Téléphotographie et hyperstéréoscopie
Unterstütze den SAC Jetzt spenden

Téléphotographie et hyperstéréoscopie

Hinweis: Dieser Artikel ist nur in einer Sprache verfügbar. In der Vergangenheit wurden die Jahresbücher nicht übersetzt.

( Stereoscopie à grand relief. )

Par Henri Huguenin.

Le montagnard, amateur photographe en excursion le long du Jura, par une belle journée d' automne, alors que la chaîne des Alpes étincelle dans le ciel bleu, ne résiste pas au désir de fixer sur la pellicule le tableau merveilleux qui se présente à lui. Sa déception est grande, une fois les épreuves tirées, de constater, à l' horizon de l' image, une toute petite ligne dentelée, insuffisant souvenir d' une vision radieuse. Seule la silhouette de 2 ou 3 des massifs les plus connus se détache et c' est tout.

Il ne faut pas oublier que les splendides sommets dominant de 2 à 3000 mètres le plateau suisse, ne sont pas aussi près que leur rayonnement de ce jour limpide le laisserait supposer. En effet, du col de la Vue des Alpes ou de Tête de Ran, il y a 100 kilomètres jusqu' au massif des Bernoises, et le Grand Combin ou les autres Valaisannes pointant derrière la chaîne sont à 140 km. Le rapport de la hauteur à l' éloignement, soit ou jfö, explique la toute petite image obtenue avec un appareil habituel de tourisme.

A cette distance, il faut utiliser un objectif de 50 cm. de foyer, presque un téléobjectif, pour obtenir une image des Alpes d' une hauteur de 1 à 2 cm. Si l' atmosphère est très limpide, il est possible d' obtenir une belle reproduction, à condition d' exposer sa plaque selon les normes voulues par un tel sujet. Pour maintenir la valeur des oppositions et les gradations suffisantes, il faut travailler avec un verre jaune foncé, car les radiations violettes sont prédominantes à cette grande distance. Le panorama pris du col de la Vue des Alpes et illustré ci-après a été tiré avec un verre jaune de coefficient environ 15. La durée d' exposition, une à une seconde et demie ( diaphragme F/80, verre jaune 15, plaque orthochromatique antihalo ultrarapide ), tient compte de la grande luminosité du sujet en décembre vers 14 à 15 heures, et correspondrait à un instantané de j^ de seconde avec ouverture F/8 sans verre jaune.

De la Vue des Alpes située au centre du Jura on se trouve en face des Alpes Bernoises, et ce sont les trois grands sommets Eiger, Moine, Jungfrau ( panorama n° 1 ) qui frappent au premier abord. Leur imposante face domine la dépression du Lac de Thoune; celle-ci rend l' atmosphère différente, et c' est pourquoi ces trois sommets sont souvent visibles lorsque le temps n' est pas tout à fait clair. Le Finsteraarhorn ne montre que son arête terminale tandis que le Schreckhorn se dresse isolé entre les deux glaciers de Grindelwald. Le dernier grand massif bernois est le Wetterhorn, puis la chaîne s' abaisse lentement et vient finir à la vallée du Hasli et au Grimsel dont on sent le vide devant le sommet ensoleillé du Galenstock.

La vue n° 2 s' étend de la vallée de Lauterbrunnen à celle de Kandersteg. Elle comprend deux chaînes parallèles; la première celle des Préalpes bernoises, va du Niesen au Schafarnisch. L' enneigement de l' époque ( décembre ) lui donne un aspect de hautes Alpes. Le Stockhorn seul tranche, coupole de rochers noirs entourée de versants neigeux. Les massifs découpés de Nünenenfluh, Gantrisch, Bürglen et Ochsen se détachent tout particulièrement. On sent derrière ces sommets le vide de la vallée du Simmental. Cependant, cette chaîne de premier plan n' a pas, vue des hauteurs jurassiennes, l' air imposant qu' elle donne au spectateur longeant le pied du Jura. C' est que derrière elle se dresse la grande paroi fermant le haut de la vallée de Lauterbrunnen, comprenant l' Ebnefluh, le Gletscherhorn, le Breithorn. Plus à droite les sommets se détachent de nouveau les uns des autres, et on distingue le massif de la Blümlisalp, celui du Doldenhorn et la trouée du Lötschenpass adossé au Balmhorn.

Avec la vue n° 3 on aborde la région allant du Kandertal au Haut-Sim-mental. Cette partie est moins découpée, après l' Altels et le Rinderhorn on remarque surtout la longue croupe du Wildstrubel; elle borde le large glacier de Plaine Morte. La chaîne qui suit prend une monotonie caractéristique, on dirait que les sommets se sont couches pour laisser dominer les rois des Valaisannes, Weisshorn, Rothorn de Zinal et Obergabelhorn. Les Préalpes fribourgeoises sont, vues d' ici, moins découpées. Un fait curieux est la similitude des deux silhouettes du Kaiseregg et du Wildstrubel.

Autant la vue n° 3 paraît uniforme, autant la suivante prend de vigueur, les sommets se séparent les uns des autres en alternances diverses, allant des croupes enneigées du Hochmatt aux parois calcaires abruptes de la Dent de Savigny et des trois Pucelles. Le groupe des Dents de Brenlaire, de Folliéran et les trois Vanils se détache tout particulièrement. Plus loin, se montrent les rois de la région, Wildhorn et Diablerets, avec leur profil caractéristique. Seules, des Valaisannes apparaissent: la Dent Blanche, les Aiguilles Rouges d' Arolla et le Grand Combin.

Les pointes isolées qui sortent partout entre les chaînes sont difficiles à situer exactement. L' hyperstéréoscopie nous permettra de solutionner cette difficulté.

Comment procéder pour prendre à cette distance des vues stéréoscopiques? Examinons rapidement le principe optique qui donne l' illusion du relief.

Considérons un observateur dont les yeux Y examinent deux objets A et B placés l' un derrière l' autre, mais près de lui ( fig. 1 ). Chaque œil recevra une impression différente et l' écart entre les deux images a et & sera grand.

Si l' observateur s' éloigne des deux objets, l' impression revue par les deux yeux se modifie et l' écart entre les deux images a et b ( fig. 2 ) est devenu très faible. C' est donc l' intervalle séparant les deux images a et b qui donne le sentiment du vide entre deux objets, sentiment qui diminue au fur et à mesure que les deux images se rapprochent l' une de l' autre. Cette distance n' est pas seulement fonction de l' éloignement des objets, elle l' est aussi de l' écartement des deux yeux de l' observateur, variant de 6 à 7 cm. selon les individus.

Pour augmenter le relief, il faudrait pouvoir éloigner les yeux ou tout au moins les rayons visuels. C' est ce qu' avait fait la maison Zeiss, lorsqu' elle Altels Rînderhorn Pointe du Dome Mischabel SteghornWildstrubel Glacier de Plaine Morte WeisshornZînalrothornGabelhorn BieshornRohrbachstein RS.

LohnerGsürSchwarzfluhKaiseregg WiddergalmSchweinsberg 64 - Photo Henri Huguenin, La Chaux-de-Fonds Spitzfluh Combifluh SchöpfenSattelspitzen spitzBerrà Panorama du Col de la Vue des Alpes de l' Altels au Gabelhorn Cervin Dent Blandie Gd Cornier Wildhorn Geltenhorn Aigrouge d' Arolla Sanetschhorn Gd Combin Culant OldenhornDiablerets Hg. 4 HochmattLes Pucelles Dent de Savigny 65 - Photo Henri Huguenin, La Chaux-de-Fonds Brunner & Cie. S.A.Z.urich Dt Branleire et Follieran Dent de Broc Us Vanils Gros Perré Sommet du Gibloux Mont Cray Panorama du Col de la Vue des Alpes du Grand Cornier au Grand Combin Die Alpen - 1936 — Les Alpes TÉLÉPHOTOGRAPHIE ET HYPERSTÉRÉOSCOPIE.

A B

\

OEIL E. OEIL DROIT.

4-

A B OEIL C. OEIL DROIT.

a breveté ses jumelles à prismes il y a environ 40 ans. La marine de guerre utilise aussi des appareils dits télémètres pour le contrôle du tir; l' écartement des deux objectifs placés aux bouts d' un long tube avec prismes est de plusieurs mètres.

Le photographe ne saurait employer un appareil aussi encombrant, aussi il ne lui reste que la solution de faire deux photos successives du même paysage en transportant son appareil latéralement sur une base choisie d' avance et aussi horizontale que possible. C' est le principe utilisé actuellement pour les relevés stéréotopographiques.

L' écartement de la base doit varier selon l' éloignement moyen du sujet à photographier. Les hyperstéréos que j' ai tirés de la chaîne des Alpes ont une base de 50 à 200 m .; ceux tirés en panorama du sommet de Pouillerel, une base de 10 à 25 m. Des résultats obtenus, l' écartement de base se prendra environ le Viooo de l' éloignement du sujet, pour avoir un bon relief. Si l' écarte est exagéré, le relief est plus accusé et le paysage se rapproche davantage, mais sans s' agrandir pour tout autant. On a alors l' impression d' être devant une miniature, reproduction en relief du pays. L' écartement de base doit aussi tenir compte des premiers plans du paysage. Alors que dans la stereoscopie avec un appareil habituel, on cherche à avoir un premier plan très rapproché pour accentuer le sentiment du vide; dans l' hyperstéréoscopie il faut éviter dans la mesure du possible les objets trop peu éloignés. Ainsi, dans les épreuves de la chaîne des Alpes, fig. 6, le premier plan boisé représentant le sommet de Chaumont situé à 7 km. est encore trop près pour une base de 200 m. et le stéréo ne peut donner le relief de cette partie. Il en est de même pour les sapins du premier plan des fig. 8 et 9. Si les premiers plans trop rapprochés jouent un rôle important dans le paysage, il faudra alors diminuer l' écartement de la base.

Pour éviter une grande différence d' éclairage du sujet, le photographe devra se hâter entre la prise des deux épreuves successives. Comme il s' écoule cependant plusieurs minutes entre la prise des deux clichés, on ne peut opérer les jours où le ciel est nuageux, car l' ombre des nuages occupe alors une place différente sur chaque cliché et nuit à l' observation du stéréo. Un léger défaut de ce genre est visible dans la moitié supérieure du cliché 8.

Il reste une question à examiner. Comment procéder pour obtenir deux images du même paysage pouvant se raccorder exactement au montage de l' épreuve stéréoscopique? On pourrait monter sur l' appareil de prise de vue un viseur de précision. En l' absence de celui-ci, l' auteur a procédé de manière différente. Les deux images ont été mises au point au moyen d' un trait d' horizon trace sur le verre dépoli et mises en page à un ou deux millimètres près d' après un point remarquable du paysage. Le repérage précis se fait plus tard au moyen d' un trait horizontal trace sur la gélatine au bord de la plaque après développement. Ce trait se tire entre deux repères reportés au compas à pointe sur les deux clichés en se basant sur deux points extrêmes de I' horizon du paysage. Ceci s' exécute à 1/10 ou 2/10 de millimètre sans grande difficulté. C' est d' après ce trait qu' on place le bord de la plaque ou du papier au tirage du positif de l' épreuve. Le repérage dans le sens de la longueur a moins d' importante et se fait au montage des deux moitiés d' épreuves; celles-ci étant tirées sur deux verres séparés et assemblés à 65 mm. de distance au moyen d' un verre à doubler.

Le format stéréoscopique le plus répandu est le 6 x 13 cm .; il est bon de tirer des clichés de 6 cm. de hauteur. Si on utilise une plaque 13 x 18 cm ., on peut obtenir trois épreuves stéréoscopiques contiguës en tirant sur la plaque deux bandes de 6 x 18 cm. Pour cela, il suffit de placer dans l' appareil devant le châssis une bande de papier noir masquant la moitié supérieure de la plaque et décentrer l' objectif vers le bas; puis, la première impression effectuée, mettre la cache devant la moitié inférieure du châssis, décentrer l' objectif vers le haut et effectuer la deuxième impression. Pour celui qui a quelque pratique en photographie, cette méthode de procéder n' est pas compliquée. L' auteur a tire ainsi en hyperstéréoscopie le panorama complet de Pouillerel comprenant 40 vues stéréoscopiques 6 x 13 cm. et le panorama des Alpes comprenant 12 vues.

Voici quelques détails concernant l' examen stéréoscopique des vues présentées dans ce numéro.

L' épreuve n°5 a été tirée le 28 décembre avec un écartement de base de 200 m. On distingue cinq plans principaux: le premier, boisé, dominé par un triangle enneigé, est le sommet de la Berra, 1724 m ., situé à 50 km. Ensuite un second plan situé à 60 km ., comprenant de gauche à droite la Combifluh ( 2058 m .), la Schopfenspitz ( 2106 m .), le Maischüpfen ( 2086 m .), à 5 km. derrière ce sommet commence l' arête rocheuse, dentelée des Sattelspitzen ( 2128 m .), suivie de la Birrenfluh ( 2076 m .), le grand sommet triangulaire de la Hochmatt ( 2155 m .) et la paroi sombre des rochers de la Dent de Savigny ( 2255 m. ). Le troisième plan n' est représenté que par trois sommets situés à environ 80 km ., le sommet brillant de neige du Wistätthorn ( 2360 m .), le Gifferhorn ( 2543 m .) et le Lauenenhorn ( 2479 m. ). Le quatrième plan est forme par la chaîne principale des Bernoises bordant le Rawyl, soit le Weisshorn ( 3010 m .), le Rohrbachstein ( 2953 m .), et enfin le Schneidehorn ( 2938 m .) et le Wildhorn ( 3264 m .), toutes situés à 90 km. Tout au fond en cinquième plan apparaissent les sommets valaisans, situés entre 128 et 150 km ., soit: à gauche le Bieshorn ( 4161 m .), le Weisshorn de Randa ( 4512 m .), le Schallihorn ( 3978 m .), tout en arrière la pointe du Lyskamm ( 4538 m .); puis le Rothorn de Zinal ( 4223 m .) dont on distingue très bien l' arête de Moming; ensuite, la pointe de la Wellenkuppe ( 3910 m .), l' Obergabelhorn ( 4072 m .), la pointe du grand Cornier ( 3969 m .) et la Dent Blanche ( 4364 m .), sur l' arête gauche de laquelle on aperçoit l' arête terminale du Cervin.

L' épreuve 6 prise avec un écartement d' environ 100 m. a un relief moins accusé. Par dessus Chaumont, les collines qui sortent de la brume sont celles du Langenberg, situées entre 50 à 60 km. Derrière, à gauche, l' arête du Rothorn de Sigriswil à 80 km .; au centre de l' image l' arête conduisant jusqu' à la Petite Scheidegg, soit le Männlichen, Lauberhorn, puis la Sulegg dominant la vallée de Lauterbrunnen à 90 km. Et à droite le Morgenberghorn. Au fond le Schreckhorn, le Finsteraarhorn, l' Eiger, le Moine et la Jungfrau à 100 km. Entre l' Eiger et le Moine on voit poindre le sommet des Fiescherhörner.

Les épreuves 7 à 10 font partie de la série du panorama de Pouillerel. Elles sont tirées avec un foyer plus court, 36 ou 42 cm ., et l' écartement de la base est seulement 15 à 25 m. Au premier plan de la vue 7 se détache la côte boisée de la rive française du Doubs, située à 5 km ., puis s' étale sur 2 km. le plateau dominé par l' église de Fournet-Blancheroche. Ensuite vient le cirque rocheux de la Cendrée situé à 9 km. Du haut du cirque, deux nouveaux kilomètres nous conduisent sur la colline partiellement boisée de Greuresse. Enfin s' étale tout le plateau français compris dans la boucle du Doubs; il vient finir à l' horizon par la colline de Roche d' Or et la Faux d' Enson ( 930 m .), située à 30 km.

L' épreuve n° 8 présente un premier plan trop rapproché ne permettant pas le relief. Ce n' est qu' à partir d' un kilomètre, soit la ferme à droite, que le relief commence à se marquer. Il est bien accusé pour toutes les fermes situées sur le plateau des Bulles, distant d' environ 4 km. A partir des bandes de Rochers de la Vanne, situés à 9 km ., il commence à diminuer, mais est cependant encore perceptible aux Rochers de Sommaîtres ( 18 km .), bien connus des varappeurs. Les dernières collines visibles à l' horizon sont à 30 km.

Le paysage représenté sur l' épreuve n° 9 donne un aspect caractéristique des plateaux jurassiens dits des « Franches-Montagnes ». Ils s' étalent uniformément sur 25 km. environ à partir des Bulles dans le Jura neuchâtelois à la Chaux sur Tramelan, Jura bernois.

Enfin, la dernière épreuve, n° 10, est caractérisée par trois plans nettement séparés. Un premier d' une dizaine de kilomètres se termine par la grande coupure du Val de St-Imier, derrière lequel sort la partie est de Chasserai avec les rochers de la Combe Grède ( 19 km. ). Le dernier plan est forme par les troupes de Montoz au Hasenmatt, sises entre 30 et 40 km.

Ceux qui auront examiné ces quelques vues au moyen de loupes stéréoscopiques se seront rendus compte des particularités de l' hyperstéréoscopie.

NB. Pour l' observation des vues reproduites dans le présent numéro, les lecteurs possédant un appareil à examiner les vues stéréoscopiques peuvent facilement démonter les lentilles de leur appareil en enlevant la vis qui se trouve entre les deux objectifs.

Feedback