes de la chaleur de l' air.

Il nous paraît donc démontré:

1° Que les variations de dimensions des glaciers sont dues essentiellement ) à des variations dans le débit du courant glaciaire; 2° Que celles-ci sont dues à des variations dans l' épaisseur du névé; 3° Que celles-ci sont dues à des variations dans les chutes de neige.

— Quel est le mécanisme de ces crues? Comment une crue du névé produit-elle une crue du glacier? Telle est la question que je voudrais examiner jourd' hui. Nous avons en présence deux théories qui se basent sur les mêmes faits.

Pour M. le professeur Dr. Ed. Richter 2 ), autrefois à Salzbourg, actuellement à Graz, en Styrie, une série d' années humides déterminent une accumulation extraordinaire de neiges sur le névé, qui augmente d' épaisseur. Cet épaississement du névé est d' abord sans influence notable sur le débit du glacier; la résistance considérable de- la masse énorme du glacier est telle, qu' elle n' est pas vaincue par une faible surcharge du névé. Si l' accumulation des neiges continue, il arrive un moment où la pression devient assez forte pour dominer tous les frottements et résistances, et alors le glacier s' écoule en masse et fait une poussée en avant; il s' allonge, et nous observons une phase de crue. Mais le débit augmentant rapidement, il dépasse bientôt la quantité de neige tombant sur le névé; le débit du courant épuise la source, et celle-ci retombant au-dessous de la moyenne, la crue cesse. Le glacier s' immobilise alors et la décrue, ou fonte sur place, commence.

Si l'on développe cette théorie et si on la pousse dans ses conclusions, on voit qu' elle ferait du glacier un courant à débit intermittent; que les alternatives de crue et de décrue seraient pour ainsi dire fatales, nécessaires, même en dehors de toutes les variations dans les facteurs météorologiques qui amènent plus ou moins de neige sur les névés. Lorsqu' une crue du glacier vient de se terminer, le névé est épuisé et est à son minimum d' épaisseur; l' écoulement du glacier est alors tellement lent que les chutes de neige, quelque faibles qu' on les suppose, doivent dépasser la quantité de glace enlevée au réservoir; le névé doit alors nécessairement s' augmenter jusqu' à ce qu' il arrive à une épaisseur suffisante pour que sa pression domine les résistances et occasionne la poussée en avant d' une nouvelle crue. Les variations dans les chutes de neige additionneraient simplement, si cette théorie est exacte, leur effet aux variations d' épais du névé causées par l' intermittence de l' écoule; elles seraient l' accident qui modifierait l' inter normale, et les crues seraient éloignées, ou rapprochées, suivant que l' état météorologique de l' air serait plus ou moins humide, plus ou moins neigeux.

J' appellerai cette théorie celle de l' écoulement intermittent du glacier.

La deuxième théorie est celle que j' ai développée en 18811 ). Elle admet que l' écoulement du glacier, à sa sortie du névé, est fonction directe de la pression exercée par le poids des neiges supérieures et plus ou moins proportionnelle à ce poids. Quand les névés sont plus épais que la moyenne, l' écoulement est plus rapide; quand ils sont moins épais, l' écoule est plus lent. Les variations d' épaisseur du névé ne sont pas très importantes; c' est par mètres, par dixaines de mètres au plus, qu' elles se mesurent. Il y aurait donc, à l' origine du glacier, de petites variations dans la vitesse d' écoulement, et par conséquent dans le débit, correspondant aux petites variations d' épaisseur du névé.

Mais ces faibles variations dans le débit d' origine du glacier s' exagèrent, s' amplifient à mesure que l'on suit en descendant le cours du fleuve glacé. L' ab, c'est-à-dire la destruction de la glace par la chaleur, agit sur toute la longueur du glacier, plus ou moins proportionnellement au temps. Plus le glacier s' écoulera rapidement, moins il' emploiera d' an nées pour franchir un espace donné, moins longtemps il sera soumis à l' ablation, moins vite il se détruira, moins il diminuera d' épaisseur et de largeur. Quand il s' écoulera vite, il conservera donc dans ses profils inférieurs une plus grande section que quand il s' é lentement, et il poussera plus loin des masses plus considérables de glace qui résisteront plus longtemps à l' action destructive de la chaleur. C' est ce qu' on peut formuler en disant que l' effet de l' ablation, fonction destructive du glacier, de signe négatif par conséquent, est fonction inverse de la vitesse d' écoule, fonction conservatrice du glacier, de signe positif; que l' effet de l' ablation est d' autant plus faible que la vitesse d' écoulement est plus forte. L' effet de l' ablation et celui de la vitesse d' écoulement agissent donc dans le même sens, ou pour la conservation ou pour la destruction du glacier; ces deux actions se multiplient l' une par l' autre, et leur produit devient considérable.

Il en résulte que de petites variations dans l' é du glacier à son origine amèneront de grandes variations dans la longueur du glacier, et que, inversement, les grandes crues et décrues du glacier s' expliquent par de faibles variations dans l' épaisseur du névé.

Cela ferait ainsi du glacier un instrument multiplicateur qui dessinerait, en les amplifiant dans ses énormes variations de longueur, les très petites variations de la somme des chutes de neige tombées sur les hautes cimes.

Cette dernière théorie peut se caractériser par le terme d' écoulement continu du glacier.

Pouvons-nous nous décider entre ces deux théories? Avons-nous les éléments nécessaires pour faire le choix?

L' écoulement intermittent du glacier se rapprocherait du phénomène des avalanches. La neige s' accumule sur une pente jusqu' à ce que son poids, dépassant la ténacité de la masse, rompe les adhérences des couches profondes, et le tout descend dans la vallée en faisant une coulée. Celle-ci s' arrête quand l' avalanche s' est assise sur un talus moins incliné, et la masse de neige fond sur place.

En faveur de cette théorie, je citerai les faits suivants:

1° Les allures générales des variations glaciaires qui semblent montrer une durée beaucoup plus longue de la phase de décrue que de la phase de crue, 2° Les transitions ménagées qui semblent enchaîner les variations très faibles et très lentes de certains glaciers aux éboulements, absolument comparables à des avalanches, d' autres glaciers. On peut établir une série bien graduée depuis les glaciers de deuxième ordre, où les variations sont presque nulles, aux grands glaciers à allures tranquilles et modérées ( Rhône/, Arolla, Grindelwald inférieur, Argentière ), aux glaciers à allures plus rapides ( Fée, Bossons, Zigiorenove ), aux glaciers à grande poussée ( Vernagt ), aux glaciers à avalanches ( Defdoraki ), aux avalanches de glaciers ( Biesgletscher ).

3° L' indépendance d' allures des divers glacier* d' une même région ( Zigiorenove et Arolla, Grindelwald supérieur et inférieur, etc. ).

La théorie de l' écoulement continu da glacier rapproche les crues et décrues du glacier de celles des fleuves d' eau. Comme dans ces dernières,, le débit est constamment proportionnel à la masse fournie par la source. Cette théorie peut s' appuyer sur les faits suivants:

1° Les variations à allures tranquilles de la grande généralité des glaciers.

2° Les relations constatées par Richter, Lang et moi-même, entre les variations des facteurs météorologiques et des chutes de neige en particulier, d' une part, et les variations des glaciers d' autre part.

3° Le fait des allures simultanées et de même sens des divers glaciers d' une même région.

4° La persistance de l' écoulement dans les profil » supérieurs du glacier, même en phase de décrue ( démontrée brillamment par les mensurations du glacier du Rhône ). Cette continuité de l' écoulement des névés. et des glaciers, à une vitesse réduite, il est vrair mais encore parfaitement constatable, même lorsque la crue est depuis longtemps terminée, distingue nettement les allures du glacier de celles de l' avalanche Dans celle-ci, la masse de neige est immobile tant que l' accumulation a lieu; elle s' éboule à grande vitesse au moment de la rupture de l' avalanche; elle fond sur place, immobile de nouveau quand elle s' est arrêtée. Tandis que le glacier s' écoule toujours, tantôt plus vite, tantôt moins vite, mais ne cesse pas de s' écouler.

Entre ces divers arguments opposés, il est difficile de faire un choix, actuellement. L' étude des faits, leur généralisation successive, à mesure que les observations s' accumuleront, peut-être même l' étude de la question par voie mathématique, aideront un jour à nous prononcer.

En attendant, mes chers collègues, alpinistes et naturalistes, récoltez des observations et adressez-les moi, afin que je les emmagasine et que nous préparions ensemble à nos successeurs des matériaux qui permettront de donner réponse à ces grosses et belles questions.

g XXXI. Chronique des glaciers des Alpes, 1887.

I. BASSIN DU RHONE.

Vallée de Conches. Glacier du Rhône. Les mensurations faites en 1887 par M. l' ingénieur L. Held ont montré la persistance du raccourcissement et de la réduction du glacier.

La surface mise à nu par la retraite du front du glacier a été, en 1887, de 7125 m2.

Ce recul est supérieur à celui des deux années précédentes; il avait été en 1885 de 5675 m2, en 1886 de 6300 m2.

De même dans l' épaisseur des profils du glacier.

Ils ont montré dans cette année la variation moyenne de:

Glacier. Profil vert— 4,7 m „ jaune— 0,5 m „ rouge— 1,8 m Névés. „ inférieur du Thäli.. 2,1 mgrand névé -1,8 » „ supérieur „ Thäli. 4,3 mgrand névé — 3,6 » La crue prochaine que nous attendons avec impatience ne montre' pas encore ses prodromes.

Vallée de la Massa. Glacier d' Aletsch. Le lac Märjelen s' est vidé par dessous le glacier d' Aletsch dans la nuit du 3 au 4 septembre 1887.

Les dernières évacuations de ce lac ont eu lieu:

dans l' été de1858 en août 1872 au printemps ou en automne1875 19 juillet1878 9—10 juin 1882 dans l' été de1884 4 septembre1887 Quant au glacier lui-même, en 1887 il semblait en croissance vers la cabane Concordia, à l' état stationnaire vers le lac Märjelen, avec tendance à l' af ( diminution verticale de 21om mesurée à un rocher ), et en raccourcissement considérable ( de 100 m environ ) à l' extrémité terminale, du côté de Bell-Alp ( M. E. Cathrein, Eggishorn, comm. A. de Torrente ).

Vallée de l' Avençon. Le glacier de Paneyrossaz s' est raccourci de 0,6 m de 1886 à 1887 ( M. A. Wagnon, Morges ).

Vallée de Saas. Les glaciers du Laquinhorn sont en allongement en 1887 ( Dr. J. Larguier, Lausanne ). Les pentes de la montagne, ordinairement couvertes de neige, sont en glace vive en 1887 ( M. A. Tschumi, Genève ).

Les glaciers de Fée sont en grande crue. Le glacier supérieur s' est élargi notablement du côté de la Gletscheralp; le glacier inférieur s' est beaucoup allongé et épaisse ( Dr. J. Larguier. M. H. Schepeler, Francfort. Mlle Cl. Imseng, Saas-Fee. Augustin Gentinetta ).

Le Dr. J. Reverdin, Genève, a fait en 1887 des mensurations exactes sur le front du glacier inférieur; il a constate un avancement évident, allongement qui s' est élevé du 18 au 25 août à l,lcm par jour en moyenne.

Vallée de St-Nicolas. Pour le Gorner et Findelen les rapports sont encore contradictoires ( voir la Chronique des années précédentes ). Le glacier de Findelen s' écoulerait fort vite sur sa rive droite ( guides A. Supersaxo et E. Imseng, communiqué par M. Schepeler ). Le glacier du Gorner serait en allongement ( M. Fr. Schrader, Paris ).

Les glaciers du Théodule sont en décroissance ( M. H. Correvon, Genève ).

Tous les glaciers de la vallée sont en diminution, sauf le Hohwänggletscher ( Zmuttthal ), qui s' allonge ( guide Peter Taugwalder, Zermatt, communiqué par M. Correvon ).

Je conclus de ces contradictions que sauf pour les glaciers du massif du Gabelhorn et du Weisshorn, Bies, Gabelhorn, Trift ), Hohwänggletscher, qui semblent en crue, tous les autres glaciers de la val- lée, en particulier les grands glaciers de premier ordre, sont encore en phase de décrue.

Vallée de Turtmann. Grande diminution du glacier de Turtmann de 1886 à 1887. La langue terminale a presque disparu ( M. Correvon ).

Vallée d' Anniviers. Glacier de Moming: Le » guides de Zermatt confirment l' observation des guides de Zinal, qui indiquaient l' année dernière un allongement du bras gauche, tandis que le bras droit serait encore en décrue ( M. H. Correvon ).

Vallée d' Hérens. Glacier de Ferpècle et Mont-Miné. M. P. Crétaz, propriétaire de l' hôtel de Ferpècle à Salay, m' a donné, en août 1887, des détails intéressants sur l' histoire de ce glaeier. Le glacier a eu un grand maximum en 1816-1817, puis s' est mis en décrue. Un nouveau maximum a eu lieu en 1868; il a dépassé de beaucoup celui de 1817; le glacier a poussé ses moraines jusque sur le monticule de l' Alpe de Ferpècle. A cette époque, la masse du glacier dominait assez ce monticule pour cacher complètement la vue du Mont-Miné à un observateur placé au centre du village de Salay; en 1887, du même point de vue, le Mont-Miné apparaît jnsqu' à son pied. En 1887, le glacier est en retraite de 600 m environ sur sa position de 1868; la diminution de volume, qui s' apprécie par les lignes des anciennes moraines frontales et latérales, est énorme.

Les chalets de Ferpècle, aujourd'hui à moitié ruinés, indiquent qu' il y avait, lors de leur construction, une alpe suffisante pour pouvoir, pendant quelques jours, nourrir un bétail nombreux. Ces pâturages ont disparu sous l' envahissement du glacier, qui les a ensevelis sous la moraine profonde des maximums de 1817 et 1868. Il serait intéressant de retrouver, soit par des documents écrits, soit par une étude d' archi, l' époque de la construction de ces chalets de Ferpècle.

Comme l' année dernière, le glacier A' Arolla est encore en phase de décrue. Son front, à la porte de la Borgne, s' est reculé de 26 m en 1886-87 ( F.A. F. ).

Les glaciers de Pièce et de Zigiorenove sont en crue. Ce dernier s' est allongé d' une cinquantaine de mètres en 1886-87; il s' est considérablement gonflé {F.A. F. ).

Vallée de Bagnes. Diminution générale de tous les glaciers de cette vallée. Le raccourcissement est moins évident pour le glacier Durand, mais très fort pour le Breney et le glacier de Fenêtre ( H. Correvon ).

L' enneigement des hautes cimes du Valais a été fortement atteint par les grandes chaleurs de l' été de 1887. M. A. Tschumi de Genève me signale la fonte considérable des neiges au Laquinhorn, à I' Alphubel, au col de Valpelline, au col du Mont-brulé, au Za-de Zan, au glacier d' Otemma, à la Sangla etc.

Vallée du Trient. Le glacier du Trient s' est allongé de 17, 19 et 22 m, suivant les repères, en 1886-87. L' accroissement en largeur, et surtout en hauteur, continue ( M. J. Guex, Vevey ). Un dessin de> ce glacier que M. F. Doge, Tour-de-Peilz, a trouvé-dans l' Helvetischer Calender de 1784, montre que le front arrivait alors jusqu' aux moraines couvertes-de sapins. Il y aurait, d' après l' estimation de M. Doge,, un état d' allongement de près d' un kilomètre sur l' état actuel, toutes réserves faites sur la précision du dessin, qui n' a aucune prétention à l' exactitude.

Le glacier des Grands continue à s' allonger » M. F. Doge a mesuré pour 1886—87 un avancement:

repère I de6 m „ II de12III plus de... 12 m „ IV de17 m Ce dernier repère est dans l' axe médian du> glacier.

Le glacier s' est étalé, augmentant beaucoup en largeur et en épaisseur; il tend à se relever sur ses*, bords.

D' après les bergers, le glacier des Petoudes continue à être en grande activité en 1887; il y a constamment éboulement de glace et de pierres.

Enneigement régressif de la vallée du Trient ( F. Doge ).

Vallée de l' Arve. Glacier du Tour. Le 13 octobre 1887, le glacier occupait exactement la même position qu' en octobre 1886; l' écoulement du glacier avait donc compensé l' effet de la fusion de l' été ( M. V. Payot, Chamonix ).

?'ï?

Glacier A' Argentière. Du 4 novembre 1886 an 13 octobre 1887, le front du glacier s' est avancé de 54,7 m. Il atteint le repère qui porte la date de 1879 ( V. Payot ).

Glacier des Bois. Voici quelques notes anciennes sur l' histoire de ce glacier:

En 1876, le glacier était en phase de crue. L' anglais W. Coxe le décrit ainsi: „ Pour approcher de la source de l' Arveron, nous traversâmes une forêt de pins; ceux de ces arbres qui avoisinent la voûte ont environ 80 pieds de haut et sont indubitablement très vieux. Entre eux et le glacier, on en remarque d' autres que leur forme, leur contexture et leur moindre hauteur doivent faire regarder comme beaucoup plus jeunes Enfin quelques troncs, semblables à ceux-ci, ont été déracinés et ensevelis sous les glaces. Dans tous ces arbres, placés comme je viens de le dire, on croit apercevoir une gradation régulière d' âge, depuis ceux qui sont les plus hauts jusqu' à ceux qui sont raccourcis. Il me semble que de ces faits on doit naturellement conclure que le glacier s' est étendu autrefois jusqu' au rang des pins les plus âgés; qu' à mesure qu' il s' est retiré, de nouveaux arbres se sont élevés dans les lieux qu' il abandonnait, et enfin que depuis quelques années, ayant commencé de nouveau à gagner du terrain, il a déraciné dans sa marche quelques uns des arbres les plus jeunes avant qu' ils aient eu le temps d' acquérir une certaine hauteur.W. Coxe. Lettres sur la Suisse. Trad. Ramon. II, 89. Paris 1781.

Dans son second voyage, en 1785, Coxe constata un recul du glacier: „ de jeunes arbres s' étaient élevés sur un terrain que j' avais vu couvert par le glacier de Montanvert.Le glacier des Bois, en 1821 et jusqu' en 1822, fit de grands progrès en avant, renversant des arbres dont quelques uns avaient deux pieds de diamètre et s' approchant des habitations, au point qu' il n' était plus qu' à 40 pas de la maison la plus voisine; le 8 juin, il n' en était qu' à 66 pieds, et au mois d' août à 62 pieds. Les grandes chaleurs de l' été de 1822 firent' affaisser considérablement le glacier, et il commença à se retirer. " 2 ) D' après cela, nous pourrions inscrire pour l' his ancienne de ce glacier:

Maximum peu après 1776 Coxe. Décrue1785 Id.

Maximum1822 Deluc.

Maximum du siècle 1826 V.Payot(v. lerrapp. ). Y a-t-il eu crue nouvelle de 1823 à 1826, ou bien la date de 1826 donnée par M. Payot doit-elle être corrigée et remplacée par celle de 1822? C' est une question que je pose à l' infatigable observateur des glaciers de Chamonix.

Le 8 octobre 1887, M. V. Payot a constaté que le glacier était dans le même état à son front que le printemps précédent.

J' ai reçu de M. Joseph Tairraz, de Chamonix, communication des belles photographies du front du glacier des Bois qu' il a prises en octobre 1885 et -octobre 1886; elles démontrent l' état stationnaire de ce glacier au fond de la gorge de l' Arveyron. Il n' a pas été pris de photographie en 1887, la position n' ayant aucunement changé.

Le glacier des Bois est donc encore en~ phase de décrue, ou du moins, si dans les régions supérieures il présente les prodromes d' une crue prochaine, il est encore stationnaire à son extrémité terminale.

Glacier des Bossons. Il semblerait, d' après les descriptions de W. Coxe, que, de 1776 à 1785, il y ait eu phase de décrue.Voici en effet sa description de 1776: „ Le 23 août, nous montâmes le long du glacier pour voir un bel amas de glaces, auquel sa forme fait donner le nom de murailles. Ces murailles sont de longues chaînes de glaçons d' une épaisseur et d' une solidité prodigieuses, qui s' élèvent perpendiculairement de leurs bases et se suivent dans des directions parallèles. Quelques unes de ces chaînes nous parurent élevées d' environ 150 pieds, mais si nous en croyons nos guides, elles en ont plus de 400 de hauteur absolue.Grand changement lors du deuxième voyage: „ En 1785, ces murailles n' exis plus."2 ) „ Le glacier des Bossons s' allongea beaucoup de 1812 à 1818. Avant 1812, l' extrémité inférieure étaitCoxe. Lettres loc. cit. II, 80. 2 ) Coxe.Voyage. I, 446, et II, 32.

18 entourée de sapins dont la grandeur annonçait une? paisible possession du terrain depuis des siècles. Mais en 1812, époque où commença une série de six étés froids, le glacier fit des progrès successifs en longueur et en largeur. Ces progrès continuèrent qu' en 1818. Tous les arbres furent renversés, non seulement sur le front du glacier, mais encore sur ses côtés. Après avoir détruit cette forêt, le glacier détruisit des prairies où on était parfaitement sûr qu' il n' était jamais parvenu en aucun temps; car il n' y avait auparavant ni moraine ni pierres sur ces prairies. Mais en 1820, et surtout en 1821, le glacier se retira considérablement.M. V. Payot a constaté le 7 octobre 1887 au-devant du front du glacier une petite moraine frontale distante de 6 m environ de la glace. Il y a donc eu, cet été, ablation de 6 m de longueur sur ce front, ablation qui n' a pas été compensée par un écoulement de nouvelles glaces. Le glacier était à cette date exactement dans les mêmes limites qui avaient été déterminées par des mesures le 18 août 1887. L' allon extraordinaire des dernières années semble done se modérer, et la crue de 1875 approche de sa fin.

Quant à l' écoulement du glacier, vis-à-vis du pavillon des Bossons, là où est creusée la grotte artificielle, du 11 mai au 7 octobre 1887, il y a eu avancement de 40 m ( V. Payot ).

M. J. Tairraz a eu l' obligence de m' envoyer le » superbes photographies qu' il a exécutées à la de- Les variations périodiques des glaciers des Alpes. 27fr mande de la direction centrale du Club alpin français. Une première série de quatre épreuves, prises exacte ment du même point de pose, depuis octobre 1884 et répétées au mois d' octobre de chaque année, montrent la progression énorme et rapide' et les changements considérables du front du glacier, qui s' est gonflé d' une manière étonnante. Ce sont la des documents précieux et importants pour l' histoire du glacier; nous avons à féliciter le C.A.F. et M. Tairraz lui-même du beau succès de la méthode qqu' ils inaugurée, et nous exprimons le vœu qu' ils continuent régulièrement à la mettre en œuvre chaque année.

Glaciers du Dauphiné. Les renseignements assez contradictoires que nous avons obtenus semblent indiquer un état stationnaire des glaciers du Dauphiné, en opposition avec ce que nous disait en 1883 M. Guillemin. ( Voyez quatrième rapport. ) Le glacier blanc et le glacier noir ( bassin de la Durance ) étaient réunis sur la carte de l' état de 1854; actuellement ils sont séparés. Ils sont encore en décrue en 1887. De même, le glacier des Etançons ( bassin de l' Isère ) était cette année en. grande diminution ( Rev. W. A. B. Coolidge, Oxford ).

M. Guillemin confirme le fait qu' en 1855 le glacier Blanc et le glacier Noir se joignaient. M. Tournier en fit alors un dessin. Ils se répandaient ensemble sur le Pré de Madame et y formaient une belle voûte de glace, comme celle de l' Arveyron. D' après M. Moissan, Paris, le glacier noir se serait allongé cette année, ainsi que quelques autres petits glaciers du massif de la Mei je. ( Comm. Ch. Rabot, Paris. ) M. Ch. Roderon, guide de I " classe à St-Chris-tophe en Oisans, estime que tous les glaciers de la région sont en décrue.

II. BASSIN DE L' AAR.

Vallée du Hasli. Voici une note rétrospective du 27 août 1786 sur l' état du glacier de l' Aar inférieur: „ Du glacier sort un torrent impétueux et bruyant, d' une eau trouble qui est la source de. l' Aar inférieure, et se joint à quelques cent pas au-delà à un autre courant, appelé Aar supérieure, qui tombe du Zinkeberg.uSur la feuille 490 de l' atlas Siegfried, levée en 1879-80 par Becker, la jonction des deux torrents a lieu à 150 m au-dessous de la porte de l' Aar inférieure. La position du front du glacier est donc à peu près restée la même dans les deux époques que nous comparons.

Deux excursions successives faites en 1887 par M. le pasteur Baumgartner, de Brienz, lui ont montré l' action considérable de quelques semaines de chaleur. Dans la première, dans les premiers jours de juillet, les glaciers de Gelmer, Aelpli, Thier-t h 81 i et le Rhône étaient encore tout enneigés, et il n' a vu la glace presque nulle part. La seconde, dans les premiers jours d' août, aux glaciers de Dossen, Rosenlauï, Renfen, Gauli, Gruben, lui ont montré la glace nettoyée de neige et dégagée jusqu' aux plus hautes régions; la neige avait entièrement disparu.

Le Gruben- et l' Aerlengletscher, d' après la position des moraines, indiquent un état de décrue évident.

Le Gauli semble s' affaisser et décroître dans les régions supérieures.

Le Dossengletscher était en grande diminution en août 1887.

Le glacier de Rosenlaui paraît être dans le même état que l' année dernière ( A. Baumgartner ).

Vallée de la Lütschine. Glacier de Grindelwald supérieur. Note rétrospective: „ Le glacier s' avança en 1817 et continua à avancer, même en hiver, qu' à l' automne de 1822. L' été précédent, il était plus avancé qu' il ne l' avait jamais été, car en 1821, il détruisit une vieille forêt qui depuis deux siècles avait toujours été en rapport, suivant les titres.En 1887, ce glacier continue à s' agrandir rapidement ( A. Baumgartn.er ).

Glacier inférieur de Grindelwald. D' après la description qu' en donne Coxe, dans sa visite du 14 août 1776, il était évidemment près d' un état de maximum. „ Près du glacier de Grindelwald, les pins, les saules, les chênes, les frênes croissent et parviennent à leur perfection; les pommes de terre, les pois, les navets et les bettes sont cultivés avec succès; à l' ombre même des glaces, j' ai cueilli des fraises et des cerises sauvages, et j' ai remarqué des coudriers, des groseillers et des mûriers.La phase de décrue a bientôt suivi; voici ce qu' il en dit dans son second voyage: „ Le glacier était si considérablement diminué depuis mon premier voyage qu' en 1785 ses limites étaient reculées d' au moins quatre cents pas. " 2 ) Cela est conforme aux notes du Pfarrbuch de Grindelwald, qui signale un allongement de 1770 à 1778. ( V. deuxième rapport. ) En 1887, l' extrémité terminale du glacier ne montre pas encore de signes d' allongement ( A. Baumgartner ).

III. BASSIN DE LA REUSS.

Maderanerthal. M. Krayer-Ramsperger, de Bâle, continue avec régularité ses excellentes observations:

Le glacier de Brunni s' est raccourci en 1886-87 de 12™. La hauteur de la voûte du torrent n' était que de 3 m.

Le glacier de Hüfi s' est raccourci dans la même période de 18 m; sa voûte mesurait 8 m de hauteur.

IV. BASSIN DE LA LINTH.

Vallée de la Sernft. Le petit glacier de la Tschingelalp, sur le versant nord-ouest du Tschingelhorn, au sud-ouest du Segnespass, marqué sur la feuille 400 de l' atlas Siegfried, publiée en 1874, n' existe plus en 1886 ( d' après les notes de M. Fr. de Salis, Coire).1 ) La partie du Saurengletscher qui se versait vers l' ouest a disparu en 1886 ( Fr. de Salis ).

V. GLACIERS DES GRISONS.

En 1887, M. l' ingénieur de Salis, de Coire, a publié un rapport très important sur l' état des glaciers des Grisons.2 ) Il y énumère nominativement 42 glaciers dont 35 sont en état de recul manifeste, 5 paraissent en état stationnaire, 1 a disparu, 1 semble en accroissement.

Le glacier de deuxième ordre situé au sud du Pizzo Vorab dans le Rheinthal, au nord d' Ilanz, entre Sagenser- et Setherfurka, était la source du Sether-tobel, qui se jette dans le Rhin à Schnaus. Le bas du glacier arrivait jusqu' au chiffre d' altitude 2603. Sur la feuille 405 de l' atlas Siegfried, levée par H. Siegfried et publiée en 1874, ce glacier mesurait l,5km de largeur et de 200 à 600 m de longueur. En 1886, il était complètement disparu.

Le seul des glaciers des Grisons qui, d' après le rapport de M. de Salis, soit en aggrandissement constaté se trouve au fond du Val de Nalps, parcouru par le torrent du Rhein, lequel se jette dans le Vorderrhein près de Sedrun ( feuille 411 de l' atlas Siegfried)-Le glacier de Nalps occupe le fond de ce vallon. Le Rondadurapass s' élève sur le flanc droit de ce glacier et conduit dans le Val Medels. Lorsque la carte a été révisée en 1872, le glacier arrivait à 200 m environ du sentier. Dans l' été de 1886, M. l' in Peterelli, pour franchir le col, dut marcher sur le glacier. Si le dessin de la carte était exact en 1872, le glacier s' est élargi depuis cette époque de 200 m environ.

Dans mon cinquième rapport, j' avais signalé une crue probable des glaciers de Fex ( Engadine ) et de Forno ( vallée de la Mera ). Les observations que M. de Salis a reçues de M. J. Caviezel, de Sils, indiquent que ces glaciers sont encore en décroissance.

VI. ALPES AUTRICHIENNES.

Massif du Stubai. ( Bassin de l' Inn. ) Glacier d' Alpein. M. le professeur L. Pfaundler, d' Innsbruck, a levé en 1886 la carte au 1 :10,000 de la partie inférieure de ce glacier.Dans sa dernière époque de maximum, de date inconnue, le glacier a poussé ses moraines latérales et frontales, qui forment un cirque parfaitement régulier. Depuis lors, le front terminal s' est beaucoup retiré et s' est fort affaissé en s' accidentant d' une manière typique. Sur la riveZeitschr. des D. u. Oe. A. V. XVIII, 58. München 1887.

droite, orientale, le glacier a laissé en arrière une bande étroite, couverte de débris qui protègent la glace; cette langue atteint presque l' ancienne moraine frontale, à 200 ou 300 m près. Sur la ligne médiane est une plaine peu inclinée ( 8 °/o de pente ), parcourue par le torrent glaciaire; la porte du glacier est à 650 m de la moraine frontale. Sur la rive gauche, la fusion a été la plus forte, et le recul du front s' élève à près de 900 m.

D' après la position qu' avait le glacier en 1865, le recul du front a été en moyenne de 15™ par an, et la diminution d' épaisseur de 22 m.

D' après des marques posées en 1881, le recul aurait exagéré sa vitesse dans les dernières années, et aurait atteint une valeur annuelle de 25 à 30 m.

Pendant les 12 jours où M. Pfaundler a séjourné en août 1886 auprès du glacier, l' ablation a raccourci la langue frontale de 0,8 à 2,6 m suivant les places.

Möllthal. ( Bassin de la Drave, massif du Glockner. ) Le glacier de Pasterze continue à être étudié régulièrement par M. F. Seeland, membre du conseil des mines à Klagenfurt.La décrue se poursuit; elle est évidente sur 4 des 5 repères posés par M. Seeland; un seul montre une augmentation d' épaisseur. La variation a été dans l' année 1886—87:

repère a. Freiwand-f- 4,1 m „ b. Pfandlbach6,0c. Margaritze — 1,6 m „ d. Elisabethfels7,0 m „ e. Ostwand am Pfandlbach. 6,7 m Le glacier était fort découvert de neige, et M. Seeland a pu retrouver dégagées de neige six pieux qu' il avait posés en 1882, et deux pierres posées en 1884, sur un profil transverse entre la Hofmannshiitte et le pied du Glockner. L' avance a été:

pieu n° 1 en 4 ans 121,5 m soit par jour 8,3om2 „ 162,0»11,1«»3 „ 175,512,0 cm4192,3»13,25 „ 201,513,8- fi1 QS fi m1 S fi cm pierre „ 7 en 2 ans 104,1 m14,3om.

8 „ 100,7 m13,8"- Moyenne 12,5cm M. Seeland refait comme suit l' histoire ancienne de ce glacier:

Les mines d' or et d' argent exploitées au Pasterze dès l' antiquité et dans le moyen-âge ont été envahies vers le milieu du XVIIe siècle par le glacier en forte crue. Depuis lors, les travaux des mines n' ont jamais été dégagés.

En 1825, lors du premier lever de la carte topographique, le glacier était fort réduit et reculait qu' à la Freiwaud, 1100™ en arrière du front actuel; la Margaritze et l' Elisabethfels étaient dégagés de glace.

En 1826-27, le glacier commença à s' allonger de 3,5 m en moyenne par an. En 1835-36, il barrait les eaux d' écoulement sur la rive gauche et commençait à former le Grüner See. En 1840-42, l' Elisabethfels était recouvert par la glace. En 1846-47, l' allongement annuel était de 4,07 m. Il atteignit son maximum en 1856 et déposa les moraines extrêmes, qui dépassent en hauteur l' état actuel à l' extrémité du glacier de 90m à la Freiwand.... 70 m à la Franz-Josefshöhe.. 56nl à la Hofmannshütte... 28 m A partir de 1857, la décrue a commencé. En 1878, l' Elisabethfels, qui avait été recouvert en 1840-42, se dégagea des glaces. En 1880, la Margaritze, qui avait été recouverte en 1848—49, se dégagea pareillement. En 1879, le Grüne See, qui avait été formé en 1835-36, s' écoula et disparut.

Le minimum ayant eu lieu en 1825 et le maximum en 1856, la phase de crue a duré 31 ans. La phase de décrue actuelle dure déjà depuis plus de 30 ans.

Vallée de l' Adige. ( Massif de l' Ortler. ) Le glacier de Sulden a été étudié avec soin et intérêt par MM. Dr. J. Finsterwalder et Dr. H. Schunck, de Munich.Ils ont levé une carte au 1: 5000, publiée Zeitschr. des D. u. Oe. A. V. XVIII, 70. 1887.

au 1: 10,000; ils ont retracé l' histoire du glacier dans ce siècle et calculé ses changements de volume.

La vallée occupée par le glacier de Sulden présente à l' altitude de 2015-2168 un escalier gigantesque de rochers, paroi très inclinée de 150 m de haut, connue sous le nom de Legerwand. Au commencement du XIXe siècle, le front du glacier était de mémoire d' homme resté au-dessus de la Legerwand. En 1815, le glacier s' allongea; en août 1817, il précipitait ses glaces sur la Legerwand; en mars 1818, sa vitesse augmentait; dans l' automne de 1818, il était à 380 m du Gampenhof; en 1819, il avança encore de 23 m. Il s' arrêta alors dans le maximum le plus considérable qu' on lui connaisse.

Alors commença la décrue, qui dura jusqu' à peu avant 1846; il subit alors une petite crue qui ramena son front au haut de la Legerwand et fit recommencer les avalanches de glaces; puis il se retira. Quelques années après, nouvelle poussée en avant qui amena un maximum en 1857; le glacier était descendu fort bas, 700 à 800 m plus loin que la Legerwand, mais ce maximum resta cependant de 500 à 600 m en arrière de celui de 1819.

Depuis 1857 retraite continue.

Dans ses périodes de retraite, le glacier se coupe en deux sur la Legerwand; il reste au pied de la paroi un bloc de glace qui se sépare du glacier supérieur et fond sur place.

L' histoire de ce glacier se résumerait donc comme suit:

Très grand maximam... 1819 Minimum1844 Maximum secondaire 1846 Minimum?

Grand maximum1857 En 1886, le front du glacier est de 1850 m en arrière de la grande moraine de 1819, de 1200 à 1300 m en arrière de la moraine de 1857.

L' histoire de ce glacier confirme la loi que la durée des crues est plus courte que celle des décrues.

La diminution de volume entre l' état de 1819 et celui de 1886 peut être évalué à 45 millions de m8. La crue de 1819 venait du glacier de la Suldenspitze, celle de 1857 de celui de l' Ortler.

RÉSUMÉ.

L' année dernière, nous comptions 40 glaciers en état de crue établie.

Cette année, nous avons deux noms à effacer de notre liste: le Vadret da Fex et le glacier de Forno, qui, d' après les rapports de MM. J. Caviezel et de Salis, semblent être encore en décrue.

Nous avons en revanche à y ajouter:

Les glaciers du Laquinhorn, dans la vallée de Saas, d' après le Dr. Larguier de Lausanne.

Le- Hohwänggletscher, dans la vallée de St-Ni-colas, d' après le guide P. Taugwalder de Zermatt.

Le glacier de Nalps, dans la vallée du Rhin antérieur, d' après le rapport de M. de Salis.

De notre liste de 40 glaciers, nous en avons effacé 2; nous y avons ajouté 3; il reste un total de 41 glaciers en crue manifeste.

En somme, la phase de crue de la nouvelle période que nous avons constatée, les dernières années, dans nombre de glaciers du massif du Mont-Blanc, des Alpes valaisannes et bernoises, continue sans s' étendre sensiblement à un plus grand nombre de glaciers. Même dans ces régions, il y a encore beaucoup de glaciers à l' état stationnaire ou en décrue manifeste.

Il semblerait que le glacier des Bossons approche déjà de l' état de maximum et que la décrue soit prochaine.

XXXII. Ecoalement des glaciers dn Grœnland.

L' importance considérable qu' a la vitesse d' écoule du glacier, pour expliquer les variations périodiques de longueur, m' engage à donner place ici à la note suivante du professeur J. Steenstrup, de Copenhague: „ La différence d' allure entre les glaciers des Alpes et ceux du Groenland s' accentue toujours plus, à mesure qu' on connaît mieux ces derniers. Le chef de l' expédition biennale sur les confins septentrionaux des possessions danoises de la côte occidentale du Groenland, M. Care Ryder, nous apprend qu' il a mesuré l' écoulement d' un grand glacier et l' a trouvé de 99 pieds en 24 heures, en été, et de 30 à 35. pieds en hiver ." i ) 32 mètres par jour! Ce chiffre dépasse tout ce qui a été cité jusqu' à présent pour les glaciers polaires. Ce serait une vitesse cent fois plus forte que celle de nos grands glaciers alpins; cela dépasserait même la vitesse d' écoulement du glacier de Vernagt, qui, dans les derniers jours de la crue de 1845, marchait à raison de 10 m par 24 heures.

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