Airelles, Bruyère et Azalée
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Airelles, Bruyère et Azalée

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Avec 4 dessins.Par Sam. Aubert.

La forêt couvre les avant-monts en tout ou partie et ainsi que nul ne l' ignore, elle protège le terrain contre les avalanches et le ravinement. Où elle manque sur les pentes sous-jacentes à la zone de la prairie alpine, c' est que jadis, par ignorance, on l' a détruite, dans l' idée d' augmenter la surface consacrée au pâturage. Mais les conséquences de ce mode de faire: ravinements, etc., n' ont pas tardé à se faire sentir, et dans certaines hautes vallées des Grisons ou du Tessin on subit encore aujourd'hui les funestes effets du déboisement. Ailleurs, le rôle protecteur de la forêt a été reconnu à une époque déjà très lointaine; on s' est bien gardé de toucher à la forêt habillant les pentes, et en bien des endroits, elle est absolument à ban.

La forêt de montagne, la forêt alpine, si elle n' héberge pas une flore aussi variée, aussi riche de couleur que la prairie qui la domine, abrite néanmoins des plantes intéressantes, d' aspect charmant, auprès desquelles le touriste qui s' en va là-haut ne passe pas indifférent. Parmi les espèces qui, sans faire de la forêt leur domicile exclusif, s' y rencontrent toujours et en abondance, citons les Airelles.

On en distingue trois espèces. D' abord, VA. ponctuée ( Vaccinium Vitis idaea ), reconnaissable à ses feuilles permanentes et coriaces, construites pour résister à la sécheresse et aux variations de température. On la trouve d' ordinaire dans les bois clairs, à sol pierreux, séchard où ses tiges se dressent sous la forme de buissonnets serrés couvrant de vastes espaces. Coup d' œil banal, quelconque! direz-vous. D' accord! Seulement, vers la fin de l' été, les fruits parvenus à maturité font leur apparition: petites baies d' un rouge si vif que les pieds d' Airelles semblent constellés d' écarlate. Tant de couleur, tant de beauté font du tableau quelque chose de charmant et l'on comprend que le nom de rougeole donné en diverses contrées à notre Airelle, lui siée parfaitement.

Comme bien d' autres plantes, l' A ponctuée éprouve la nostalgie des hauteurs; fuyant les altitudes moyennes, elle s' échappe de la forêt, monte, s' installe ici ou là, autour des rocs, sur les moraines, et seuls les 3000 m. arrêtent son ascension vers les sommets.

L' Airelle des marais ( Vaccinium uliginosum )! Vous la reconnaîtrez à son port ascendant, à ses feuilles glauques, ses fruits bleus. Si elle affectionne de préférence les tourbières, elle ne dédaigne pas les altitudes élevées, qu' on l' observe en quantité dans les champs de Rhododendrons de la zone alpine. Dans le Jura, chaîne du Crêt de la Neige, elle apparaît, fréquente, sur les pentes exposées au nord, dans la compagnie de maintes espèces alpines, qui communiquent à cette montagne un caractère alpestre indéniable.

Si, à la Vallée de Joux, par exemple, vous parlez d' Airelle des marais, personne ne saura de quoi il s' agit, car la plante n' y est connue que sous le nom de crullie. D' où vient ce terme? Je l' ignore. Dans la même contrée, pour creuser, on dit crullier. Y a-t-il quelque rapport entre crullie et crullier? Je ne pense pas.

Enfin, VA. myrtille ( Vaccinium Myrtillus ), l' ambresalle du Jura neuchâtelois, l' ambroche de la Vallée de Joux. A observer que ce mot ambroche était seul connu et utilisé voici 60 ans. Actuellement il a quasi disparu; seules les vieilles gens le connaissent encore mais ne l' emploient plus. Inutile de donner une description même sommaire de cette plante forestière par excellence. Qui ne la connaît et n' apprécie la saveur agréable de ses baies pruineuses. La Myrtille est une plante très commune dont rien ne frappe les regards, si ce n' est son extrême abondance dans les forêts de montagne; toutefois chaque année pour elle sonne une heure de gloire. Etes-vous Airelle myrtille.

jamais montés, en septembre, de Saas-Fée à la cabane Britannia par le sentier de la Plattje? Oui! Eh! bien, vous aurez sûrement remarqué, sous la couverture claire des mélèzes, une infinité de « myrtilliers » dont les feuilles rougies par l' automne flamboient au soleil. De quelque côté que vous portiez vos regards, en haut, en bas, c' est un ruissellement, une débauche de rouge qui s' affirme d' autant plus vif que les feuilles ont été davantage caressées par le soleil.

Ce tableau? Une pure merveille! La coloration automnale des feuilles de la Myrtille n' est pas spéciale à la forêt alpine; on l' observe aussi à des altitudes inférieures et dans le Jura notamment, mais elle est beaucoup moins ardente, car d' une manière générale, elle s' intensifie avec l' altitude, comme du reste, celle des organes floraux.

Nul n' ignore que le soleil, par les réactions chimiques qu' il provoque à l' intérieur de certains tissus végétaux, est le facteur essentiel de leur coloration. Plus ses rayons seront ardents, d' autant plus vive sera la colo- AIRELLES, BRUYÈRE ET AZALÉE.

ration. Or, l' action chimique des rayons solaires augmente avec l' altitude, parce que l' atmo, devenant moins dense, en absorbe une quantité d' autant plus faible. On se représente donc sans peine que les feuilles de la Myrtille prennent une teinte automnale plus vive haut dans les Alpes que dans le Jura.

La famille des Ericacées à laquelle appartiennent nos Airelles ainsi que le Rhododendron, comprend d' autres espèces encore, alpines ou non. C' est le cas de la Canneberge ( Oxycoccus quadri- petalus ), une mignonne et déli- cate petite plante, à fleurs rosés Raisin d' ours.

disposées comme autant d' étoiles sur les tiges étalées à la surface des mousses spongieuses dans les tourbières. Elle est inconnue sur d' autres substratum. Plante alpine? Pourquoi pas, puisque des tourbières existent encore haut dans les Alpes.

Et puis nous avons le Raisin d' ours ( Arctostaphylos Uva ursi ) dont les tiges armées de feuilles coriaces rappelant celles de l' A ponctuée, palissent les rochers et certains terrains séchards des Alpes et du Jura. Une belle plante qui ne passe point inaperçue et que les varappeurs du Salève ou d' autres montagnes préalpines doivent certainement connaître.

Et puis encore la Bruyère rose ( Erica carnea ), hôte fidèle de certains terrains calcaires des montagnes jusqu' à 2500 m. et plus. Vous la verrez abon- Bruyère rose.

AIRELLES, BRUYÈRE ET AZALÉE.

dante à la marge des sentiers qui traversent le Parc national et si vous franchissez le Col du Fuorn en autocar pour vous rendre au Val Mustair et de là à l' Ortler ou au Piz Umbrail, sans quitter la voiture, vous distinguerez, sous le couvert des pins, ses tiges hérissées de feuilles en aiguilles et fleuries de rose très pur, mélangées à celles du Daphne strié, proche parent du D. cneorum du Marchairuz.T.rop tôt la glorieuse vision s' effacera de vos yeux, mais non le souvenir.

Enfin, l' Azalée des Alpes ( Loiseleuria procumbens ), le plus noble représentant de la famille et type strictement alpin, puisqu' on ne l' observe que dans les hautes Alpes et cela jusqu' à 3000 m. Sans parler des espèces cultivées, les Azalées constituent un monde immense qui vit essentiellement dans les montagnes du sud-est de l' Asie où l'on en compte des centaines d' espèces hautes de tige et portant de grandes et magnifiques fleurs. Mais la nôtre n' a pas ces prétentions; c' est un végétal tout modeste, un arbuste aux rameaux rampants qui s' appliquent, se terrent frileusement contre le sol. Si vous faites halte sur quelque sommet à 2500 m ., vous la verrez sûrement dans les dépressions du terrain, dans ces combettes minuscules où la pierraille et le gazon se disputent la place. Le lacis des rameaux se recouvre de petites feuilles brillantes, coriaces, au bord enroulé, et quand fete bat son plein, d' une infinité de petites fleurs, autant d' étoiles d' un rose Azalée des Alpes.

très tendre.

Tant de beauté s' étale à la surface de ces tapis d' Azalées qu' un sentiment d' admiration vous saisit et qu' un hymne d' adoration monte en votre cœur à l' adresse de ces petites fleurs si pures de forme et de couleur que, saison après saison, une terre en apparence ingrate, édifie avec la complicité du soleil.

Vous, que les monts appellent et qui fréquemment en prenez le chemin, n' avez d' yeux que pour la cime qui là-haut vous fait signet Non! Tout en vous élevant le long du sentier, n' aurez pas de regards pour les plantes fleuries qui ont élu domicile sous le dôme de la forêt ou qui constellent les hauts gazons, les moraines, les rocs? Evidemment, vous les sa-luerez au passage. Mais si, dans votre course, vous avez spécialement distingue les « myrtilliers » flamboyant sous les caresses du soleil ou les Azalées, étoilées de rose, je gage qu' aux joies de l' ascension s' ajoutera le souvenir de ces deux plantes et de bien d' autres filles de la forêt ou de l' Alpe.

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