Escalades nouvelles au Lac du Grimsel
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Escalades nouvelles au Lac du Grimsel

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Claude Remy, Bossières

D' immenses parois de granite polies par les glaciers dominent la rive gauche du lac de barrage du Grimsel. C' est là que nous avons mené plusieurs campagnes d' escalade libre intégrale, la technique en faveur aujourd'hui dans certains milieux où l'on attribue une valeur esthétique et même éthique supérieure à ce genre de . Il y a quelque chose de plus franc et de plus pur dans ce corps à corps de l' homme et du rocher.

L' accès le plus prometteur au col ou au lac du Grimsel se fait, selon nous, par le Hasli, la « vallée aux noisetiers », selon l' étymologie. Mais en fait de noisetiers, c' est bien davantage la beauté sauvage des rochers qui caractérise ce versant bernois. Peu après le village de Guttannen, dernier endroit où l'on trouve du ravitaillement, on entre dans des gorges fantastiques. Mais, d' abord, la présence d' une vaste installation hydroélectrique, avec ses hauts pylônes métalliques, ses barrages, ses téléphériques, est un rappel de notre époque avide de kilowatts: production annuelle, près d' un milliard et demi en ces lieux mêmes...

La Handegg... C' est presque au pied des célèbres dalles portant ce nom que les grimpeurs d' aujourd ont fixé un de leurs lieux de rassemblement favoris. On y campe dans un décor un peu barbare... par sa modernité, juste à côté de l' usine électrique et en bordure de la route, dans le fracas occasionnel de violents coups de mines: des travaux sont en cours. Principal avantage du lieu: le logement est gratuit, chose rare dans l' Helvétie « propre en ordre ». A noter que l' hôtel de la Handegg ( on orthographie aussi Handeck ) pratique des prix et offre un service appréciés des grimpeurs.

La Handegg est donc un centre d' escalade connu depuis un certain temps. Il a été pour nous comme la porte d' entrée du massif. Trois jours d' escalades sur ses dalles magnifiques ont été l' une de nos heureuses découvertes de l' été 1980. Mais c' est à une équipe suisse alémanique, et au très actif Hans Howald, que l'on doit, en 1978 et surtout en 1979, la révélation de ce fabuleux terrain d' escalade libre intégrale, le style adopté d' emblée. Ici, le but n' est plus de gagner un sommet. C' est le « comment » de la « grimpe » qui devient sa propre raison d' être.

Les voies de la Handegg, particulièrement bien équipées, présentent une escalade en adhérence. On a jugé qu' elles manquaient de diversité, qu' elles présentaient une certaine monotonie. Selon nous, cela n' enlève rien à leur beauté. Ainsi, pour notre goût, les voies Boulder-Highway, Siebenschläfer et autres, touchent à la perfection, et nous sommes pleins d' admiration pour nos prédécesseurs. Ce sera l' avis de tout fin connaisseur.

Stimulés par leur exemple et la splendeur de leurs voies, l' envie nous travaille de faire quelque chose de la même valeur, et ce sont nos parents qui vont nous aider à trouver l' en où réaliser ce désir. Eux qui nous ont déjà beaucoup appuyés dans notre activité de grimpeurs, ils vont sillonner en éclaireurs les vallées alpestres. Notre père, toujours actif en montagne et connaisseur de l' Oberland Bernois, a déjà son idée en tête. Au retour d' une de leurs excursions communes, c' est notre mère qui nous apporte à sa manière la bonne nouvelle:

- Nous avons vu de grandes dalles de rocher bien trop lisses, impossibles pour vous...

Mais notre père corrigera:

- Ces dalles sont pareilles à celles de la Handegg, mais plus marquées de fissures, dont aucune, il est vrai, ne conduit en ligne directe au sommet des parois, car elles sont plus courtes, et décalées les unes par rapport aux autres. Quelque chose de fantastique, conclut-il avec un sourire qui en dit long.

Ces dalles immenses se situent en fait sur la rive gauche du lac du Grimsel, et leur pied, par endroits, plonge dans les eaux mêmes du lac. Cette région et ces rochers sont connus de longue date des grimpeurs; et - nous l' ap plus tard - bien des prétendants ont recensé de nombreuses possibilités de l' endroit.

La région est le point de rencontre de climats fort différents. De manière générale, la proximité du Gothard, baptisé « pot de chambre de la Suisse », détermine un temps plutôt rude et capricieux. Mais par chance, il règne le long du lac artificiel du Grimsel un microclimat relativement doux et calme. L' hospice du Grimsel occupe un piton rocheux un peu plus bas que le col sur le versant nord, mais il faut savoir que la région est fermée sept à huit mois par année aux véhicules pour faire place au grand silence hivernal.

Les grimpeurs trouveront d' agréables emplacements de bivouac le long du lac, à proximité de petits ruisseaux. Mais il est bon de rappeler que cette région est classée réserve naturelle et doit rester intacte. Tout grimpeur ou promeneur se fera un devoir de respecter la nature, en particulier en remportant tout déchet. Le camping proprement dit n' est pas autorisé.

Voie Motörhead ( 2e longueur ) Escalades sur la rive du Lac du Grimsel Au début de juillet 1981, nous sommes, mon frère et moi, à l' hospice du Grimsel, munis de jumelles et d' un minimum de materiel d' esca. Il fait beau, et nous pourrons étudier les possibilités de « grimpe » des parois qui nous intéressent. Nous empruntons l' agréable sentier de la cabane du Lauteraar, qui file le long du lac. Mais il commence de façon déconcertante dans un dédale de béton. Enfin, au-delà d' un court tunnel, on retrouve la nature et on redescend vers la rive. Le long du sentier, la flore est abondante pour une telle altitude ( 1900 m ). On trouve plus d' une espèce assez rare: la drosera anglica, une plante des tourbières; la gymnadenia alloida, une plante des gazons de montagne; la centaurea rhapontica, une plante des pentes pierreuses, et même quelques arbres, pins et bouleaux. Les grenouilles ont trouvé dans l' humidité un terrain de prédilection. Plus d' une fois un de ces batraciens passera d' un bond entre vos jambes, et vous sursauterez tout comme lui. Renards et marmottes, avec les chamois fort nombreux, hantent pareillement la région.

Après une heure et demie le long des dalles de granite presque horizontales, nous voici au pied d' une paroi extraordinaire, une paroi de rêve...

Ce jour-là, installés sur le sable fin du lac dont le niveau est bas, nous observons minutieusement cette paroi vierge fascinante qui s' élève d' un seul jet de 500 mètres.

Pour nous familiariser avec ce rocher, d' ex qualité, et pour calmer notre impatience, nous démarrons le long d' une ligne d' escalade qui s' impose, sur le flanc gauche de la paroi. Nous suivons de beaux dièdres et fissures dont le fond est parfois herbeux. Des dalles lisses, mais d' inclinaison raisonnable, facilitent notre progression. Cette première voie est baptisée « bibliquement » la Genèse. Elle aboutit un peu à gauche du sommet. Si l' escalade s' y développe surtout en adhérence, elle est généralement possible grâce à des fissures et à des inégalités rocheuses de ce flanc granitique, imposant des mouvements variés à souhait.

Durant l' ascension, nos yeux ont scruté le reste de la paroi, où se devinent des possibilités fantastiques.

De retour à la rive du lac, nous faisons un saut rapide à l' Hospice pour en ramener le matériel complet d' escalade et de bivouac.

Que demain vienne vite, l' envie de grimper nous démange!

La Motor head Grand beau, pas un nuage. Ainsi a commencé notre plus belle journée d' escalade, ce 7 juillet 1981... Mais il y en aura d' autres plus tard.

A la fois calmes et soucieux, nous abordons la grande paroi baptisée pompeusement le Dôme de l' Eldorado.

Harnaché de quelques pitons et d' une gamme de coinceurs, mon frère, qui est le leader, démarre le long d' une « ligne magique » de fissures et de dièdres. Nous évitons par la droite un grand toit caractéristique. Là, une dalle lisse se franchit en adhérence, et le matériel n' apporte ni aide, ni sécurité ( le gollot en place a été mis ultérieurement ).

Plus haut, un dièdre d' une beauté à couper le souffle. Seuls nos rêves, ou quelques photos, s' approchaient jusqu' ici d' une telle réalité. Les difficultés vont presque à l' extrême, mais une fissure à gauche du dièdre permet repos et relais. Puis l' inclinaison diminue, et les difficultés avec elle. Mais la beauté de ce rocher lisse et poli aux couleurs variées et changeantes selon l' ensoleillement a quelque chose d' irréel.

La suite de l' itinéraire reste évidente: deux grandes longueurs, en suivant des fissures-dièdres, exigent une certaine rapidité dans l' enchaînement des mouvements. L' escalade devient quelque peu athlétique, mais non pénible.

Une énigme se présente: Yves essaye de forcer un passage le long d' une fissure qui va se mourant sur un rocher trop incliné pour l' adhérence. Sans gollots ni « copper-heads », le jeu paraît sérieusement compromis. Finalement la solution se trouve dans une traversée exigeante et délicate vers la droite sur un mur raide. Plus haut, nous découvrons des « gouttes d' eau » dans le granite, mais sur le moment nous n' apprécions pas la trouvaille inattendue, nous sommes trop concentrés sur la suite de l' escalade. Enfin, des dalles lisses vont permettre, par leur modeste inclinaison, une progression presque reposante.

Le mur sommital offre une sortie époustouflante: une fissure folle oblige à des coincements de doigts et de mains. Un petit toit s' évite avec élégance par la gauche, et ça continue... Dingue à hurler!

En une dizaine d' heures, et avec une poignée de pitons, s' achève notre plus belle voie, et dans le style que nous voulons, qui nous importe avant tout: impeccable.

Montagne et musique font entre elles un heureux mariage.Voyez plutôt: sur le rocher, en paroi, gestes et mouvements sont une sorte de danse verticale.

Belle escalade signifie généralement rocher solide et difficile... Or notre musique préférée s' appelle précisément le hard-rock!Voilà pourquoi, en hommage à notre groupe préféré Dôme de l' Oubli: départ d' Uzumati de hard-rock du moment, nous baptisons notre voie Motörhead. Nous saluons ainsi la « sortie », le 23 juin de cette année 1981, d' un 33 tours gravé par ce groupe, une musique au niveau de notre voie.

L' instant de repos que nous goûtons au sommet du Dôme de l' Eldorado, en grignotant quelques fruits, a pour arrière-plan un décor alpin majestueux, avec ces deux maîtres sommets de l' Oberland Bernois: le Lauteraarhorn et le Finsteraarhorn, formant ensemble une chaîne immense. C' est là, sur ce dernier sommet, que poussent à près de 4200 mètres les plus hautes fleurs des Alpes.

Retour expéditif et agréable par une rampe facile à droite. Au pied du Dôme, juste au-des- sus du sentier, nous découvrons un gros bloc, emplacement de bivouac idéal dans un cadre qui ne l' est pas moins.

Le lendemain, sans forcer, nous suivons la ligne évidente de la voie Simple-Solution. Située au centre de l' Eldorado, elle offre quelques belles longueurs peu soutenues. Mais nous sommes bien conscients de notre bonheur d' être là, seuls sur ce grand mur à l' image sereine ( pour longtemps encore ?) de l' Oberland. Nous avons une pensée pour les pionniers qui ont fait la conquête des hauts sommets. Aujourd'hui, le jeu a changé, mais le plaisir reste, et c' est là ce qui compte.

Le Dôme de la Marée Avant le retour en plaine, nous allons encore, partant de l' Hospice, gravir le joli petit pilier lisse proche de l' endroit où s' appuie le barrage. Le rocher parfait y procure une escalade splendide, marquée à la deuxième longueur par une traversée très délicate à gauche, entièrement en appui pieds et mains. C' est plus tard que nous découvrirons la particularité de ce pilier baptisé Dôme de la Marée. Avec l' été, en effet, le niveau du lac monte, et le départ de la voie, en août, se trouve sous l' eau. En revanche, au début de juin, on l' aborde sur la banquise. A noter cependant que l'on peut, quand les eaux sont hautes, gagner le pied du Dôme par un petit rappel pendulaire.

Plus tard, nous ouvrirons à gauche la voie Eagle-Rock. Voie moins jolie, parfois un peu herbeuse, mais marquée pour nous par le souvenir d' un couple d' aigles qui nous a survolés. Présence émouvante qui s' est produite plusieurs fois en ces lieux.

A droite de la grande cascade produite par une conduite d' alimentation se déversant dans le lac du Grimsel, à quelque 25 minutes de l' Hospice, se dresse l' anodin Dôme de la Cascade. Constitué comme toute cette région par l' excellent granite de l' Aar, ce dôme est entrecoupé de rampes herbeuses et de zones peu inclinées, ce qui ôte de l' intérêt à trois des quatre voies qui le parcourent actuellement. Seule la voie Razamanaz ( titre d' une musique du groupe rock Nazareth ) procure une escalade jolie surtout par sa variété. La sortie originale est sans intérêt. On lui préfère maintenant celle par la voie des Petits Baigneurs. L' ensemble de 250 mètres, équipé, mérite largement d' être parcouru, mais il est recom-

Voie « Marche ou crève! »: goulottes caractéristiques du massif mandé de se chauffer un peu les muscles avant le départ, car la première longueur, la plus difficile, exige de la détermination et de douloureux coincements du bout des doigts.

L' équipement des voies Intéressé par nos escalades et nos diapositives, un généreux fournisseur d' articles de sports nous soulagera largement de nos frais de matériel. L' équipement correct d' une voie en vue de la sécurité n' est par une mince affaire. Il exige beaucoup de patience et un labeur pénible. Partout où cela est possible nous utilisons les coinceurs, mais lorsque la pose d' un coinceur ou d' un piton est douteuse, nous avons recours à un gollot, généralement de gros diamètre ( des M 10 d' une résistance de 2 tonnes ). A notre grande surprise, lors d' un « contrôle » en 1982, nous avons facilement sorti des pitons pourtant solidement plantés l' année précédente. Cela est dû au ruissellement de l' eau dans les fissures et aux écarts de température. D' autre part, des pitons plies témoignaient déjà de certaines chutes, ce qui nous a conduits à placer des gollots en plus grand nombre encore.

Lorsque tout va bien, il faut une trentaine de minutes pour placer un gollot, en utilisant parfois deux, voire trois tampons, tant ce granite est dur. Et cela pour un seul trou! Or, pour ouvrir et pour équiper les voies du Lac du Grimsel, nous avons placé, outre les pitons, plus de 130 gollots dans les deux saisons 81 et 82. Aussi prions-nous les grimpeurs de respecter cet important travail et, pour les voies équipées, de les gravir sans marteau, afin de ne pas endommager le rocher mais de conserver à l' escalade sa pureté éthique et esthétique.

Lac du Grimsel: l' escalade moderne « à la loyale » C' est avec ardeur, même avec une certaine frénésie, que nous continuons d' explorer le massif. Durant les saisons 81-82, où nous avons ouvert plus de 60 voies, 25 se situaient au Lac du Grimsel.

En août 1981 nous avons ouvert non sans peine notre deuxième grande et belle voie, la Septumania. Elle commence par une série de « bassines », formation rocheuse peu habituelle. Le parcours a exigé près de cinq jours, ce qui comprenait l' ouverture, l' équipement à poser et, tâche ingrate, le nettoyage. Cette dernière opération n' est pas aisée. Elle nécessite le dégagement des pierres descellées et de l' herbe prise dans certaines fissures. En général, chacune des grandes voies équipées de Y Eldorado a exigé une à deux journées d' un tel nettoyage.

La voie de la Septumania, malgré la pose de plus de trente gollots, s' effectue entièrement en libre: suprême récompense! Mais le soleil, sur ces dalles en plein sud, crée une chaleur torride, ce qui a failli nous jouer un vilain tour. Complètement déshydratés par d' intenses journées d' escalade, nous avons dû observer une période de repos.

Précisons que toutes nos voies au Lac du Grimsel ont été ouvertes à partir de la base et sans reconnaissances, ce qui impliquait parfois une progression... déconcertante sur certaines dalles. La pose de gollots, réalisée sur une marche minuscule, a coûté parfois plus d' une heure et de terribles crampes. Des passages ont exigé au contraire une escalade plutôt rapide et exposée. Parfois un gollot d' assu a été posé ultérieurement, mais sans nuire à la pureté de l' escalade.

Les cotations sont celles de l' ouverture, et nous avons conservé l' échelle traditionnelle qui s' arrête au VI, ce qui n' est pas si mal! Car si l'on veut laisser un sens à cette cotation, il faut pratiquer l' escalade libre intégrale, c'est-à-dire sans aucun point d' aide ou de repos.

Deuxième saison au Lac du Grimsel L' ouverture des voies au Lac du Grimsel se poursuit. A chaque fois, nous découvrons de magnifiques longueurs et nous équipons quel-ques-unes des voies les plus belles. Au Dôme de la Marée, nous réalisons Y Eurêka, qui nous semblait d' abord impensable, démarrant au ras de l' eau par une fine et « vicieuse » fissure exposée.

A Y Oubli, deux très belles voies se font en libre sur coinceurs, à savoir l' Uzamati ( nom de la tribu indienne qui a baptisé le Yosemite ) et la Stay-Clean ( la « Reste-Propre » ).

Métal-Hurlant En juillet, nous terminons ce que nous pensions être la voie des voies, ébauchée l' an passé, à savoir bien sûr celle dite Métal-Hur-lant ( td sup. 500 m ), dont le tracé offre, à par- tir du sentier, une ligne d' escalade... délirante. Par une chance inespérée, le grand dièdre bouché, situé au-dessus de la septième longueur, s' évite très élégamment à droite dans une dalle en escalade libre d' une audace exemplaire ( VI, deux gollots pour 35 m ).

Venon L' histoire de l' Eldorado touche à sa fin plus tôt que nous ne pensions. Après les voies évidentes vient l' exploration des piliers d' appa intouchables. Il y a eu les courts piliers Djamsmodè/e et l' original Marche-ou-crève ( qui mérite son nom, mais n' est pas terminé ). Ce sont deux belles variantes équipées de la Septuamania. Mais voici mieux: de longs piliers de 500 mètres.

Bordant la droite de la voie Takitorleavit, le pilier Woo Li n' est pas équipé, mais présente plusieurs très belles longueurs, dont l' une d' artificielle dans la raide zone médiane.

L' élan extraordinaire du pilier Motorhead, équipé, offre 13 longueurs d' une totale perfection. Dénommé Venon ( ED inf. 500 m ), il a failli nous échapper. A notre grande surprise, alors que nous étions en train de batailler dans la deuxième longueur, voici venir une cordée animée des mêmes intentions que nous. Ce sont nos amis d' Interlaken, D. Flühmann et B. Hutmacher, qui se sont déjà signalés en ouvrant des voies dans le Haslital. Ils se rabat-tront sur le magnifique pilier rouge ( qui sépare les voies Simple-Solution et Radio-Sonde ), voie qu' ils pensaient équiper. Quant à nous, poursuivant sur la Venon, nous découvrons une surprenante 3e longueur. Cette section d' apparence parfaitement lisse et redressée est marquée « juste au bon endroit » de véritables marchettes permettant une agréable progression en libre. Ensuite, après une dülfer ar-rache-doigts, un petit toit se franchit grâce à deux pas d' A 1, les seuls de toute la voie. La remontée d' une grande écaille procure des moments de joie intense dans un décor fabuleux, avec des grimpeurs en action dans les passages voisins. Plus haut, un mouvement délicat, mais où l'on peut bien assurer, donne accès aux dalles moins raides, mais présentant encore des pas d' adhérence pure à la limite de la glissade. Ici, le rocher est splendidement rougeâtre.

Autres Dômes au Lac du Grimsel Vu le nombre des escalades possibles, et d' un intérêt exceptionnel, au Lac du Grimsel, où « presque tout » reste à faire, nous décidons de consacrer à ces lieux le plus clair de notre temps. Notre prospection ne se cantonne donc pas à l' Eldorado: d' autres dômes plus modestes sont fort jolis. En amont, à droite de l' Eldorado, voici le Dôme de l' Oubli, dont les lignes évidentes nous attirent. Sa hauteur est de 200 à 250 mètres. Au centre se dessine un grand dièdre. Juste à sa droite s' échappe une superbe fissure coupant le bord de deux toits. Nous enlevons à haute cadence et sans bavure la belle voie Les Larmes de Rire. Seule la sérieuse première longueur a exigé deux pitons de protection. Le reste de l' escalade se fait avec des coinceurs, et les difficultés se situent entre les degrés IV et V. Donc, du « libre » à souhait. Dans le mur sommital, peu après des écailles douteuses, on trouve un dernier passage très exposé, mais ce « finish » sera abandonné au profit de la sortie plus sûre et très belle de la Takitorleavit.

Enchaînement des voies La région du Lac du Grimsel offre un type d' escalade aussi beau que varié et qui n' est jamais pénible, ni laborieux, en quoi il convient aux « petits gabarits » et surtout aux grimpeuses. Un terrain pareil se prête aux horaires ultra-rapides, ce qui nous a inspiré une idée un peu fofolle...

Le 15 septembre, aux premières lueurs du jour, nous escaladons la Septumania à toute allure. Du sommet, nous dévalons le Dôme à coups de rappels et enchaînons en attaquant la Motörhead, puis la Venon et encore la Mé-tal-Hurlant. La forme restant acceptable, nous changeons de lieu pour continuer la chevauchée fantastique au Dôme de l' Oubli. Puis, la fatigue se faisant tout de même sentir, nous gravissons à moindre allure les Larmes-de-Rire et finalement la Uzumati... Ouf! Il restait encore assez de lumière pour continuer, mais nous en avions assez, avec plus de 2000 mètres d' escalade sans autre préparation que la connaissance de ces voies. Plus tard, soit en octobre, Yves, en solitaire, enlèvera la Septumania en un peu plus d' une heure.

La région du Lac du Grimsel, avec ses fantastiques dalles de granite dur et compact, poli par les glaciers, est devenue un lieu de prédilection pour les cordées qu' attire l' esca moderne. Si elles furent nombreuses en 1982, ce n' est certes pas fini...

Donc, affaire à suivre!

1982

irich Mir

Pierre Galland, Neuchâtel L' Himalaya, plutôt si. L' Himalaya, fascination.

ça ne s' explique pas ...ou on ne peut résister à sa B. Pierre 1 Membres de l' expédition: Markus Itten, Berne ( chef de l' expédition ); Daniel Chevallier ( dit « Yèti » ), Chaumont; Heinz Fahrer, Berne ( médecin ); Pierre Galland, Neuchâtel, Ernst Hunziker, Münchenbuchsee; Toni Knecht, Zurich; Eric Marchand, Villeret.

Tous les alpinistes qui ont eu la chance de découvrir les hautes montagnes de l' Asie en subissent le charme et n' attendent ( souvent plus ou moins consciemment ) que l' occasion d' y retourner. Aussi ai-je bondi, lorsque un soir de l' hiver 1981-82 mon camarade Yèti me demande d' un petit air innocent ce que je pense d' un voyage au Pakistan avec un 7000 à la clé. Et même si le but de l' expédition est le point culminant de l' Hindou Kouch ( il ne fait donc pas partie de l' Himalaya ), la fascination dont parle Bernard Pierre s' exerce déjà.

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