Noms de lieux alpins. V.
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Noms de lieux alpins. V.

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Par Jules Guex. V.

Corrections, additions et discussions.

Mon Esquisse toponymique de la Vallée du Trientx ) m' a valu une très volumineuse correspondance de collaborateurs bénévoles, et souvent bien informés. Un cordial merci à tous ceux qui ont répondu à mon appel! Dans ces matériaux abondants, je dois, à regret, faire un triage dont je donnerai ici le résultat, après avoir signalé les retouches qui me paraissent aujourd'hui nécessaires à quelques-unes des etymologies que j' avais proposées. Enfin, je reviendrai, pour la troisième fois, à un nom qui me tient à cœur, celui du hameau d' Etier dans la vallée de Bagnes.

La Médettaz ( p. 72 ). Le mot savoyard médetta « malédiction, maudite » pourrait expliquer le nom de ce hameau; cependant aucune tradition locale n' éclaire ce problème.

Le Triège ( p. 73, 74 ). Recherches faites, je dois reconnaître que la traduction de Jaccard, « croisée de trois chemins », du latin trivium, est assez contestable. L' explication la meilleure de ce nom se trouverait dans ma note 4 de la p. 74, un peu modifiée. Un mot gaulois trébio « passage étroit, trace de passage », devenu triège, se serait appliqué à la « piste préhistorique », dont j' ai longuement parle; et, peut-être, par métaphore, à la « gorge étroite » puis au « torrent de la gorge », voisine du trébio.

La Saufaz ( p. 112 ). Nom d' une forêt du versant occidental de l' Arpille. Le latin silva « forêt » a eu une très nombreuse descendance en toponymie. La Saufaz en fait partie, avec ces noms si divers d' apparence aujourd'hui: Serva, Servette, Cervaz, Selve, Sève, Seube, Seuve, Sœuvres, Celle, Seule, Xhaules, Sauve, etc. Dans nos montagnes, silva est beaucoup moins fréquent que le celtique juria « forêt qui croît dans des lieux élevés », doli Jeur, Joux, Jura, Jorat, etc.

Luex de Balayé ( p. 77, 78 ). Par excès de scrupule, ne croyant pouvoir assimiler bal âgé et bal ayè, je dois avoir cherché midi à quatorze heures. La distinction entre ayé et ayé n' est pas nécessaire, ce qui nous ramène à la première traduction envisagée: « bel érable ».

Six Jeur ( p. 79 ). Les objections qu' on peut faire à la traduction de Jaccard, « rocher de la forêt », sont moins fortes que je ne le croyais.

!) Voir Les Alpes, tome VII ( 1931 ), p. 67 à 79 et 107 à 120. J' indiquerai entre parenthèses les pages où se trouvent les notices relatives aux noms de lieux étudiés à nouveau dans le présent article.

: ...~^L.siv.: .'.V','T w -r Mont IUiaii ( p. 108 ). Si les Valaisans l' appellent Mont Rouyan, les bergers de Sixt ( Haute-Savoie ), qui le connaissent mieux et l' ont, je pense, baptisé, lui donnent le nom de Mont Rouan, ce qui autoriserait mon hypothèse: mons ravidanus « mont gris, mont noir et blanc ». Toutefois, par acquit de conscience, je signale, sans la discuter, la signification qu' on donne de ce nom de sommet: « Montagne rouge », dans le Guide de la chaîne frontière entre la Suisse et la Haute-Savoie, Tome II, p. 107.

La Veudale ( p. 109 ). Le latin vallicella « vallon, petite vallée » ( en italien: vallicella et en vieux-français: vaucele ) est certainement l' origine de Wallisellen ( Zurich ); de Vaucelle, Vauchelle ( France ); de Vugelles ( Yverdon ), dont on connaît les formes historiques anciennes: Vouzala en 1228, Vougella en 1403; de Vogealle ( Savoie ), prononcé Vodzale. Je crois bien qu' il en est de même pour Za Veudale d' Emosson, et pour ceMes de Champéry et de Mar-tigny-Combe, comme aussi pour les nombreuses Vaudallaz et Vudalle vaudoises et fribourgeoises, et même pour les Veuvalles de la Vare. Le vallicella primitif, passant au cours des âges par les prononciations vouzale, veuzale et veuthale ( avec Ih anglais ) a abouti à ces doublets Veudale et Veuvalles. Le th anglais, plus anciennement simple z, a évolué dans nos patois vers deux sons voisins d et v.

Exemples:

onzedevenu onde et onue douze»dode et doue Ouzon ( 1332 ) »Audon ( Ormonts ) Vizy ( 1471»Vidy ( Lausanne ) Eusanna»dans la prononciation locale Euvanne Anzeinda»dans la prononciation locale Anvinde vauzaire»vaudaire et vauraire Je crois donc, sauf meilleur avis, que Veudale signifie « petite vallée », ce qui confirme l' hypothèse que formulait, guidé par un sûr instinct, mon ami et excellent informateur des Marécottes, M. Denis Coquoz, bien que ce mot n' existât plus dans le patois de Salvan. Les vaudai « sorciers », qu' invoquait Jaccard, doivent battre en retraite devant cette interprétation, que confirme partout, d' ailleurs, la configuration des lieux 2 ). L' Atlas topographique de la Suisse a commis une erreur en donnant ce nom à un « sommet »: le point 2493, qui domine la « petite vallée » où les vaches d' Emosson viennent prendre de bons « dîners », devrait être baptisé, si l'on veut: Pointe de la Veudale.

M. Ph. Farquex de Martigny a eu l' amabilité de m' envoyer des renseignements précis, que son flair de bon archiviste lui a fait découvrir et qui m' ont réjoui, car ils sont venus confirmer mes hypothèses sur quelques noms intéressants. Je l' en remercie très vivement.

Gueuroz ( p. 112 ) est orthographié en 1363 Gouroz. La traduction en est donc bien: gorge ou gouffre où l' eau bouillonne. Comparez le mot français gour « amas d' eau », et les noms propres: les Grands Gours ( Cher ), trous au fond desquels jaillit sans cesse une eau limpide; les Gourds ( Gironde ) et les Goures ( Drôme et Sarthe ).

Le Trouléro ( p. 112 ) rappelle bien le nom d' une famille qu' on trouve aux Jeurs dès 1351. L' orthographe Troléroz est plus fréquente que Trouléroz.

Vané à l' AIeman = rocher à Allaman ( p. 113 ), nom d' une ancienne famille originaire du village des Jeurs, et constamment représentée dans ce coin de pays dès le premier tiers du XIVe siècle; elle est parfois nommée Cretton alias Allamand. Je rappelle que l' étymologie de ce nom de famille est la même que celle du mot allemand.

Bois Magnin ( p. 115 ). Ici magnin est employé adjectivement dans le sens de « noir comme un magnin ou chaudronnier ». Le patois possède un verbe magnenâ « noircir ». Bois Magnin veut donc dire « bois noir », nom que justifie sa composition où les sapins sont en grande majorité. Grâce à des renseignements qu' a bien voulu me donner M. Denis Coquoz, je corrige ci-après quelques erreurs peu graves, que je n' aurais point commises si je l' avais consulté sur tous les noms de son pays natal qu' il connaît si bien.

Les Marcots ( p. 71 ) de la carte Siegfried doit être remplacé par le Marcot.

La Pointe de l' Etava ( p. 75 ) s' appelle dans le pays la Dent d' Elava.

( Baia Comba ) ( p. 73 ) est le nom du haut du val d' Emaney, à partir d' un étranglement qui se trouve à 500 m en amont des chalets. Dans cette « Belle Jaccard, p. 18 ) un dérivé du latin alveus « auge » ( masculin dans nos patois ), « bassin fermé », d' où « pâturage de fond de vallée ». Les formes hypothétiques auget, augei, audzei, auzei, authei, auraient abouti à Odii et à Eudéi, qui semble être la plus moderne des prononciations.

5 combe », les vaches trouvent d' abondants « dîners ». J' avais été mal renseigné par un vieux berger qui m' assurait qu' il s' agissait de la combe neigeuse et pierreuse aboutissant au Col de Barberine.

Fontany ( p. 70 ) est bien une « fontaine », mais dans le sens primitif de « source ».

La Tète à Guète ( p. 79 ) signifie la Tête au Guex, et non la Tête aux Guex.

Planajeur ( p. 72 ). Ma traduction: Plan dans la forêt est trop libre. Le sens littéral est: La forêt plane, c'est-à-dire: plate.

Emaney ( en 1324 Amaney ) ( p. 72 ). M. Coquoz me fait remarquer qu' on dit en patois: in Omaney ( d' où l' orthographe deMurith: Nomaney ). Il se demande si ce ne serait pas l' a ou Vau manei « l' Alpe moyenne », la petite « alpe » entre deux grandes: Salanfe et Barberine.

Le Treuen ( p. 74, 75 ). M. D. Coquoz m' a appris récemment deux noms de lieux dits qu' il a notés près du Giétroz de Finhaut:

1° Le Pas du Tyin, mauvais passage dans un précipice dominant la gorge de la Barberine; 2° Sur le Tyin, replat dominant la même rivière, sur la rive française.

Il se demande si Tre Tyin ( Treuen ) ne veut pas dire: « au delà de la gorge », « de l' autre côté de la rivière encaissée », et si ce mot tyin ne serait pas une déformation de Trient ( pr. treyein ), puisque le Triège portait autrefois le nom de Petit Trient. La remarque de M. Coquoz doit retenir l' at.

M. le professeur J. U. Hubschmied ( Kusnacht, Zurich ) a lu avec attention mon Esquisse toponymique de la Vallée du Trient et il a bien voulu m' en quelques remarques, dont les lecteurs des Alpes sauront apprécier, je l' espère, la valeur et l' intérêt.

Tseppes et Tseppelets ( p. 114 et 71 ) doivent remonter à *cippas et sont des noms d' endroits où il y a eu des « souches d' arbres ».

Luex, Lex, Lix, etc. ( p. 72 ), « rocher; pente rocheuse; côte unie, parfois gazonnée, en pente très déclive ». Ces formes remontent à des types *lauce ou *loce. Or, l' ancien à celtique a abouti en britannique et en gaulois, dès le Ve siècle de notre ère, à au ( aw ) ou ô; donc *lauce ou *lôce représentent un ancien gaulois lâk. Comme en celtique primitif le p indo-européen est tombé, *lâk peut représenter un préceltique *pldk; *plâk est le correspondant exact du germanique *flôh ( ancien anglais flôh; ancien haut-allemand fluoh; allemand moderne fluh ), qui a le même sens que le gaulois *lâk.

Le Luisin ( p. 72 ) remonte à un dérivé roman du gaulois *lâk, plus tard *lauk: ( mons ) *laucinus « mont rocheux ». En allemand: Fluehberg.

Le Djoit ( p. 72 ). ( La prononciation locale de ce nom est djoua, et non djoa comme je l' ai écrit par erreur dans mon article: cela renforce encore l' hypothèse de M. Hubschmied, qu' on va lire ci-après. ) Le Djoua pourrait remonter à jocum « jeu ». Dans les Alpes de la Suisse allemande, Spit désigne des endroits où les chamois et les coqs de bruyère prennent leurs ébats: Gemsenspil, Hahnenspil. On peut se demander si des représentants de jocum ont un sens correspondant dans les patois de la Suisse romande.

Finhaut ( p. 76 ). Feniô ( ou Finyou ) est un dérivé de joenum « foin », correspondant, pour la forme et le sens, au français fenils, avec vocalisation de 17 devant s.

Bel Oiseau ( p. 78 ). Le col de Saint-Bernardin, dans les Grisons ( ainsi nommé d' après une chapelle dédiée à saint Bernardin de Sienne, mort en 1444 ), était appelé, au Xe siècle, par le Langobard Liutprand Mons Auium « mont des oiseaux »; au XVe siècle, des textes italiens l' appellent Monte Ulzello, Olcello, Colmo de Occello, et, au XVIe siècle, on voit employer en allemand les noms Vogel, Vogler, Vogelsberg. D' où viennent tous ces curieux « oiseaux »? Evidemment, le col était appelé à l' époque gauloise simplement *Ouxello « la hauteur, le haut passage »; en roman, le gaulois ouxello a abouti au même résultat que le latin aucellum ( oiseau ); on a cru avoir affaire, dans le nom de ce col, au mot aucellum, et on l' a traduit en Mons Avium, Vogel, Vogler, etc.

Je m' imagine que les choses se sont passées d' une manière analogue dans la vallée du Trient: le col qui menait de cette vallée dans celle de l' Arve ( le col des Montets actuel ) aura été appelé, à l' époque gauloise, *Ouxello « la hauteur, le haut passage »; cet Ouxello a abouti au même résultat que le latin aucellum, soit à Oiseau. Ce nom, n' étant plus compris, a été attaché, plus tard, à un sommet voisin du col ( anciennement les sommets ne portaient guère de noms ), et, en même temps, il a été « interprété »: L' Oiseau étant un drôle de nom pour un sommet, on en a fait un Bel Oiseau.

Arvassey ( p. 110 ). Un mot gaulois désignant le pin arole ( et d' autres espèces de conifères ) était *arwa ( d' où l' allemand arve; le dauphinois ervo ou auvo ) ou le diminutif *arulla ( d' où arola ). J' imagine que arva a aussi existé en Valais, et qu' on en a dérivé arvasse « arole rabougri », et * Arvassey « bosquet d' aroles rabougris ».

( Je rappelle que, dans la région, on entend trois prononciations pour ce nom: Neverse, Averse et Arvassey, sans qu' on puisse dire avec certitude laquelle est authentique.A suivre. )

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