Le versant ouest du Weisshorn
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Le versant ouest du Weisshorn

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Par Marcel Kurz

Avec 1 illustration ( 9Neuchâtel ) Dans la seconde édition ( 1930 ) du Guide des Alpes Valaisannes, vol. II, j' avais intentionnellement passé sous silence ce sombre revers du Weisshorn et les voies scabreuses qui s' y hasardent. Mais les temps ont changé depuis et certains alpinistes m' ont reproché d' avoir masqué ces horreurs à la jeunesse d' aujourd...

En préparant la troisième édition de ce volume, je me suis promis d' être complet et plus objectif. J' ai donc étudié à fond l' histoire de ce versant. Elle a pris des proportions telles que je préfère livrer mes notes à l' organe mensuel du C.A.S. et décharger le plus possible le texte de mon guide, déjà considérablement grossi par les exploits des conquérants modernes.

On trouvera donc ci-dessous la liste chronologique des ascensions réussies au Weisshorn par le versant W. Il est possible que cette liste soit encore incomplète. Certains alpinistes sont aussi avares de nouvelles qu' audacieux dans leurs entreprises. Espérons que, dans l' intérêt de l' histoire alpine, ceux d' entre eux qui auraient affronté cette face rébarbative voudront bien sortir de leur incognito et nous envoyer quelques détails pour compléter notre chronologie.

Il n' existe aucune cabane du C.A.S. sur ce versant de l' Arpitetta. Celui qui veut s' attaquer au Weisshorn de ce côté, doit coucher au chalet des Leisses ( 2567 m. C. N. ) ou bivouaquer plus haut dans les moraines du Glacier du Weisshorn.

Depuis le pied de la nervure Young ( 5 ) on a réussi à rejoindre le refuge du Col de Tracuit en franchissant la paroi rocheuse qui sépare le Glacier de Tourtemagne ( branche W ) de celui du Weisshorn. Cette paroi s' attaque à 3620 m. environ. Elle mesure à cet endroit 200 m. de hauteur et n' est pas facile. Il est probable que la section Chaussy du C.A.S. ( propriétaire du refuge de Tracuit ) y fera poser une corde fixe. Mais cette voie, pratique au retour de l' arête Young, ne vaut rien pour les itinéraires de la face W proprement dite. Au départ du Col de Tracuit, il faudrait couper sous la paroi W de la Tête de Milon, ou même franchir le Col de Milon ( 2975 m .) ce qui entraîne une grosse perte de niveau et de temps.

Au reste, ceux qu' attire la sauvagerie de ce versant, préféreront sans doute coucher à la belle étoile plutôt que sous un toit prosaïque...

Dans tout ce versant W ravagé par les avalanches, on ne décèle qu' une seule voie raisonnable: celle de Young qui suit la longue nervure issue du Grand Gendarme de l' arête N. Elle est décrite dans notre guide sous le n° 369. Les guides de Zinal y avaient installé ( en 1902 ) 800 mètres de cordes fixes. Il n' en reste actuellement que 200 mètres à peine. On suit généralement cette voie à la descente. Toutes les autres spéculations sont terriblement dangereuses et difficiles.

Résumons-les brièvement:

1En août 1879, G. A. Passingham avec Ferdinand Imseng et Aloys ( dit Louis ) Zurbriggen ( Macugnaga ) furent les premiers à s' attaquer à cette face. Malgré le récit détaillé de Passingham ( A.J. IX, 427—431 ), il est impossible de reconstituer son itinéraire. Tout ce qu' on peut dire c' est qu' il se développe entre la nervure Young et la verticale du sommet, mais plus près de la première à laquelle il reste plus ou moins parallèle. Du bivouac ( sur la moraine entre les Glaciers de Moming et du Weisshorn ) au sommet en onze heures et demie.

2Août 1883: J. P. Farrar avec Johann Kœderbacher ( Tyrol ) montèrent en zigzags entre le Schaligrat et la voie Passingham et aboutirent comme ce dernier sur l' arête N à quelque distance du sommet, après un bivouac à 4300 m. ( A.J. XI, 416/417 ). L' itinéraire a été tracé par Farrar lui-même sur la photo face à p. 14 du A.A.C.B. J. XXIV ( 1929 ). Mais ce tracé ne correspond plus tout à fait à la description originale où Farrar prétendait avoir eu un certain temps le Schaligrat « tout près à main droite ». Cette photo est néanmoins le seul document sur lequel nous puissions encore nous baser.

3—Août 1888: Le jeune Munichois Georg Winkler, qui tentait seul l' ascen de cette face, semble avoir été emporté par une avalanche vers 3800 m. Son corps n' a jamais été retrouvé, mais sa cape et sa photographie ( Echo 1888, 227/228; S.A.C.J.. XXIV, 401, 405; XXXIV, 82. Dans Empor ( Winklers Tagebuch ) on ne trouve aucun détail sur cette tentative ).

4 — En 1889, Theodore Cornish avec Hans et Ulrich Aimer ( Grindelwald ) semblent avoir simplifié et rectifié l' itinéraire Farrar. Ils mirent néanmoins treize heures de l' Arpitetta au sommet ( A.J. XV, 192—196 ).

5Le 7 septembre 1900, G. W. Young avec Louis et Benoît Theytaz ( enfin deux guides indigènes 1 ) forcèrent la nervure baptisée depuis nervure Young et qui devînt une voie classique de descente. Cet itinéraire a été suivi souvent depuis, même à la montée, mais nous ne faisons que le mentionner dans cette chronologie, ne le considérant pas comme partie intégrante du versant W.

Suit une relâche de 28 ans durant laquelle aucune caravane ne semble s' être attaquée au versant W.

Puis oient Vére des sans-guides:

6 — Fin août 1928: Jean Savard ( C.A.F. Lyon ) et Marc de Hemptinne. Cette caravane n' a jamais rien publié, mais voici quelques détails aimablement fournis à l' auteur par J. S. dont les notes ont été perdues durant la dernière guerre. Date incertaine, entre le 15 et le 31 de ce merveilleux mois d' août 1928. Bivouac ou plus exactement repos à l' Arpitetta jusque vers 2 heures et attaque de la muraille entre le point 3126 ( A. S. ) et le couloir de l' itinéraire Farrar. « Pas de difficultés dans le couloir très peu marqué qui nous fit rejoindre l' arête qui tombe sur le point 3126. Je n' ai pas souvenir d' avoir effectué une traversée à droite comme l' indique Farrar, mais au contraire d' avoir monté en écharpe vers la gauche pour contourner les escarpe- ments. Nous avons certainement tiré franchement à gauche sous le sommet, mais je ne crois pas que nous ayions débouché sur l' arête N à plus de 100 m. du sommet. En raison de la sécheresse exceptionnelle, tous les fonds de couloirs étaient dégarnis de neige ce qui simplifiait beaucoup l' ascension. On aurait pu passer un peu partout dans cette face W. Nous avons dû arriver au sommet vers 19 heures et avons bivouaqué en descendant l' arête E. En principe j' ai suivi l' itinéraire Farrar, en évitant simplement son crochet à droite. » 7 — 4 septembre 1933: Jean Leininger et Jean Vernet ( Nice ). Ces deux fameux membres du G. H. M. n' ont rien publié non plus, mais voici une note rédigée par J. V. et que Lucien Dévies a bien voulu nous communiquer ( avec photo et tracé ). Nous la transcrivons textuellement:

« Bivouac à 2900 m ., à peu de distance de la moraine latérale du glacier du Weisshorn. Départ à 4 heures. Traversée du glacier à crampons. Point d' attaque de la muraille à l' origine d' un couloir-vire caractéristique qui entaille le flanc NW du grand éperon central de la muraille, non loin de sa base, à droite du couloir gravi par la caravane Farrar. Altitude 3200 m. 6 h. Espadrilles.

L' itinéraire emprunte le couloir-vire, puis s' élève obliquement vers la gauche et atteint par quelques traversées attentives de rochers pourris partiellement couverts de neige et de glace le couloir Farrar. Celui-ci, en partie verglassé, est traversé. L' itinéraire suit les rochers de sa rive droite et gagne finalement une première, puis une deuxième arête qui forme en ce point la dorsale du grand éperon. La cote 3900 est dépassée vers 9 heures. L' arête ne tarde pas à se perdre dans la masse d' un ressaut escarpé dont les vires permettent une facile échappée à droite. En suivant ainsi les stratifications, on atteint une nouvelle crête moins accentuée, au-dessus et vers la droite du ressaut. La structure générale en dalles de la muraille devient nettement plus sévère. Néanmoins, l' espadrille permet une adhérence encore facile. Peu après avoir coupé ( pour la deuxième fois ) la direction de la voie Farrar qui opère à ce niveau une grande traversée vers l' arête N [erreur], l' itinéraire arrive devant une partie particulièrement lisse de la pente, où l' arête perd toute individualité et qui semble très exposée aux chutes de pierres. Il s' en détourne par la droite, grâce à une vire et à une nouvelle arête abrupte. Ce mouvement tournant est de loin la partie la plus acrobatique de l' ascension. Une marche zigzaguante à travers les dalles supérieures et des zones de roches pourries ramène obliquement vers le N. Au delà d' une dernière petite crête est atteint un ravin par le fond duquel, au prix d' une brève escalade aisée, l' arête N est rejointe à très peu de distance du sommet, à 14 heures. Les espadrilles sont enlevées. Départ à 14 h. 30. Sommet 14 h. 45 environ. Descente par l' arête N et le Bieshorn. Refuge Baumgartner 20 h. 15 environ.

L' état de sécheresse des pentes et les espadrilles ont seuls permis de réaliser cet horaire en dépit de sacs assez lourds. Un vent du N froid a beaucoup contribué de son côté à ralentir la chute des pierres dont l' itinéraire semble d' ailleurs éviter au maximum les principales trajectoires. » 826 juillet 1945: René Dittert, Léon Flory, Francis Marullaz ( enfin des Suisses I ). Après une première tentative et un bivouac à plus de 3500 m.

LE VERSANT OUEST DU WEISSHORN en août 1944, départ de l' Arpitetta pour attaquer à 6 heures l' éperon 3281 ( C. N. ) par un couloir étroit et facile sur son versant N.

« Le remonter dans toute sa hauteur, puis suivre la croupe de l' éperon. Celle-ci est d' abord large et peu inclinée, puis elle se redresse pour former un gendarme caractéristique [3647 m.*]. A 40 m. environ au-dessous du sommet de ce gendarme se trouve l' emplacement de notre bivouac 1944.

De ce point, contourner le gendarme par le N, gagner son sommet et suivre l' arête sur quelques longueurs de corde. Une traversée à gauche ( N ) permet de franchir un couloir et de parvenir aux abords immédiats d' une arête peu définie. On ne rejoint pas immédiatement cette arête. L' escalade se poursuit en contrebas ( S ). Un passage difficile amène à la naissance de grandes dalles et de fissures raides. ( Notre intention était d' atteindre directement le sommet, mais la neige fraîche et le verglas, résultat d' un violent orage la veille, rendirent ce projet irréalisable et nous fûmes forcés de nous échapper vers la gauche et de rejoindre le plus rapidement possible l' arête N. ) Par une longue traversée ascendante, exposée et difficile ( chutes de pierres provoquées par la fonte de la neige fraîche ) grimper jusqu' aux abords d' un couloir issu d' une brèche de l' arête N flanquée d' un gendarme crochu. Remonter des rochers raides entrecoupés de plaques de neige sur la rive gauche de ce couloir pour sortir sur l' arête N à quelques mètres au-dessus de la brèche. Arrivée au sommet 17 h. 15. Très grande et très belle course se déroulant dans un site grandiose. Difficile. Rochers en général bons. Quelques dangers de chutes de pierres. » ( Information personnelle de la. D. à l' auteur. ) Comme on le voit, les trois dernières caravanes ont suivi en grande partie l' itinéraire Farrar, cherchant à utiliser le plus possible les formes convexes du terrain. La nervure Young n' en reste pas moins le seul itinéraire recommandable dans tout ce versant W du Weisshorn, et ceci à la descente seulement. Avec une corde de rappel d' une cinquantaine de mètres, une caravane de deux peut gagner beaucoup de temps.

Au retour de la première traversée du Zemu Gap, un col de 5878 m. à l' est du Kanchenjunga ( Himalaya ), H. W. Tilmann écrit:

« Nous avions gravi une montagne et franchi un col; nous avions été trempés; nous avions souffert du froid et de la faim; nos vies avaient été en danger, et pourtant nous étions heureux. Comment cela se fait-il? C' est ce que je ne saurais expliquer, et si le lecteur ne le sait pas aussi bien que nous, s' il n' a pas saisi l' intensité des joies que nous avions éprouvées, c' est alors la faute à l' auteur. Une autre campagne himalayenne était derrière nous; il était temps de songer à la prochaine. ,Le sentier ardu mène à la vie éternelle; la paresse est le chemin de la mort. ' » H. W. Tilman, When Men and Mountains Meet, 1946

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